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Billet de blog 24 octobre 2024

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Abandon de noms illustres dans Paris

Les noms du général Bugeaud, du général Richepance et d'Alexis Carrel ont disparu des rues de Paris.

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De nombreuses voies parisiennes portent des noms sans charge mémorielle. Mais la plupart honorent des personnages illustres et ces nominations sont liées à l’Histoire. Elles bénéficient d’une certaine permanence : changer  le nom d’une rue impose un certain nombre de contraintes. Il faut remplacer les plaques qui l’identifie et modifier les adresses de ceux qui y habitent. Ces opérations coûteuses freinent de tels changements et, en conséquence, des noms qu’il convient d'oublier demeurent. Mais parfois des édiles décident malgré tout d’ordonner leur disparition. C’est ainsi que l’avenue Bugeaud vient d’être débaptisée, partageant le sort de la rue Villepance et de la rue Alexis Carrel. Paris a rendu hommage à trois personnes dont jusqu’ici le nom ne figurait pas sur des plaques de rue : Hubert Germain, le Chevalier de Saint-George et Pierre Ribière.

Autrefois, des puissances européennes, qui affirmaient apporter à des indigènes les bienfaits de la civilisation ainsi que la parole divine, occupaient des pays lointains pour en exploiter les richesses. C’est ainsi que le général Bugeaud, après avoir pris part à la répression des révoltes de 1830  et 1848, s’illustra lors de la conquête de l’Algérie. En 1865, le second empire avait donné son nom à l’avenue de Saint-Cloud. Cette voie qui, dans  le 16ème arrondissement de Paris, relie la Porte Dauphine à la place Victor Hugo, vient d’être baptisée avenue Hubert Germain, du nom de celui qui rejoignit la Grande-Bretagne dès juin 1940. Ultime survivant des 1.038 Compagnons de la Libération, il est décédé le 12 octobre 2021, à l’âge de 101 ans.

https://blogs.mediapart.fr/malesherbes/blog/191024/la-carriere-glorieuse-du-general-bugeaud

Dans le 8ème   arrondissement de Paris, à proximité du Marché Saint-Honoré, une rue fut créée en 1865 lors des travaux du baron Haussmann. Elle portait le nom du général Antoine Richepance. En avril 1794, avec l'appui des planteurs esclavagistes, les Britanniques avaient repris possession de la Guadeloupe. Cette même année, la Convention montagnarde abolit l’esclavage. Le premier consul Bonaparte envoya en Guadeloupe des troupes qui, avec l'aide de sans-culottes noirs, vainquirent les Britanniques. La plupart des grands propriétaires prirent alors la fuite tandis que d’autres  furent fusillés ou guillotinés. Quelque temps plus tard,  une partie des troupes françaises locales de couleur s’étant révoltée, Napoléon 1er envoya en Guadeloupe un corps expéditionnaire avec Antoine Richepance comme général en chef. En 1802, l'empereur nomma le général victorieux gouverneur de la Guadeloupe et rétablit l’esclavage dans l’île. Le nom de Richepance, gravé sous l'Arc de triomphe de l’Étoile, a en 2001 cédé la place  à celui de Chevalier de Saint-George, même si, désormais honni, il figure encore sur une plaque de ladite rue.

https://blogs.mediapart.fr/malesherbes/blog/241024/noirs-et-metis-dans-la-societe-francaise

Le prix Nobel de physiologie ou médecine fut décerné en 1912 à Alexis Carrel pour ses travaux sur la suture vasculaire et la transplantation d'organes, ainsi que pour ses contributions à la chirurgie expérimentale. Il avait traité de l'eugénisme dans certaines de ses œuvres, notamment en 1935, dans L'Homme, cet inconnu. Selon lui, il convenait de :

  1. Éliminer les individus jugés "inférieurs"
  2. Contrôler la reproduction 
  3. Encourager la sélection des plus aptes 

La rue du 17ᵉ arrondissement de Paris qui avait reçu son nom s’appelle désormais Pierre-Rebière, en hommage à  un résistant français, membre de la police et du groupe de Résistance "Libération Nord". Il avait été arrêté en 1944 et est mort en déportation.

https://blogs.mediapart.fr/malesherbes/blog/231024/alexis-carrel-prix-nobel-1912

Les édiles se trouvent parfois à court de lieux disponibles pour honorer tel ou tel personnage illustre. Cela aboutit à des situations que je qualifie de cocasses. Les Parisiens n’ont vraisemblablement pas remarqué un trottoir long d’une vingtaine de mètres situé au croisement de la rue du Faubourg  Saint-Honoré, de l’avenue Haussmann et de l’avenue de Friedland. Ce lambeau de terrain a été récemment été gratifié de la désignation « Place Maurice Couve de Murville ». Hommage discret à l’homme qui, sous la présidence  de De Gaulle, fut Premier ministre et, pendant près de dix ans, ministre des Affaires étrangères. 

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