Ainsi donc, si nous abdiquons notre combat, nous laisserons le champ libre à qui érige le mensonge en mode de gouvernement ( « retraite plus juste » pour cacher une baisse de pensions pour tous, à terme ; « déficit du régime des retraites » creusé sciemment notamment par les exemptions de cotisations non compensées par l'Etat », « cas » présentés dans les documents gouvernementaux systématiquement faux, étude d'impact toujours pas diffusée). Mensonges et boniments en lieu et place du débat démocratique, fondement pourtant de notre République – à laquelle nous renoncerions.
Ainsi donc, si nous abdiquons notre combat, nous livrerons nos enfants et les enfants que nous formons à un travail sans fin, jusqu'à 65 ans ( au-delà plus tard?) alors même que nous les poussons à faire des études longues, ce qui retarde d'autant leur entrée dans le monde du travail. Travail sans fin, avant le tombeau.
Ainsi donc, si nous abdiquons notre combat, nous leur lèguerons un monde où il leur faudra prendre n'importe quel travail, à n'importe quelles conditions, pour engranger des points, coûte que coûte – et quoi qu'il en coûte. Parce que c'est cela qu'induit nécessairement la réforme des retraites telle qu'elle est pensée – et c'est même sans doute pour cela qu'elle est pensée. Fluidifier le monde du travail, toujours, toujours.
Ainsi donc, si nous abdiquons notre combat, nous serons nous-mêmes les premières victimes de notre défaite – perdant et notre retraite et notre honneur. Notre retraite parce que nulle « revalorisation » possible dans le cadre de ce que Bercy permettra ne pourra jamais compenser les pertes à venir. L'honneur, parce qu'aux 870.000 que nous sommes, nous n'aurons pas su compter, argumenter, chercher, mettre en perspective, nous engager, agir, organiser la force colossale que nous représentons par notre masse – que nous nous serons montrés aussi méprisables que notre Ministre croit que nous le sommes : manipulables, corvéables à merci, impressionnables, infantiles, craignant le bâton – sages, terriblement sages quand il s'agit de ne plus l'être. Nous perdrons sur les deux fronts que nous devons tenir "en même temps", celui des retraites et celui de la réforme du baccalauréat - la défaite sur le premier front entraînant celle sur le second.

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Ainsi donc ??
Mais c'est parce que nous sommes tous de formation universitaire supérieure, parce que nous sommes riches de toutes les matières que nous enseignons, parce que nous savons lire, compter, comprendre, mettre en lien, nous intéresser au monde extérieur, parce que l'intérêt de l'autre ( nos élèves...) est bien souvent supérieur à notre intérêt propre, parce que nous sommes mus par des valeurs bien plus que des intérêts, que nous n'abdiquerons pas devant les mensonges et le déni de la force de notre mobilisation protéiforme.
La grève, c'est maintenant. Pour la victoire - et pour l'honneur
Gavroche nous regarde.
Les mineurs de Montsous, qui avaient bien plus à perdre que nous, aussi.
Pour mettre en perspective:
- L'intervention de François Hommeril de la CGE-CGC ( syndicat des cadres) pendant le live de Mediapart, le mercredi 15 Janvier.
Ecouter au moins de 8.30 mn à 11.57.
- La remarquable interview de Romaric Godin, journaliste à Mediapart et auteur de La guerre sociale est déclarée, qui met en perspective les réformes d'E. Macron dans l'Histoire longue: https://lvsl.fr/romaric-godin-les-elites-neoliberales-ne-veulent-plus-transiger-avec-le-corps-social/
- Une interview de Grégoire Chamayou, philosophe, à propos de son livre La société ingouvernable : https://www.liberation.fr/debats/2018/11/09/gregoire-chamayou-pour-se-defendre-le-neoliberalisme-a-fait-refluer-le-trop-plein-de-democratie_1691090
- Le monde du chiffre, sans âme et sans humanité, comme ils le voudraient : Discours du professeur Hartemann, chef du service diabétologie de la Pitié-Salpêtrière. Comme elle, 1 200 médecins hospitaliers ont démissionné de leur fonction d’encadrement le 22 Janvier 2020.
Le discours poignant du professeur Hartemann, chef du service diabétologie
- On complètera utilement le visionnage de la vidéo précédente en mettant celle-ci en perspective avec la pensée d'Alain Supiot, dont un livre publié en 2015 est intitulé La Gouvernance par les nombres : https://www.franceculture.fr/oeuvre-la-gouvernance-par-les-nombres-de-alain-supiot