L’actualité des prisons russes, c’est d’abord la révélation, par l’ancien détenu Sergeï Savelev et par l’ONG gulagu.net d’un système organisé de viols et de tortures, dans un établissement pénitentiaire de l’oblast de Saratov et dans d’autres régions. Je n’y reviens pas, les médias français ont parlé de cette infamie, le lecteur qui y aurait échappé pourra lire, par exemple, cet article de RFI.
Je voudrais restituer ici une autre information, donnée il y a quelques semaines par le journal RBK, sur l’ampleur de l’infection au VIH dans les établissements pénitentiaires russes. J'ai déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises, à propos de ruptures de traitement dans ce billet ou dans cet autre consacré à la part prise par le sida dans les causes de décès de détenus – 22,8 % au premier semestre 2020.
J'actualise au passage une statistique donnée dans ces billets : au 30 juin 2021, le nombre des détenus séropositifs sous traitement antirétroviral était de 47 430, en recul par rapport à celui de la fin décembre 2020 (53 515). Cela correspond à environ 10 % de la population pénitentiaire.
RBK a aussi publié des statistiques régionales à la fin 2020, avec comme source le service fédéral pénitentiaire (FSIN). Elles n'étaient pas connues auparavant. Elles montrent une concentration sur certaines régions. Les quatre où la proportion de détenus séropositifs est la plus élevée sont au dessus de 20 %. Ce sont les oblasts de Kemerovo (25 %), de Samara (23 %) et de Tomsk (20 %), ainsi que le district autonome des Khantys-Mansis ( 21%).
Ces quatre régions sont également des régions où la prévalence du VIH est forte dans l’ensemble de la population, et l’oblast de Kemerovo a le triste privilège d’être le sujet de la Fédération de Russie où le taux de prévalence est le plus élevé dans la population (1998 pour 100 000 habitants, soit 2 % de la population infectée par le VIH, une personne sur 25) et dans les prisons (un détenu sur quatre).
Dans 19 autres régions, le nombre de personnes infectées par le VIH dépasse la moyenne de 10 %.
Arrêtons un instant sur ces chiffres, sans plus développer, ils sont énormes. En France, la prévalence du VIH en prison était estimée en 2010 par l'enquête Prévacar à 2%, pour 0,37 % en population générale.
En complément à ce billet, cette courte vidéo sur une antenne de prévention du VIH sida mise en place en 2020 dans un des établissements pénitentiaires d’Irkoutsk, de 7000 places. L'oblast d'Irkoutsk est la deuxième region la plus touchée par l'épidémie, avec 1935 personnes infectées par le VIH pour 100 000 habitants à la fin décembre 2020.