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Billet de blog 15 déc. 2022

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Tendre l’autre joue

En lisant le titre de l’interview d’Adrien Quatennens dans la Voix du Nord, j’ai pensé que moi aussi je m’étais tu pendant trois mois, depuis son premier et dernier communiqué. Mais voilà que ça recommence, alors c’est plus fort que moi, faut que je vous en cause encore.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je suis particulièrement affligée, car j’ai battu la campagne pour la Nupes et la France insoumise durant de longues semaines lors des dernières élections législatives et que cela fait des années que je tente de relayer les luttes, d’y participer, de porter la parole que je peux, à ma petite échelle. Je ne pensais pas que ça tournerait comme ça et qu’on se déchirerait toutes et tous à propos des accusations de violences conjugales et de leur degré de gravité.

Je n’avais pas prévu non plus que dans un tel cas, le présumé innocent, mais finalement coupable puisqu’autoproclamé et finalement désigné ainsi par la justice, s’évertuerait à minimiser les faits, puis in fine à se victimiser. J’ai lu son communiqué de septembre, la tribune de soutien publiée par des « féministes pas intégristes » peu après sur Mediapart et sur les réseaux, puis le communiqué à l’AFP de la femme de Quatennens (à la suite de celui de son avocate minimisant les faits) à propos des années de violences et de crises, et plus récemment, l’interview de Quatennens dans la Voix du Nord, l’entretien avec Bruce Toussaint sur BFM, et vu passer les différentes prises de position de ses camarades sans m’y attarder vraiment. J’avais essayé de presque oublier. J’avais tenté de croire à une prise conscience de sa part, mais rien n’est venu.

À chaque fois que Quatennens tente de se justifier, il s’enfonce et lorsqu’il reconnaît sa gifle, il est incapable d’aller plus loin. Quelques mois de thérapie auraient réglé le problème ? Dans ses dernières prises de parole, on ne peut que constater qu’il n’en est rien. Genre, le mec se barre deux mois de la baraque et quand il revient, il est chez lui, mais ô scandale, il doit sonner à la porte et se rendre seul avec sa fille aux évènements familiaux, en père célibataire !

Et de continuer à dénoncer ce qu’il ne comprend toujours pas : « Par exemple, quelques jours seulement après avoir porté plainte contre moi pour "harcèlement", elle s’en retourne au commissariat pour déposer une énième main courante pour se plaindre que j’ai quitté le domicile conjugal ! » Une énième main courante ? Et comme s’il ne savait pas que l’abandon de domicile conjugal compte dans toutes les procédures de divorce. Et du coup, il se passe tout ça, mais il est étonné quand, une nouvelle fois, elle demande le divorce. Et la thérapie, elle sert à quoi ?

Adrien Quatennens utilise même les lettres des femmes qui lui écrivent pour se plaindre de la lenteur de leur dossier comparée au traitement du sien. Il continuera, comme il le fait depuis toujours, à venir en aide à ces femmes et à leurs familles, qui subissent des blessures atroces constatées par des médecins légistes (oui, comme dans tous les cas de violences conjugales donnant lieu à plainte, c’est bien un légiste qui œuvre !). J’ai aussi connu ce genre : c’est quoi une gifle à côté de toutes ces souffrances abominables que subissent les femmes que j’écoute, que je comprends, que je défends ?

Il ne fait pas carrière, mais : « La sanction contre moi est déjà lourde et sans précédent : j’étais coordinateur et donc numéro 2 de La France Insoumise. Je ne le suis plus. J’étais son principal porte-parole. Je ne le suis plus.[…] J’ai reconnu une faute et j’ai été sanctionné par la justice pour celle-ci. N’est-ce pas suffisant ? Je ne souhaite pareille épreuve à personne. » Personnellement, je ne souhaite à aucune femme de se prendre une gifle par son mec, et si la justice lui a infligé quatre mois de prison avec sursis, 2000 € de dommages et intérêts et 1500 pour les dépens, ce n’est certainement pas par hasard. On peut reconnaître une « faute », être sanctionné par la justice, et n’avoir toujours pas compris le fond du problème. D’abord à titre personnel, puis au titre du personnage public défendant des causes, dont la croyance de la parole des femmes subissant des violences.

Au titre de sa parole publique, et quitte à se reconstruire, à tout refaire, comme il dit, il aurait été beaucoup plus respectueux envers toutes celles et ceux qui se sont démenés aux côtés de la France insoumise de démissionner plutôt que d’affirmer : « Je respecterai la décision collective du groupe. Mais la mienne m’appartient et elle est prise : j’ai payé bien assez cher sur tous les plans. Je ne céderai pas. » Et elle, sa femme, et nous, les gens, on a payé quoi comme tarif avec ses conneries et ses dénis ? On va se les traîner combien de temps dans nos luttes pour un autre monde ? Je me demande aussi comment se fait-il que depuis trois mois, Lahouaria Addouche, sa suppléante ne l’ait pas remplacé.

Continuer à palabrer sur son triste sort, c’est tendre l’autre joue pour que la médiatisation se poursuive. Pour moi, soutenir Quatennens serait une véritable indécence envers toutes les femmes qui subissent les violences d’hommes qui n’ont rien compris au pouvoir de cette saloperie de patriarcat. Cela serait, là aussi, tendre l’autre joue et je ne leur donnerai pas ce plaisir ni aux « féministes pas intégristes » qui accusent celles qui sont d’un autre avis de véhiculer « des idées des plus réactionnaires en utilisant des méthodes s’apparentant à celles du Maccarthysme, voire de l’Inquisition, à la justice expéditive des épisodes les plus sombres de l’Histoire de l’Humanité […] ». Ben voyons, rien que ça !

Allez, dormez bien !

Illustration 1
Rennes, mars 2020

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