En ce début du mois d'octobre 2018, E.M., l'Homme Fort, fut confronté à la rébellion ouverte du ministre de l'Intérieur, surnommé le premier flic du Macronistan. Une telle chose ne s'était jamais produite de mémoire de Macronistanais.
G.C., puisque c'est de lui qu'il s'agit, avait été nommé ministre d’État, ministre de l'Intérieur par l'Homme Fort dès qu'il prit le pouvoir. Il avait été le premier baron de l'Ancien Régime à le soutenir dans sa conquête du pouvoir et il en fut récompensé par sa nomination à ce poste prestigieux, deuxième dans l'ordre protocolaire. C'était le couronnement de la carrière politique de cet homme, jusqu'alors premier édile de la deuxième ville du Macronistan.
G.C. devint rapidement l'un des dignitaires les plus écoutés de l'Homme Fort. C'est à lui qu'étaient confiées les basses besognes du régime. Faire harceler par la police les militants venant en aide aux réfugiés. Faire pourchasser les réfugiés, leur retirer les tentes qui leur servaient d'abri et les priver d'eau et de nourriture. Faire tabasser les manifestants qui osaient critiquer la politique de l'Homme Fort. C'est aussi G.C.qui fit adopter par la Chambre d'Enregistrement (dénommée Assemblée Nationale avant E.M.) une loi restreignant un peu plus les libertés individuelles. Le ministre de l'Intérieur s'acquittait avec dévouement de toutes ces tâches ingrates.
C'est une manifestation qui déclencha un enchaînement d'actes et de déclarations qui allaient précipiter la rupture entre le Génie de la Somme et son ministre. Comme nous l'avons relaté dans le premier épisode de cette chronique, un barbouze chargé de la sécurité de l’Homme Fort se fit remarquer en train de tabasser des manifestants, en se faisant passer pour un policier. Auditionné par une commission d'enquête parlementaire, le ministre de l'Intérieur prétendit ne pas connaître le barbouze et rejeta la responsabilité sur l'entourage de l'Homme Fort.
Celui-ci en conçut un immense courroux, à la mesure de l'affection qu'il avait pour cet homme qui avait été le premier à croire en son illustre destin. Lors d'un dîner au Palais, le Génie de la Somme et son épouse, la très influente dame Brigitte, reprochèrent vivement à G.C. de ne pas les avoir protégés dans cette affaire qui éclaboussait le régime.
Alors qu'il était d'usage qu'un ministre fît profil bas devant l'Homme Fort, G.C. au contraire se répandit ensuite en confidences dans les gazettes. Il déclara qu'il entendait reprendre en 2020 ses fonctions de premier édile dans sa bonne ville et il égratigna au passage le dirigeant suprême du Macronistan. Selon G.C., il manquait d'humilité et il n'écoutait plus guère ses conseillers, de moins en moins nombreux à pouvoir et surtout à oser lui parler.
L'arrogance de l'Homme Fort et son profond mépris pour le peuple étaient connus de tous mais qu'un dignitaire aussi haut placé osât le confirmer, voilà qui retentit comme un coup de tonnerre en Macronistan. Et pourtant, en dépit de ce crime de lèse-majesté et à la surprise générale, l'Homme Fort n'écouta pas son Premier ministre qui lui demandait la tête de G.C et il voulut lui conserver sa confiance.
C'est alors que G.C. commit l'irréparable. Il présenta sa démission à l'Homme Fort, qui la refusa, puis il déclara le lendemain dans une gazette qu'il maintenait sa démission. Cette humiliation publique du Génie de la Somme plongea ses affidés dans la stupeur et l'effroi tandis que l'opposition, si mal en point depuis sa prise du pouvoir, s'en réjouit bruyamment.
Ainsi allaient les affaires publiques en Macronistan en ce début du mois d'octobre 2018, An 2 après E.M.
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(*) La Somme est un département du Nord du Macronistan qui est la terre d’origine de l’Homme Fort. Éblouis par le génie de leur Maître, ses affidés le surnomment affectueusement le « Génie de la Somme ».