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Billet de blog 15 février 2014

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Le monstre chante toujours

La revue Le Chant du monstre poursuit son accompagnement de la « création littéraire » et sa quête de « curiosités graphiques », toujours fidèle à son double sous-titre programmatique, pour un riche n° 3.

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La revue Le Chant du monstre poursuit son accompagnement de la « création littéraire » et sa quête de « curiosités graphiques », toujours fidèle à son double sous-titre programmatique, pour un riche n° 3.

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Le Chant du monstre n’est pas une revue thématique mais hybride. Sa volonté (plus qu’un credo, tant la mise en œuvre est souple et en constante évolution) ? qu’une forme graphique accompagne les textes, que les images se lient à la prose, en osmose, comme le montre le soin attaché à la typographie. Seuls les titres de rubriques demeurent, tiroirs d’un cabinet de curiosités et créations originales, mais aussi une exigence et une forme d’insoumission, le terme au centre de la réflexion de Laure Limongi dans « Seul contre tous ».

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Indociles, au pluriel signifiant, c’est ainsi que Laure Limongi, auteure et éditrice, qualifiait en 2012 quatre auteurs de choix — Denis Roche, Hélène Bessette, Kathy Acker, B.S. Johnson. Un adjectif que l’on peut aussi lire comme un autoportrait oblique d’écrivain et le manifeste d’une éditrice, dans sa recherche de textes et auteurs insoumis, refusant de se plier aux diktats d’une littérature calibrée ou commerciale : la littérature comme espace culturel exigeant, laboratoire et champ d’exploration. Aux publications aseptisées, monochromes et fadasses, Laure Limongi — d’abord chez Léo Scheer dans sa collection «Laureli» et désormais chez Inculte — préfère le risque, la mise en danger, des livres qui provoquent des émotions et parfois même des rejets, bien loin des conseils par algorithmes de sites marchands en ligne visant à museler le libraire et le lecteur, « bordé dans un confort en forme de camisole ». « Le lecteur, il sort sa carte bleue, et il ferme sa gueule ».

La chaîne du livre — éditeur, passeurs (libraires comme critiques), lecteurs — doit au contraire être mue par l’indocilité, cette « résistance politique, formelle ». Impossible sans doute de renverser la tendance générale, de porter les lettres au pinacle et non plus les chiffres, mais il est possible de prendre des « chemins de traverse », de s’exclure du mouvement panurgique. Indociles offrait quatre noms, dans Le Monstre Laure Limongi poursuit la liste, bouquet de lectures qui bouleversent, profondément, essentiellement : Anne-Marie Albiach, avec sa partition de poésie « blanche » et Christophe Tarkos, écrivain « debout », deux auteurs qui rejoignent la ligne des « Indociles, au pluriel, au multiple ».

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Le tiroir « Alchimie », dans ce numéro 3, construit un mur à multiples couches (Orion Scohy et Laurie Bellanca) et renvoie mathématiques (Laurent Derobert), littérature et psychiatrie (Adrien Altobelli) à une quête commune de fragments existentiels. « Ex-qui ? » participe d’un mouvement d’exhumation du culte et du vintage, nous offrant Jérôme, réédité après un purgatoire de 30 ans. Il est aussi des corps flottants et pièces de métal dans ce numéro 3, des Fleurs de fer, déclaration d’amour d’Andréas Becker à « une littérature en perpétuel mouvement ».

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Enfin — même si c’est au tout début de ce troisième Chant du Monstre dont nous avons renversé les tiroirs — les « Affinités électives » présentent longuement textes, auteurs et éditeurs des éditions Cambourakis — qui auraient pu se trouver aussi dans la rubrique « Alchimie » (elles publient de la fiction comme des albums graphiques, refusant la frontière imbécile de la littérature et de la bande dessinée) voire dans « Ex-qui ? » puisqu’on leur doit la (re)découverte de Don Carpenter (et tant d’autres) mais aussi d’auteurs contemporains, comme récemment le chef d’œuvre du hongrois László Krasznahorkai, Guerre et Guerre. Frédéric Cambourakis retrace son parcours d’éditeur, celui d’une maison récente (mars 2006) et ouverte sur l’ailleurs, au catalogue déjà impressionnant. « Pour durer, se réinventer », comme axe d’une exploration.

Encore un numéro du Chant du monstre qui fait

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