YVES FAUCOUP (avatar)

YVES FAUCOUP

Chroniqueur social

Abonné·e de Mediapart

885 Billets

2 Éditions

Billet de blog 3 février 2017

YVES FAUCOUP (avatar)

YVES FAUCOUP

Chroniqueur social

Abonné·e de Mediapart

Et les emplois semi-fictifs des petits marquis!

Outre les emplois fictifs, il existe dans le secteur public des emplois de conseillers, pour une activité parfois sans aucun lien avec des montants de rémunération exorbitants. La transparence doit aller plus loin : tous ces salaires, indemnités et avantages doivent être rendus publics.

YVES FAUCOUP (avatar)

YVES FAUCOUP

Chroniqueur social

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

On sait qu'il y a emplois fictifs et emplois fictifs : par exemple ceux de la mairie de Paris sous Chirac ou ceux des attachés parlementaires européens du Front National. Il s'agit d'alimenter en militants le parti en détournant ainsi les fonds publics. Ce sont moins des emplois fictifs que des financements illégalement détournés. Mais il y a aussi ceux qui sont carrément bidon, comme cela semble être le cas de l'attachée parlementaire de François Fillon, ci-devant épouse de l'homme politique qui devait devenir homme d'État.

Des leaders donnant des leçons en permanence ("Smic trop élevé pour la compétitivité des entreprises", "RSA abusivement attribués à des assistés qui se complaisent dans l'assistanat") ont une telle idée d'eux-mêmes qu'ils estiment que leurs revenus officiels sont insuffisants pour assurer leur train de vie. Ils sont torturés à l'idée qu'un footeux gagne tellement plus qu'eux et, le pire, les quelques journalistes qui tiennent le haut du pavé, leur font parfois la morale à propos de leurs petites magouilles, poussant parfois à l'hallali, sans vergogne, quand ils perçoivent eux-mêmes deux ou trois fois ce que gagne l'homme politique. Ils enragent.

Mais le scandale ne réside pas que dans les emplois fictifs des assistants parlementaires. On ne peut passer sous silence les salaires bidon ou semi-bidons alloués, dans les ministères ou dans des collectivités territoriales, à des conseillers de toute sorte, des petits marquis qui se la pètent, dont quelques fois l'incompétence est notoire ou l'inactivité manifeste. Ils sont justement sur des rémunérations proches de celle mise en exergue par l'affaire du Fillongate : 7000 euros. Sans parler des voitures ou logements de fonction, ainsi que des frais divers qu'ils empochent facilement, puisqu'en gros ils en décident, au grand dam de fonctionnaires de base, honnêtes, écœurés par ces pratiques auxquelles ils assistent impuissants. Et si, contrairement à Mme Fillon, il leur arrive de produire un travail, le niveau de leurs indemnisations est trop souvent indécent.

Les rémunérations des fonctionnaires, y compris gradés, répondent à des grilles indiciaires connues, sur lesquelles il n'est guère possible de tricher. D'ailleurs, un agent d'une collectivité qui percevrait un euro de trop, le contrôle de légalité (la Préfecture) y mettrait aussitôt le holà. Mais les emplois pour les petits copains, ne pouvant être recrutés comme fonctionnaires, recrutés donc comme contractuels, ne sont pas rares, et à des niveaux de salaires dignes de Pénélope. Sans que cela ne soit en aucune façon justifié. Il n'est pas rare que des fonctionnaires des Préfectures s'épanchent en privé, sur ces abus auxquels il est difficile d'y mettre fin sans engager des tensions politiques que les autorités de l'État préfèrent éviter.

Illustration 1

L'Escamoteur, ou Le Jongleur, ou Le Bouffon, de Jérôme Bosch, mis en scène par des jeunes gens aux Pays-Bas [Musée Art Center Bosch de Bois-le-Duc, Photo YF]

L'opinion publique est de plus en plus scandalisée par les abus, les inégalités flagrantes. Les super-salaires des PDG du CAC40, chacun mesure bien que ce n'est pas simple de s'y attaquer. Mais les revenus des élus, représentants la Nation, chargés d'une mission particulière, nécessitant un engagement démocratique et républicain, aux frais des contribuables, là il semble qu'on peut agir.

C'est pourquoi, je pense que la loi de 2013 sur la transparence doit aller plus loin et prévoir l'affichage des rémunérations, indemnités, et avantages de tous les agents du public qui ne sont pas recrutés sur des grilles indiciaires officielles. Par ailleurs, il est souhaitable que les Chambres régionales des comptes (la "Cour des comptes" en province) exercent en amont un contrôle sur les dépenses publiques, en particulier lorsqu'elles concernent le train de vie des élus et de leurs conseillers.

Il ne s'agit nullement de propager l'idée que tous les élus trichent. Beaucoup sont très honnêtes et assument leurs fonctions de façon particulièrement désintéressée, s'investissant énormément alors même qu'ils sont très peu indemnisés. Mais malheureusement, ce n'est pas le cas de tous, et les dérapages des uns, leur immoralité, portent préjudice à l'ensemble et entretiennent le "tous pourris" et l'abstentionnisme. Ce qui est la mort de la Démocratie et de la République.

_____

(1) A l'occasion du Fillongate, on parle beaucoup de l'indemnité qu'un député reçoit pour rémunérer des assistants : soit 9561 € (certains rémunèrent 4 ou 5 assistants). Ce qu'on n'a pas dit c'est que le député, s'il gère lui-même le recrutement de ses assistants, perçoit un complément d'indemnité correspondant à la moitié des 9561 € pour couvrir les cotisations patronales. Il peut aussi demander à un service de l'Assemblée de tout gérer. Il y a fort à craindre que la gestion directe facilite les magouilles, mais Fillon n'est pas le seul à procéder ainsi. On ne nous a pas dit non plus si FF demandait à l'AN de prendre en charge ses cotisations patronales.

Par ailleurs, bien sûr, le député perçoit une indemnité parlementaire (de base, de fonction et de résidence) de 7100,15 € bruts et 5189,27 € nets. S'il cumule avec une fonction d'élu local, le total de ses indemnités ne peut dépasser 8272,02 € (beaucoup d'infos circulent sur les réseaux sociaux négligeant la prise en compte cet écrêtement).

Mais il y a une troisième indemnité, de frais de mandat, qui est passée à la trappe dans le débat public, alors qu'il constitue le plus souvent un réel complément de rémunération : 6412 € bruts mensuels non imposable, pour prendre en charge des dépenses liées au mandat. Alors même que des frais sont pris en charge : les frais de transport (SNCF, avion, jusqu'à 80 déplacements province-Paris), un bureau au Palais Bourbon… Sans fourniture de justificatifs. Il est clair que cela aussi devrait être réformé : justifier au centime près toute dépense. Il est à espérer que les députés les plus honnêtes gardent bien traces de toutes leurs dépenses.

Petites chroniques du Fillongate

"Les journalistes, ras le bol, tous de gauche" !

Illustration 2

C'est ce que dit cette femme venant assister au meeting de François Fillon dimanche au Zénith. Tous de gauche les journalistes ? Yves Calvi, François Lenglet, Jean-Michel Aphatie, Yves Thréard, Ivan Rioufol, Catherine Nay, Christophe Barbier, Guillaume Roquette, Elisabeth Lévy, Nicolas Beytout, Éric Brunet, J.P. Elkabach, Mougeotte, Zemmour, Pujadas, Pernaut, FOG, d'Orcival, de Kerdrel, Tillinac, etc...etc... Ces journalistes qui tiennent le haut du pavé : tous de gauche ? Alors que certains, très influents, sont ouvertement de droite-extrême sinon d'extrême-droite.

[2 février]

Les charognards
Marine Le Pen a annoncé ces jours-ci qu'elle exigera deux ans de présence et de travail sur le sol français pour avoir droit à la Sécurité sociale (jusqu'alors, depuis 2012, son programme exigeait un an de présence). François Fillon, tout à l'heure à Charleville-Mézières, a déclaré que pour avoir droit aux "prestations sociales" il faudra deux ans sur le territoire, sans plus d'explications, passant vite au sujet suivant. Son programme sur son site de campagne dit qu'en ce domaine il y aura une réforme, sans autre précision. Sachant que pour plusieurs prestations le délai est déjà de cinq ans (le RSA par exemple) ou même dix ans (l'ASPA minimum vieillesse), il semble évident que Fillon durcit le ton et vise, sinon l'assurance maladie, du moins les allocations familiales. Manifestement, l'extrême-droite et la droite-extrême se rapprochent inexorablement.

[2 février]

Un quatrième emploi fictif

On a eu tort de n'évoquer que les emplois fictifs de Pénélope Fillon et des deux enfants Fillon. Il y en a un quatrième ! En effet, François Fillon a été pendant 5 ans payé comme premier ministre, mais il n'occupait pas la fonction. Lors de tous ces discours, que ce soit au Zénith dimanche ou toute à l'heure à Charleville-Mézières (j'ai suivi les deux en direct), il ne dit rien de ce qu'il a fait, mais ne cesse de répéter "je veux" tout changer, se plaignant que sur tous les sujets, rien n'ait été fait jusqu'alors, et depuis longtemps. C'est étonnant combien cette famille est fantôme, tout en étant sonnante et... trébuchante.

[2 février]

Affaire Fillon : scoop

Illustration 3

J'ai un scoop : Madame Fillon ignorait que son mari, pour arrondir ses fins de mois, l'avait déclarée comme assistante parlementaire, et, ce, depuis longtemps. Bon, ce n'est qu'une hypothèse, mais je m'étonne qu'elle n'ait pas été émise pour le moment. En effet, on constate que Pénélope Fillon ne s'exprime pas : or elle est en principe la première concernée (elle n'a parlé, semble-t-il, qu'aux enquêteurs). Contrairement à ce que son mari a dit, ce n'est pas elle qui est visée : on est prêt à lui donner le bon Dieu sans confession. Par ailleurs, elle n'a cessé de dire qu'elle ne secondait pas son mari. Et l'on apprend par "Envoyé spécial" [ce soir] qu'elle avait déclaré à un journal anglais en 2007 : "je n'ai jamais été son assistante, ou quoi que ce soit de ce genre-là". Elle est peut-être sincère. Car si elle était vraiment son assistante avec un tel salaire et qu'elle le savait, faire une telle déclaration est ridicule, elle pouvait tout à fait éviter d'en parler. Ou au contraire, il aurait été plus intelligent juste d'admettre qu'elle l'aidait un peu. Au cas où, car cette affaire, même si elle a duré si longtemps, risquait à tout moment d'éclater.
Mais faut vous dire, Monsieur, que chez ces gens-là, on ne cause pas. On compte. Et, surtout, on est persuadé que les secrets sont toujours bien gardés et que, dans le cas contraire, on bénéficiera en général d'une totale impunité. En général…

[2 février]

"Les puissants ne sont plus protégés" en France

Suite à cette déclaration d'un porte-parole de F. Fillon, Philippe Vigier :

Il s'est rétracté depuis, mais tout de même ce porte-parole de François Fillon avait regretté que les puissants ne soient plus protégés dans ce pays, sous-entendant donc que c'était le cas jusqu'alors. Mais ils font exprès d'être si nuls en matière de com' ?

[1er février]

Ces petites chroniques ont été publiées sur mon compte Facebook aux dates indiquées

Billet n° 304 

Contact : yves.faucoup.mediapart@sfr.fr

Lien avec ma page Facebook

Tweeter : @YvesFaucoup

  [Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Voir présentation dans billet n°100. L’ensemble des billets est consultable en cliquant sur le nom du blog, en titre ou ici : Social en question. Par ailleurs, tous les articles sont recensés, avec sommaires, dans le billet n°200. Le billet n°300 explique l'esprit qui anime la tenue de ce blog, les commentaires qu'il suscite et les règles que je me suis fixées.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.