Or celle-ci en France fait peu pour la Palestine et rien pour l’Ukraine. Qu’est ce qui freine à gauche la mobilisation de soutien à l’Ukraine ? L’affirmation de Poutine que l’armée russe impérialiste est l’héritière de l’armée rouge libératrice contre le nazisme ? Que les ukrainiens étant blancs ne peuvent pas vraiment être un peuple colonisé ? L’incapacité de faire l’analyse actuelle, concrète et plaquer sur les situations actuelles les grilles d’analyse du passé ? jusqu’à reproduire même les erreurs d’analyse du passé !
Ainsi beaucoup à gauche, consciemment ou non, répètent les erreurs d’analyse de Rosa Luxembourg, soutenue par Trotski, lors de la première guerre mondiale : l’idée qu’au temps de l’impérialisme, tous les conflits sont en fait entre impérialistes. La lutte des peuples pour l’émancipation et l’indépendance ne seraient essentiellement que des conflits inter impérialistes. Il ne faut pas choisir de camp car ce serait une alliance avec un camp impérialiste. Dans tous les conflits il faut dire « guerre à la guerre », souhaiter les compromis, concéder territoires et populations au nom de la paix. Lénine dès 1916 a critiqué cette position qui interdit aux travailleurs et aux peuples opprimés de lutter. S’il admet que cette erreur d’analyse de Rosa Luxembourg n’est pas grave dans le cas concret de la guerre de 14-18[1], parce que les deux camps sont de même nature et de même force, en 39-45 cette erreur sera tragique. La position trotskiste « Ni Churchill ni Hitler » mène alors de fait à l’inaction. Au contraire l’URSS et le mouvement communiste passent l’accord avec le camp impérialiste dominant de l’époque, les impérialismes français, anglais, américain, pour battre le nazisme. Par la suite le mouvement communiste a soutenu les luttes d’indépendance des peuples même s’ils ne visaient pas au dépassement du capitalisme. Les résistances de Palestine et d’Ukraine sont parmi les dernières de ces luttes.
PALESTINE UKRAINE MÊME COMBAT !
Que dans leur lutte pour l’émancipation les peuples prennent appui sur l’impérialisme adverse est légitime. La lutte est difficile. On sait que Lénine lui-même obtient un wagon du camp allemand pour rejoindre la révolution russe. Si Poutine aide la Palestine, et Trump l’Ukraine tant mieux. Cela ne fait ni de la Palestine ni de l’Ukraine essentiellement des conflits entre impérialistes. Ce sont avant tout les luttes légitimes des peuples pour leur indépendance. Zelenski est le De Gaulle ukrainien, avec toutes ses ambiguïtés, à la fois dirigeant la résistance et représentant les intérêts de la bourgeoisie ukrainienne et réprimant les droits des travailleurs. Sans toutefois que Zelenski n’atteigne les côtés criminels et impérialistes de De gaulle qui faisait bombarder Sétif et tuait 10 000 personnes le 8 mai 1945 en Algérie ! En Palestine la résistance est dirigée également par la bourgeoisie religieuse du Hamas qui l’oriente vers une stratégie terroriste dont les conséquences sont éprouvantes pour les travailleurs palestiniens.
Cependant, malgré les difficultés générées par les bourgeoisies leaders de la lutte dans leurs pays respectifs, toutes les organisations de travailleurs, aussi bien en Palestine qu’en Ukraine sont dans la résistance à leurs agresseurs spécifiques.
Ces agresseurs, Russie et Etats-Unis avec son détachement israélien, s’ils aident les peuples en lutte contre leur concurrent, l’Ukraine pour les Etats-Unis, la Palestine pour la Russie sont susceptibles de les lâcher à tout moment. Ils sont prêts à leur tordre le bras pour qu’ils cèdent des territoires, le Donbass et la Crimée pour l’un, la partition de la Palestine en deux états pour l’autre. Donc prêts à soumettre les populations ukrainiennes au fascisme russe, comme palestinienne au fascisme israélien.
Russie et Etats-Unis sont à la fois en rivalité et en connivence. Ils partagent la même idéologie de suprémacistes blancs enrobée de religion, proche du fascisme, développée par leurs idéologues, Karaganov, Sourkov, Kirill, Douguine etc. en Russie, Yarvin, Thiel, Fuente, Kirk, Vance, etc. aux Etats-Unis. C’est pourquoi leur soutien aux luttes des peuples qui combattent leur concurrent est fragile. Ils sont toujours prêts à trahir les peuples. C’est pourquoi dans chaque lutte les travailleurs doivent veiller à leur autonomie d’organisation et de décision.
LE SOUTIEN CONJOINT A LA PALESTINE ET A L’UKRAINE ETOFFE LE PROJET DE GAUCHE
- Le soutien à la Palestine manifeste le rejet réel du colonialisme, l’alliance avec les pays du Sud. Orientation nécessaire majeure d’un projet de gauche dans un pays capitaliste riche comme la France. La faible mobilisation de la gauche française pour la journée de l’immigration du 18 décembre dernier est à cet égard regrettable. Par l’absence de protection qu’elle constitue, cette faible mobilisation limite également la mobilisation des travailleurs immigrés.
- Le soutien à l’Ukraine manifeste aussi le contenu démocratique d’un projet de gauche. Le rejet des systèmes dictatoriaux comme celui de Poutine. Le soutien à la Palestine et à l’Ukraine, qui luttent contre les deux promoteurs des extrêmes droites dans le monde, Poutine et Trump, est une composante essentielle de la lutte antifasciste.
- Il faut se méfier des grandes considérations géopolitiques et prêter plutôt attention à ce que les peuples en lutte, et en particulier les organisations de travailleurs, veulent eux-mêmes. En Palestine comme en Ukraine elles l’expriment de façon unanime : résistance ! Il faut renforcer l’autonomie des travailleurs dans chaque lutte et l’unité des travailleurs au-delà des frontières. Il faut se démarquer de la corruption des dirigeants ukrainiens et palestiniens, de la dépendance des dirigeants d’Ukraine aux Etats-Unis, de l’intégrisme religieux et du terrorisme des dirigeants du Hamas, ainsi que de toutes les religions, chrétienne, orthodoxe, judaïque, islamiste qui alimentent toutes ces tragédies. C’est ce que les drapeaux rouges symbolisent.
- Ils sont l’amorce de ces organisations communistes modernes dont l’absence fait cruellement défaut, non seulement en Palestine et en Ukraine, mais on le voit aussi dans l’échec des gauches en Amérique du Sud, comme dans le piétinement de la gauche ici en France.
Voir aussi les billets : La guerre approche… vouloir la paix mais comment ?
[1] « Parce que les forces des deux coalitions ne sont pas tellement différentes… dans la guerre ACTUELLE ». Lénine soulignant actuelle plusieurs fois. A propos de la brochure de Junius, 1916. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/07/vil191607001.