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Billet de blog 3 oct. 2019

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Propositions pour la convention citoyenne pour le climat (1/4)

Voici une liste de propositions de mesures concrètes qui pourraient être décidées par la convention citoyenne pour le climat, et qui ne se veut qu'une modeste contribution au débat.

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Mise à jour le 20/01/2020

La convention citoyenne pour le climat qui s'ouvre vendredi 4 octobre et dont les conclusions sont attendues pour début janvier 2020 est un exercice inédit décidé par le gouvernement. Comme je l'expliquait dans un précédent billet, au-delà de la récupération politique qui peut en être faite, c'est une occasion de centrer le débat écologique sur le fond et d'inciter à une plus grande prise de conscience de la gravité de la situation et des remises en cause indispensables à la lutte contre le changement climatique.

Je présente ici une modeste contribution à ce débat, comme y invitent les organisateurs de la convention. J'invite tout citoyen à faire de même, ne serait-ce que pour s'interroger personnellement et tenter de prendre conscience de ce que signifient les bouleversements nécessaires.

Les propositions énumérées ci-dessous se veulent les plus concrètes possibles (pas de grandes incantations théoriques), applicables à court terme (pas des résultats repoussés à 2050), d'une complexité de mise en oeuvre raisonnable (éviter les "usines à gaz"), et qui ne reposent pas sur des promesses technologiques (ne pas s'en remettre à des paris sur le progrès).

Thème 1 - La publicité moteur de la surconsommation

Rarement pointée du doigt, la publicité est pourtant le moteur de la surconsommation de nos sociétés développées. Elle célèbre l'envie et le vice, forge un modèle de l'opulence et du paraître qui irrigue toutes les couches de la société. La réduction de nos émissions de GES, commence par la réduction notre consommation en général, par délaisser le superflu pour revenir au nécessaire (comme la loi Evin de 1991 a pu contribuer au recul du tabagisme en interdisant sa publicité).

1a) Interdire la publicité pour des produits fortement émetteurs de GES (ou à défaut et à court terme forcer des mentions légales "ce produit a un effet néfaste sur le climat," à la manière de "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé"). La première cible d'une telle mesure est l'automobile, mais les exemples pourraient être nombreux (compagnies aériennes, sports d'hiver, viande, etc...).

1b) Interdire les affichages publicitaires lumineux ou animés, qui en plus de pousser à la consommation sont énergivores, que ce soit dans la métro ou le long du périphérique parisien. Pour les enseignes des commerces, l'éclairage ne devrait être autorisé qu'aux horaires d'ouverture des établissements.

1c) Interdire la distribution de prospectus autrement qu'en main propre (courriers non adressés, flyers déposés sur les pare-brises, etc...)

1d) Revenir à des médias publics sans publicité. Les média publics bénéficiant de la redevance devraient être exempt de tout financement par la publicité. De nouvelles pistes pourraient être imaginées pour en assurer la subsistance comme permettre au contribuable d'orienter une redevance qui serait majorée.

1e) Imposer la publication des recettes publicitaires dans les comptes des entreprises (et la liste des principaux annonceurs). Cette mesure n'aurait pas d'effet direct de réduction, mais on peut espérer que cette transparence représenterait un frein ou permette ensuite de cibler de futures restrictions.

A noter que je ne mentionne pas ici de nombreuses mesures qui devraient être prises à un échelon local comme la réduction du nombre de panneaux publicitaires le long des routes, dans les transports en commun, etc...

Enfin plus important -et plus complexe - il faut trouver un moyen de freiner le marketing via les médias numériques qui est l'objet de la rubrique suivante.

Thème 2 - Le numérique, mettre des limites à un impact croissant

Pour nous dispenser des applications de plus en plus consommatrices sur des appareils de plus en plus nombreux, les immenses data centers nécessaires aux infrastructure numériques sont le poste d'émissions de GES à la plus forte croissance. Il est impératif de poser des limites à ce développement (car il pourrait annihiler tous les autres efforts), choses qui n'est pas aisée pour ce domaine mondialisé et financé majoritairement par la publicité.

2a) Imposer une mention légale sur tout support numérique publicitaire, similaire à ce qui existe dans la presse papier (qui doit expliciter tout encart publicitaire). Par exemple : bandeau mentionnant tout site web contenant des publicités (comme cela été fait pour les "cookies"), mention en introduction des e-mails publicitaires et dans les messages sur les réseaux sociaux, y compris et surtout dans les messages personnalisés.

2b) Taxer la vente les appareils électroniques connectés (ordinateurs, téléphones, etc...) par exemple en instaurant une nouveau taux de TVA à 30% ou 40%, afin de freiner leur multiplication et inciter à une obsolescence moins rapide de ce type d'appareils.

2c) Instaurer une taxe sur les revenus publicitaires (du numérique, voire de tout support) en complément de la proposition 1e. Elle encouragerait le modèle du web payant (comme Mediapart !) face au web "gratuit" (c'est à dire gavé de revenus publicitaires).

2d) Imposer un modèle payant à tous les contenus pornographiques. Les contenus pornographiques représenteraient 35% du trafic internet ! Imposer un accès payant à tout contenu pornographique, en retirant la part des contenus gratuits financés par la publicité, remplirait un double objectif : réduire le trafic (et donc l'empreinte écologique) et protéger les adolescents.

2e) Ne pas déployer la 5G. Comme l'a très bien évoqué Jean-Marc Jancovici dans une tribune, la nouvelle génération de réseaux mobiles promet des débits de données beaucoup plus importants, mais dont les bénéfices en terme d'usage restent à prouver (la 4G permettant déjà le streaming vidéo). De plus, du fait des fréquences utilisées à plus courte portée et du renouvellement nécessaire des équipements, la "facture carbone" de cette technologie des lourde (augmentation de 2% de la consommation électrique nationale !). La sagesse conseillerait donc de suspendre l’attribution des fréquences nécessaires aux réseaux 5G.

Thème 3 - Les plus riches d'abord, une question morale

Cette section qui traite des plus riches a surtout une portée symbolique. Dans l'"esprit de justice sociale" du mandat de la convention, il est indispensable que les plus grands excès soient bannis, et ce même si d'un point de vue comptable ces émissions de GES d'une toute petite minorité représente finalement peu à côte de la masse des citoyens. Mettre en place des "interdits écologiques" et pas uniquement des taxations qui ont le travers de renforcer les marqueurs de richesse.

3a) Interdire le tourisme spatial à tout ressortissant français. Exemple extrême, le tourisme spatial qui va apparaître dans quelques années constituera une dépense énergétique considérable que seuls quelques milliardaires pourraient s'offrir.

3b) Restreindre et progressivement interdire l'accès des yachts et des jets privés aux infrastructures françaises. Pour ne réserver ce type d'appareils qu'à des services étatiques. La progressivité pourrait se faire en limitant les sites autorisés et en fixant des tailles maximales dans un premier temps.

3c) Fixer des limites aux constructions à destination de particuliers. Pour tout nouvelle construction (car difficilement applicable aux bâtiments historiques), fixer une surface habitable et une hauteur maximale, une limite de volume des piscine, ou autre bassins artificiel, etc... afin d'empêcher la construction de villas démesurées.

3d) Interdire les avions supersoniques. Bien que le Concorde ne vole plus, de nouveaux programmes d’avions supersoniques sont en train d’émerger à destination d'hommes d'affaires richissimes. Tout comme la limitation de la vitesse sur les routes, l'interdiction des avions supersoniques (en tout cas pour le civil) est un moyen de limiter la vitesse des avions et l'emprunte carbone des plus riches.

3e) Interdire la circulation des limousines, qui généralement ne transportent que bien peu de personnes, en fixant une longueur maximale aux véhicules particuliers. 

à suivre...

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