Ana Dumitrescu (avatar)

Ana Dumitrescu

Réalisatrice

Abonné·e de Mediapart

53 Billets

1 Éditions

Billet de blog 7 octobre 2023

Ana Dumitrescu (avatar)

Ana Dumitrescu

Réalisatrice

Abonné·e de Mediapart

Dans les cuisines de l'ignorance

Sur le ton du rire, puis certainement du rire jaune, je vous emmène à nous interroger sur l'ignorance et ses visages. Partons à la découverte de notre non-savoir.

Ana Dumitrescu (avatar)

Ana Dumitrescu

Réalisatrice

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Pour écrire un billet, il me faut souvent une petite étincelle, soit un film que j'ai vu, soit un cumul d'éléments qui au fil du temps se rassemblent pour ne faire qu'un, soit un événement d'actualité. Ainsi naît l'idée et puis elle chemine lentement, reliant des informations déjà acquises avec des nouvelles. Pour ce billet, l'inspiration m'a été insufflée par une plaque à induction. Et de cette simple plaque de cuisine, je suis arrivée à une réflexion sur l'ignorance. C'est donc dans ce voyage au centre de nos convictions et de notre non-savoir que je vais vous emmener aujourd'hui. Je pense qu'avant de disserter sur l'univers, il faut se pencher sur soi et sur l'anodin de notre quotidien telle la pomme tombant sur Newton. Avant de me lire sachez que je n'ai aucun conflit d'intérêt et que je ne suis pas financée par le lobby des plaques de cuissons à induction.


Tout d'abord, il faut savoir que j'aime cuisiner et j'aime découvrir des saveurs. Mon placard à épices c'est un peu la caverne d'Ali Baba. Je saute à pieds joints sur toute nouvelle expérience gustative. J'ai été ravie de goûter des œufs de cent ans et je suis capable de choisir au restaurant le plat que je ne connais pas. Je n'ai donc pas peur de l'inconnu, j'y vais, j'y cours dès que je peux. J'aime le risque et le danger. J'ai l'âme de l'aventurière gastronomique. J'ai même testé la raclette au wasabi, c'est pour vous dire. J'aime aussi les choses simples tel que le hamburger de pulled-pork mijoté à cuisson extra-hyper lente au Château Margaux millésime 1995, recouvert d'un confit d'oignons rouges issus de l'Amap locale, tout fait maison bien entendu. Je suis intraitable sur le temps de cuisson du poisson et malheur à celui qui ose mettre un filet de saumon au barbecue.

Message personnel à l'attention de F. :

Illustration 1

Sache que j'ai encore du mal à me remettre du massacre orchestré sur ce beau filet de saumon Atlantique acheté au Leclerc et que tu as détruit en ce dimanche 23 juin 2013 à 13h20 exactement, lors du barbecue organisé dans notre location près de La Rochelle où nous étions pour le Sunny Side of the Doc. Ce beau jour ensoleillé est teinté d'une tâche gastronomique indélébile. Avec mon éternelle rancœur. Bisous.

Perfectionniste dans l'âme au point d'en être parfois un tout petit peu chieuse,

Illustration 2

j'étale modestement mes connaissances. Je suis l'experte familiale du fourneau, un titre durement acquis. Je prodigue mes conseils à qui me le demande non sans une certaine fierté malgré tout empreinte d'une certaine humilité. Quand je rêve de tout quitter, je me vois tenir une friterie mais pas n'importe laquelle, une comme dans le Ch'nord, où tu fais un sandwich américain Beaufort, jambon de pays, cornichons et frites, le tout généreusement arrosé de vinaigre, un peu comme dans le film The Van. Attention, il ne faut pas confondre l'américain frites et le sandwich américain. C'est une nuance gastronomique de haute importance.

Illustration 3
Sandwich américain
Illustration 4
Américain frites

Je suis également quelqu'un de fort patient car la culture ça dure. Voilà maintenant 20 ans, que j'attends que le restaurant El Bulli m'appelle pour confirmer ma réservation. Bon, depuis j'ai changé de mail et de téléphone, mais je ne désespère pas d'être contactée quand même.

Illustration 5

Tout cela pour dire que je me considérais un tant soit peu érudite en la matière. J'ai même failli faire un Instagram en me disant que, comme je n'aurais pas de retraite, il serait fort intéressant de se reconvertir en influenceuse culinaire et ainsi d'abreuver la toile de mon expérience. Je suis sûre que j'aurai un nombre incalculable de likes (et de sponsors) pour mes spaghetti à la burrata, le tout recouvert d'un pesto de citrouille (pesto de chez Lidl, en vente dans tous les bons Lidl de quartier) et de persil finement ciselé (hachoir en vente chez bazardemerde.com pour la modique somme de 4,99 euro, délai d'expédition 4 à 6 semaines, en provenance direct du fabricant en Chine, garanti sans travail d'enfants).

Malgré tout, je n'ai jamais eu l'impression d'être une grande cheffe ni de concurrencer un.e étoilé.e Michelin. Quoique. Je me rappelle de ce jour où voguant de Paris sur la RN 20 en direction d'Orléans, je me suis arrêtée dans ce petit resto routier. Il ne payait pas de mine mais j'étais sure d'y trouver de la grande cuisine. Tout le monde s'accorde à  dire sur Internet que les restos routiers c'est trop bon. Quelle ne fut ma déception de voir arriver en entrée deux œufs mayonnaise qui faisaient grise mine. Le Philippe Etchebest qui était en moi se réveilla d'un coup. Je bondis de mon siège en Moleskine et j'allais directement en cuisine. J'y trouvais un bonhomme aux cheveux gras qui me regarda d"un regard ébahi. Il essaya de me demander ce que je foutais là mais je ne lui laissa pas le temps de répliquer. Je lui octroya d'une traite mon conseil, lui expliquant à quel point la cuisson des œufs durs est précise et que si c'était loupé le jaune devenait gris, ce qui était le cas des siens. Je ne sais pas pourquoi il le pris mal et me jeta son tablier graisseux à la figure. Pas grave, je n'y retournerai plus et je le signalerai dans les avis Google.

Malgré quelques déconvenues que je m'explique difficilement, j'étais quand même un chouia un peu fier de moi et de mes compétences. Et puis arriva le drame. Encore aujourd'hui, j'ai du mal à m'en remettre. C'est très difficile d'en parler. Une plaque de cuisson à induction m'a fait vacillé toutes mes certitudes et m'a mise face à ma propre ignorance.

Voilà mon histoire: Depuis plusieurs années, j'utilise des plaques de cuisson électriques de type vitro-céramique. Celles un peu de base avec un bouton qu'on tourne pour régler la température. J'avais acheté il y a quelques années un lot de sauteuses en inox à prix d'or, histoire d'avoir des ustensiles à minima corrects. Sauf que tout cramais dedans, j'avais beau mettre à feu doux. Bref la catastrophe qui m'a faite petit à petit abandonner en grande partie ce mode de cuisson, pour opter pour l'art de la cuisson au four. Il faut dire que je suis autodidacte en la matière, que je n'ai jamais ouvert un livre de cuisine mais comme on dit, on apprend sur le tas. La preuve en est, je me suis coupée avec mon merveilleux hachoir de boucher et à l’hôpital en recousant le bout de mon doigt précieusement mis dans un sachet congélation entre trois glaçons, l'interne m'a dit que c'était le métier qui rentre. J'avais enfin ma reconnaissance professionnelle.

Tout cela pour dire donc que ma vitro-céramique décède et je me vois face à l'obligation de la changer. Vu mes conditions actuelles, un peu camping mais ça c'est une autre histoire que je vous raconterez1 un jour, j'ai donc acheté une petite plaque mais à induction.

Illustration 6

Une toute belle sur ses petits pieds mais compliquée au point de devoir avoir besoin d'un diplôme d'ingénieur pour la faire fonctionner (j'ai failli m'inscrire à un MOOC dédié à ça). Je me suis disputée avec la plaque car elle avait l'outrecuidance de refuser la moitié de mes poêles. Elle n'accepte que mes sauteuses maudites. Imaginez ma déconfiture. Étant super fatiguée ce soir-là, je me suis dit que je prendrais la décision le lendemain matin de savoir si je retourne au magasin pour l'abandonner lâchement là-bas. Oui j'ai acheté en magasin et non pas sur Internet.

Le lendemain, elle me toisait et moi je lui ai lancé un regard noir. Nous n'étions pas partis en de bons termes. Pourquoi ? Parce que j'étais tout simplement une grosse ignorante qui ne se sachet, sachais, savais pas. Oui, j'avoue et j'ai honte. Du haut de mes certitudes culinaires, je pensais que tout était de la faute de la plaque. Elle portait en elle la seule responsabilité de mes échecs passés, présents et futurs. La première idée en toute logique était donc de retourner vers ce que je connaissais, c'est-à-dire une bonne vieille vitro-céramique. Mais je suis têtue. Très têtue. Extrêmement têtue. Je ne pouvais donc pas me laisser vaincre par une plaque. Le mâle alpha qui sommeille en moi s'est réveillé et tel un guerrier mythologique digne de Thaïs d'Escufon, j'ai décidé de combattre. Ok, je suis une femelle selon Marguerite Stern mais c'est pas grave.

Et là j'ai découvert une autre univers. Celui de la cuisson précise au degré près, celui où la sauteuse fonctionnait à merveille sans rien cramer, celui de la cuisson ultra-lente ouvrant à des saveurs merveilleuses. La plaque m'a vaincue. J'étais moralement KO malgré un monde de possibles inimaginables qui s'est ouvert brusquement à moi. J'étais telle la femme des cavernes qui a frotté deux silex ensemble. J'avais appris ce que je ne savais pas. Et j'ai du me rendre à l'évidence, je n'étais qu'une ignorante. Le choc fut terrible. Je ne maitrisais pas la cuisson, ni rien en fait. Ma base psychologique s'est effondrée. Je repensais aux œufs durs de la RN 20. Promis juré, demain j'arrête la cuisine et je m'intéresse aux champs magnétiques.

J'espère vous avoir fait rire tant soit peu. Avec ce stand-up virtuel légèrement (très légèrement hein!) inspiré de ce qui m'est réellement arrivé avec une plaque à induction, j'ai tenté l'exercice de l'humour pour vous décrire l'effet Dunning-Kruger que je vais vous décrire un peu plus loin. Après cette mise-en-bouche, je vais donc vous parler dans ce billet de l'ignorance. Vaste sujet qui mérite toute notre attention. À partir de là, je passe en mode sérieux. Fini la rigolade.


Depuis la crise du Covid, un mot est devenu très à la mode et il est emblématique de ce que nous sommes tous un peu quelque part, sur un sujet ou un autre : l'ultracrépidarianisme. C'est assez barbare et assez dur à retenir pourtant cela définit exactement le mal de notre siècle : c'est-à-dire s'exprimer sur un sujet sur lequel on n'a pas les compétences requises. Le développement d'Internet et des lieux de prises de paroles tels que les RS ont permis à chacun de donner son avis à tort et à travers sur absolument tous les sujets : médicaux, juridiques, etc.

On parle car on pense être légitime à le faire. Nous avons tous une expérience de vie. Tirer une conclusion de cette expérience c'est fonder un raisonnement sur ce que l'on appelle l'empirisme, c'est-à-dire que nos connaissances proviennent non pas d'un apprentissage théorique mais de l'expérience. L'empirisme en soit n'est pas forcément une mauvaise façon de faire vu que l'humanité a progressé ainsi mais quand cela devient l'unique façon de faire, prenant le dessus sur toute forme d'apprentissage théorique, cela commence à poser problème. Le savoir c'est d'ailleurs l'alliance de la théorie et de l'empirisme donc un juste équilibre entre les livres et la vie.

L'ultracrépidarianisme est dû à un biais cognitif connu sous le nom d'effet Dunning-Kruger ou effet de surconfiance. Il faut déjà savoir que nous avons tous des biais cognitifs car nous sommes influencés dans notre construction par un tas de facteurs différents, à cela se rajoutent également des caractères innés différents.

Illustration 7
David Dunning et Justin Kruger

Nous sommes un ensemble constitué de notre inné et de notre acquis, il est donc impossible de virer les biais de nos vies. La seule chose que l'on peut faire c'est de savoir s'interroger sur notre manière d'être, de réfléchir et de ne jamais se reposer sur des certitudes. Il n'y a pas de noir et blanc mais une nuance de teintes et plus on s'intéresse à la diversité de ces teintes, plus notre horizon s'élargit et donne matière à penser. Mais revenons aux recherches des deux psychologues, Dunning et Kruger, et au biais de surconfiance. Il faut savoir que ceci n'obtient pas un consensus scientifique mais à mon humble avis, tout ce qui relève de la psychologie ne peut pas donner lieu à un consensus mais mérite toutefois discussion. Donc Dunning et Kruger ont décidé d'analyser pourquoi un jour un mec s'est réveillé et a trouvé génial de cambrioler deux banques en s'enduisant le visage de jus de citron en croyant devenir invisible. À quel moment, s'est-il dit « Tiens c'est une super idée que le jus de citron ! » ?  À partir de là, ils ont mené plusieurs études sur plusieurs sujets et ils sont arrivés à la conclusion que :

  1. La personne incompétente tend à surestimer son niveau de compétence. C'est ce que j'ai illustré dans le début de ce billet de façon humoristique. On croit être ce que l'on n'est pas.
  2. La personne incompétente ne parvient pas à reconnaître la compétence de ceux qui la possèdent véritablement. Cela doit sûrement vous parler. Qui n'a pas eu affaire à un inconnu sur les RS ou dans la vraie vie qui vient vous apprendre votre métier et cela avec un aplomb terrible ?
  3. La personne incompétente ne se rend pas compte de son degré d'incompétence. Cela rejoint le point 1. L'ignorant est à mille lieues de le savoir et c'est bien ça qui complique l'affaire. L'ignorant s'ignore ignorant.
  4. Si une formation de ces personnes mène à une amélioration significative de leur compétence, elles pourront alors reconnaître et accepter leurs lacunes antérieures. Alors le point 4, c'est celui de l'espoir, c'est celui on l'on se dit que tout n'est peut-être pas foutu. On va voir que c'est beau en théorie mais qu'en pratique ça se complique car la personne doit accepter d'apprendre donc remettre en question son degré de non-savoir. Et ça, c'est vraiment pas gagné.

La définition de l'effet Dunning-Kruger est simple. Le problème majeur c'est qu'on va rire et penser à l'homme qui s'est enduit de jus de citron. Or, dans les faits, tout le monde peut-être atteint par ce biais car cela ne concerne pas les gens qu'on va qualifier de "bêtes". Au contraire, on peut être diplômé, très compétent dans un registre et souffrir de surconfiance dans un autre domaine. L'un n'exclut pas l'autre. On peut aussi avoir deux personnes ou deux groupes de personnes qui s'affrontent, les deux étant avec un effet de surconfiance. C'est d'ailleurs très courant.

Prenons le cas sur les RS des pros et des antis (tout domaines confondus). On peut, si on observe le phénomène de loin, voir deux groupes d'individus qui s'affrontent à coup de sophismes. Chacun des groupes revendique avoir pleinement raison. Aucun ne se remet en question. En étant extérieur aux groupes et en analysant les arguments, on voit vite qu'on est face à deux entités aussi ignorantes l'une que l'autre, usant souvent de mauvaise foi, chacun partisan d'un clan, tous faisant fi de la véracité et ne souhaitant qu'une chose : gagner une bataille absurde. On a donc un effet de groupe qui se rajoute à l'effet Dunning-Kruger et qui tend à le propager sur l'ensemble de l'entité. Si une personne dans le groupe manifeste son désaccord sur certains points, elle est exclue du groupe. Dans ce cas précis on est donc face à l'impossibilité d'atteindre le point 4 et d'arriver à faire monter le degré de connaissances tant du groupe que des individus de ce groupe.

Dans la littérature, nous avons un exemple merveilleux illustrant le face à face de deux entités ignorantes. Je vous parle bien entendu de La Conjuration des Imbéciles. L'auteur, John Kennedy Toole, un vrai génie, n'a pas trouvé d'éditeurs de son vivant. Il a fini par en mourir et se suicida dans la solitude et la nuit sans fin que réservent ce monde aux meilleurs. Je ne peux m'empêcher de mettre ici cette citation de Jonathan Swift :

«  Quand un génie véritable apparaît en ce bas monde, on peut le reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui. »

Illustration 8
John Kennedy Toole

C'est la mère de l'auteur qui a pris la relève après sa mort et s'est battue 15 années avant de réussir à faire publier l'ouvrage qui est devenu l'un des chefs-d’œuvre littéraires du siècle dernier. Pour revenir au sujet du livre, le personnage principale est Ignatus Reuilly. Il est érudit. Il est également hypocondriaque et s'enferme dans un monde à lui, un monde odieux en opposition au reste du monde, lui aussi odieux. Ignatus Reuilly maîtrise son savoir. Il se base sur le concept Weltanschauung de Kant pour tenter de changer le monde l'entourant. Mais ce n'est pas le savoir universitaire qui pêche chez Ignatus. Le personnage est surtout face à son ignorance à comprendre le monde et le monde est face à son ignorance pour comprendre l'univers d'Ignatus.

On voit ici que l'ignorance est un concept plus complexe que la description qui en est faite par Dunning et Kruger qui placent l'ignorant face au sachant. John Kennedy Toole, lui, fait s'affronter un monde d'ignorants, chacun ignorant différemment, sur un autre plan que l'autre. C'est La Conjuration des imbéciles qui est certainement le modèle le plus proche de la réalité. En effet, le livre montre plusieurs degrés d'ignorance. L'ignorance ne se limite donc pas à un savoir théorique ou universitaire.

C'est ce que l'on peut aussi appeler dans le langage commun, l'incompréhension. Ne pas comprendre. La solution qui est couramment apportée c'est l'empathie. Empathie n'est pas synonyme de sympathie. On peut être empathique face à une personne que l'on déteste viscéralement. L'empathie c'est le concept de se mettre à la place de l'autre, de tenter de le comprendre. L'empathie demande à ce qu'on abandonne nos propres croyances pour essayer de mieux visualiser celle d'autrui.

Depuis cette rentrée, l'empathie est devenue une actualité. En effet, Gabriel Attal a eu la lumineuse idée de proposer des cours d'empathie. Sauf que l'empathie est une réponse face à l'incompréhension donc à l'ignorance de l'autre. Et avant de passer au remède, il faut d'abord diagnostiquer le problème, en l’occurrence l'ignorance. Or rappelons-nous que ce qui caractérise l'ignorant c'est justement qu'il s'ignore. Il est aussi à noter que l'empathie est dévoyée vu qu'elle est assimilée uniquement à des émotions et jamais à des connaissances ou un manque de connaissance. C'est la raison pour laquelle cela ne peut pleinement fonctionner. Il faut donc renforcer la connaissance de l'autre, de son univers, de ses croyances et passer par l'acceptation de l'altérité afin de pouvoir combler l'ignorance. L'empathie ne peut exister qu'à ces conditions.

L'ignorant est souvent confondu avec "l'imbécile ", terme qui désigne celui qui serait plus bête que nous. Nous sommes tous l'imbécile de quelqu'un car être imbécile n'est pas quelque chose d'universel. L'imbécile est défini par notre propre curseur de connaissances (ou de ce que nous pensons connaître) et de valeurs. Mike Judge, celui qui a réalisé la série animé Beavis et Butt-Head a décidé d'en faire un film : Idiocracy.

Illustration 9
Idiocracy

Certainement à cause de son sujet non-politiquement correct, la 20th Century Fox a reporté pendant deux ans la sortie du film puis s'est décidée de le sortir en 2009 sans trop de publicité. Pour résumer l'histoire, Joe Bauers, un Américain moyen, se fait cryogéniser pour une expérience. On l'oublie et il se réveille 5 siècles plus tard. C'est là qu'il découvre une société tellement stupide qu'il passe pour un génie aux yeux de tous. Ici, on est dans le domaine de l'ignorance première. Judge y moque entre autres les gens qui se basent sur l'empirisme en créant un monde où l'on arrose les plantes avec des boissons énergisantes et où l'eau est utilisée uniquement dans les WC, car preuve est que l'eau ne peut nourrir les plantes vu que rien ne pousse dans les toilettes...

Finalement Bauer arrive à arroser les culture avec de l'eau mais entraîne la chute de la société fabricant la boisson énergisante, ce qui occasionne le chômage de la moitié de la population. On est ici face à un propos politique, c'est-à-dire l'ignorance qui soutient le fonctionnement d'un système complet. Car entretenir et valoriser l'ignorance c'est aussi s'assurer le pouvoir. L'émancipation de l'individu devient alors un vrai danger. Il faut le maintenir dans un système lui faisant croire qu'il n'est pas ignorant afin qu'il ne puisse pas accéder à plus de connaissances. Quel est donc un des meilleurs moyen de lui faire croire qu'il n'est pas ignorant ? Tout simplement, aller directement au point 4 de l'effet Dunning-Kruger et lui faire croire qu'il accède à des connaissances. En gros lui dire, c'est avant que tu étais ignorant et maintenant tu sais. Un des meilleurs exemples pour illustrer ceci c'est Qanon, les soutiens de Trump.

Qanon ce n'est pas une blague potache mais un vrai projet politique, réactionnaire, nauséabond et d'extrême-droite qui a permis entre autre de soutenir l'idiocrate Trump au pouvoir Dans mes précédents billets, je décortique déjà plusieurs points utilisés par ce groupuscule pour faire adhérer le public tels que la pédocriminalité ou l'obsession de la transsexualité et du "wokisme". Vu de l'extérieur, Qanon profère des inepties qu'un enfant ne devrait pas écouter. On a tendance à rire d'ailleurs quand quelqu'un vous sort une des nombreuses stupidités inventés par Qanon.

D'abord, il faut bien comprendre le mécanisme de pourquoi certains y adhérent avant de rire car c'est pervers et c'est similaire à quelqu'un qui est endoctriné par une secte. Oui c'est une secte et cette secte se diffuse et se propage par divers canaux de communication sur Internet. Un des points d'entrées principaux a été la crise Covid. Face à des gouvernements parfois hésitants et contradictoires, face à certaines mesures qui ont été violentes dans la façon dont elles ont été appliqués, le doute s'est insinué. Et qui dit doute, dit reprise politique. Une vaste partie de la population a été fragilisée psychologiquement à ce moment-là et c'était le moment idéal. C'est ainsi que Qanon a commencé à insuffler un narratif parallèle à un public étendu. Ce narratif existait déjà avant mais d'une part il n'avait pas un taux d'adhésion aussi important et d'autre part il n'était pas mondial car aujourd'hui nous ne parlons pas uniquement de Qanon USA mais d'un projet politique qui inclut l'union idéologique de toutes les extrêmes-droites au sein d'un narratif devenu universel.

Donc avec la crise du Covid, cette mouvance a discrètement et silencieusement été embrigadé du monde sous couvert de leur dire la vraie vérité de vrai, celle qui est cachée. Voilà comment on est au point 4 de l'effet Dunning-Kruger. Je vous invite à lire cet article de 20 Minutes qui explique la partie secret défense des Conseils de Défense sanitaire.

L'histoire a été réduite à la crise sanitaire c'est secret défense et la nature a horreur du vide. C'est donc ainsi que certaines théories sont venues combler ce vide. Et ainsi de suite car ce n'est qu'un exemple parmi des milliers de cette période.

Illustration 10

Coup sur coup après la crise sanitaire, il y a eu la guerre en Ukraine et le dérèglement climatique en Une des journaux. Quelle aubaine ! De la crise sanitaire, on est donc passé vers le pro-poutinisme, le climato-septicisme, la pseudo lutte anti-pédophile, la lutte anti-"woke", anti-féminisme, anti-LGBTQ, etc. Vous devez tous connaitre une personne dans votre entourage qui coche tous ces points depuis le Covid. Petit à petit cette population a décroché des informations dites officielles car elles sont devenues synonyme de désinformation. On est donc dans une échelle d'inversion du lieu qui contient le savoir. Cette population a commencé à rentrer dans des canaux parallèles. Bien entendu qu'aucun de ces canaux ne s'appelle Qanon. On y parle de bon sens, de réflexion, on fait prétendument appel à l'intelligence de chacun et on fait croire que l'on dévoile des vérités cachées. On joue sur la carte de l'empirisme à fond, par exemple : « Si vous ne connaissez personne qui est mort du Covid, c'est peut-être que le Covid n'existe pas ? Et ainsi de suite ». De plus, les gens se sentent valorisés, mis dans le secret car ils pensent avoir acquis des connaissances que les autres n'ont pas. Ça renforce un sentiment de supériorité qui coupe l'individu de son entourage qu'il va le considérer petit à petit imbécile et con.

On invoque aussi des sommités elles-mêmes plongés dans le biais de surconfiance. C'est ce que je vous écrivais plus haut en disant que cela peut frapper n'importe qui, y compris des gens très éduqués et réputés dans leur profession. C'est ce qu'on appelle l'effet Nobel quand cela frappe un prix Nobel qui s'engage en dehors de son champs de compétence réel. C'est une facette du Dunning-Kruger. En effet, on peut être très intelligent et être ignorant à la fois, aveuglé justement par son intelligence. Donc qualifier les gens d'imbéciles est tout sauf une solution. Les mettre le nez dans le caca comme se sont amusés à le faire certains debunkers, eux-aussi baignant dans le Dunning-Kruger, n'a pas aidé non plus.

Car justement le point commun entre le Debunker de Youtube qui se prend pour une star de la science et celui qui baigne dans le narratif Qanon c'est que tous les deux pensent savoir et veulent imposer leur prétendu savoir aux autres. La conjuration des imbéciles est en marche. Tout le problème des zététiciens et des sceptiques improvisés c'est que ces gens vendent une méthode, c'est-à-dire la forme mais ne maitrisent pas leur sujet, c'est-à-dire le fond. C'est bien d'être sceptique, zététicien mais aller se fourvoyer dans des domaines qui ne sont pas non plus de leur compétence et donner son avis sur absolument tout, tout en faisant croire qu'on donne de la connaissance à son public c'est juste adopter la même technique que Qanon. Du kif kif bourricot pour moi. Le yin et le yang d'un système véreux prenant l'individu pour un abruti fini. On est loin de l'émancipation.

Tout cela est gentiment propagé par l'ultracrépidarianisme, c'est-à-dire cette volonté de donner son avis partout et sur tout sans se rendre compte de son incompétence. Et le remède appliqué à Qanon, c'est-à-dire un fact-checking moqueur et imbu de biais tue le malade, en l'occurrence l'enfonce encore plus dans sa croyance. La boucle est bouclée, le cercle vicieux est là. Et on n'est pas près de s'en sortir malheureusement car on retombe sur le point 3, l'ignorant ne se sait pas ignorant. L'adepte Qanon ou le Zététicien starifié se croient tous les deux dans le vrai et chacun va propager son prosélytisme sur les RS.

Tout cela est bien gentil mais frappe une partie seulement de la population. Ça serait chouette de se dire que c'est cantonné à Qanon et aux Zets, sauf que le filon est trop bon pour ne pas être exploité en population générale par nos politiques.

Illustration 11

Ce qu'on appelle l'Hanounisation de la population, c'est l'ignorance érigée en norme. Hanouna n'est pas seulement un guignol, il est surtout un très bon outil politique. Faire le clown ne fait pas de lui un ignorant. Il est assez malin pour avoir compris qu'exploiter l'ignorance de l'autre est un très bon business. L'émancipation ne paye pas. L'ignorance si. La première est une notion longue compliquée, demandant un véritable investissement alors que la seconde est facile et à portée de tous. Mais là aussi l'ignorance doit prendre les habits du savoir. L'ignorant ne doit à aucun moment savoir qu'il l'est sinon c'est foutu.

Il faut donc jouer sur les cordes du prétendu savoir en dévoilant des informations même fausses (surtout fausses) comme c'était encore le cas cette semaine avec les trois villes de France qui seraient dans le top 10 des villes les plus dangereuses au monde. C'est un exemple parmi des milliers. Et puis surtout il faut bien choisir ses pantins. On va varier les chroniqueurs, les changer et même y mettre de temps en temps de gens qui donnent une impression plus "intellectuelle". Idem pour les invités. On ne va pas hésiter à inviter des hommes et des femmes politiques pour soi-disant toucher plus de monde. Mais aucune homme ou femme politique digne de ce nom ou digne de sa fonction ne devrait accepter de mettre un seul orteil sur ce plateau. Cela vaut pour toute personne digne de respect. Cautionner ce système c'est vouloir le voir proliférer et en ça il y a un véritable intérêt politique d'être face à une population ignorante. C'est le système Qanon élargit en population générale.

D'ailleurs, au niveau des pouvoirs politiques, on voit bien que la direction est donnée dans ce sens. Il suffit de consulter le dernier rapport de la Cour des Comptes sur le CNC qui nous parle des films art et essai qui ne trouveraient pas leur public. Après des années d'abandon des cinémas art et essai municipaux à leur sort, de réduction de budget, de diminution de la place accordée aux œuvres, on veut éliminer la partie du cinéma considérée de l'art, celle qui fait réfléchir, celle qui pose des questions pour favoriser le cinéma en tant que distraction uniquement. Les réalisateurs deviennent juste des dompteurs de tigres qui sont là pour amuser la galerie. Ce sont les jeux du cirque qui étaient déjà là à l'époque pour détourner l'attention du citoyen et ériger la cruauté et la bêtise comme normalité. Donner leur de la distraction, ils réfléchiront moins.

Dans les systèmes favorisant l'ignorance, il y a bien entendu Internet. Comme vu plus haut, il y a les RS mais il n'y a pas qu'eux. C'est en fouillant dans l'archéologie d'Internet que l'on va trouver le début de la pomme viciée car la structure même du net est basée sur l'ultracrépidarianisme. On appelle ça gentiment l'intelligence collective. C'est collectif en effet mais ce n'est pas de l'intelligence.

Illustration 12
rotten.com

J'ai eu Internet grâce à mon père, très tôt, c'est-à-dire en 1993 alors que j'étais adolescente. J'ai vu son évolution et finalement on suit une logique. Les premiers sites ont été créés par des personnes qui avaient des trucs à dire plus ou moins importants et surtout plus ou moins vérifiés. On trouve dans les limbes du net des précurseurs de théories fumeuses et de photos atroces.

Certains ici on peut être connu Rotten.com qui est un GOAT dans le genre. On y trouvait des photos horribles d'accident mais aussi les prétendus dossiers secret de l'autopsie de Marylin Monroe, photos de cadavre à l'appui. La théorie fumeuse ça attire toujours et cela depuis des siècles et des siècles.

Illustration 13
Yahoo Q/R

Et puis il y avait l'ancêtre de Twitter, l'endroit qui a jeté les bases de la merde future. Ça s'appelait Yahoo Q/R (Questions/Réponses). Alors pour ceux qui ne connaissent pas c'était un endroit où tu posais une question et les gens venaient te répondre. Il n'y avait aucune modération et n'importe qui pouvait y raconter n'importe quoi. La meilleure réponse était élue à coup de like. L'anonymat était de mise mais ça ne change rien au problème car l'anonymat ne favorise pas l'ignorance. N'oubliez pas, l'ignorant s'ignore.

Et puis il y avait déjà les stars, un peu comme sur Twitter maintenant et les combattants (vrais ou faux, on ne saura jamais) morts au combat c'est-à-dire mort de maladie. Je réveillerai peut-être des souvenirs chez certains en parlant de super golfeuse, une star du réseau qui est morte prétendument du cancer, on ne saura jamais le vrai du faux de cette histoire. Il y a aussi eu Kaboum, dont la compagne a annoncé le suicide. Tous les membres de Yahoo Q/R avaient aussi un blog rattaché qui s'appelait Yahoo 360 et qui pouvait s'apparenter à Facebook avec un mur et des commentaires. Tout cela était le début des temples de l'ultracrépidarianisme. Cela donné le ton pour la suite. La partie Q/R était l'ancêtre de Twitter et je serais curieuse de savoir si Jack Dorsey y a puisé son inspiration et la partie 360 était l'ancêtre de Facebook, donc même question pour Mark Zuckerberg.

Yahoo Q/R a quand même résisté jusqu'en 2021. Si vous ne connaissez pas, voici un l'avis de décès de Yahoo Q/R rédigé par Numerama.

Mais le GOAT des GOAT de l'ignorance organisée c'est Wikipédia, tout cela sous couvert de participatif et de propagation du savoir. Moi aussi je vais sur Wikipédia. Nous y allons tous et en fait c'est mal car on se contente le plus souvent de ce qui y est écrit donc d'une information fragmentaire. L'ignorance ce n'est pas seulement le fait de ne pas savoir mais aussi le fait de savoir partiellement, ce qui est encore pire car on a l'illusion du savoir en connaissant seulement un petit bout. On a beau lire un résumé de livre, on ne connaitra que l'histoire. Sauf que pour un écrivain, l'histoire n'est que prétexte pour écrire quelque chose de plus profond, de plus important. Le message qu'apporte un livre ou film ne se situe jamais dans l'histoire en elle-même. L'histoire c'est juste un chemin qui mène vers une critique, une réflexion, une pensée. Pour comprendre une œuvre, il faut forcément la lire ou la voir. Et si on ne la lit pas ou ne la voit pas pour X motifs, il faut admettre qu'on se contente d'une information superficielle. Ce n'est pas un mal en soit si on admet que cette information est incomplète. Ça le devient si on pense avoir fait le tour du sujet.

Dans mes billets, je cite souvent des œuvres que j'ai vues ou lues, mais c'est un support pour étayer. Mon invitation est de vous dire d'aller vérifier de vous-même, de donner votre avis, de le contester si nécessaire car le savoir c'est ça aussi ça, confronter les idées afin de permettre de voir plusieurs angles de vues. Une seule personne ne peut pas toutes les détenir. Elle ne peut qu'apporter son point de vue, plus ou moins large et toute opinion doit être prise avec cette perspective. En ce sens, il faut réhabiliter l'idée du débat, de l'échange et donc passer du mode de confrontation actuelle en mode discussion.

Wikipédia reste toutefois un très bon outil mais il faut le considérer juste comme un dictionnaire, ni plus ni moins. Ce n'est pas un outil de savoir. C'est un outil qui nous permet de manière rapide à avoir accès à une brève information, à des dates, à des courts résumés, à des fiches historiques, etc. D'ailleurs ce n'est pas Wikipédia qui nous rend ignorant, c'est la manière dont on l'utilise et cela vaut pour tout. L'important est d'en être conscient. C'est le premier pas et certainement le plus important pour pouvoir avancer dans un monde où tout est fait pour maintenir l'individu dans un état de savoir minimum lui donnant l'impression de la maîtrise.

Pour conclure, je constate qu'on baigne dans un univers où l'ignorance régit nos vies sans même qu'on s'en rende compte. C'est ancrer comme une habitude. On nous apprend à être ignorant, à nous y complaire et à normaliser et normer le processus. On nous apprend également qu'on serait tous capables de devenir médecin grâce à Doctissimo, à devenir juriste grâce aux nombreux sites en la matière, à devenir maçon, charpentier, serrurier, plombier-chauffagiste, couturier, réalisateur, etc grâce à d'innombrables tutoriel de Do It Yourself. On invite des prétendus experts sur les chaînes d'infos. On érige des Dunning-Kruger en star tel un certain pseudo triple docteur qui est aussi bien qualifié en médecine qu'en géopolitique et même en… photographie. Bienvenue à l'ère de l'expert généraliste qui sait tout sur tout mais qui, dans les faits, ne sait strictement rien. On en impose avec des diplômes survendus et on fait croire que l'on partage son savoir en vendant une formation bidon sur le net. On vend des points de vue comme des vérités incontestables. On joue sur le biais d'autorité, ce qui fait perdre tout repère, nous empêchant de différencier le vrai du toc. L'offre de prétendu savoir est devenu un vrai marché. Plus personne n'ose dire ou écrire qu'il avoue son ignorance. Alors que faire me direz-vous ?

Et bien il faut arriver à prendre individuellement conscience que nous sommes tous des ignorants ne le sachant pas. C'est le début pour pouvoir s'attaquer au point 4, c'est-à-dire pouvoir se former et retrouver un processus d'apprentissage, long mais pérenne qui nous permettra d'élargir nos connaissance et ce en dehors de tout endoctrinement de masse. C'est un processus individuel et personnel. Et puis, il ne faut pas non plus vouloir l'impossible. Il n'y a pas de honte de ne pas tout savoir. Alors il faut ré-apprendre à dire simplement « je ne sais pas » et se concentrer à emmagasiner le plus de savoir possible sur nos points d'intérêts. C'est savoir se recentrer sur l'essentiel et accepter que pour le reste certaines choses peuvent nous échapper. C'est de casser le cercle vicieux de notre société qui nous impose une ignorance sous couvert de fausses connaissances. Il faut redevenir fier de nos ignorances, les admettre, les accepter et les apprivoiser. Dire ne pas savoir c'est le premier pas pour dire que nous sommes prêts à apprendre. Et la vie n'est qu'une suite de surprises, bonnes ou mauvaises, de découvertes et jusqu'au bout on peut changer d'avis, apprendre et découvrir. Nous avons tous à apporter quelque chose à ce monde, quel que soit notre âge, et c'est bien ce quelque chose que nous devons enrichir, approfondir, propager sans nous plier au faux sujet que nous impose cette société du spectacle et du contrôle en nous faisant croire à tort que nous sommes libres de penser et de dire.

Pour le mot de la fin, je laisserai la parole à Jean Gabin (ou plus exactement les paroles Philippe Green dit Phill Green) avec maintenant je sais :

Quand j'étais gosse, haut comme trois pommes
J'parlais bien fort pour être un homme
J'disais, je sais, je sais, je sais, je sais

C'était l'début, c'était l'printemps
Mais quand j'ai eu mes 18 ans
J'ai dit, je sais, ça y est, cette fois je sais

Et aujourd'hui, les jours où je me retourne
J'regarde la terre où j'ai quand même fait les 100 pas
Et je ne sais toujours pas comment elle tourne

Vers 25 ans, j'savais tout
L'amour, les roses, la vie, les sous
Tiens oui l'amour, j'en avais fait tout le tour

Et heureusement, comme les copains
J'avais pas mangé tout mon pain
Au milieu de ma vie, j'ai encore appris

Ce que j'ai appris, ça tient en trois, quatre mots
Le jour où quelqu'un vous aime, il fait très beau
Je peux pas mieux dire, il fait très beau

C'est encore ce qui m'étonne dans la vie
Moi qui suis à l'automne de ma vie
On oublie vite le soir de tristesse
Mais jamais un matin de tendresse

Toute ma jeunesse, j'ai voulu dire je sais
Seulement, plus je cherchais
Et puis moins j'savais

Y a 60 coups qui ont sonné à l'horloge
J'suis encore à ma fenêtre, je regarde, et j'm'interroge
Maintenant je sais, je sais qu'on ne sait jamais

La vie, l'amour, l'argent, les amis et les roses
On ne sait jamais le bruit ni la couleur des choses
C'est tout ce que j'sais
Mais ça, j'le sais

Je vous mets ici la vidéo de la version originale en anglais But now I know :

Jean Gabin - But now I know (1974) © Louis' oldies

1 Raconterai, c'est pour faire plaisir à Philippe car cela a visiblement perturbé son Karma.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.