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Billet de blog 4 janvier 2025

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Les voeux présidentiels du nouvel an

Ces voeux de Nouvel An sont à marquer d'une pierre blanche dans les annales de la macronie, car l'autocritique ne fait guère partie des exercices préférés de notre Président.

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Il faut qu'il y ait été contraint pour admettre - du bout des lèvres - que la dissolution de l'Assemblée Nationale qu'il a décidée contre tous les avis de son entourage était une erreur : "La dissolution a apporté pour le moment davantage de divisions à l’Assemblée que de solutions pour les Français". Pour le moment, dit-il ? Le mot "lucidité"; qui revient plusieurs fois dans ses propos, n'est pas précisément ce qui caractérise son discours, même s'il cherche à nous faire oublier l'actualité par une projection vidéo évoquant ce qu'il  considère comme les grands moments de l'année : la constitutionalisation de l'IVG, les jeux olympiques et la réouverture de Notre-Dame, le tout commenté par un prétentieux "impossible n'est pas français". Car, une fois évaporées les dernières effluves de champagne, il va falloir se confronter à la réalité : les quatre premiers ministres qui se sont succédés depuis le début de son deuxième quinquénat  l'instabilité gouvernementale, le massacre de l'Education Nationale et du système de santé, le déclin de l'Europe et la nécessité de renforcer sa défense, le tout en pleine période de marasme budgétaire dont le président et ses ministres sont les premiers responsables. 

Il est tout à fait paradoxal que, pour justifier la dissolution, il dise avoir voulu redonner la parole au peuple. Mais c'est précisément ce qu'en huit ans de présidence, il n'a jamais su faire. L'exemple le plus significatif est cette Convention Citoyenne pour le Climat qu'il avait lui-même sollicitée en préambule du vote de la loi "climat et résilience". Il n'a pas tenu la promesse d'appliquer "sans filtre" les propositions émanant de cette consultation, mais cet engagement lui même était fallacieux et relevait d'une ignorance totale de nos institutions car sa "lucidité" ne lui avait pas suggéré qu'un filtre, il y en avait un et incontournable : l'Assemblée Nationale qui, selon la Constitution et en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, a seule celui de voter les lois. Et les lobbies sont passés par là. Alors, oubliées les velléités écologiques, qui n'étaent là que pour la frime. Et il faut ajouter qu'un des moyens d'expression citoyenne est le tissu associatif, que Tocqueville, dans son analyse de la démocratie américaine, considérait comme essentiel à l'exercice de celle-ci. Or, à l'occasion des manifestations contre les mégabassines, le Ministre de l'Intérieur, non content d'envoyer sa flicaille motorisée brutaliser des manifestants pacifiques, s'est illustré par une tentative de dissolution des mouvements de la terre, en inventant au passage la notion "d'écoter-roriste" qui n'a aucune réalité juridique. 

Alors comment redonner la parole au peuple ? Le président suggère, sans toutefois prononcer le mot "référendum", qu'il pourrait recourir à des consultations directes des électeurs : "Nous aurons des choix à faire (…) et je vous demanderai aussi de trancher certains de ces sujets déterminants".  Mais le recours au référendum est un enfer pavé de bonnes intentions : à l'image du référendum de 1969 qui a entraîné la démission de De Gaulle, ce type de consultation populaire peut être détourné de la question posée et se réduire à un plébicite pour ou contre le pouvoir, ce qui sera inmanquablement le cas dans le contexte actuel d'allergie anti-Macron. De plus, l'exemple du Brexit a bien montré que le résultat d'un référendum dépend essentiellement de l'exhaustivité, de l'objectivité de l'information donnée. Sur ce dernier point, si les grands journaux, comme ceux du groupe Le Monde et Libération, se sont dotés d'une structure actionariale qui protège leur indépendance éditoriale,  il suffit d'évoquer les tentatives du pouvoir macronien d'appropriation des sources de Médiapart pour comprendre qu'il n'est pas le meilleur garant d'une information objective. 

Reconnaissons au moins un éclair de lucidité au Président quand il refuse de démissionner, car de nouvelles élections présidentielles ne feraient qu'aggraver le chaos dans lequel nous sommes, avec le risque de voir arriver l'extrème droite au pouvoir. Il doit donc assumer jusqu'à son terme le marasme dans lequel nous sommes et dont il est l'unique responsable. Mais en a-t-il la capacité ? Et avec quelles marges de manoeuvre ? Les mots d'un discours sont dérisoires en face de la réalité.

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