La Cour européenne des droits de l'homme sanctionne l'atteinte faite à la Convention européenne des droits de l'homme par la loi sur la protection des sources en soulignant que : « Le droit des journalistes de taire leurs sources n’est pas un simple privilège qui leur serait accordé ou retiré en fonction de la licéité ou de l’illéicité des sources, mais un véritable attribut du droit à l’information. ».
Cette décision confirme la consécration du droit à l'information. Elle était prévisible depuis l'adoption de la loi "sur la protection des sources".
L'alinéa 3 de l'article 2 de la loi sur la liberté de la presse précisant que l'atteinte au secret des sources peut être envisagé "si un impératif prépondérant d'intérêt public le justifie et si les mesures envisagées sont strictement nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi" est ainsi jugé contraire à la Convention, notamment son article 10 sur la liberté d'expression, laquelle ne se limite pas aux journalistes mais bénéficie à tout le monde, y compris les fonctionnaires et les militaires, comme en a déjà jugé Strasbourg.
La France doit donc modifier sa législation sur la liberté de la presse. C'est un droit constitutionnel dans d'autres pays d'Europe. La loi française est gravement insuffisante.
En effet, la Cour européenne des droits de l'homme juge qu'une juridiction nationale confrontée à une jurisprudence européenne « applique directement la Convention et la jurisprudence de la Cour. » (CEDH Affaire Verein gegen Tierfabriken Schweiz c. Suisse 4 octobre 2007 § 55) et que " les Etats conservant dans leur ordre juridique respectif une ou des normes nationales similaires à celles déjà déclarées contraires à la Convention sont tenus de respecter la jurisprudence de la Cour sans attendre d'être attaqués devant elle " (Modinos c. Chypre Requête n°15070/89).
L'Assemblée plénière de la Cour de cassation a adopté et consacré cette jurisprudence européenne en jugeant à son tour que “les Etats adhérents à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, sans attendre d’être attaqués devant elle ni d’avoir modifié leur législation”. (Arrêt N°10.30313)
Il appartient dorénavant aux directeurs de journaux français de s'élever au niveau démocratique que leur confère le droit européen de l'information et que sont en droit d'attendre d'eux légitimement les journalistes et les lecteurs français.
NB : La mise en examen de Christophe Labbé, Olivia Recasens et Jean-Michel Decugis peut apparaître surprenante à l'égard de ces journalistes ayant dénoncé la pratique de la torture dans la police (voir leur livre "Place Beauvau, la face cachée de la police") et que la justice française n'a pas poursuivie malgré la gravité de cette infraction pénale internationale et la campagne de presse qui l'a dénoncée. La torture est un crime contre l'humanité, selon l'article 7 du Statut de Rome, rendu imprescriptible par la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité New York du 26 novembre 1968. La France n'a ni signé ni ratifié cette dernière convention. Le moment n'est-il pas venu de le faire ?