De la Mission de Contrôle Sénatoriale ( suite et fin ) ( partie 2)
De l’équivoque, sciemment entretenue, du mot laïcité
Le rapport de la Mission de Contrôle affirme, non sans euphémisme :
1) « La laïcité assure la stricte neutralité dans l’espace scolaire » nous dit le rapport [1].https://www.senat.fr/fileadmin/Presse/Documents_pdf/20240306_Essentiel_MCC_Agressions_enseignants.pdf
La laïcité de l’Ecole, oui : celle dont relèvent les élèves, assure effectivement la stricte neutralité dans l’espace scolaire ; mais en aucun cas le laïcisme ambiant qui, comme nous le constatons, sème la discorde et la haine. La laïcité de l’Ecole résulte de la loi du 09 décembre 1905 après minoration (dans l’intérêt des enfants) de l’article 2 de cette dernière par les circulaires Jean Zay. La stricte neutralité exigée des élèves n’a été imposée définitivement qu’à partir de 1937.
Les enseignants, en tant que préposés de l’Etat, relèvent, eux, de la laïcité de l’Etat, donc de la loi du 9 décembre 1905 prise dans son intégralité. Comme toutes les lois de la République, elle est d’interprétation stricte.
L’article 2 de la Constitution de 1958, sanctuarise la laïcité en la rendant constitutionnelle : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale » ; il précise qu’ « elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ».
Le statut religieux (l’appartenance juridique à la religion catholique, protestante, juive ou musulmane) ne fait pas partie de l’état des personnes : le Droit Français ne prend en considération la liberté religieuse qu’en tant qu’expression de la liberté de conscience de ses citoyens … L’Etat est neutre et doit se tenir à égale distance des convictions des Français. L’égalité des droits et des devoirs des citoyens, qu’il proclame, l’exige.
Contrairement à ce que serinent les laïcistes (en particulier, M. Penà Ruiz) quand l’article 2 de la loi du 09 décembre 1905 stipule « la République ne reconnaît ni ne salarie aucun culte », il ne confine aucunement les religions dans la sphère privée.
D’abord, ce serait trop ridicule de légiférer sur ce qui concerne la sphère privée (« charbonnier est maître chez lui », l’Etat n’a pas à fourrer son nez dans le linge sale des familles) ; et l’Etat n’a jamais osé affronter ce ridicule.
Ensuite, une loi qui interdirait la sphère publique aux religions viole la liberté de conscience promue au rang de vertu cardinale républicaine par la Constitution. Surtout que, dans ce cas de figure, cet article 2 de la loi du 09 décembre 1905, ainsi biaisé par le sophisme ambiant, viendrait contredire l’article 1 qui, lui au contraire, garantit toutes les libertés : c’est là une anagogie dont seule la transduction ésotérique laïciste débridée est capable.
Notons que, ne serait-ce que par ce quiproquo, la loi du 09 décembre 1905 n’aurait jamais pu percoler au travers du filtre constitutionnel (elle aurait été rejetée car anticonstitutionnelle).
Sur ces derniers points le Conseil Constitutionnel doit être saisi ; et le citoyen lambda que je suis ne peut le saisir car cet acte incombe aux « gardiens du temple républicain » : les Présidents de la République, du Sénat et de l’Assemblée Nationale. Alors, à votre devoir, messieurs ! il y va de la paix civile.
Non, l’article 2 de la loi du 09 décembre 1905 ferme la porte à un éventuel retour de la Religion Catholique religion d’Etat ; il sépare le pouvoir temporel (l’Etat) du pouvoir spirituel (l’Eglise) et interdit à ce dernier d’empiéter sur les prérogatives de l’état.
L’Etat s’interdit toute compétence en matière de religion, affirmant sa neutralité en se retranche derrière la liberté de conscience des citoyens et l’égalité de ces derniers en droits et en devoirs. L’Eglise a rechigné à l’accepter puis elle a fini par y trouver son compte et se contenter de n’être que le pouvoir spirituel. Jésus-Christ, sauveur et révolutionnaire, avait rappelé à ses ouailles qu’ « il faut laisser à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ».
Quant au voile à l’école ( soi-disant musulman , mais qui ne l’est pas en réalité) : l’Etat, qu’ excite à l’excès cette fanfreluche , devrait , pour la paix civile, demander – une bonne fois pour toutes - la lumière des islamologues ( de chez nous , s’ils préfèrent , mais d’avant 1979 ou , de préférence, du 19ième siècle, pour bien se tenir à l’écart de l’infection islamiste et de la fièvre laïciste qui s’entre-potentialisent , à l’évidence ).
Le voile à l’école est ressenti comme revendicatif, du fait de la cacophonie médiatique qu’il génère ; c’est désormais, qu’il le veuille ou non, un signe ostentatoire prohibé par la laïcité de l’Ecole (loi de 1905, dont l’article 2 est minoré par les circulaires Jean Zay) et par la loi de 2004, concomitamment.
Les élèves musulmanes doivent accepter cette nouvelle donne, il y va de leur avenir. Les fanfreluches, qui peuvent rendre fous, nous le savons tous, pointées du doigt, hystériquement, par les laïcistes, sont devenues une manière de « clou de Jeha » - une fixation, source de tous les tracas possibles .Aussi, ne leur tendez pas le fouet de votre flagellation.
Le voile à l’Ecole, agité par la propagande laïciste, vire à l’arme de destruction massive de la citoyenneté, de l’intégration et l’avenir immédiats de ces filles.
Pour le reste, les enfants, ouvrez un annuaire téléphonique du sud-ouest, et constatez que les noms à consonances arabe et berbère – malgré la patine du temps- sont nombreux ; c’est bien la preuve que les hommes et les femmes qui les portent ont été et sont miscibles dans « la race française », n’en déplaise aux servants de la distillerie de la haine.
À jouer à « emmerder l’emmerdeur » - un plaisir fugace et toujours stérile- les filles, vous vous livrez à un « qui perd gagne » ou un « qui gagne perd », le résultat est le même: vous serez perdantes. Pour ce qui concerne la résilience, Eve vous a légué bien des atouts, autrement plus conséquents, pour vos jeux de filles, de femmes et de mères : la ruse et la retenue n’en sont pas les derniers…
Le voile des adultes (citoyennes de plein droit, non préposées de l’Etat, ni assimilées) relève, lui, de la liberté de conscience (quand bien même se tromperaient–elles sur le rôle du voile dans l’Islam) et, partant, se trouve sous la protection de l’Etat qui s’honorerait à respecter et faire respecter sa Loi et sa Constitution ainsi que les traités internationaux qu’il a signés.
Le rapport de la Mission de Contrôle ajoute :
2) « La laïcité est un principe conçu contre les religions ».
Effectivement, l’histoire montre que ce principe a été conçu contre la religion catholique (religion d’Etat durant l’ancien Régime), et son clergé, un ci-devant pouvoir spirituel, selon le lexique sans-culottier. Ce pouvoir avait tenté, abusivement, au cours de l’Histoire, d’en imposer au pouvoir temporel de l’Etat et de rogner sur ses prérogatives (lire précédents billets, googlez : l’Escarbille de Belab, Club Médiapart).
Le protestantisme et le judaïsme avaient applaudi à l’abolition du Catholicisme religion d’Etat en 1791 et se sont réjouis de la loi du 09 décembre 1905, promouvant la laïcité, donc la neutralité de l’Etat, au rang de vertu cardinale républicaine.
L’islam, lui, n’était pas encore arrivé en France Métropolitaine, d’une part, et d’autre part, le pouvoir colonial n’avait pas estimé devoir appliquer la loi sur la laïcité à l’Algérie, département français. Et pour cause : elle aurait de facto forcé, à terme, la citoyenneté française des « sujets de la France » qu’étaient les indigènes d’Algérie. Ce dont le lobby « coloniste », comme on disait à l’époque, ne voulait à aucun prix.
L’islam jouait déjà le rôle de l’épouvantail et matérialisait la ligne de démarcation. In fine, nos contemporains laïcistes puisent – copieusement - d’une part dans le malheur juif et d’autre part dans le malheur de l’Algérie coloniale, pour synthétiser ce « savoir-faire », ce legs nocif de deux histoires lancinantes de douleur, qui lui permet de rénover, par petites touches impressionnistes, sa propagande, bon an, mal an, depuis 1989 et l’affaire du foulard de Creil.
Rappelons que ni le coran ni les hadiths- livres principaux de l’Islam- ne mentionnent le voile : ce n’est donc qu’un couvre-chef coutumier et qui varie d’une contrée à une autre par sa forme, sa couleur, son ampleur. Par contre le voile est juif par l’ancien testament et chrétien par l’Epitre de St-Paul aux Corinthiens. Si ces deux religions l’ont dédramatisé, l’islam de France pourrait le faire encore plus facilement et, ce faisant, désarmerait durablement ses ennemis.
Rappelons qu’il y a eu au cours des années sombres de l’antisémitisme triomphant (temps durant lesquels des juifs ont été défenestrés parce que juifs, à Reims par exemple en 1936/1937) bien des affaires de « voile juif » : les juives traditionalistes mariées avaient contourné la menace en adoptant la perruque pour cacher leurs vrais cheveux. Tout récemment, une de ces traditionalistes juives, molestée par la police au cours d’une interpellation, a vu sa perruque confisquée et la réclamait en proie manifestement à une grande émotion et confusion : je suis juive, je suis mariée et ma religion m’impose de couvrir mes cheveux [4] https://www.youtube.com/watch?v=OnmzgTqPnnA. Les Elisabeth Levy, les Finkielkraut, les Zemmour et les autres, qui jouent les oublieux, alimentent le foyer de la haine entre Français : ils portent une lourde responsabilité.
Le rapport de la Mission de Contrôle et le bonneteau lexical laïciste :
3) Confusions « laïcité et tolérance », « laïcité ouverte », « laïcité plurielle »,
Tous ces qualificatifs résultent de l’enfumage des lobbies laïcistes qui sèment l’équivoque pour tromper la vigilance des Français et occulter la réalité. À preuve : les premiers concernés, les professeurs des Ecoles eux-mêmes, sont ainsi piégés et patinent dans l’ornière sémantique laïciste. Le rapport de la Mission de Contrôle Sénatoriale, lui-même , le déplore à sa façon: « la défense de la laïcité se délite aussi chez les adultes concourant à la vie de l’établissement (…)Bercés par « des débats publics confondant laïcité et tolérance » et l’émergence de termes tels que « laïcité ouverte », ou « laïcité plurielle », un certain nombre de jeunes enseignants s’interrogent sur son utilité et l’opportunité de conditions spécifiques d’application dans le cadre scolaire » ?
La laïcité n’est ni ouverte, ni plurielle car, régie par une loi, elle est univoque et d’interprétation stricte ; inscrite dans le marbre constitutionnel, elle est intouchable. Mais assurément la laïcité est tolérante [5] : elle a été voulue comme telle par Jean Jaurès et Aristide Briand.
Que cesse ce tripotage de la loi et de la Constitution ! Ce qui se passe est un scandale doublé d’une trahison.
Sources :
[2] Comment Val et Malka ont amené au ‘casse-pipe’ l’équipe de Charlie Hebdo | Le Club (mediapart.fr)
[3] https://www.youtube.com/watch?v=Ja1Z8eSYTG4
[4] https://www.youtube.com/watch?v=OnmzgTqPnnA
[5] Extraits : La foi laïque , Ferdinand Buisson | Le Club (mediapart.fr)