« On va faire quelque chose de totalement inédit au mois de mars, une grande enquête par Internet qui va nous permettre, auprès des 850.000 professeurs, de connaître à la fois leur ressenti, leurs préconisations, leurs idées, leur volonté », a dit le Ministre sur France Inter le 25 Février dernier. Une enquête « anonyme » et « confidentielle » menée entre les 3 et le 17 mars où « tous les professeurs pourront dire ce qu’ils attendent » de l’évolution de leur métier.
Pour être inédit, c'est inédit ! Tellement « anonyme » et « confidentiel » que, rapidement, les enseignants se sont rendus compte que le lien qui leur avait été envoyé ce 3 Mars sur leurs adresses professionnelles académiques permettait d'accéder à un questionnaire qu'ils pouvaient valider sans y répondre, valider une fois et y répondre une deuxième fois, un questionnaire qu'ils pouvaient faire remplir par leurs amis, parents, enfants – ou dit autrement un questionnaire auquel n'importe quel troll macroniste pouvait avoir accès pour répondre aux desiderata ministériels...

Monsieur Blanquer est bien parti pour faire mieux que le Ministre de l'Education Nationale précédent, Najat Vallaud-Belkacem, quand les résultats de la « consultation nationale sur le projet de socle commun de connaissances, de compétences et de culture » de Septembre-Octobre 2014 annonçaient un taux de réponse globale des 850.000 enseignants prenant en compte un seul clic sur la page d'ouverture du site de consultation. Une manipulation des chiffres permettant d'annoncer un pourcentage de réponse de 20% des destinataires du message renvoyant sur le site de consultation. Puis ensuite d'énoncer des pourcentages de réponses à chacune des questions n'indiquant jamais le nombre de réponses données... Une galéjade, donc, déjà.
Mais le Ministre actuel pourra faire mieux, et se targuer de son intérêt pour les enseignants, et peut-être dire que, décidément, ils souhaitent justement ce qu'il souhaite... en s'appuyant sur des chiffres parfaitement fallacieux par essence puisque rien ne permet d'assurer que ce sont bien des enseignants qui ont répondu ( ou que ce n'est pas parfois le même enseignant qui a répondu 12 fois au questionnaire...).
Les enseignants sont habitués à ce que leur ministère de tutelle les méprise et ils n'attendent rien de cette consultation qui permettra encore une fois au Ministre de s'offrir un « moment-médias ». Ils le savent : celui-ci espère encore une fois parler, parler, parler sans qu'aucun journaliste ne le confronte aux faits. Ils y sont habitués désormais avec la question de la retraite par points pour laquelle nul journaliste n'a rétorqué au Ministre qu'une prime annuelle brute de 1500 euros amènerait dans le nouveau système 1,74 euros de retraite mensuelle brute, ce qui sera loin de compenser, au bout de 43 ans de travail, la perte de 30% de pension promise aux jeunes enseignants - et que c'est 10 milliards PAR AN qu'il faudrait pour compenser les pertes de retraite des enseignants.
Communiquer donc, sans écouter. Etre sourd au bruit de la rue, puisqu'ils sont descendus massivement dans celle-ci récemment, pour défendre leurs retraites ou défendre encore une fois leurs élèves au travers de l'épisode ubuesque des E3C en lycée... Etre sourd aux réseaux sociaux et aux Stylos Rouges, par exemple, groupe fermé d'enseignants fort de 71 000 membres discutant salaires, retraites, conditions de travail où quelques "espions" ministériels doivent bien traîner... Le Ministre veut savoir ce que les enseignants pensent? La blague ! Il sature l'espace médiatique et c'est tout.
Sourd et manipulateur. Méprisant, sans doute. En Marche, en somme. Avec la complaisance médiatique qu'il espère...
A moins que....
Boîte noire :
Le questionnaire in extenso remis en page, pour qui voudrait en faire l'analyse