Billet de blog 24 avril 2008

David Dufresne (avatar)

David Dufresne

Écrivain-documentariste, AuPoste.fr, Allo Place Beauvau, «10h59» (Grasset), Un pays qui se tient sage (2020), punk rock et contre filatures.

Pigiste Mediapart

Pour qui sont ces crieurs qui crient sur nos crânes ?

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David Dufresne

Écrivain-documentariste, AuPoste.fr, Allo Place Beauvau, «10h59» (Grasset), Un pays qui se tient sage (2020), punk rock et contre filatures.

Pigiste Mediapart

C’est une figure un peu jaunie. Une icône du passé. Un gamin qui a tant vieilli qu’il est quasi mort. C’est le crieur de presse, vaguement remis au goût du jour ces derniers jours (casquette rouge et presse gratuite MétroSoirMinute à la sortie du métro). Le journalisme est un art étrange : à force de s’occuper du passé récent, du presque présent, et du plus que présent déjà passé et jamais parfait, ce genre a une tendance : celle d’aimer le passé. En un mot, le journalisme est, par essence, nostalgique. C’est ce qui le rend amer et beau. Mortifère et vivant. Ainsi, l’autre soir, dans le métro, justement, cette affiche, pour le (re)lancement d’un (ancien grand) journal (qui fut) populaire :

Illustration 1


Puis, quelques minutes plus tard, sur un des blogs de Mediapart, signé d'un dénommé Plenel Edwy, ce dessin courtesy Plantu :

Illustration 2


Et puis, bien sûr, depuis décembre 2007, le p’tit gavroche de Mediapart, aux origines déjà cernées.

Illustration 3


Sourires devant cette avalanche de gamins à casquette plate. Souvenirs, aussi, d’une courte et belle aventure, qui s’appelait Le Jour, petit quotidien parisien à l’aube des années 90, fils damné d’un Libé qui n’aurait pas grossi. Et dont chacun des rédacteurs, à tour de rôle, se faisait crieur. Mais, soupirs, aussi, devant tous ces crieurs muets, ces images d’Epinal à l’heure du Net. Que nous disent-ils, ces crieurs sans voix ? Qu’aujourd’hui, on écrit mal dans les journaux et que personne ne crie ? Que, sur le Net, comme le disait l’adage des débuts : personne ne vous entend crier ? Ou bien que le journalisme est mort et que ses ongles poussent encore, ici ou là ? Ou bien encore que toutes les Jean Seberg du monde sont bien à bout de souffle, qu’on ne trouve plus d’Herald Tribune sur les Champs Elysées ?

Illustration 4


Et si dans le regard de ces crieurs, il y avait tout ça à la fois? La fin d’un monde et le début d’une mutation totale. La nostalgie et le futur. Le papier et le Net.