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Billet de blog 22 juin 2016

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Podemos: cravate, patrie et... social-démocratie

Porterait-il une cravate le soir du grand et seul débat à quatre précédant les élections générales du 26 juin ? Grave question qui en Espagne à fait couler beaucoup d’encre et a mobilisé les spécialistes en communication.

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 Ainsi par exemple le journal de droite « El Mundo» du 7 juin a consacré un long article à la question sous le titre « Pourquoi Pablo Iglesias ne quitte-t-il plus sa cravate ? ». La correspondante du « Monde » elle-même après avoir signalé l’événement-cravate dans un précédent article, constate dans son billet du 15 juin, que Pablo Iglesias est venu au débat « sans cravate contrairement à ses dernières apparitions publiques ». Qu’est-ce à dire ?

Remarquons d’abord que nombre de ces commentateurs se trompent quand ils disent où laissent entendre que Iglesias vient d’adopter la cravate dans le but  évident de « présidentialiser son image ». Il suffit de retourner quelques années en arrière, alors que Podemos n’existait pas,  pour constater que Iglesias animait des débats sur « Fort Apache » avec ou sans cravate.

Nous ne sommes pas comme les autres

 Pour autant, il est évident que pour lui, spécialiste s’il en fut en communication politique, l’image qu’il s’applique à donner est riche de significations dont la plus « visible » est celle-ci : « nous ne sommes pas comme les autres ! », s’entend, nous ne sommes pas comme les autres politiciens, nous sommes comme le commun des mortels, comme  « la gente », ce qui prend tout son sens et toute sa cohérence quand, au-delà des apparences, Podemos inscrit dans son programme que les élus ne toucheront pas d’indemnités ou de salaires supérieurs à trois fois le salaire minimum en vigueur dans le pays soit 2000 euros environ, ce que pratiquent en effet les élus du nouveau parti, mesure dont l’importance ne  peut échapper à personne et qui pourtant est très souvent, trop souvent passée sous silence . On aimerait bien entendre la ptétendue gauche française sur ce sujet et particulièrement celle qui a pour Podemos les yeux de Chimène.

Pablo Iglesias joue évidemment de son image avec une certaine « maestría » se gaussant des journalistes qu’ils soient du « Monde » ou de « El Mundo » bien obligés de constater que pour ce débat si important dans la campagne… il ne portait pas de cravate.

Patriote...

 Mais il suffit pour ce qui est de la cravate. Venons-en au patriotisme que Pablo Iglesias conjugue désormais sur tous les tons et dans tous ses discours. J’avais déjà abordé le sujet du patriotisme à l’occasion de la venue d’Iglesias à Paris. Je continue à penser qu’il n’y a pas de quoi être fier (orgulloso dit Iglesias) d’être espagnol, français ou tout ce que l’on voudra, puisque nous n’y sommes pour rien, nous n’avons pas choisi notre lieu de naissance comme nous n’avons pas choisi de naître.

Bien sûr la patrie dont se réclame Iglesias n’est pas celle du PP, le parti au pouvoir issu du franquisme et n’est évidemment pas celle de Franco. Iglesias se tue à expliquer que sa patrie à lui ce sont les gens et non les symboles, drapeaux ou chants guerriers, revenant ainsi à la patrie de 1792 qui n’était autre que la Révolution.

Il n’en demeure pas moins que le choix de brandir le mot patrie à toute occasion entretient, pour le moins, une ambigüité permettant de ratisser large parmi cette multitude qui n’hésite pas à brandir fièrement et un peu partout, dans les stades comme dans les manifestations politiques et syndicales, ces symboles dont on ne se souvient pas assez qu’ils sont souillés de sang car l’on se retrouve alors sur le terrain fangeux du nationalisme dont on sait ce qu’il produit de fierté imbécile et de violence mortifère, les évènements politiques et sportifs de ces derniers jours nous le rappellent dramatiquement.

Peut-être serait-il alors opportun d’opposer aux fausses évidences du patriotisme et du nationalisme qu’il produit nécessairement d’irréfutables évidences :

Je n’ai jamais au cours de ma vie « aimé » ni un peuple ni une collectivité, ni le peuple allemand, ni le français, ni l’américain, ni la classe ouvrière ni rien de la sorte. En effet, je n’aime que mes amis et le seul genre d’amour que je connais et auquel je crois est l’amour porté aux personnes. (Hannah Arendt, Eichemann à Jérusalem).

Et :

Le patriotisme est la moins perspicace des passions (Jorge Luis Borges).

Ou encore :

L’égoïsme et la haine ont seuls une patrie, la fraternité n’en a pas (Lamartine).

Parrêsia...

 Venons-en enfin à la social-démocratie. Voici en effet que lundi 6 juin,  Pablo Iglesias se définit comme le leader d’une nouvelle social-démocratie, son alliance avec IU (essentiellement communiste) n’étant nullement contradictoire avec cette affirmation car, dit-il, les signifiants importent peu et, en outre, Marx et Engels, c’est bien connu,  étaient des sociaux-démocrates puisqu’à l’époque social-démocratie avait le même sens que communisme aujourd’hui (El País, 7 juin). N’est-ce pas ? Ne conviendrait-il pas de nuancer quelque peu en relisant la « Critique du programme de Gotha » et particulièrement la définition de la « dictature du prolétariat » ?

Sans doute mais vient alors particulièrement à propos, la sortie chez l’éditeur Vrin de textes de Michel Foucault (Discours et vérité précédé de La Parrêsia ) présentés par Frédéric Gros, qui complètent ou éclairent les Cours au Collège de France également présentés par F. Gros lequel rappelle dans  son introduction que :

« La Parrêsia est un terme grec qui signifie le fait de tout dire […]. On peut donc traduire par : « franc -parler », « dire vrai », « courage de la vérité », « liberté de parole »…

 Mais alors peut-on lire plus avant :

 Le parrèsiaste, tel qu’Isocrate par exemple en dessine le portrait dans son discours « Sur la paix » est celui qui, à l’inverse des démagogues ne cherchant à faire entendre au peuple que les opinions que ce dernier prend plaisir à écouter, prend sur lui de proclamer des vérités désagréables à entendre, faisant « dissensus » et entraînant le risque pour lui d’une réaction populaire hostile.

Alors Pablo : Parrèsiaste ou démagogue ?

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