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Je ne suis qu'un rêveur...

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Billet de blog 18 février 2022

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Plumes de traverse

Bien au-delà de toute controverse, l’écriture reste avant tout un acte délibérément solitaire. Et si, plutôt que de se conforter dans cette bulle intimiste, l’on essayait de s’échapper de ce cercle vertueux pour de nouvelles tessitures poétiques. Porté par les vents du grand large, duo d’improvisation entre quelqu’un d’ordinaire et un incorrigible rêveur.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
© Vent d'Autan

A la poursuite d’un temps qui n’a plus cours et qui n’a plus lieu, l’imposant vaisseau aux formes effilées, surfe sans encombre le long de l’interminable ruban d’asphalte, engloutissant sur son passage la cavalcade de bornes kilométriques. A son bord, l’équipage, voyageur des grands espaces, entame son retour à l’aube des lumières. Immersion en vase clos avant de prendre son envol vers d’autres contrées aux mystérieuses origines. Dans son onirique extravagance, le jour amorce sa filandreuse reconquête, écorchant l’enveloppe de la nuit. Happée dans le flux du mouvement, l'imposante galerie émerge du carcan de sa zone de confort.

Semblable au feulement des grands fauves assoupis dans la chaleur torride de la savane, le moteur ronronne sans peine à son régime de croisière. La moite douceur de l’habitacle contraste avec le froid polaire qui cristallise les panoramas blanchis en paysages transis. Faisant fi des turbulences et autres caprices d’une météo hasardeuse, le vaisseau glisse vers ce point de fuite au bout de la ligne d’horizon. Les yeux rivés sur le multiplex de l’écran de contrôle, le pilote chevronné maintient le cap, sans relâche. Il emprunte cette ligne avec un plaisir toujours renouvelé. Cet engouement semble partagé. Ground control to Major Tom….

Illustration 2
© Edmey

A l’arrière de la vitre embuée, elle contemple ces larges trouées qui défilent sous la splendeur de ses yeux embrumés, emprunts de nostalgie, laissant derrière elle cette chaîne montagneuse aux mille pics vertigineux. Vue imprenable en cinémascope sur les sommets enneigés élancés à la conquête du ciel. De temps à autre, elle regarde en arrière, jusqu’à les voir s’éloigner dans le lointain, puis peu à peu s’effacer, dissous dans la nébuleuse du néant. Emportée par cette part d’imaginaire, capturant l’instantané éphémère. Clichés empruntés, recueils de témoignages momentanés. Moisson de passages de vie.


Ce matin-là, le paysage offre un décor d’une exceptionnelle beauté. Déboussolés, on ne peut s’empêcher de dépeindre, avec nos mots, les charmes de cette toile si inédite. Un mystérieux chamboulement champêtre embrouille la folle nature d’étranges étoffes figées
et offre un méli-mélo tissé d’étoiles pétrifiées boutonnées au poétique, à l’imaginaire et aux chimères. Au sol, l’humus, les herbes et les branchages dessinent des volutes brumales festonnées à ce cocon de soie ébaubi et les pensées engourdies brodent délicatement le
tulle enlaçant l’âme, le cœur et l’esprit de filaments torsadés. Les guipures nids d’abeilles,cristallines et blanchâtres, les silences mystérieux figés des capes et des paillettes, les pensées transies du givre et du frimas hivernal, semblent murer tous les mots dans cet écrin de mousseline.

Illustration 3
© Edmey

Chacun des paysages traversés a cette résonance si particulière, ce supplément d’âme qui, entre équilibre et agitation, nous fait sentir et ressentir cette sensibilité que l’on ne saurait faire taire, faisant vibrer en chacun de nous les cordes sensibles de notre propre palette émotionnelle. Lointains échos de ces insignifiants qui, en coulisses, impactent les affects de notre boussole intérieure. Vibrations à l’unisson, indissociables bouffées d’air de nos humeurs grisâtres. Autant se laisser submerger par cette envie, cet élan vital dont l’étendue des surprises nous plonge dans d’immenses sentiments de plénitude. De l’aplomb de la ligne de crête des cimes jusqu’au bord de grève de la belle bleue, la grande traversée de l’hexagone à travers la ruralité des territoires. Invitation à découvrir les coins les plus reculés de contrées parcourues au gré des chemins de traverse. Chaque cliché étant le reflet d’une intime part de soi, voile de cette pudeur manifeste.

 Voyager c’est partir. Partir c’est s’éclipser. S’abandonner au temps. Laisser dans son sillage une part de soi, un pan de soie flottant dans le tourbillon des vents, une trace d’écume que nul ne saurait apprivoiser, impossible à décrire. Infime petit gravier  semé sur le sentier de ses propres échappées. Cette intime partie d’invisible qui reste en place dans l’attente d’un prochain retour. Et cette petite main qui s’agite en guise d’au revoir, le cœur étrillé par cette pusillanime nostalgie. De petits riens qui bout à bout font et défont les chemins pour affronter le mouvement de la vie. A quoi bon l’itinéraire ? Et si l’on écrivait à la plume cet invisible là, cette flamme qui scintille et qui illumine le prochain bouleversement qui pointe à l’horizon.

Illustration 4
© Vent d'Autan

Voyageur impassible, toujours en transit, à quai entre deux trains. De passage entre les nuages, peut-être bien ailleurs, encore plus loin, à ce point de fugue que nous portons tous en nous. Quelque part entre habituelle routine et évagations chimériques. En ligne de mire le seul lieu qui soit à la rencontre de ces voyageurs improbables, insondable déferlante des flots lointains. Tous ces allers- retours propulsés au gré de l’intimité frémissante. Autant de rires que de larmes. Infimes petits plaisirs de la douceur de vivre. Esprit libre en guise de conquêtes.

Voyager c’est s’évader. S’évader c’est se perdre. S’engouffrer dans la magie des songes et des écrits, entrouvrir d’autres planètes des possibles. Endosser ce manteau blanc qui nous colle à la peau et nous tient chaud. C’est donner la vie aux choses, aux êtres par l’alchimie de la plume.C’est emmener l’esprit vers d’autres horizons plus près des anges que des angoisses. Explorer d’autres sentiers que les chemins des ombres et chercher dans les palettes de couleurs qui s’offrent à nous un coup de chance, une lumière, un souffle, une bouffée d’espoir pour enchanter la vie et se passionner pour la légèreté et la fragilité de sa féérie.

Illustration 5
© Edmey

Surement happés par la respiration des vents et l'appel inaltérable de la mer bergère, toujours en recherche d’étoiles filantes à partager dans la nuit de la poésie, nos pages blanches constellées de scintillements interstellaires, de mystères semeurs d’espoir en route vers le firmament de la voie lactée. Ce tournis incessant du voyage nous emporte vers le vertige de l’infini, itinérance de cette poésie qu’est la vie.

Duetto poétique sous la plume d' Edmey et de Vent d'Autan.

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