Oui, une drôle de soirée dans l’expectative d’un danger éminent, d’une menace pressante mais aussi, mélangé, comme de l’espoir, du coup de tonnerre qui puisse faire mentir ce président immature qui chamboule tout...
Le couperet des 20 heures tapantes est tombé et la surprise, le ‘‘je n’y crois pas mes yeux’’ et puis, quelques instants, quelques longues secondes, quelques images, une première déclaration politique (histoire de prendre tout le monde de court, comme Macron le 9 juin), avant même qu’on puisse s’approprier de la nouvelle.
Et puis, et puis, un état comme suspendu, et le ‘‘sursaut de l’espoir’’ /ici/ que j’avais exprimé comme un vœu, semblait se concrétiser, même si la Macronie est sortie un peu plus fournie en élus que prévu. Et du coup, Macron va encore se gargariser, ‘‘voilà c'est ce que je voulais, donner la parole au peuple pour clarifier la situation’’.
‘‘Clarification’’ dit-il!
S’il y a eu clarification c’est celle du rejet par les électeurs de son arrogance, de son mépris, de ses entourloupes, de la violence sociale et policière de sa politique. Et sa clarification c’est aussi la manipulation de la démocratie, mettant le pays dans les pires conditions, lui "volant" du temps pour préparer et présenter des projets de société et des politiques alternatives après le constat des élections européennes.
Rapidement on comprend que le Nouveau Front Populaire est en tête en nombre d’élus, une victoire que nous méritons de savourer... tout en sachant que les Lepénistes-Bardella n’ont perdu qu’arithmétiquement, car c’est le parti qui a le plus progressé en nombre d’élus et que plus de 10 millions d’électeurs ont déposé dans l'urne le bulletin d'un candidat du FN-RN et alliés.
Le barrage au FN-RN c’est notamment le résultat de la mobilisation et des désistements dans les triangulaires. A gauche le Nouveau Front Populaire a annoncé et respecté cette volonté politique. Et, si les macronistes d’Ensemble ont réussi à être en deuxième position, c’est grâce aux voix de gauche qui, une fois encore (2017, 2022), ont voté en leur faveur... Outre, qui le dirait, s’être désisté pour Darmanin, le ministre-policier contre les immigrés et les écoterroristes et pour Borne, la Madame 49.3 de la réforme des retraites... Sans oublier que, aussi bien le président, que Attal et ses ministres, les chefs des partis de droite, n’ont eu de cesse qu’amalgamer ce qu’ils appelaient les extrêmes pour discréditer cette unité retrouvée de la gauche.
Finalement ce ‘‘faire barrage’’ a permis, pour le moment, à éloigner ou retarder l’ascension du FR-RN, sans pour autant permettre à la gauche de s’imposer. Macron garde toujours la maitrise de sa clarification dont il saura s’en servir... car les conditions qui ont permis au Lepénisme d’arriver là où il est, restent toujours présentes.
Et maintenant ?
Reste à accomplir l’impossible, et déjà le risque de la tentation des coups de menton, du forcing d’étalage pour s’imposer, empêchant de discuter avec toutes les nuances du Nouveau Front Populaire. Dès 20h, dimanche, Mélenchon a parlé dans le poste : ‘‘Le Nouveau Front populaire appliquera son programme, rien que son programme mais tout son programme’’.
On était encore dans les premiers balbutiements d’un résultat positif et important pour la gauche et pour le pays. Cependant cette déclaration lançait tout de suite l’opprobre sur celles et ceux qui s’autoriserait à une quelconque interrogation. Comment, dans une Assemblée coupée en trois avec deux partis ou groupes résolument opposants au Front Populaire, plus les entourloupes et pièges que le président battu va glisser à l’équipe proposée par le Front Populaire, un responsable politique, chef d’un groupe parle au nom du collectif avant de connaître davantage sur l’évolution des résultats et sans aucune concertation. Outre la question, à quel titre puisque il n’a pas participé à la création de NFP.
Quel programme?
Mais aussi et c’est là, me semble-t-il, le plus important, de laisser entendre aux électeurs que ‘‘tout le programme’’ sera appliqué alors qu’on n’a pas la majorité. Créer l’illusion à la population quand on sait les limites, ici et maintenant, de l’action d’un gouvernement qui sortira du contexte de la prochaine séquence parlementaire à commencer par l’élection du ou de la Présidente de l’Assemblée le 18 juillet (qui me paraît la question principale avant la course au poste de premier-ministre que LFI et PS semblent privilégier...). Ce sera à la fois un teste mais aussi l’indication des échanges possibles entre parlementaires, dits républicains, pour trouver le terrain qui permettra d’apporter des mesures significatives à la population voire quelques décisions clés notamment en matière de pouvoir d’achat, augmentation du Smic, l’environnement, les méga bassines de Ste-Solines ou l’autoroute A69 dans le Tarn... ou la question de l’agrément de l’association Anticor, contre la corruption et pour l’éthique en politique !
Dans son dernier billet stephane lavignotte prône ‘‘une assemblée en mode convention citoyenne’’ /ici/. Sans doute qu’on peut se mettre à rêver et souhaiter ce qui serait le plus ouvert et le plus constructif pour ce grand chantier où il faut reprendre les effets du "septennat" de la Macronie. Autant la Convention Citoyenne a été un moment fort et important pour toutes celles et ceux qui y ont participé, autant Macron son promoteur, a su (ce qui était peut-être son intention) la domestiquer et la détourner.
Même si le Nouveau Front Populaire est né comme un rassemblement électorale, dans l’urgence de la pluralité des forces de gauche, souhaitons le et œuvrons pour cela, pour qu’il n’ait pas le même sort que la Nupes et devienne réellement un facteur d’unité et de mobilisation humaniste et plurielle.
Merci La plume rieuse pour ce dessin * Mediapart 8/07/2024