Le "Cadre de partenariat stratégique" signé en 2019 entre l'ONU et le FEM était passé quasiment inaperçu. Il était pourtant ambitieux, affichant une volonté de coopération entre le monde des multinationales représentées par le Forum Économique Mondial (plus connu sous le nom de Forum de Davos) et les Nations Unies se déclinant à tous les niveaux d'organisation géographique ainsi qu'avec toutes les agences de l'ONU. C'est un marqueur important de la volonté des multinationales de se mettre en position d'influencer au plus près les processus de décision les concernant au niveau mondial, et de substituer à la coopération multilatérale interétatique des cadres dorganisation leur permettant de faire valoir leurs intérêts.
C'est ce qu'on retrouve concernant la régulation d'internet. Les Sommets mondiaux sur la société de l'information de 2003 et 2005 avaient décidé d'un double cadre de travail, d'un côté un forum qui est un lieu de discussion, associant États, société civile, experts, entreprises, et de l'autre une coopération renforcée entre États assumant la partie décisionnelle.
En 2018, un "panel de haut niveau sur la coopération numérique" rend un rapport. Il est présidé par Malinda Gates (épouse de Bill Gates, fondateur de Microsoft) et par Jack Ma (fondateur d'Alibaba, équivalent chinois d'Amazon). Et en juin 2020 le secrétariat général de l'ONU publie un "plan d'action de coopération numérique" inspiré de ses conclusions. Alors que le secrétariat général n'a aucun mandat pour proposer une modification de l'architecture décidée par les sommets de 2003 et 2005, il le fait, et propose la création d'une troisième instance, qui d'un côté coordonnerait les discussions du Forum, de l'autre proposerait des orientations à l'instance de décision, bref qui serait la cheville ouvrière du processus. Et dans cette nouvelle instance seraient représentées les multinationales du numérique, qui auraient donc un rôle clé dans la définition des règles les concernant.
Ce à quoi on assiste à l'ONU se retrouve au niveau étatique, notamment en France. Est mise en œuvre, non pas une version libertarienne du néolibéralisme, qui viserait au dépérissement de l'État, mais une colonisation de l'État comme des instances interétatiques, pour les mettre au service des multinationales et d'intérêts économiques similaires.
Plus de détails dans cet article du CETRI :
https://www.cetri.be/L-ONU-propose-que-les-GAFA-soient#nb1
Vous pouvez
télécharger la lettre adressée au secrétaire général de l'ONU par 170 organisations de la société civile ici (pdf, 240.0 kB).