On constatera ces derniers temps en France, que l’idée d'un président de la République musulman fait mouche. D’aucun en on même fait leur beurre (hilarant jeu de mot). Disons-le tout net, le livre dont je souhaite parler date de bien avant que le sujet soit galvauder à coup de becs furibards par un mielleux obsédé sexuel. Je voudrais partager avec vous maintenant une émotion face à un vrai livre honnête, sur un sujet sérieux, totalement réaliste et ou l’auteur a eu la clairvoyance de s’interroger avec un regard et un point de vue. Rien qu’à voir le titre, on comprend qu’il accepte de « prêcher pour sa paroisse », et il serait un peu ridicule de la part des chrétiens de critiquer la démarche, si commune, que l’on a fait une expression du langage commun valable aussi pour des laïcs.
Abd Al Malik, est un homme aux multiples talents dont la carrière à succès de rappeur, réalisateur, compositeur, écrivain est la preuve tangible qu’il communique des messages et un talent que les français aiment entendre. Il est donc français, noir et probablement musulman. Il d’ailleurs odieux de préciser cela mais comme j’ai peine à croire que quand on est français, blanc et probablement chrétien , la vie ne soit pas un peu plus simple, les opinions moins méfiantes et surtout, les digressions philosophiques considérées comme « plus respectables », je précise qu’à mes yeux, il est d’emblée plus intellectuellement structuré et solide que….. bien des gens qui hantent les medias.
Son livre prend comme ligne de départ, la veille d’une élection présidentielle où l’on découvre, oh horreur ! que le « présidentiable » du lendemain est musulman alors que le bougre n’en avait pas l’air. A mon avis il y a pas de gens dans ce cas en France, tant qu’on en parle. Donc c’est la veille, toute son équipe, quasiment déjà euphorique tombe dans un état de stupeur et de terreur face aux réactions possibles des votants, son bras droit se sent trahi mais reste un ami et notre homme se trouve confronté à lui-même et à ses choix les plus privés face à sa vie la plus publique.
Le livre est la somme des réflexions de cet homme, sur son parcours de converti, sur son parcours de politique, sur les cruelles bêtises qui sont devenues des blagues odieuses en France et sur l’amour qu’il à sa femme (dont on sait peu de choses mais qui appartient au genre « français, blanc probablement chrétien). Cet homme, profondément républicain, qui se prépare depuis longtemps à prendre les rênes de la France est un homme intelligent. Il ne rejette aucune source d’inspiration pour pouvoir faire son travail au mieux, il ne se bloque pas contre une idée sans au moins essaye de savoir pourquoi. Sa qualité humaine est celle que l’on est en droit d’attendre de quelqu’un qui prise une si haute responsabilité, même si personne n’est parfait. On sent bien qu’il ne cherche qu’à se convaincre lui-même, qu’il peut relever tous ces défis et que certains mots ne sont pas incompatibles, comme l’époque s’applique assez stupidement à vouloir nous en convaincre. En cela, la démarche de l’auteur est un réel service qu’il rend à notre pays dont l’Islam est la seconde religion.
Le livre s’arrête le lendemain au matin et Al Malek, nous offre royalement le fruit de ses pensées à lui, aussi, puisque l’on sent bien que la conversion de cet homme est due à des rencontres en France d’une grande qualité. Sans prétendre offrir de solution miracle, l’intelligence de la démarche réside ici dans l’art d’offrir des pistes qui viennent des piliers de cinq piliers de l’Islam, sans se perdre dans le Coran, qui est un livre de lumière parfois aveuglante, comme tous les livres de sa catégorie.
On pourrait rapprocher « L’Islam au secours de la République » de l’essai de J-H Kaltenbach et M Tribalat « La République et islam » (Gallimard. 2002), qui reste néanmoins plus ardu à lire et ne vient pas d’une pense musulmane française. Mais les constats sont les mêmes, tout comme l’honnêteté et la rigueur dans la volonté d’ouvrir un débat politique sain sur ce sujet.
Peu de livres affrontent les réalités qui dérangent de face et sans voyeurisme. Peu d’auteurs s’exposent sur leur vie privée et les choix qui font leur colonne vertébrale au quotidien. Peu de rappeur, enfin, s’octroie le luxe d’être au pouvoir, ne fusse que le temps d’un livre… En lisant celui-ci, on comprend en quoi tout cela est à regretter et combien la jeunesse du regard, l’humilité de la réflexion et la volonté réelle d’une « vivre ensemble dans l’harmonie » manque à nos politiques et malheureusement à nos intellectuels (en tous cas à ceux d’entre eux si médiatiques que l’on finirait par oublier qu’il y en a d’autres)
Merci Monsieur pour votre livre et merci pour cette phrase, aux saveurs bergsoniennes, qui devrait être apprise par cœur par bien des têtes de listes « Une des raisons pour laquelle il avait choisi de faire de la politique était de comprendre l’instant (au sens de saisir le sens, la direction et la signification de l’époque). Comprendre son temps et essayer d’y être utile. »
Je tiens à remercier Pacale Bastiani Augiat, donc le conseil fut si clairvoyant.
Liens vers mes dernières critiques de livre:
Le chaos Syrien :( R Kassis et A del Valle)
Les chemins de Damas ( G.Malbrunot et Chesnot)