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Billet de blog 7 mars 2024

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8 mars : M. Macron célèbre les femmes que sa politique maltraite le reste de l’année

Le président de la République organise en cette journée internationale des droits des femmes une « cérémonie de scellement » à des fins de récupération politique de l’inscription dans la Constitution de « la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ».

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Cette modification de la Constitution n’a jamais fait partie du programme du candidat Macron, ni en 2017 ni en 2022. Mme Braun-Pivet, à l'époque porte-flingue de M. Macron à la présidence de la Commission des Lois de l'Assemblée Nationale, ne la jugeait d'ailleurs ni « nécessaire » ni « utile » en 2018. Si le chef de l’État s’est tardivement rallié à cette initiative parlementaire portée par Mmes Mathilde Panot et Mélanie Vogel, c’est par pur opportunisme politique. Selon Le Monde, cette cérémonie serait l'occasion pour le président de « convaincre de son féminisme ». « Vaste programme » aurait pu dire l'un de ses illustres prédécesseurs.

Depuis près de sept ans, nous avons pris l'habitude : au sommet de l’État, la communication tient lieu de politique, la mise en scène supplée au vide de la pensée et les discours ampoulés du président contredisent la réalité de l’action de son gouvernement. Ce n-ième spectacle organisé par le régime macroniste pourrait toutefois ne pas suffire à faire du président de la République une figure du féminisme et à occulter son inaction dans ce domaine.

Alors, féministe, Emmanuel Macron ?

Féministe celui dont la police a tué Zineb Redouane et a fracassé le crâne et détruit la vie d’Angelina à Marseille en décembre 2018 ?

Féministe celui dont la police a gravement blessé Geneviève Legay à Nice en mars 2019 lors d’une violente charge policière et qui a matraqué depuis 2017 des milliers de femmes qui ne faisaient qu’exercer leur droit constitutionnel à manifester contre sa politique ?

Féministe celui dont la politique budgétaire provoque l’effondrement de l’hôpital public et des services d’urgence au point que des femmes y décèdent, ou bien leur conjoint, un de leurs parents ou un de leurs enfants ?

Féministe celui dont la politique économique contraint des milliers d’étudiantes à faire la queue dans les distributions de colis alimentaires ou de produits d’hygiène et condamne des millions de femmes seules à la précarité, à ne pouvoir se chauffer correctement ou à sauter des repas pour donner à manger à leurs enfants ?

Féministe celui qui a décidé de durcir les conditions d'obtention et de réduire la durée d’indemnisation des personnes au chômage, une mesure dont les femmes sont les premières victimes puisque près d'une sur trois travaille à temps partiel (29,3%), contre seulement 8,4% des hommes ?

Féministe celui qui appelle à « sanctionner financièrement et facilement les familles à la première infraction » d’un de leurs enfants mineurs, et donc principalement les femmes élevant seules leurs enfants ?

Féministe celui qui a fait passer en force une réforme des retraites qui pénalise plus les femmes (et notamment celles qui ont eu des enfants) que les hommes ?

Féministe le dirigeant d’un pays dans lequel les femmes représentent 62 % des personnes payées au Smic , où le salaire annuel moyen des femmes est inférieur de 22 % à celui des hommes et où un tiers des femmes retraitées touche personnellement moins de 858 euros par mois contre moins de 10 % des hommes retraités ?

Féministe celui qui dirige un pays où le nombre de femmes sans papiers enceintes ou avec enfants en bas âge à la rue ne cesse de croître et où le nombre de femmes ayant accouché dans la rue est passé de 49 en 2017 à 146 en 2019 ?

Féministe le président qui se glorifie de la réforme constitutionnelle sur l’IVG alors que 130 centres IVG ont fermé en France entre 1975 et 2020 selon le Planning familial ?

Féministe le président de la République qui se mêle de définir ce que doit être une tenue décente pour les jeunes collégiennes ou lycéennes et leur enjoint de cacher ce nombril qu’il ne saurait voir ?

Féministe celui qui a défendu un ministre ayant accordé à des femmes une aide dans un dossier administratif ou judiciaire en échange de faveurs sexuelles ?

Féministe celui n’a pas eu un mot à l’intention de femmes victimes d’agressions sexuelles ou de viol tandis qu’il défendait leur agresseur qui rendrait « fière la France » et s’inquiétait de la « chasse à l’homme » dont celui-ci serait l’objet ?

Ce président « féministe » autoproclamé a réagi à l’adoption de la loi constitutionnelle par un de ces messages grandiloquents qu’il affectionne : « Fierté française, message universel ».

Vraiment ?

Mais où étaient donc la fierté française et le message universel quand une Nigériane enceinte de six mois et gravement malade fut refoulée avec son mari à la frontière italienne en mars 2018 puis abandonnée par la gendarmerie nationale devant la gare de Bardonecchia sans même avertir le médecin de garde ? Elle est décédée quelques semaines plus tard en Italie.

Où étaient la fierté française et le message universel après le retour des talibans au pouvoir à Kaboul en 2021 quand M. Macron s’est empressé d’écarter toute « vague migratoire » tout en évoquant avec des trémolos dans la voix  la « situation terrible » des femmes afghanes ?

Où sont la fierté française et le message universel quand des milliers de femmes meurent chaque année en Méditerranée avec leur conjoint, leurs frères, leurs parents ou leurs enfants sans la moindre action de la part de M. Macron et de son gouvernement ?

Où sont la fierté française et le message universel quand des milliers de femmes sont arrêtées par les garde-côtes libyens financés par l’Union Européenne et donc par la France avant d’être transférées dans des camps où elles sont réduites en esclavage et violées ?

Où sont la fierté française et le message universel quand les femmes palestiniennes et leurs enfants sont massacrés depuis cinq mois par l’armée de ce « cher Bibi » à qui M. Macron proposait en octobre 2023 la participation de la France à une coalition internationale pour bombarder Gaza ?

Alors, non, Emmanuel Macron n’est pas un féministe, ne l’a jamais été et ne le sera jamais. Point barre comme dirait l’intéressé.

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