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Billet de blog 12 mars 2023

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BRÉSIL À Bahia, l'île de Boipeba bientôt dévastée par un prédateur immobilier ? (1/9)

Un projet touristico-immobilier, pharaonique, dans le sud de l'île paradisiaque de Boipeba, à Bahia, vient d'être autorisé par le gouverneur de Bahia, Jerônimo Rodrigues, du PT. Pour une superficie similaire à 1.700 terrains de football, soit 1/5 de l'île, avec des routes, un aérodrome, des pousadas, un pier, 67 lots résidentiels. Désastre à l'horizon.

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Illustration 1
En noir, la zone qui pourrait être occupée par le projet touristique-immobilier. © DR

Le gouvernement de l'Etat de Bahia a autorisé, via la portaria numéro 28063/23 du 7/3/2023 octroyée par l'Institut bahianais de l'environnement et des ressources en eau (Inema), de commencer la construction d'un complexe touristique par la société Mangaba Cultivo de Coco Ltda. Cette entreprise a pour actionnaires le multi-milliardaire José Roberto Marinho, l'un des trois fils du fondateur du géant groupe audiovisuel O Globo, et vice-président du groupe, et Armínio Fraga, de nationalité brésilienne et américaine (USA), économiste et ancien président de la Banque centrale (1999-2003). Fraga, proche de nombreux hommes politiques d'extrême droite, a voté Lula da Silva en octobre 2022, mais cela ne trompe personne.
 
Le projet (PDF 118 pages) touristique et immobilier est situé dans la propriété Fazenda Ponta dos Castelhanos, dans le sud de l'île. Cela représente un cinquième de la surface de l'île. La licence d'installation couvre une superficie similaire à 1.700 terrains de football, avec des infrastructures routières, un aérodrome, des maisons d'hôtes, une jetée, 67 lots résidentiels et deux lots pour des activités sociales. 
L'autorisation de démarrage du projet a été publiée dans le Journal officiel de l'Etat de Bahia, du 8 mars 2023. 
 
 
Ce chantier va se développer dans des zones protégées par la loi fédérale. 

Sur 118 pages, détails du projet Mangaba Cultivo de Coco Ltda / Fazenda Ponta dos Castelhanos (pdf, 2.3 MB) © INEMA / DR


 
Un activiste local, Raimundo Esmeraldino Silva, a déclaré au média ((o))eco que des zones de pêche traditionnelles ont été bloquées, que des cabanes de pêcheurs ont été démolies et que des résidents qui travaillaient dans des fermes ont vu leur emploi menacé afin de "faire avaler le projet". Et celui qui se fait appeler "Siri" a poursuivi :  "Ils [l'entreprise] n'ont jamais planté un cocotier ou un mangabeira [qui donne le fruit mangaba]. Au contraire, ils veulent nous enlever les mangabeiras qui participent de nos revenus et de notre alimentation. Nous avons toujours vécu de l'agriculture, de la pêche. Ils sont en train de détruire notre culture et notre identité ".

Illustration 3
Boipeba © DR

Les analyses effectuées par le ministère public de Bahia (MP-BA) sur l'octroi de licences à "Fazenda Ponta dos Castelhanos" ont déterminé la régularisation du régime foncier des communautés traditionnelles et vérifié les conflits de compétence entre les agences publiques et les impacts sur les mangroves, les sources et les zones réservées aux tortues de mer.
 
Pur marketing pour faire avaler la pillule de la prédation déguisée.
 
Car le nouveau gouverneur de Bahia, Jerônimo Rodrigues (PT), investi le 1er janvier 2023, a maintenu intactes les orientations de l'Inema. Dans un article publié le 23 février 2023* dans ((o))eco, des entités civiles déclarent que "les administrations du parti PT dans l'État de Bahia ont été une école pour la mauvaise gestion environnementale de Bolsonaro et [son ministre de l'environnement] Ricardo Salles".
  
La diplômée en pharmacie Márcia Telles, qui dirige donc à nouveau l'Inema depuis janvier 2023, nommée par le gouverneur Jerônimo Rodrigues, est entrée par concours dans la fonction publique en 2006, et a été la directrice-générale de l'Inema de 2012 - nommée par le gouverneur Jaques Wagner (PT) - jusqu'au 3 décembre 2021.
A cette date, le gouverneur de Bahia, Rui Costa (PT), l'a nommée secrétaire d'Etat à l'environnement (SEMA). Celle qui avait été sa directrice administrative et financière à l'Inema (de 2011 à 2021), Daniela Teixeira Fernandes de Araújo, est devenue directrice de l'Inema le 3 décembre 2021 et en même temps nouvelle cheffe de cabinet de Marcia Telles au SEMA. Précision utile : ces deux femmes sont blanches, dans l'Etat le plus "noir" ou métis de noir (75 % de la population) du Brésil.
 
En décembre 2021, après la nomination de Márcia Telles au poste de secrétaire d'Etat au SEMA, Amanda Santos Silva, l'une des représentantes de la société civile dans l'organisme public bahianais "Conseil de Bahia de l'environnement" (Cepram) avertissait :  « C'est la consolidation d'un recul que nous avons connu dans l'État de Bahia et c'est la confirmation de combien l'agence environnementale est à la merci des intérêts économiques présents dans l'État de Bahia et non de la préservation de l'environnement. Alors qu'elle était directrice de l'Inema, Márcia a signé plusieurs concessions de licences, chevauchant des zones de communautés traditionnelles et des engagements de licences qui affectent des zones importantes pour la protection de l'environnement ».
 
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(*) Extrait de l'article du 23/2/2023
"Ici, c'était l'école du gouvernement Bolsonaro", métaphorise Marcos Rogério Beltrão dos Santos, membre du mouvement écologiste Grande Sertão Veredas, dans la région de Correntina [très loin de Boipeba, à l'extrême ouest de Bahia.] Et rajoute : " c'est même de l'hypocrisie, quand [Jacques] Wagner [le premier gouverneur PT de Bahia, élu en 2006 et réélu en 2010] a assumé la présidence de la Commission de l'environnement du Sénat et a critiqué Bolsonaro et Ricardo Salles. Parce que quand on regarde ce qui s'est passé dans son gouvernement, c'est comme s'il faisait son autocritique. Il a fait la même chose", compare Marcos Rogério.
Avec le gouverneur Rui Costa, du PT, qui lui a succédé dit le leader socio-environnemental. "En 2017, au plus fort du conflit à Correntina, le gouverneur ne nous a pas reçus. Alors que l'agrobusiness semble avoir la clé de son cabinet. Quand le gouverneur arrive, l'agrobusiness est déjà là à l'attendre".
En 2022, Jerônimo a maintenu les portes fermées aux communautés. "Nous n'avons pas pu parler à Jerônimo depuis la période de transition. Alors que le gouvernement Lula est ouvert au dialogue, ici à Bahia, le gouvernement de l'État s'est enfermé. Et il est le premier gouverneur indigène du Brésil", déplore-t-il.
Marcos Rogério Beltrão dos Santos met en avant une lettre écrite par des dizaines de mouvements socio-environnementaux, demandant un dialogue avec le candidat de l'époque et qui a été renouvelée après sa victoire au second tour en octobre 2022. La rencontre n'a eu lieu que le 25 janvier 2023, mais seulement avec le titulaire du Secrétariat de l'environnement (Sema), Eduardo Sodré Martins, sans la présence du gouverneur.
À cette occasion, les ONG et les mouvements socio-environnementaux ont exposé les chiffres honteux des déforestations et des permis non durables délivrés ces dernières années, ont présenté des propositions pour améliorer la gestion environnementale de l'État et ont également demandé la nomination d'une personne technique engagée dans la cause au sein de la présidence principale de l'Inema. 
  
 
LIRE AUSSI, daté du 25 août 2022 :
 
Le déboisement irrégulier, «politique d'État» du gouvernement de Bahia (1/2)

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