Cinquième tribune/« Tshilombo, les 5 visages d'une diplomatie dispendieuse »/ #DiplomatieCitoyenne #CongoQuiParle #VoixDuPeuple #DiplomatieDeTerrain #RefondationFatshi AfriqueAttend #Congo parlepeu#maisdépense #beaucoup#PrioritésRenversées 🧠 5 volets, 5 angles d’analyse, 1 appel à la conscience citoyenne. 👉 À lire, à partager, à discuter. # RDC #Tribune # Diplomatie # Tshisekedi # Tshilombo # les 5 visages d'une diplomatie dispendieuse # LwakaleMubengayBafwa

Le peuple congolais a une voix. Il est temps que la diplomatie l’écoute et l’utilise également. Et si la diplomatie congolaise commençait à Matadi, pas forcément depuis Manhattan ? Le Congo a besoin d’une diplomatie enracinée et chevillée, portée par ses propres citoyens, ses artistes, ses penseurs. Une diplomatie qui écoute avant de parler. Sortir des doutes ! Une autre diplomatie est possible ! Vers une diplomatie portée par le peuple et nourrie des témoignages des victimes…
La diplomatie de la République démocratique du Congo (RDC) est panne et traverse une période de remise en question profonde. Accusée de manquer de résultats tangibles face aux défis majeurs du pays, elle suscite critiques et interrogations sur son efficacité, sa capacité à défendre les intérêts nationaux, et sa connexion avec les attentes des citoyens. Dans un contexte marqué par les crises humanitaires et de récurrents conflits meurtriers, l’exigence d’une refondation s’impose comme un débat incontournable et salutaire.
La diplomatie congolaise se trouve donc à un carrefour crucial. Sans avancées concrètes face aux crises sécuritaires et humanitaires persistantes, notamment dans l'Est, la question de sa réinvention n'est plus une option, mais une impérieuse urgence. Les missions diplomatiques classiques, perçues comme trop dépendantes des princes et des délégations officielles considérablement onéreuses à l'étranger, semblent avoir atteint leurs limites. L’heure a sonné d'opérer une mutation de paradigme : faire descendre la diplomatie congolaise des salons de Manhattan aux réalités de Matadi.
RD Congo : la diplomatie s'active - YouTube
État des lieux : un manque criant de consistance et de résultats escomptés
En effet, c’est depuis des années que des observateurs avisés pointent du doigt l’absence de véritable visibilité et d’impacts significatifs de la diplomatie congolaise sur la scène internationale. Malgré des délégations imposantes et coûteuses, en dépit des efforts récurrents pour attirer l’attention sur les souffrances du peuple congolais et le pillage de son territoire, les avancées concrètes demeurent rares. Les négociations internationales peinent à améliorer la sécurité dans l’est du pays, à obtenir justice pour les victimes des agressions du Congo ou à mobiliser durablement l’aide internationale. C’est cette situation qui alimente la perception d’une diplomatie forcément déconnectée des réalités du terrain, et prisonnière de logiques institutionnelles ou protocolaires.
Les priorités d'une diplomatie proactive, chevillée et ancrée
Pour regagner en consistance, en efficacité et visibilité, la diplomatie congolaise doit se réorienter, au moins, vers trois priorités capitales, en phase avec les besoins réels de son peuple :
- sécurité et paix durables, la priorité absolue reste la stabilisation de l'Est du pays. Cela nécessite une diplomatie proactive, axée sur le renforcement de la coopération régionale et internationale pour mettre fin aux conflits armés et aux groupes rebelles. Il ne s'agit pas seulement de chercher des solutions externes, mais aussi de s'appuyer sur une gouvernance interne plus équitable pour prévenir, remédier et conjurer des querelles intestines ainsi que plus efficace pour gérer les ressources et les défis sécuritaires ;
- développement socio-économique, la politique étrangère doit être un instrument au service du décollage et de l’expansion économique. Les partenariats stratégiques doivent être conclus en fonction de leur utilité et de leur primauté pour les infrastructures et pour les populations ; visant notamment à améliorer la qualité de vie, l'accès à l'éducation, à la santé, au logement salubre et au travail de manière équitable pour tous. La diversification des partenaires, au-delà des puissances traditionnelles, vers la Chine, la Russie ou les pays du Golfe, doit servir un objectif clair d'autonomie économique ;
- refonte institutionnelle et éthique, une diplomatie forte requiert des instruments solides. La formation des futurs diplomates doit intégrer la pensée critique pour leur permettre d'analyser et d'anticiper les enjeux complexes du XXIème siècle, luttant notamment contre la désinformation ...
Vers de nouveaux paradigmes : quelles priorités pour la diplomatie congolaise ?
Face à son manque de consistance, d’efficacité et de visibilité, la diplomatie congolaise se doit d’opérer un virage stratégique. Se réorienter notamment vers des priorités clairement définies telles que placer la défense des droits humains au cœur de chaque action, renforcer la mobilisation contre l’impunité ainsi que faire du dialogue avec la société civile une règle plutôt que de le contenir à l’option discutable d’exception. Plus fondamentalement, la RDC ne peut plus se contenter de son approche classique de la diplomatie ; elle doit se préoccuper et démontrer sa volonté de représenter d’abord et avant tout les intérêts de sa population et de ses victimes.
C’est dans cette perspective que la diplomatie citoyenne s’impose alors comme une alternative crédible et novatrice. Il s’agit ainsi d’une approche qui ouvre la diplomatie aux citoyens, aux rescapés des conflits, aux artistes, aux intellectuels et aux acteurs de la société civile. Cette forme de diplomatie valorise la prise de parole directe par des personnes concernées, eu égard aux enjeux de politique étrangère, et permet de porter à l’international une voix authentique, enracinée dans les réalités vécues au quotidien.
En effet, les témoignages des victimes sont une parole qui touche la sensibilité et la mettre en exergue s’attaque et peut repousse l’indifférence. Donner la parole aux rescapés, réfugiés et victimes des guerres et les afficher n’humanise pas seulement la diplomatie ; ils suscitent également l’introspection et provoquent aussi bien l'empathie cognitive qu’affective du public cible. Ce qui donne un relief supplémentaire et une sensibilité mobilisatrice à l’action diplomatique menée au nom du peuple congolais. Leurs récits bouleversants sont plus éloquents que les rapports institutionnels. Ils interpellent les consciences et invitent à l’action. Il est donc crucial que ces témoignages ne soient pas relégués au second plan ; mais qu’ils deviennent des supports et références de plaidoyers diplomatiques, afin que les réalités vécues par les populations soient entendues et prises en compte dans la prise de décision.
L’approche de la « diplomatie citoyenne »
Face aux carences de la diplomatie institutionnelle traditionnelle, l'émergence d'une diplomatie citoyenne et ancrée offre une piste stratégique essentielle. En effet, celle-ci place le peuple congolais au centre de l'action extérieure. Ce qui se manifeste déjà à travers :
- le féminisme congolais en première ligne, des initiatives de diplomatie citoyenne et féministe sont déjà à l'œuvre ; portées notamment par des organisations de la société civile. Parmi les plus visibles déjà à l’œuvre, il y a celles qui lient l'urgence humanitaire à la stratégie politique en offrant un soutien psychosocial, une éducation et une formation à l'entrepreneuriat pour les survivantes de violences sexuelles. Elles font le lien entre Kinshasa, New York, Genève et Bruxelles, en réclamant une réponse coordonnée et durable au cumul de crises et s’affermissent dans la justice sociale ;
- l'enracinement dans les besoins du peuple, l'idée est de substituer l'approche des voyages officiels, avec des délégations inutilement pléthorique et abusivement coûteuses par une diplomatie de l'écoute, où les ambassadeurs des besoins locaux (artistes, penseurs, leaders communautaires) parlent au monde après avoir écouté le peuple. Une diplomatie qui commence à Matadi pour rayonner à Manhattan ou à Genève, par exemple. Ce qui suppose de donner la parole au peuple pour une implication des citoyens dans les missions diplomatiques…
Réinventer la diplomatie congolaise passe aussi par l’intégration des citoyens dans la définition et la conduite des missions diplomatiques. Cela signifie écouter les témoignages des victimes, valoriser les initiatives locales, et impliquer des représentants issus de la société civile dans les délégations officielles. Les Congolais doivent pouvoir s’exprimer sur les enjeux qui les touchent, que ce soit à travers des forums, des consultations publiques ou des campagnes de plaidoyer international. Cette implication est la clé pour restaurer la légitimité et l’efficacité des actions diplomatiques. Plus concrètement, elle peut se développer en s’appuyant sur :
- la création de plateformes de dialogue entre diplomates, citoyens, artistes, et penseurs afin de nourrir la politique étrangère de réalités de base et de points de vue diversifiés ;
- l’intégration systématique des témoignages des victimes dans les dossiers diplomatiques et plaidoyers internationaux ;
- le soutien à des campagnes internationales menées par des figures issues de la société civile, capables, à l’instar du Docteur Dennis Mukwege, de toucher les opinions publiques étrangères et de mobiliser des soutiens concrets ;
- La promotion d’une diplomatie culturelle, où les artistes, à l’image de Miriam Makeba jadis, deviennent ambassadeurs d’une identité congolaise ouverte, créative et résiliente…
Une illustration : Dr Dennis Mukwege et le pouvoir des témoignages émouvants
L'expérience du Dr Denis Mukwege, lauréat du Prix Nobel de la Paix en 2018, prouve la puissance diplomatique de la voix d’une société civile militante et de la voix des victimes. Son combat a permis de :
- sortir les atrocités endurées de l'oubli, le Prix Nobel a offert une tribune mondiale exceptionnelle pour dénoncer l'utilisation du viol comme arme de guerre et pour lutter contre l'indifférence de la communauté internationale ;
- un plaider audible pour la justice, le Dr Mukwege a notamment fait pression pour que les responsables des violences sexuelles au Congo soient traduits en justice, y compris ceux évoluant au sein du gouvernement congolais et dans des milices…
Prolonger cette dynamique par la mise en exergue massive et constante des rescapés des massacres et des déplacés internes aurait un impact diplomatique considérable. Les témoignages plantureusement et inlassablement réitérés de l’errance de ceux qui fuient les boucheries humaines, du déracinement continu des réfugiés pullulant aux frontières du Congo, donneraient un visage humain saisissant et la réalité de l’urgence palpable aux statistiques et à de creux communiqués diplomatiques. Cette diplomatie du témoignage mobiliserait l'opinion publique internationale, ferait pression sur les décideurs politiques pour le démantèlement des systèmes qui favorisent la violence, et transformerait les victimes en actrices de la résilience et du plaidoyer pour la paix et la justice.
Avec son parcours de sauveur jusqu’à sa somptueuse conquête du Prix Nobel de la Paix et à sa militance postérieure jusqu’à ce jour, Dr Dennis Mukwege, symbolise et illustre la force d’une diplomatie portée par le vécu des citoyens. Par ses prises de parole courageuses et ses actions en faveur des victimes de violences sexuelles, il a su attirer l’attention du monde sur les drames congolais. Son engagement prouve qu’une voix issue du peuple, nourrie par l’expérience du terrain, peut bousculer les agendas diplomatiques et obtenir une reconnaissance internationale bien plus efficace que certains discours officiels. Mukwege incarne ainsi une diplomatie visible, chevillée, honnête, et résolument tournée vers la justice.
Pour une diplomatie portée par le peuple et tournée vers l’avenir
La réinvention de la diplomatie congolaise passe donc par une démocratisation, solidification, consolidation et raffermissement de sa parole. En s'ancrant dans les besoins du peuple et en amplifiant les voix citoyennes, notamment celles des survivants et des activistes féministes, la RDC peut passer d'une diplomatie de la dépendance à une diplomatie de la force morale pour enfin transformer son potentiel en paix et en développement durable.
La réinvention de la diplomatie congolaise est à la fois une nécessité et une opportunité. C’est dans une approche ouverte, citoyenne, chevillée et enracinée dans les réalités d’un peuple mobilisé pour affronter et relever les défis actuels et futurs du pays qu’elle réside. Il appartient désormais à une élite responsable de faire le choix du courage et de l’innovation, en ouvrant la diplomatie à toutes les voix qui font la richesse et la dignité de la RDC. Car, comme le prouve l’exemple de Mukwege, il n’y a pas de meilleure ambassadeur qu’un peuple qui parle en son nom, avec force, authenticité et espérance.
Eclairage,
Chronique de Lwakale Mubengay Bafwa
Vers une diplomatie citoyenne : repenser les priorités de la diplomatie congolaise !