Philippe Halimi, professeur de radiologie, qui fut collègue et ami de Jean-Louis Mégnien, a décrit le parcours de son ami comme une "lente descente aux enfers orchestrée". Philippe Halimi, fondateur de "l'association des amis de Jean-Louis Mégnien" a témoigné que le martyre qui a mené Jean-Louis Mégnien à se suicider a débuté peu après sa nomination en tant que professeur des universités en 2011. A l'époque, bien que pressenti par tous pour succéder au professeur Alain Simon, son chef de service, Jean-Louis Mégnien s'est vu rejeté par le professeur Alain Simon. Cela aurait pu en rester là mais le professeur Mégnien a été mis en quarantaine. Ses moyens en consultations et en accès au secrétariat ont été réduits au point que son travail devenait impossible. Jusqu'au moment où le professeur Simon a considéré que le professeur Mégnien devait quitter le service. Le malheur, dans cette histoire, est qu'il y a eu conjonction de deux perversités: d'un côté, la maltraitance d'un chef de service, et de l’autre, l'appui des autorités médico-administratives locales. Un des maltraitants identifié par le professeur Halimi était à l’époque président de la CME (Commission Médicale d'Etablissement) de l'HEGP, qui pouvait ainsi peser de tout son poids auprès d’Anne Costa, la directrice générale de l’hôpital, pour détruire le professeur Mégnien qui voyait les portes se fermer les unes derrière les autres.
Un collègue chirurgien du professeur Mégnien a alerté la direction de l'HEGP fin novembre 2014, sur le risque suicidaire de son confrère: "Le Pr Mégnien a clairement exprimé "son envie d’en finir"; il "s'est renseigné", m’a-t-il annoncé ce matin, en pleurs! Seul son amour pour sa femme et ses 5 enfants l'ont empêché de commettre l'irréparable. Prendre une décision, aujourd'hui, qui irait contre son souhait ou ses intérêts risquerait de le pousser au fond du précipice au bord duquel il se trouve actuellement."
Sa seule issue était de s'arrêter de travailler pour grave dépression. Le professeur Halimi a témoigné de la lucidité du professeur Mégnien sur l’impasse dans laquelle il se trouvait. Le professeur Mégnien l’a d’ailleurs écrit, fin janvier, peu de temps avant son arrêt maladie, dans la conclusion terrible d'un mail adressé à un membre de la CME : 'Mais que dois-je faire demain? M'occuper de mes patients, contacter mon avocat ou me jeter par la fenêtre? Je vous le demande…"
Le professeur Halimi décrit ainsi les conditions "sordides" du retour au travail de son collègue, le lundi 14 décembre: "La serrure de son bureau avait été changée, ses patients tous adressés à d'autres médecins, et ordre avait été donné aux secrétaires du 7ème étage de ne lui transmettre aucune information sur le fonctionnement du service."
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Dans les jours qui suivent ce suicide, l'épouse du professeur Mégnien dépose une plainte auprès du parquet de Paris, qui ouvre alors une enquête préliminaire le 30 décembre 2015 pour "harcèlement moral", puis une information judiciaire le 19 février 2016.
A la fin du mois de juillet 2021, Anne Costa, l'ancienne directrice de l'hôpital Georges-Pompidou et trois responsables médicaux, le professeur Alain Simon, le professeur Éric Thervet et le professeur Michel Desnos, ont été renvoyés en correctionnelle.
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Affaire Jean-Louis Mégnien : l’AP-HP mise en examen pour "harcèlement moral"
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A propos d'un suicide au travail.
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