L'unique député RN sortant de la région Auvergne est Jorys Bovet, élu en 2022 dans la 2e circonscription de l'Allier (Montluçon). « Il se saisit régulièrement de faits divers relayés par la fachosphère pour stigmatiser les étrangers, a remarqué Mediapart. En réaction à une vidéo montrant des réfugiés dormant dans les couloirs du métro à Paris, M. Bovet écrit avec sarcasme en août 2023 : "Notre 'chance pour la France'." En décembre 2023, réagissant à l’agression d’une élue Génération.s à Saint-Denis, il commente : "Ou quand le 'bien vivre ensemble' te rencontre." Il est depuis établi que l’agression a été commanditée par un chef d’entreprise. »
Entre juin 2023 et avril 2024, j'ai relevé pas moins de 12 posts sur son compte X (ex-Twitter) dans lesquels M. Bovet utilise l'expression « une chance pour la France », laquelle fait partie de « la sémantique des groupuscules d'extrême droite pour qualifier les immigré·es », selon le compte L'Extincteur. Ce compte vient d'exhumer un autre tweet de M. Bovet, publié en avril 2022, dans lequel il exprimait le souhait que les entreprises françaises puissent continuer à être présentes en Russie, en dépit de l'invasion en Ukraine. Depuis décembre 2022, il était membre du groupe d'amitié France-Russie à l'Assemblée nationale.
Dans un billet récent, j'ai par ailleurs remarqué que M. Bovet s'est affiché début 2023 aux côtés de deux militant·es clermontois·es de la Cocarde étudiante : ce syndicat, qui ne dédaigne pas recourir à la violence, a été cofondé par un candidat RN pro-russe investi dans le Cher et dirigé jusqu'en 2022 par un proche collaborateur de Jordan Bardella. En mai dernier, M. Bovet a dénigré des ateliers organisés au sein d'un lycée du département de l'Allier dans le cadre de la journée internationale de lutte contre les LGBTQIAphobies. Il ne me paraît pas excessif de considérer que ce post présentait un caractère homophobe, lesbophobe et transphobe. Je rappelle aussi que M. Bovet s'est abstenu à trois reprises sur la constitutionnalisation de l'IVG : le 24 novembre 2022 et le 30 janvier 2024 à l'Assemblée nationale, le 4 mars 2024 au Congrès.
Non, il n'y a pas "2/3 brebis galeuses" au Rassemblement national comme le répète Jordan Bardella. Selon cette carte très documentée, ils sont 125 !
— Nassira El Moaddem (@NassiraELM) July 3, 2024
Partagez-la, elle dit bien que le RN est le seul parti à attirer ces personnes. Le racisme est son système.https://t.co/bjMjLSFQPZ
Isabelle Dupré, la candidate RN de la 2e circonscription du Puy-de-Dôme (Riom-Combrailles), vient d'être épinglée par le journal La Montagne pour des posts à caractère raciste, xénophobe et sexiste qu'elle a partagés ces dernières années sur les réseaux sociaux. Deux exemples pendant le confinement du printemps 2020 : « Ce virus est bien chinois : on est tous "cantonais" à la maison et on "riz jaune" » et « "Je suis musulmane. Si je n'habite pas à côté d'un magasin halal, ai-je le droit d'aller plus loin ?" Absolument ! Tu peux même traverser la Méditerranée si tu veux ! » Mme Dupré a promis au journaliste d' « arrêter l'humour raciste », dans le cas où elle serait élue. Le lendemain de la parution de l'article, elle l'a accusé de l'avoir diffamée et d'avoir porté atteinte à sa vie privée. La candidate, qui méconnaît visiblement la notion d'intérêt public, a finalement pris la décision de fermer son compte Facebook.
"Si je suis élue, j'arrête l'humour raciste" : les posts embarrassants d'une candidate RN du Puy-de-Dôme
— La Montagne (@lamontagne_fr) July 3, 2024
▶️ https://t.co/rfHCtgW0jG pic.twitter.com/rGEIwC1GRz
En Auvergne aussi, la plupart des candidat·es RN sont invisibles. Dans l'Allier, Jorys Bovet s'est révélé incapable de venir défendre son bilan – il est vrai famélique (0 rapport parlementaire, 0 proposition de loi) – sur le plateau de France 3 Auvergne ; la candidate dans la 1ère circonscription (Moulins), qui a reçu le soutien de Marion Maréchal (son suppléant, issu de Reconquête !, avait participé à sa campagne européenne), vit paraît-il depuis dix ans dans le département, mais elle y est inconnue et n'accepte de répondre que par mail aux journalistes de la presse locale [1] ; dans la circonscription de Vichy, le candidat est un énigmatique diplomate parachuté [2], dont le visage n'apparaît ni sur sa profession de foi, ni sur les panneaux à l'entrée des bureaux de vote (puisqu'il n'y a pas collé d'affiches). Quant à la candidate de la 3e circonscription du Puy-de-Dôme (Clermont-Montagne), Nadine Pers, elle a laissé son suppléant la représenter lors du récent débat télévisé, et aucune confrontation n'a eu lieu dans la 1ère circonscription du Cantal : « Moi j’arrive, je ne suis pas à l’intérieur des dossiers comme l’est [Vincent Descœur], je ne souhaite donc pas débattre avec lui », n'a pas caché Dorothée Gallais.
Le délégué départemental du Puy-de-Dôme, Louis Clément, est l'un des rares à accepter l'échange avec ses adversaires. Dans la 1ère circonscription du Puy-de-Dôme (Clermont-Cournon), il vient de mener sa quatrième campagne en trois ans pour le RN, mais il lui a échappé que la députée sortante Marianne Maximi a siégé dans l'opposition, il ne connaît qu'approximativement le programme de son parti (voir ci-dessous), explique d'une étrange façon l'absence des candidat·es RN sur les antennes locales (à partir de la 8e minute du dernier débat sur France 3)... et ne dispose visiblement pas de fournisseurs fiables.
Ce candidat du RN se présente pour être député de la 1ère circonscription du Puy-de-Dôme...
— Marianne Maximi (@MarianneMaximi) June 27, 2024
Il ne connaît pas son programme, il ne connaît pas la circonscription.
Quand on ne parle pas d'immigration, il n'a plus rien à dire. pic.twitter.com/WPNgrq35qj
Les deux candidats les plus aguerris dans la région sont sans doute le « techno » Alexandre Heuzey, parachuté face à Laurent Wauquiez dans la 1ère circonscription de la Haute-Loire, et son collègue de la 2e circonscription du Cantal, Gilles Lacroix, qui fut un adjoint de la maire FN puis MNR de Vitrolles Catherine Mégret à la fin des années 1990 (lire ici, là et là), se présenta en 2001 dans une autre commune des Bouches-du-Rhône, avant de venir s'installer dans le Cantal. Le premier comme le second ont accepté l'invitation de France 3 et France Bleu Pays d'Auvergne, respectivement avant et après le 1er tour.
Dans les départements voisins, la « Carte de la honte » et d'autres médias ont identifié les candidat·es :
- de la 3e circonscription du Cher : Pierre Gentillet, le cofondateur de la Cocarde étudiante déjà mentionné plus haut, et sa suppléante Julie Apricena ;
- de la 2e circonscription de la Nièvre : Julien Guibert (lire ici et là) ;
- de la 2e circonscription de la Saône-et-Loire : Olivier Damien ;
- des 4e, 5e et 6e circonscriptions de la Loire : respectivement Gerbert Rambaud, Michel Lucas et Grégoire Granger (voir aussi la prestation télévisée de Marie Simon, candidate dans la 1ère circonscription) ;
- de la 2e circonscription de l'Ardèche : Thierry Dussud ;
- des 1ère et 2e circonscriptions de la Corrèze : respectivement Maïtey Pouget et Valéry Elophe ;
- de la Lozère : Luc-Etienne Gousseau.
Ce dimanche, six candidat·es défendent le programme du Nouveau Front Populaire : iels s'appellent Yannick Monnet (0301, Moulins), Louise Héritier (0302, Montluçon), Marianne Maximi (6301, Clermont-Cournon), Christine Pirès Beaune (6302, Riom-Combrailles), Nicolas Bonnet (6303, Clermont-Montagne) et André Chassaigne (6305, Thiers-Ambert). Et dans les six autres circonscriptions (5 duels LR-RN et 1 duel RN-Ensemble), pas une voix ne doit bien sûr aller aux candidat·es de l'extrême droite.
[1] En 2022, la candidate RN habitait dans les Deux-Sèvres et n'avait pas mis les pieds dans la 1ère circonscription de l'Allier pendant la campagne : « Je ne peux pas me déplacer, pour des problèmes de dos, [mais] je connais bien l'Allier, mon compagnon vit à Bourbon-l'Archambault », avait alors déclaré à la presse locale Marie Cibert, qui avait raté le 2nd tour à 20 voix près.
[2] Réactualisation du 5.07.2024 à 23h55 : le candidat RN de la 3e circonscription de l'Allier, Rémy Queney, rejoint la « Carte de la honte », suite à l'enquête que publie ce soir Mediapart à son sujet (elle peut être lue en accès libre tout le week-end). Titre de l'article : « Casseroles et sympathies royalistes : le détonnant diplomate candidat du RN à Vichy. » Il y a deux jours, M. Queney se félicitait sur son compte X que Le Canard enchaîné le présente comme l'un des deux hauts fonctionnaires du Quai d'Orsay à avoir fait « leur coming out RN ».