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Billet de blog 1 juin 2023

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À la mémoire de toutes les victimes du péril woke

La petite sirène, devenue Noire. Cette enfant, qui s’est fait lire une histoire par une dame que en fait c’est un monsieur. Johnny Depp, qui n’a eu droit qu’à 7 pauvres minutes d’ovation en ouverture de Cannes avec Maïwenn. Morandini, Depardieu, Beigbeder, tant d’autres tombés au front. Combien de victimes encore pour que l’impunité cesse ?

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Alors, voilà, je sais bien, on est sur Mediapart, officine de la bien-pensance terroristo-intellectuelle où il est toujours de bon ton de mettre des points médians partout sur les i et de brosser dans le sens du crin les indigénistes de tout poil, ou l’inverse, et l’intégralité des ennemis embusqués de l’universalisme-républicain-des-lumières-et-que-s’apelorio-que-l’Occident-c’est-quand-même-mieux-que-le-reste et de la laïcité (mais pas celle de 1905, on a paumé le texte).

Et on a donc pu y lire ces dernières semaines, dans sa partie prétendument participative mais où toute parole vraie sur la menace réelle qui pèse sur nous est interdite, des écrits comme celui de Marie-Cécile Naves qui affirme ni plus ni moins que « le monstre du wokeness n’existe pas », ajoutant -par pure provocation parce que rien à voir, d’abord- que « la chambre d’écho du fascisme, elle, par goût du sensationnel, par attachement au modèle économique du buzz, par mépris et haine d’autrui, et par complicité, existe bel et bien », ou celui d’un certain Alain policar, qui ose chouiner quant à lui sur le fait que « ce que l'accusation d'islamogauchisme a échoué à réaliser … celle de wokisme ... est en mesure de réussir à le faire : installer un climat de guerre civile, lequel, à terme, pourra justifier des mesures de restriction des libertés ». Pff.

Tout ceci est grotesque. Cette propension maladive à aller dans le sens des gens jamais contents sous prétexte qu’ils sont Noir ou lesbienne ou les deux ou que sais-je encore, alors même qu’on vit indubitablement, et même deux ou trois dubitablement, une époque formidable… Enfin, qui le serait vraiment sans toutes ces personnes décrites avec génie par la brillante et résolument progressiste Nathalie Heinich, boycottée évidemment par TOUS les médias sauf 90 % d’entre eux, et qui voit dans ce foutu wokisme -n’allez pas me demander une définition, renseignez-vous bon sang- « une certaine forme de totalitarisme ». Je vous voir venir : en bonne chercheuse, elle est très mesurée, et précise bien sûr « ce mot ici ne renvoie pas bien sûr à un régime totalitaire », voyons, mais plutôt à ce qu’elle appelle, très subtilement, c’est limite impressionniste, un «totalitarisme d’atmosphère», soit « une mentalité totalitaire, plus ou moins prégnante ».

Et d’ailleurs, et n’allez pas me dire que c’est un « Point Goulag », « les défenseurs du wokisme qui assimilent sa contestation à la pensée réactionnaire et accusent ses contempteurs de «faire le jeu de l’extrême droite», comme naguère les dénonciateurs du Goulag étaient taxés d’«agents de la CIA», démontrent involontairement ce qu’ils s’évertuent à nier : à savoir que, faute de prendre la peine de réfléchir, ils se coulent parfaitement dans la mentalité totalitaire. » Bim.

Tout ceci est vrai. Je voulais donc rendre ici hommage à tous -et hors de question évidemment que je marque « pointEupointEsse » comme ils disent, ces barbares- ceux qui sont tombés sous les obus certes tirés avec le cul des licornes, mais ô combien meurtriers, de ces pelotons végano-radicalisés du wokistan, seins sans soutifs, aisselles velues et drapeau arc-en-ciel brutalement étalés sous nos yeux « estomaqués », comme dirait notre chère ministre de la culture, devant ce qui rappelle les pires heures de… les pires heures.

Je pense à Johnny Depp, ce pauvre « cancelé » par l’ignominie féministe, ce héros moderne du cinéma bien couillu comme on l’aime -pas comme celui de cette reloue de Jutine Triet là-, et qui, sous prétexte que lors de son procès pour violences contre Amber Heard, 12 des 14 faits cités ont été jugés « substantiellement vrais » par la cour, n’a eu droit, en ouverture du festival de Cannes pour le film Jeanne Du Barry, qu’à une minable petite ovation debout de 7 minuscules minutes, tandis qu’une critique aux ordres s’obstinait trouver chiant et nul ce film que Maïwenn a tourné à propos d’elle-même et du fait qu’elle est tout de même une personne formidable -mais il faut croire qu’on ne peut plus rien faire dans ce pays, ni étaler son narcissisme bourgeois dans les salles, et même pas soutenir un Besson accusé de multiples viols ou agresser un journaliste moustachu que je ne nommerai pas dans un restaurant.

Je pense à ce pauvre Morandini, certes condamné en appel à une broutille par le tribunal correctionnel de Paris -quelque chose comme un an de prison assorti d'une période de sursis probatoire de deux ans pour «corruption de mineurs» sur trois adolescents- et qu’on ne voit pour ainsi dire presque plus à la télé, sauf heureusement bien sûr dans son émission quotidienne sur TV-Bolloré, ou il a pu parler tranquillement des suspicions de corruption de mineurs pesant sur Palmade lol ou plus récemment inviter à causer popo-litique la porte-parole de Nénésis, un mouvement ouvertement xénophobe et proche de ces groupuscules identitaires tout de même moins dangereux que les casserolades de la NUPES.

Je pense à Michel Sardou, qui certes se porte comme un charme mais je me suis tout de même laissé dire que c’était pas tous les jours facile pour lui. Quelle époque.

Je pense, de manière générale, à tous ces mâles blancs -notamment les riches- qui ne peuvent plus bouger le petit doigts ou la braguette sans qu’on leur colle l’étiquette de « porc » alors même qu’ils apportent tant à la vitalité culturelle de ce pays #JeSuisDepardieu.

Je pense à toutes ces blagues racistes, misogynes, homophobes, faites bien dans le dos des concernés comme il se doit, sans qu’ils puissent répondre parce que ça gâche la vanne, merde, et qui ne pourront plus jamais être faites. RIP. Et une pensée particulière pour le génie humoristique incompris de Beigbeder

Je pense à ce chef-d’œuvre que n’aurait pas manqué d’être Rabbi Jacqueline, la suite de Rabbi Jacob prévue par Danièle Thompson, la fille de Gérard Oury. Mais ; las ! Cela ne verra pas le jour, à cause, a-t-elle dit face au très beau Laurent Delahousse, de la « censure qui existe aujourd'hui » sans vraiment plus de détails mais on comprend TRÈS BIEN de qui elle parle. Et le film a donc été annulé pour ces raisons et pour ces raisons uniquement, et non parce qu’elle aurait peut-être eu la flemme de devoir s’imposer l’effort de faire un film aussi bien écrit que Rabbi Jacob au lieu d’un machin plus proche de la série -hilarante- des Mais Qu’est-ce qu’on a fait au couscous ? ou bien est-ce au bon Dieu je ne me souviens plus, avec cette autre victime du wokisme qu’est le malheureux Christian Clavier.

Je pense à toutes ces statues couvertes de peinture, de faux sang, voire d’inscriptions grossières au prétexte douteux qu’elle représentent des génocidaire et/ou des tortionnaires et/ou des esclavagistes et/ou tout ce qui fait finalement le sel de notre histoire, si on y réfléchit bien. Vous voulez quoi ? Des statues de gens qu’on ne connaît pas et qui n’ont jamais fait de mal à personne ? Saddam Hussein reviens, ils sont devenus fous (ah, on me signale que non, Saddam c’est comme Lénine, la destruction de ses statues était à l’époque vivement tolérée voire encouragée, autant pour moi).

Je pense à tous ces enfants qui se voient raconter de gentils contes tout mignons par des personnes habillées de telle façon que eux s’en foutent car à leur âge on est ouvert à tout, mais qui risqueraient de dangereusement remettre en cause les certitudes de leurs parents en racontant leur journée, une fois rentrés à la maison. Je pense à tous ces pauvres adolescents homos qui n’auront pas la joie d’attendre leur 35 ans pour se rendre compte de la réalité de leur orientation sexuelle. A toutes ces personnes trans qui n’apprendront pas le goût de l’effort en devant supporter jusqu’à la fin de leurs jours un corps qui n’est pas le leur.

Voilà. Natoche Heinich, à nouveau, a bien raison. Marre de ces wokes « indifférent au bien commun »,« obsédés par les affiliations à des collectifs victimaires », qui préfèrent « l’idéologie à la science », voient « dans la défense de la laïcité une attaque contre les minorités religieuses », pratiquent « sans complexe cette forme de censure sauvage qu’est la cancel culture » et qui, « de l’écriture inclusive à la militantisation du savoir, de la réécriture des textes au déboulonnage des statues, des assignations identitaires aux interdits sémantiques et à l’occultation des rapports de classe derrière l’obsession raciale et sexuée », nous font vivre un véritable enfer quotidien que à côté Kaboul c’est le pays enchanté.

Bon. Allez, j’arrête les conneries.

J’ai une question pour Heinich, pour Zemmour, pour tous les autres, qu’ils se disent de droite, de gauche ou de mon cul : elles sont où vos p**ain de victimes du totalitarisme woke ? Ils sont où, les morts que vous pleurez ? Ils sont où, vos silenciés ?

Ils sont où, les charniers que vous déplorez à longueur d’édito dans vos interminables ouin-ouinades médiatisées, poussant des grands cris sur le sort des malheureux tombés sous les balles couleur arc-en-ciel du grand complot de la bien-pensance ?

Ok, la nouvelle petite sirène est Noire. Oui, Beigbeder ne peut pas l’ouvrir sans qu’on se foute de sa gueule. Certes, il y a de plus en plus de personnages racisés et LBGT+ dans les films et séries, et pas forcément très bien écrits car Disney et les plates-formes de streaming évidemment s’en foutent de ça et ne le font que par opportunisme. So what ?

C’est vrai, il y a plus grave : sur les réseaux, et dans le monde réel de la réalité véritable, des personnes se font harceler, menacer de mort. Et c’est injustifiable. Personne, pour quelques raisons que ce soit, ni JK Rowling ni que sais-je, ne mérite d’être menacé comme ça, parce que c’est con, et parce que c’est lâche. Mais réfléchissons deux secondes s’il vous plaît : le problème là-dedans, il est dans le « wokisme », dans le fait de ne plus accepter, normaliser comme auparavant les comportements et propos racistes, sexistes, homophobes, transphobes, etc., ou il est dans le mode de fonctionnement inhérent à ces p**ain de réseaux sociaux qui rendent dingues toutes les personnes qui y foutent un doigt pour scroller ? Et, plus largement, car il ne s’agit pas de donner tous les torts à ces réseaux, dans une société basée sur le jugement de l’autre et l’agressivité à son encontre, soit toutes les valeurs de la prédation capitaliste ?

Comme écrit récemment dans une tribune du syndicat de la Presse Pas Pareille sur les menaces que fait peser l’extrême-droite nationaliste sur les médias indé, « ces mouvements, répertoriés par le collectif antifasciste la Horde, sont plus d’une centaine. Certains d’entre eux ont récemment défilé, en toute impunité, à Paris et à Annecy. Comme l’a rapporté Mediapart en avril dernier, « depuis la candidature Zemmour, la violence d’extrême droite se déchaîne sur les université » : « Tags racistes et xénophobes, menaces de mort, guets-apens et agressions d’étudiants… Des groupuscules … sévissent de plus en plus souvent aux abords des facs, voire à l’intérieur ».  Dans les rues, à Lyon, à Brest, partout, les agressions se multiplient. Yannick Morez, maire de Saint-Brevin-les-Pins, a dû démissionner suite à des attaques liées à sa politique en faveur des personnes migrantes. De nombreux spectacles, conférences, rencontres, sont prises pour cible ». C’est quand même autre chose que le vieux Sardou qui peut plus fumer dans son avion en classe affaire, si je peux me permettre ?

En Allemagne, il y a peu, nous dit à nouveau un article de Mediapart, un « énorme coup de filet » chez une mouvance allemande d’extrême droite joliment nommée les « citoyens du Reich », qui projetait notamment l’enlèvement du ministre Karl Lauterbach ainsi tant qu’à faire qu’un « putsch comprenant l’attaque à l’explosif de points névralgiques du réseau électrique afin de provoquer une série de blackouts pendant une ou deux semaines », ce coup de filet donc, « a débouché sur la saisie de 93 armes (pistolets, fusils, couteaux, machettes, arbalètes), de téléphones satellites ainsi que de 50 kilos d’or et de métaux précieux et de 420 000 euros en argent liquide. Des procédures ont été lancées contre cinquante-cinq personnes ».

Et pendant que cette extrême-droite se fait plaisir, concoctant ses petits projets de prise de pouvoir par les urnes ou par le coup d’État, déchaînant sa haine homophobe, anti-trans, anti-migrants, Schiappa-ça-veut-dire-nul-en-italien-je-le-répéterai-jamais-assez fait joujou avec la moula du fond Marianne, et Macron et Darmanin font de la luge sur la pente de l’ultra-capitalisme méga-autoritaire à tendance turbo-réactionnaire (ils aiment les superlatifs pour parler de la « méga-gauche terroriste », pourquoi nous on se gênerait), se torchant allègrement leurs augustes renflement bruns avec toute velléité démocratique de l’opposition et du peuple lui-même.

Donc, voilà, j’arrête là, parce que j’en ai marre. Quand j’étais tout gosse, il y avait à la télé les sketch de Dorothée et les émissions AB production. Grâce à la patience et au courage du youtubeur Joueur du Grenier (qu’on ne peut pas suspecter d’être excessivement « woke », je le précise pour celles et ceux qui ne le connaîtraient pas, sans aucun doute extrêmement nombreux sur Mediapart), j’ai pu redécouvrir à quoi ça rassemblait. Bilan : le cringe est total, pas une minute qui ne soit constituée d’humour empli de sexisme, d’homophobie et de racisme -incluant bien sûr l’antisémitisme- ordinaire. Est-ce que je regrette que ça, « ça ne soit plus possible, aujourd’hui » ? Non, pas du tout.

Et Nathalie Heinich et ses nouveaux petits camarades fachos devraient en faire de même, plutôt que de dire « l’antifascisme, c’est ça le vrai fascisme ».

Je me rassure en me disant que les mentalités évoluent, avec ou sans eux.

Salutations libertaires,

Mačko Dràgàn

Journaliste punk-à-chat à Mouais, abonnez-vous j’ai besoin de manger pour nourrir mon wokisme : https://www.helloasso.com/associations/association-pour-la-reconnaissance-des-medias-alternatifs-arma/boutiques/abonnement-a-mouais

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