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Billet de blog 30 septembre 2018

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Pourquoi je soutiens le Manifeste pour l’accueil des migrants

Se développe dans les colonnes du Club de Mediapart, et au-delà, un débat très vif autour du manifeste porté par trois journaux. Si ce débat devait tourner à la polémique et à l’instrumentation politique, ce serait un désastre pour la défense d’une cause commune qui doit unir tous les humanistes. Rejoignons l'appel lancé par SOS Méditerranée!

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Le Manifeste pour l’accueil des migrants porté par les rédactions de Regards, Politis et Mediapart a suscité la réaction de Manuel Bompard, un responsable important de la France insoumise qui, dans un premier billet de blog, expose les raisons pour lesquelles il ne souhaite pas signer le manifeste. Un abonné a répondu à cette prise de position par un billet opposant au responsable politique de la FI une tribune de Philippe Martinez publiée dans le Monde. Toutes les conditions sont réunies pour que se développe un pugilat qu’affectionnent les abonnés les plus actifs du Club et qui tient à distance la majorité.  Pugilat qui clive les positions et construit des camps, avec diverses injonctions à choisir le sien. Je m’y refuse et, après avoir exposé les raisons de mon soutien au Manifeste, je tente de considérer quelques effets politiques de la position adoptée par Manuel Bompard.

J’ai signé et diffusé le Manifeste pour trois raisons principales.

Parce que ce texte pose de manière axiale la question de la montée de l’extrême droite et s’inscrit résolument dans un combat contre les idées qu’elle a imposées. « Aucune concession » ne doit être faite à ces idées, aucun compromis et aucune compromission ne sont acceptables. Le manifeste est clair et très ferme sur cette question.

Parce qu’il identifie clairement les causes des désordres de notre monde et de nos sociétés : non pas la « pression migratoire », comme veulent nous le faire accroire les idéologues de l’extrême droite et des droites extrêmes, mais « la frénésie de la financiarisation, la ronde incessante des marchandises, la spirale des inégalités, des discriminations et de la précarité ». Une idée centrale suscite encore ma pleine adhésion : « Ce n’est pas la main-d’œuvre immigrée qui pèse sur la masse salariale, mais la règle de plus en plus universelle de la compétitivité, de la rentabilité, de la précarité. »

Parce qu’il met des considérations éthiques et morales au-dessus des questions de politique politicienne. Et c’est pour moi très important. Le texte a le mérite de substituer aux habituels arguments politiciens la question des valeurs : la défense de la liberté de circulation et des droits fondamentaux, « le partage », « l’esprit public ». J’y aurais ajouté pour ma part, et plus explicitement, l’impératif éthique de l’accueil. Mais il est compris par chacune et chacun.

Manuel Bompard, dans un long argumentaire, expose les raisons pour lesquelles il n’a « pas souhaité signer le manifeste » bien qu’il en « partage pourtant une grande partie de son contenu ».

La première est que le texte « semble considérer que l’explosion des migrations, y compris contraintes, est une fatalité ». Cette lecture ne me semble pas tenir, si l’on veut bien considérer l’ensemble du manifeste qui identifie clairement les causes des phénomènes migratoires et sous-entend évidemment qu’il convient de lutter le plus énergiquement possible contre celles-ci. Quelle rédactrice ou quel rédacteur de ce texte, quel signataire, soutiendrait donc que « l’on ne pourrait rien faire face aux ravages de la mondialisation capitaliste ? ». Aucun. Or c’est sur la base de cette lecture que Manuel Bompard infère ensuite que, selon les auteurs du texte, « s’interroger sur les sources des flux migratoires conduit nécessairement « par être contraint au pire », au « contrôle policier » et à ériger les frontières comme un « mur » ». Mais le texte ne dit pas exactement cela. Il pose que toute logique de contrôle et d’interruption des flux migratoires – et non pas la simple interrogation sur les sources des flux migratoires, ce qui serait absurde ! – conduit automatiquement à des mesures violentes qui s’inscrivent contre les droits fondamentaux et le principe de libre circulation des personnes.

La seconde raison exposée par Manuel Bompard est la suivante : il est conduit à penser « qu’il y avait parmi les initiateurs de cet appel une volonté de démarcation et d’instrumentalisation de la question migratoire pour cibler, indirectement, les positions de la France insoumise. » Et de faire référence « aux polémiques qui ont occupés les dernières semaines à gauche, à coup de procès d’intention et d’anathèmes. » La dernière partie du texte de Manuel Bompard ne m’a pas convaincu. Ne vise-t-elle pas à justifier ou mieux expliquer les positions de la FI dans un contexte où des « lignes » divergentes et parfois indécises ont été exposées ? Cet argumentaire final laisse à penser que le refus de signature est peut-être davantage motivé par la seconde raison que par la première.

En définitive la position du responsable de la FI, toute sincère et honnête qu’elle soit, me semble créer trois effets dommageables. Tout d’abord, fort du haut niveau de responsabilité qu’a son auteur dans un mouvement politique de premier plan, une telle prise de position a du poids et aura inévitablement pour conséquence d’éloigner nombre de militants et sympathisants de la FI du manifeste et de la cause qu’il défend. Il est ensuite à craindre que cette position n’aggrave les clivages au sein des gauches, au moment même où la FI semblait donner quelques signaux d’ouverture et de rassemblement. Enfin elle apporte de l’eau au moulin de celles et ceux qui fustigent le criticisme idéologique de la FI à l’endroit des médias. Fallait-il prendre comme prétexte de telles réserves pour ne pas signer ce manifeste ? Je ne le crois pas. Par ailleurs combien d’appels et de pétitions signons-nous en acquiesçant totalement à leur rédaction ? Bien peu. Manuel Bompard le reconnaît lui-même. Une autre voie s’offrait à lui : signer ce manifeste et exprimer ses réserves. La cause des migrants en aurait été davantage soutenue.

Certes, ce manifeste comporte quelques faiblesses dans sa rédaction et son argumentaire. En particulier le parallélisme construit trop hâtivement entre le libre déplacement des capitaux et celui des êtres humains. Ce n’est évidemment pas du premier que l’on peut tirer un argument pour défendre le second et il s’agit là d’une maladresse de rédaction. Le premier caractérise les ravages de la finance mondialisée, le second relève, ainsi qu’il est rappelé à la fin du manifeste, « des droits fondamentaux de l’humanité ». L’on peut aussi regretter que rédactrices et rédacteurs de ce texte n’aient pas cru bon d’appeler sur un tel sujet à l’unité des forces de gauche et au refus de l’instrumentalisation politique de la question migratoire. Si je n’ai pas la naïveté de croire que ce serait possible dans l’état actuel du débat politique, au moins un appel fort à l’urgence d’un sursaut unitaire pour les valeurs d’humanité et d’hospitalité aurait été bienvenu. De même qu'un appel à l'agir effectif. Signer une pétition, c’est bien. Agir concrètement pour sauver des migrants, les accueillir, les soutenir et les aider, c’est mieux.  C’est aussi signifier à l’État que s’il n’accomplit pas son devoir, les citoyens le font et continueront de le faire. Voir ci-dessous l'Appel de SOS Méditerranée.

Pascal Maillard

SOS MEDITERRANEE LANCE UN APPEL URGENT A MOBILISATION CITOYENNE

Ces derniers mois, l’Aquarius, affrété par SOS MEDITERRANEE et opéré en partenariat avec Médecins sans Frontières (MSF), a été la cible de manœuvres politiques visant à criminaliser ses équipes et à mettre un terme à sa mission vitale de sauvetage. Après la fermeture des ports italiens et les difficultés récurrentes à trouver un lieu sûr pour débarquer les rescapés, l’Aquarius a été attaqué à deux reprises par l’Etat du pavillon – Gibraltar en août puis Panama qui a annoncé son intention de radier le navire de ses registres. Sans pavillon, l’Aquarius serait contraint de rester à quai, alors qu’aux portes de l’Europe, en l’absence de tout navire de sauvetage civil en Méditerranée centrale, les morts se multiplient. Autant de vies qui disparaissent en silence, tandis que les Etats européens ferment les yeux.

Rappeler aux Etats d’Europe leurs responsabilités en Méditerranée centrale

L’Aquarius doit retourner en mer au plus vite pour sauver des vies. SOS MEDITERRANEE et MSF appellent à une mobilisation citoyenne urgente à l’échelle européenne afin de demander à tous les Etats d’Europe :

• De prendre toutes les mesures pour permettre à l’Aquarius de reprendre sa mission de sauvetage le plus rapidement possible ;

• De faire respecter le devoir d’assistance aux personnes en détresse en mer ;

• D’assumer leurs responsabilités étatiques en établissant un véritable modèle de sauvetage en Méditerranée.

SOS MEDITERRANEE lance une pétition « Sauvons l’Aquarius et le sauvetage en mer » et appelle à des rassemblements citoyens le 6 octobre dans plusieurs villes d’Europe afin de porter ces messages.

Pétition internationale : 1 million de signatures attendues

SOS MEDITERRANEE a choisi la plate-forme WeMove pour porter cette pétition qui peut être signée dès maintenant sur
https://you.wemove.eu/campaigns/sauvons-l-aquarius-et-le-sauvetage-en-mer

La pétition sera accompagnée d’une campagne digitale où chaque citoyen sera invité à se filmer ou à se photographier avec les hashtags #SaveAquarius et #SaveRescueAtSea.

Vague orange le 6 octobre dans les rues d’Europe

Le 6 octobre, une vague citoyenne orange, aux couleurs des gilets de sauvetage et de l’Aquarius, est appelée à descendre dans la rue afin de soutenir les valeurs d’humanité portées par SOS MEDITERRANEE et MSF. Les citoyens, marins, humanitaires, secouristes, artistes, intellectuels, associations, entreprises, mouvements religieux, syndicats et collectivités publiques sont invités à rejoindre les rassemblements pacifiques et apolitiques avec comme seul signe distinctif un t-shirt orange. SOS MEDITERRANEE organisera des rassemblements citoyens dans plusieurs villes d’Europe en Allemagne (Berlin), Italie (Palerme) et en France notamment à Paris, Marseille, Lyon, Nantes, Montpellier, Toulouse, Brest, Bordeaux, Grenoble, Saint-Etienne…

Sauvons l’Aquarius et le sauvetage en mer !

Pour organiser une manifestation, contactez-nous par facebook ou
mobilisation@sosmediterranee.org

Pour savoir où ça se passe en France, consultez le site :
www.sosmediterranee.org (rubrique événement).

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