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Billet de blog 3 mai 2022

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BRÉSIL Qui donnait aux tueurs de Marielle Franco l'info privilégiée sur leur cible ?

Premier commissaire chargé de l'enquête sur l'homicide de Marielle dès le 15/3/18, Giniton Lages sort un livre. Et parle à The Intercept Brasil. Son désarroi: l'enquête "aurait avancé plus" si les assesseurs de Marielle n'avaient craint que leurs dépositions soient publiées dans la presse. Des images de caméras et la déclaration d'une survivante qui ont fuité ont, selon lui, influencé des témoins.

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Illustration 1
"Quem matou Marielle ?", de Giniton Lages et Carlos Ramos (abril 2022) © Matrix Editora

A Rio de Janeiro, dans le commissariat central de la division homicides (DH), le poste de direction de ce service était libre, le 15 mars 2018, à cause d'une intervention fédérale de l'armée dans l'Etat de Rio de Janeiro, subite, ordonnée par le gouvernement Bolsonaro.
Et le commissaire Giniton Lages ambitionnait d'être nommé à ce poste. En arrivant dans le commissariat, il est tombé sur le député fédéral Marcelo Freixo, du parti PSOL, présent là à cause du double assassinat de la veille au soir de son amie Marielle Franco, également du PSOL.
Sans détour, le commissaire Rivaldo Barbosa de Araújo Júnior, qui avait assumé la direction générale de la police civile de l'Etat de Rio de Janeiro le 7/3/2018 [choisi et nommé à ce poste par le général Walter Braga Netto et le général Richard Fernandez Nunes] a annoncé, regardant Freixo : "Le docteur Giniton prend en main la DH et va commander les investigations de cette affaire".
 
Depuis le 1er avril 2022, un nouveau directeur général de la police civile de l'Etat de Rio de Janeiro a été nommé par le gouverneur Claudio Castro : Fernando Antônio Albuquerque.
 
Auparavant, ont assumé ce poste Allan Turnowski (sept. 2020-mars 2022), venu après le commissaire Flávio Marcos Amaral de Brito, nommé en juin 2020 et qui n'était resté à son poste que trois mois. L'avait précédé le commissaire Marcus Vinícius de Almeida Braga, qui avait déposé sa démission en mai 2020, après avoir pris son poste le 3 janvier 2019, à la suite du mandat écourté de Rivaldo Barbosa de Araújo Júnior. 
 
 
 
Nommé le 15/3/2018, Giniton Lages est resté à son poste de directeur de la section homicides jusqu'au 13/3/2019, exonéré de cette charge au lendemain de l'arrestation, le 12/3/2019, des deux supposés tueurs de Marielle Franco, Ronnie Lessa et Elcio de Queiroz. Lui ont succédé : Daniel Rosa (2019 / 17 septembre 2020), Moysés Santana Gomes (2020 / juillet 2021) et Edson Henrique Damasceno (2021 / 1er février 2022). Depuis le 2/2/22, c'est le commissaire Alexandre Herdy qui dirige l'enquête.
 
Pendant cette année 2018/2019, les équipes menées par Giniton Lages ont interrogé 230 personnes, ont analysé 33.000 lignes téléphoniques et ont mis sur écoutes 318 lignes téléphoniques, après la décision d'un juge.
Depuis le 15 mars 2019, quatre autres commissaires chefs d'enquête se sont succédés et n'ont toujours pas trouvé le nom du ou des commanditaires du double assassinat.
 
En avril 2022, le commissaire Giniton Lages avec le chercheur Carlos Ramos a choisi de lancer un livre "Qui a tué Marielle ?" (296 pages) aux éditions Matrix. Et a été interviewé le 26 avril 2022 par le site de journalisme indépendant The Intercept Brasil pour revenir sur la raison profonde de cette publication.
 
Giniton Lages veut tout à la  fois montrer les coulisses de la police civile, ses difficultés malgré les 47 policiers dédiés à cette seule affaire lorsqu'il la commandait, et ses rapports avec la société civile, et par là-même proposer une réflexion sur le secret de l'enquête et le droit à l'information. Et le commissaire, chevronné, Giniton Lages de souhaiter provoquer également une réflexion sur le pourquoi des 45.500 homicides annuels dans le pays.

 
The Intercept Brasil :
La presse avait joint deux témoins avant vous - un sans-abri et un autre qui attendait le feu vert pour traverser, juste à l'intersection où les coups de feu ont été tirés. Pourquoi n'avez-vous pas poursuivi les témoins, puisque vous mentionnez dans votre livre l'importance de les trouver ?

Giniton Lages : dès que nous avons pris en charge l'affaire, la première étape a été de collecter les images. Dans le cas de Marielle, il y avait une chance d'avoir des images du moment de l'exécution. Mais nous avons vu que [les caméras] étaient éteintes, ce qui fait partie du modus operandi des criminels. Cette mise en perspective des images est quelque chose qui, pour l'enquêteur, est très coûteux et doit être fait le plus rapidement possible, car nous pouvons les perdre. Je divise les équipes, et elles commencent à chercher des images. Nous avions déjà, à ce moment-là, l'emplacement et la dynamique - l'expertise légale avait déjà dessiné cela.
 
Nous savions que les auteurs [des tirs] ne sont pas sortis du véhicule. Il y avait cette perspective que tout avait été très rapide. Nous avons eu le témoignage de Fernanda [l'assistante de Marielle qui l'accompagnait dans la voiture cette nuit-là] et de deux autres personnes qui se trouvaient dans un centre éducatif en face de la scène du crime. Le journal [O Globo] a amené deux autres témoins. Comme nous savions que les auteurs ne sont pas sortis de la voiture, qu'ils ont tiré pendant que le véhicule était en mouvement, nous sommes allés chercher les images des caméras [de surveillance]. Un témoin oculaire, dans cette dynamique, ne me donnerait pas la paternité, donc faire venir le sans-domicile fixe ou la femme qui traverse la rue n'était pas pertinent. Il n'y a pas eu de préjudice pour l'enquête. Aucun d'entre eux ne serait en mesure de nous dire qui était l'auteur des tirs, mais la piétonne pourrait nous donner des informations pour reconstituer la scène, nous l'avons donc emmenée à la reconstitution [qui a eu lieu dans la nuit du 10 au 11 mai 2018].
 

N'est-il pas étrange que le portier du condominio Vivendas da Barra ait enregistré, sur l'agenda informatique officiel du condominio, l'autorisation d'Élcio de Queiroz à entrer au numéro de la maison de Jair Bolsonaro ?

Lorsque j'établis le profil psychosocial de [Ronnie] Lessa, l'une des premières informations est qu'il vit à Vivendas da Barra. Nous savions que la famille Bolsonaro y vivait aussi, nous étions déjà au premier tour des élections [présidentielles, le 7/10/2018]. Mais je ne travaille pas sur la base de théories de conspiration ou des fake news, je travaille avec des données objectives. La seule chose qui m'intéressait était de savoir où vivait Lessa. Mais c'était aussi l'environnement d'un candidat à la présidence de la République, avec des mouvements contrôlés, avec la police fédérale. Tout était surveillé à ce moment-là. Je savais que ma cible avait de nombreuses relations au sein de la police civile et de la police militaire. Ce n'était pas n'importe quelle cible et il n'était pas possible de faire, dans le condominio, le moindre mouvement sans qu'il le remarque. Je ne pouvais pas y envoyer une voiture de police pour demander à quelle heure il était parti le jour du crime. Cela ferait intervenir tous les responsables et habitants du condominio. Dans un condominio, tout le monde sait tout. Le portier sait et informe. Je savais donc que je ne pouvais pas me tromper. Nous avons donc demandé au service de renseignement et à la police fédérale de mener cette enquête. Nous avions besoin d'eux pour faire sortir cette information très précieuse du condominio : le mouvement des visiteurs qui entrent et sortent, sans attirer l'attention de personne. Comme la police fédérale entrait et sortait, personne ne remarquerait s'ils demandaient cette information. Cela a marché. Mais nous ne nous sommes pas concentrés sur la famille Bolsonaro. Aujourd'hui encore, je remercie Dieu que cette information [sur Vivendas da Barra] n'ait pas été divulguée, à l'époque. Peut-être aurions-nous perdu quelque chose, ou nous n'aurions même pas pu arrêter Lessa.
 
Cette mission a été confiée à un groupe spécifique et, une fois de plus, le facteur humain était à l'œuvre. Lors de l'analyse de cet agenda informatique, le policier a appliqué une analyse conjuguée. Nous avons recherché tous les noms des proches de Lessa qui sont entrés dans le condominio avec son autorisation. À ce stade, nous voyions déjà Élcio comme quelqu'un de proche de la cible - et il a attiré notre attention plus que les autres. L'analyste n'a pas remarqué ce que l'équipe suivante a vu : la note d'entrée le jour du crime avec le numéro de la maison 58, où vivait la famille Bolsonaro. Plus tard, ils ont constaté que l'enregistrement audio ne correspondait pas et que, par conséquent, il s'agirait d'une erreur matérielle du portier. Nous n'avions pas cette information à ce moment-là, nous avons seulement cherché l'entrée des suspects dans la maison 65, celle de Ronnie Lessa.
 
Il est très risqué de prendre pour vrai un mot manuscrit, écrit par quelqu'un posté dans un poste de garde, avec des gens qui vont et viennent. Là, on touche un numéro, on échange des informations, c'est très dangereux. Je ne sais pas ce qui s'est passé, je ne connais pas l'enquête de ce moment-là [postérieure à son départ de responsable de la direction de l'enquête], mais l'idéal aurait été qu'il se fasse un contrôle très rigoureux.
 

Les dernières nouvelles sur l'enquête indiquent que la police civile n'a remis qu'une partie des images au ministère public à la fin de l'année 2021. Dans votre livre, vous mentionnez la méfiance des femmes procureures à l'égard de votre équipe. Aviez-vous la même méfiance ? Est-ce la raison pour laquelle toutes les informations et tous les matériaux n'ont pas été transmis au ministère public (MP-RJ) ?

Dès le début, nous avons suivi le protocole. Nous avons travaillé avec l'idée suivante : nous devons préserver tout ce qui peut être perdu. Et les images pourraient être perdues. Nous avons pris toutes les images des deux individus à l'aller, le temps qu'ils sont restés sur les lieux jusqu'au point d'exécution, les caméras de surveillance à la sortie de Marielle du bâtiment du Conseil municipal jusqu'à la Casa das Pretas, car nous voulions savoir si elle était déjà suivie par une autre voiture. Nous savons déjà que ce n'était pas la première [voiture], parce qu'elle est allée directement à la rue des Invalides, mais nous voulions savoir si une voiture l'avait suivie avant. Nous avons donc collecté toutes ces images et les avons stockées dans la banque d'images, sur des supports physiques, sur un disque dur de 1 téraoctet et sur le cloud. Et ils sont encore là aujourd'hui. J'en ai une copie avec moi.
 
Lorsque les procureures ont rejoint l'enquête, nous avons tenu une réunion pour tout leur dire. Nous sommes restés tard dans la nuit. J'ai mis un point d'honneur, pour gagner leur confiance, car elles sont arrivées le dos au mur à cause de tout ce qui s'était passé, et elles ne savaient pas où elles mettaient les pieds. Tout comme moi, elles ont également reçu des informations et des contre-informations. Il est courant que cela se produise dans un cas de grande répercussion. C'est pourquoi nous avons tout remis au ministère public. Tout ce que nous avions dans la banque d'images, sur papier, nous le leur avons donné.
 
Je ne sais pas si c'est vrai, je ne sais rien de ce qui a été traité en termes d'enquête et de diligence après mon départ. Je ne sais pas dans quelle mesure est véridique l'affirmation qu'un des éléments livrés n'a pas été traité. Je ne sais pas si un élément que nous avons remis a été utilisé dans la seconde phase d'enquête, car le regard sur cette affaire a alors changé. Je peux vous assurer que nous avons tout produit et collecté. Et si nous ne l'avions pas collecté, il aurait été perdu. C'est un fait.
Ce qui capture une image est un dispositif électronique appelé DVR, et normalement il est programmé pour conserver l'image pendant sept à trente jours. Après cette période, les images sont superposées. En d'autres termes, vous perdez l'image précédente. Je ne pense donc pas que d'autres images aient été jointes à l'enquête en dehors de celles que nous avons remises. Oubliez-cela, ce n'existe pas. Et je précise : l'équipe de la police civile l'a traité, et l'équipe du ministère public l'a aussi traité par le biais de la CSI [Coordination de la sécurité et des renseignements du ministère public].

Maintenant, le mouvement naturel est que tout soit revu. Si j'étais l'équipe qui a repris l'affaire maintenant, j'analyserais tout à nouveau, car quelque chose a pu passer inaperçu, nous sommes des humains.
 

Les familles réclament un accès complet à l'enquête depuis 2018. Quelles étaient vos relations avec les familles et qu'est-ce qui pouvait leur être transmis ?

La famille est la plus intéressée par ces informations, le reste n'est que spéculation. Il est normal que la société ait également besoin et veuille savoir, mais elle doit faire confiance à ses institutions. C'est la relation que peut-être, à certains moments, nous observons : l'absence de confiance. Nous savions que nous devions apporter des éclaircissements aux familles. Nous nous en sommes acquittés dans un premier temps, puis les procureures ont créé une plus grande empathie et un lien jusqu'à ce qu'elles assument ce rôle [de contact avec la famille]. Elles m'en ont parlé et j'ai trouvé ça génial, parce qu'à un certain moment de l'enquête, on manque d'énergie et de temps pour continuer à faire cette interface, surtout le chef du commissariat, qui est très proche des enquêtes. J'avais du mal à recevoir la famille, donc, stratégiquement, nous avons choisi à l'époque le directeur de la division, le "docteur" Fábio*, pour faire cette interface avec la famille et avec le parti politique qui, naturellement, était très touché. Marcelo Freixo [député fédéral du parti PSOL, qui avait eu dans son équipe Marielle, avant qu'elle soit élue conseillère municipale] a été choisi pour faire cette communication entre nous et le PSOL.

Si nous sommes dans une enquête où l'on a beaucoup réfléchi à l'avant et à l'après-assassinat, sans produire beaucoup de traces, nous devons également être prudents. Il est essentiel, pour une enquête aussi complexe, de ne pas divulguer le calibre et le numéro de lot des munitions utilisées, le type d'arme utilisé et l'existence ou non de témoins. En faisant connaître cette situation, vous affaiblissez la réponse rapide et efficace. Cela alerte les personnes faisant l'objet d'une enquête et met les témoins en danger.
J'ai écrit un exemple dans le livre, sur la fuite dans la presse de la déclaration de Fernanda. Quelqu'un dira alors : "Eh bien, mais c'est un droit, les gens doivent savoir ce qui se passe". Je pense que nous devons équilibrer les gains et les pertes. Publier la déclaration de Fernanda le jour suivant était un crime. Cette fuite l'a mise en danger.
 
Révéler que la victime a dit ceci ou cela quand il n'y a pas de gain est une info pour l'info, la seule chose que nous gagnons est la méfiance. Le secret donne la tranquillité aux témoins. Quand on va parler, pour gagner la confiance, la première chose dont on a besoin, c'est de garantir la confidentialité, de garantir qu'il n'y aura pas de fuite. Alors la personne me fait confiance. Quand ça fuites, c'est fini.

Je suis sûr que dans le cas de Marielle, j'aurais obtenu beaucoup plus... Je pense que s'il n'y avait pas eu de méfiance [concernant la garantie de confidentialité] parmi les assistants de Marielle, parmi les personnes de son cercle politique, j'aurais fait plus de progrès. J'aurais pu aller un peu plus loin dans les tenants et aboutissants. Les assistants politiques ont dessiné une réalité que je sais inexistante, qui serait seulement d'harmonie, de paix et d'amour. Ce n'est pas comme ça. Ceci est en contradiction avec ce qui est observé au sein d'une formation politique. Mais ils l'ont dit comme ça à cause des fuites et parce qu'ils étaient tous accompagnés d'une avocate liée au parti. Il était donc évident qu'il y avait un soupçon de ce qui pouvait être divulgué. J'ai demandé l'aide des gens du PSOL, après la fuite de la déclaration de Fernanda, pour calmer les assistants afin que cela ne se reproduise pas. Mais je ne suis pas sûr de leur avoir donné la sécurité nécessaire. C'est l'un des exemples de la façon dont la fuite peut entraver une enquête.

A une autre occasion, un journaliste a eu accès aux 14 volumes de l'enquête. Il y avait là des informations privilégiées, dont la fuite ferait beaucoup de tort à l'enquête, révélerait des informations pour les responsables de l'exécution et pour les responsables - s'il existe, le commanditaire du double assassinat a reçu des informations privilégiées par voie de presse et, s'il en avait la capacité, il aurait pu effacer les traces.
 
Nos médias sont habitués à ce qu'ils avaient auparavant, lorsque le commissariat spécialisé en homicides (DH) ouvrait les perspectives d'enquête dans des affaires très médiatisées. Brusquement, nous avons voulu réécrire une relation qui était plus ouverte. Je commente dans le livre que je ferais peut-être différemment aujourd'hui, je mettrais un porte-parole pour contrôler les informations transmises. Nous étions déjà dans une société polarisée, alors beaucoup de théories du complot, de fake news, de contre-information ont émergé. La famille en a beaucoup souffert, sans savoir ce qui était vrai ou non. Et les organismes internationaux, de manière très légitime, ont fait pression pour obtenir des réponses, car il existe une perspective selon laquelle le crime est une attaque contre la démocratie. C'est une réponse qui doit encore être donnée par la deuxième phase de l'enquête.
 

Vous déclarez dans le livre que vous croyez en la possibilité de l'existence d'un informateur. Pourquoi parier sur cette hypothèse ?

Ecoutez, d'après l'expérience de la police, c'est une hypothèse. Les auteurs du crime se sont déplacés très lentement, très calmement, tout était réglé au préalable. Ils sont arrivés en retard à l'événement [de la Casa das Pretas]. Ils n'étaient pas pressés d'arriver, ils n'allaient pas plus vite, donc ils avaient des informations privilégiées. Avaient-ils déjà recueilli ces informations à un moment antérieur ou les ont-ils reçues pendant qu'ils se déplaçaient ? Les deux hypothèses sont ouvertes. Cela passe par une vérification de tous ceux qui étaient dans l'hémicycle du conseil municipal, que ce soit dans le cadre du mandat de Marielle ou de celui d'autres conseillers municipaux. Ceci, la deuxième phase de l'enquête va devoir y faire face : il y avait quelqu'un qui donnait des informations privilégiées.

Nous avons essayé de trouver cette personne en écoutant et en interceptant des personnes, sur le cloud, via la levée du secret des antennes, la levée du secret de l'information télématique [technologie utilisée pour capturer la localisation des téléphones mobiles par le biais des données transmises sur le réseau]. Nous avons fait ce travail et trouvé de nombreuses personnes sur la scène du crime, à l'intérieur du Conseil municipal, autour du Conseil municipal, dans la zone de surveillance, dans l'exécution en utilisant un téléphone pirate [numéros enregistrés illégalement auprès d'un numéro d'identification sociale de tiers], et ces informations n'ont mené nulle part. Le Conseil municipal reçoit de nombreuses personnes. Nous avons pris soin, par exemple, de demander tous les registres d'entrées et de sorties d'une période élastique, je ne me souviens plus combien de temps avant et après le crime. J'ai été impressionné par le nombre de personnes qui passent par là. Toute personne qui y entre pourrait donner des informations, c'est donc très complexe, très difficile. Mais, pour la collecte d'informations, il est évident que nous avions cela sur notre radar, parce qu'alors vous obtenez des informations. Par exemple : quels téléphones portables les gens utilisent, à qui ils parlent, puis vous ouvrez les réseaux de connexion et essayez de démêler qui sont les personnes avec qui ils parlent dans le lieu où se construisent un pré et un post-crime.
 
 

Il y a eu une dénonciation au sujet d'un employé du Conseil municipal dont le travail consistait à surveiller chaque pas de Marielle. Vous avez pu l'interroger, non ?

J'ai entendu dire que l'équipe d'enquête réexaminait cette question. C'est une chose sur laquelle nous travaillons, dans cette perspective que quelqu'un au Conseil municipal a transmis des informations. Nous avons entendu cette personne, mais elle a donné un alibi. Nous allons avancer sur cette affaire, qu'elle ait un alibi ou pas. Il est nécessaire d'approfondir cette question. Pendant l'enquête, il y avait un groupe de travail sur ce seul sujet. Il n'était pas le seul. Nous avons enquêté sur d'autres personnes. Mais à un moment donné, nous avons dû nous concentrer, optimiser notre énergie pour traiter les données de la levée du secret télématique. C'était d'un volume dingue. Et l'objectif, à ce moment-là, est devenu d'attraper les auteurs des tirs, les exécuteurs. Parce que lorsque vous les arrêtez, il y a la possibilité de découvrir leur motivation par un interrogatoire, des traces ou lors de la perquisition et de la saisie. Mais cela ne s'est pas produit ; à ce jour, ils n'ont pas dit un mot. Cette recherche d'un informateur a été laissée en suspens. Et je veux croire que l'équipe actuelle va revoir et avancer sur ce point.
 
 
 
(*) Le traducteur de cet entretien suppose qu'il s'agit du commissaire Fábio Cardoso Júnior. 
 
 
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Par ailleurs, le commissaire Giniton Lages a donné une autre interview, à la journaliste Aline Macedo, du journal en ligne O Dia, publiée le 2 mai 2022.
 

Illustration 2
Entretien publié dans l'édition du journal O Dia du 2 mai 2022. © O Dia

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