Plan du Billet
1. Pédophilie, pédocriminalité, pédosexualité ?
2. La pédocriminalité
3. La violence sexuelle et la justice
4. Les conséquences de la pédocriminalité
5. La pédopornographie et les réseaux de prostitution
6. Quel coût pour les violences sexuelles ?
Avant-propos
Ce premier billet du dossier « La pédocriminalité en question » propose un état des lieux sur ce crime sexuel, certes non-exhaustif, mais d’autres billets suivront pour affiner certains points et en discuter d'autres. La pédocriminalité est un fléau social qui touche tout le monde, en tant que victime d’abord, mais aussi en tant que témoin. En effet, grâce aux enquêtes de victimation, nous pouvons émettre l’hypothèse que nous connaissons tous, parfois sans le savoir, une personne qui a été victime de pédocriminalité.
En 2007, les 47 pays qui constituent le Conseil de l’Europe ont signé la convention de Lanzarote, officiellement intitulée : « Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels ». Elle devait être contraignante en construisant les fondements d'une lutte contre la pédocriminalité au niveau européen. Cependant, elle s’est embourbée dans les lenteurs bureaucratiques et n’est rentrée en vigueur que le 1ier janvier 2016, tout en étant que très partiellement mise en place. Tout comme le Grenelle des violences conjugales, la montagne a accouché d'une souris.
1. Pédophilie, pédocriminalité, pédosexualité ?
a. Sur le vocabulaire
Etymologiquement, la pédophilie provient du grec ancien « paidóphilos », dérivé de « paîs », qui se traduit par « enfant », et de « philos » se traduisant par « ami », « personne qui aime ». La pédo-philie serait donc « l’amour d’un adulte à l’égard des enfants ». Cependant, je refuse d’utiliser ce terme au sein de ce dossier. Tout comme de nombreuses associations qui luttent pour le droit des enfants, je considère qu’il faut utiliser des mots réparateurs pour les victimes. Le pédo « n’aime pas les enfants » lorsqu’il harcèle, agresse ou viole. Les enfants ne subissent pas un amour incontrôlable d’un adulte qui « abuse » d’eux, un terme qui doit également être oublié. « L’ abus » fait référence à un comportement un « peu trop excessif » et euphémise ainsi la violence sexuelle. J’utiliserai donc les termes de pédocriminalité et de pédocriminel pour définir les actes criminels des adultes à l’encontre des enfants, et le terme de « pédosexuel abstinent » pour ceux qui ne passent pas à l’acte. Par ailleurs, j’utiliserai le terme de « pédosexualité » en tant que catégorie psychiatrique pour discuter de ce phénomène.
b. La pédosexualité, une tentative de définition psychiatrique
Dans le champ des sciences psychologiques, il n’y a pas de consensus sur la définition de cette déviance. Le DSM-IV-TR – la classification internationale des troubles mentaux – utilise trois critères pour la diagnostiquer :
- « La survenue récurrente et fortement excitante sexuellement, de fantasmes, de désirs sexuels ou de comportements impliquant une activité sexuelle avec un ou des enfants non pubère(s) (généralement âgé(s) de 13 ans ou moins) sur une période d'au moins six mois.
- Ces désirs sexuels ont été suivis de passage(s) à l'acte, ou bien ces désirs, ou fantasmes sont à l'origine d'une détresse marquée, ou de difficultés importantes dans les relations interpersonnelles
- Le patient a au moins 16 ans et a au moins cinq ans de plus que le, ou les enfant(s) mentionnés dans le critère (a). »
Par ailleurs, la pédosexualité est hétérogène. Elle peut être exclusive, c’est-à-dire que le pédosexuel n’est attiré que par les garçons et/ou les filles. Elle peut être préférentielle : il est plus attiré par un certain âge, par les garçons ou les filles. Pour finir, elle peut être secondaire, c’est-à-dire que le pédosexuel peut avoir des relations avec les adultes et momentanément des fantasmes pour les mineurs, avec des passages à l’acte ou non.
2. La pédocriminalité
a. Les victimes de violences sexuelles
Je propose ci-dessous un tableau statistique de la pédocriminalité au travers des enquêtes de victimation. Selon les études, les chiffres peuvent diverger. Ceci est surtout dû à deux choses : les évolutions de la société et la manière de poser les questions. Cependant, les résultats de ces enquêtes sont actuellement les plus fiables et les plus sérieuses. Elles nous permettent de visualiser la réalité de ces violences cachées, car peu dévoilées, reconnues et condamnées.
Grâce à différentes enquêtes telles que CSF 2008, ONDRP 2010-2015, VIRAGE 2017, nous savons qu’il y a entre 154 000 à 165 000 enfants qui subissent des violences sexuelles (viols et tentatives) par an : 124 000 à 130 000 filles - 30 000 à 35 000 garçons. C’est approximativement 1 femme sur 6 et 1 homme sur 20 qui ont subi au moins un viol ou une tentative de viol dans leur vie, dans plus de 60% des cas en tant que mineur.e.s.
L’inceste est la dimension la plus grande de la pédocriminalité. Dans les enquêtes de victimation, les chiffres ont triplé depuis 2009. Une enquête de 2009 montrait que 3 % de la population française (2 millions de personnes) étaient victimes d’inceste. Celle de 2015 environ 6 % de la population (4 millions de personnes), et l’enquête de l’Ipsos de novembre 2020 10 % de la population (6,7 millions de personnes). Dans ce questionnaire, 32% des répondants ont affirmé connaître au moins une ou plusieurs victimes de ce crime sexuel.
Si nous prenons l’ensemble des violences sexuelles, tous âges confondus, ce sont les enfants – majoritairement les filles – qui sont les principales victimes. On considère qu’environ 1 fille sur 5 et 1 garçon sur 13 subissent des violences sexuelles. L’enquête IVSEA de 2015 de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie élaborée autour de 1214 victimes, montre que 81 % des violences sexuelles commencent avant 18 ans, 51 % avant 11 ans et 21 % avant 6 ans. Contre certaines idées reçues, les violences sexuelles sont présentes dans toutes les classes sociales et les origines ethniques (ENVEFF, 2000 ; CSF, 2008 ; ONDRP 2010-2015 ; IVSEA, 2015 ; VIRAGE, 2016-2017). Par ailleurs, les enfants en situation de handicap subissent 4 fois plus de violences à cause de leur vulnérabilité, et plus particulièrement les filles ayant un handicap mental et neuro-développemental : jusqu’à 90% des femmes ayant des troubles du spectre de l'autisme ont subi des violences sexuelles - 78% tous sexes confondus -, selon les travaux de Brown-Lavoie de 2014, et plus particulièrement durant leur minorité.
Pour finir, la synthèse des études initiées durant plusieurs années par le Conseil de l’Europe montre qu’environ 20 % des enfants en Europe sont victimes au moins une fois de violence sexuelle – avec une définition qui se veut non-restrictive, car elle ne se résume pas aux viols et aux agressions sexuelles comme de nombreuses enquêtes de victimation, aussi rigoureuses soient-elles. Ainsi, le Conseil conclut que « selon les données disponibles » un enfant européen sur 5 aurait été « victime de violences sexuelles, sous une forme ou une autre... ». Les violences sexuelles se composent : « des attouchements sexuels, des viols, des harcèlements et agressions sexuelles, de l'exhibitionnisme, l'exploitation sous forme de prostitution et de pornographie, du chantage et des extorsions sexuelles en ligne. »[1]
3. Les auteur.e.s de pédocriminalité
Qui sont les pédocriminels ? Nous savons que dans environ 90 % des situations, l’agresseur est connu de la victime. Plus précisément, dans la moitié des cas, les violences sexuelles sont faîtes par un membre de la famille. Par ailleurs, ce sont les hommes (90 à 98 % des situations) qui commettent les violences. Les agresseurs proviennent de tous les milieux sociaux, de toutes les origines. Ce n’est pas, contrairement à un imaginaire qui commence maintenant à s’effondrer, un homme fou, isolé, désocialisé, non-intégré, ayant de graves troubles mentaux etc…La plupart des pédocriminels sont parfaitement intégrés à la société. Le violeur est bien souvent un père, un frère, un cousin, un bon ami, un voisin, un collègue de travail, une personne estimée. Sans tomber dans le sensationnalisme, il faut comprendre que les agresseurs sexuels sont partout : dans nos familles, sur nos lieux de travail, dans notre cercle amical etc…Pour violer des millions de personnes, il faut des millions d’agresseurs.
4. La violence sexuelle et la justice
a. La France, le paradis des pédocriminels ?
La justice française n’a jamais construit de véritable cadre juridique, avec des lois contraignantes pour protéger les enfants des violences sexuelles des adultes. Par exemple, elle n’a jamais fixé de seuil d’âge de non-consentement pour des actes sexuels, contrairement à de nombreux pays européens : « Seule une jurisprudence de la cour de Cassation du 7 décembre 2005 a considéré que l'état de contrainte ou de surprise résultait du très jeune âge des enfants (âgés d'un an et demi à cinq ans) qui les rendait incapables de réaliser la nature et la gravité des actes qui leur étaient imposés ». En d'autres termes, pour la France, un.e enfant peut être consentant à partir de 6 ans à des actes sexuels avec un.e adulte, ou du moins, son comportement peut faire croire à l’adulte qu’il.elle était consentant.e. En conclusion, les pénétrations sexuelles d'un.e adulte sur un.e enfant de 6 ans ne résultent pas automatiquement du viol ! Cependant, la relation sera considérée comme une atteinte sexuelle et pourra être condamnée jusqu'à 7 ans de prison, mais le « possible » consentement de l’enfant sera toujours évalué par le juge. C’est lui qui a cette souveraineté absolue pour reconsidérer l’atteinte sexuelle en viol s'il considère qu'il n'y a pas de possibilité de discernement pour l'enfant, ou justement pour décriminaliser le viol en simple atteinte sexuelle. Dans une société patriarcale où la culture du viol est omniprésente, ce pouvoir laissé aux juges est intolérable.
On voit donc des correctionnalisations de viols d'enfants commis par des adultes en simple atteinte sexuelle car des juges décident que les enfants peuvent être consentants malgré leur jeune âge. Par exemple en février 2019 à Nîmes, un éducateur viole une enfant de 13 ans dans un foyer de jeunes en difficultés. Il est remis en liberté sous contrôle judiciaire car le juge a décriminalisé le viol en simple atteinte sexuelle. Il y a d’autres affaires comme en 2018, où deux fillettes de 11 ans sont violées par des adultes de 22 et 28 ans. Dans la première affaire, l'adulte est poursuivi pour atteinte sexuelle et non pour viol car le juge considère que le consentement de la fillette est probable. L'homme de 22 ans est acquitté en première instance ! Mais il sera finalement condamné pour viol en appel. Dans la deuxième affaire, le juge correctionalise le viol d'une fillette de 11 ans par un homme de 28 ans en atteinte sexuelle car selon lui, la petite fille est parfaitement en mesure d'être consentante à des relations sexuelles !
Face à ces violences patriarcales et institutionnelles, il faut imposer un seuil d’âge de non-consentement à partir de 15 ans, et 18 ans pour les cas spécifiques : inceste, enfant en situation de handicap et pour les adultes ayant autorité sur l’enfant. La pression des associations sur le gouvernement commence à porter ses fruits, puisque le ministre de la Justice Dupont-Moretti va proposer de fixer le seuil de non-consentement à 15 ans selon les dernières informations du ministère, et 18 ans en cas d’inceste.
b. Une justice défaillante - Police et justice, une violence institutionnelle[3]
Nous savons qu’entre 85 et 90 % des viols ne sont pas dénoncés à la justice. Avec une culture du viol qui remet en cause les victimes, le déni de la société, l’absence de reconnaissance, les défaillances institutionnelles, les mécanismes d’emprise et de domination, les violences traumatiques, les liens avec l’agresseur (familiaux, amicaux, conjugaux), la honte et la culpabilité qu’on fait porter aux victimes, font que la loi du silence règne, bien que cela commence à se fracturer depuis quelques années. Lorsque les victimes portent plainte (entre 10 et 15 % des victimes), environ 70 % des plaintes (précisément 60 % pour les mineur.e.s) sont classées sans suite selon l’enquête de la sociologue Véronique Le Goaziou. Sur les 30 % restants (40% pour les mineurs), la moitié sera déqualifiée en agressions sexuelles ou en atteintes sexuelles pour les mineur.e.s, et donc jugée au tribunal correctionnel. Pour finir, après un certain nombre de non-lieux, seuls 15% des viols seront jugés en cour d’assises et 10% seront condamnés. En définitif, si on prend l’ensemble des viols commis en France (pas seulement ceux dénoncés à la justice), on peut considérer que seulement 1 à 2 % des violeurs sont condamnés en cour d’assises.
L’écrasante majorité des personnes qui porte plainte ne se considère ni écoutée ni reconnue par les services de police et de la justice. Les institutions sont clairement défaillantes et ne remplissent pas leur mission de service public. Les procédures judiciaires sont tellement dures et carabinées qu'elles en deviennent dissuasives. C’est pourquoi, 83 % des victimes témoignent n’avoir jamais été reconnues, ni même protégées. L'épreuve du dépôt de plainte est un bon exemple de cette violence institutionnelle. Dans l’enquête IVSEA de 2015 de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie : « 67% des répondant-e-s qui ont porté plainte n’ont bénéficié d’aucune mesure de protection, 82% ont mal vécu le dépôt de plainte, 89% ont mal vécu le procès, 81% estiment que la justice n’a pas joué son rôle, 70% ne se sont pas senties reconnues comme victimes par la police et la justice. » Par ailleurs, les victimes de violences sexuelles qui ont le sentiment de ne pas avoir été écoutées et reconnues font plus de tentatives de suicide que la moyenne des autres victimes interrogées. L'Etat est complice du système patriarcal qui violente les victimes et les réduise au silence et à la négation de leur souffrance.
4. Les conséquences de la pédocriminalité
a. Les conséquences sur la santé
Les recherches en traumatologie et en victimologie permettent de comprendre les mécanismes exceptionnels de survie que notre organisme utilise pour se défendre contre l’agression. Je ne vais pas m’étendre sur ce sujet car un billet sera exclusivement consacré à cette thématique.
Les violences sexuelles commettent des détériorations extrêmement carabinées sur l’intégrité physique et psychique des enfants. Les effets de la dissociation traumatique et de la mémoire traumatique font vivre à la victime un véritable enfer en réduisant son psychisme en esclavage. Ces violences traumatiques ont des impacts sans précédents sur la santé mentale comme le montrent de nombreuses études : 96% des victimes déclarent que les violences sexuelles ont un impact sur leur santé mentale, 70% sur leur santé physique. De plus, le fait d’avoir été victime de violences (physique, sexuelle ou psychique) durant l'enfance, est la principale cause de morts précoces. En effet, le fait d'avoir subi des violences dans l'enfance peut faire perdre de 20 ans d'espérance de vie selon la psychiatre Muriel Salmona. Par ailleurs, son rapport « Impact des violences sexuelles de l'enfance à l'âge adulte » montre que le risque de tentative de suicide est 7 fois plus élevé chez les victimes de viol que dans la population générale. Environ 50 % des victimes font des tentatives de suicides (parfois une dizaine), ont des dépressions à répétitions et présentent des conduites addictives (IVSEA, 2015). Par ailleurs, le crime sexuel détériore également la santé physique et le corps des victimes. Les victimes développent plus facilement à l’âge adulte des « troubles cardio- vasculaires, des diabètes, des pathologies broncho-pulmonires, immunitaires, digestives, neuro-endocrinienne, gynéco-obstétriques, de douleurs chroniques », (Felitti, Anda, 2010).
Autre constat : les enfants qui subissent des violences sexuelles - plus précisément pour les filles -, ont davantage de risques de subir d’autres violences sexuelles durant leur vie d’adulte, que ceux-celles qui n’en ont pas subies, comme le montre l’enquête Fulu de 2017 : « les filles qui ont subi des violences sexuelles dans l’enfance ont 25 fois plus de risques de subir des violences conjugales que celles qui n’en ont pas subi ». Pour appuyer cette hypothèse, l’enquête IVSEA de 2015 de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie montre que 70% des victimes de violences sexuelles qui ont participé à l’enquête en subissent à nouveau tout au long de leur vie.
b. Victime de pédocriminalité, un devenir pédocriminel ?
Comme l’exprime le psychiatre Walter Albardier, « tous les pédophiles n’ont pas non plus été victimes d’attouchements sexuels ou de violences sexuelles pendant leur enfance ». Connaître le ratio entre la proportion de victimes de pédocriminalité qui deviendront ensuite des agresseurs est complexe car ce n’est pas une donnée que l’on peut avoir avec les enquêtes de victimation. Ainsi, nous devons zoomer sur les auteurs de violences qui ont été condamnés et explorer leur passé. Le psychiatre Mathieu Lacambre explique qu’environ un condamné pour violences sexuelles sur trois environ a été victime des mêmes traitements durant son enfance, alors que le professeur Serge Stoléru affirme qu’environ 50 % des pédocriminels ont subi des mauvais traitements (pas exclusivement sexuels) durant leur enfance.
Il peut donc avoir une corrélation entre le fait d'avoir été victime de mauvais traitements durant l'enfance et d’exercer des violences sexuelles, physiques, psychiques, à l’âge adulte. La grande enquête Fulu de 2017 montre que les garçons qui subissent dans leur enfance des violences sexuelles ont « 14 fois plus de risques d’exercer des violences conjugales que ceux qui n’en ont pas subi. » Cependant, il ne faut pas se tromper dans la dialectique. La majorité des enfants victimes de violences n’exerceront jamais de violences physiques ou sexuelles lorsqu’ils seront adultes ! Cependant, de nombreux adultes qui exercent des violences ont subi des mauvais traitements dans leur enfance.
5. La pédopornographie et les réseaux de prostitution
Je traiterais cette question plus longuement dans un prochain billet sur les réseaux de pédocriminalité. Cependant, je me dois d’en discuter rapidement dans ce papier. La pédo 2.0 est une réalité dont la classe politique et la société méconnaissent grandement. La pédocriminalité s’est parfaitement adaptée à la révolution numérique en s'internetisant. On estime en 2019 qu’il y a 45 millions de vidéos et de photos pédocriminelles disponibles sur le net au travers des plateformes pédopornographiques. Un constat encore plus effrayant sachant que ces chiffres doublent tous les ans : 1 millions en 2014, 8 millions en 2017, 18 millions en 2018 !
Les réseaux de pédocriminalité se sont appropriés à leur guise le net afin de produire et de commercialiser les viols d’enfants. En 2019, une coopération internationale a permis de démanteler sur le Darkweb le site Welcome to Vidéo. Celui-ci hébergeait 250 000 viols de mineurs qui étaient commercialisés via la crypto-monnaie Bitcoin. La production, la diffusion et la commercialisation des vidéos et photos pédopornographiques se réalisent de plus en plus dans un environnement domestique et familial. Après la fermeture du site, il y a eu 337 arrestations dans 38 pays dont la France.
Actuellement, 5 pays hébergent 92 % des sites pédopornographiques selon l'Internet Watch Foundation (Fondation pour la surveillance d'Internet), une organisation indépendante britannique qui lutte contre la pédopornographie sur internet. Dans l’ordre décroissant : les Pays-Bas, les USA, le Canada, la France et la Russie. Alors que la France est le quatrième pays qui abrite les sites pédopornographiques, elle ne lutte pas non plus contre ce fléau. En 2000, il y avait 4 enquêteurs pour traquer les cyberpédocriminels. Aujourd’hui, ils sont 27 mais la moitié de cet effectif se concentrent sur les escroqueries sur le web, comme l’expliquent Karl Zéro, Serge Garde et Homayra Sellier dans leur manifeste contre la pédocriminalité.[4] Ceci est ridicule face à ce fléau qui a pris une ampleur jusque-là inégalée.
6. Quel coût pour les violences sexuelles ?
Que coûte à l'Etat l'ensemble des violences sexuelles ? L’ONG Stop aux violences sexuelles (SVS) présidée par la docteure Violaine Guérin qui regroupe de nombreux professionnels est parvenue au chiffre de 10 milliards d'euros annuels pour la sécurité sociale, et jusqu'à 100 milliards € en incluant tous les coûts médicaux sociaux[5]: symptomatologie du psychotraumatisme, diabète, hypertension, cancers, pathologies gynécologiques, ORL, fibromyalgie, stérilités...
Si la gouvernance de l'Etat néolibérale ne s'est jamais intéressée à la violence de la pédocriminalité - et aux violences sexuelles systémiques en général -, peut-être le fera t-il à la vue de ce gaspillage d'argent public ? Car pour lui, l'argument financier est toujours plus important que l'argument social, humaniste ou thérapeutique. Ainsi, l'Etat bourgeois, toujours enclin à réaliser des économies à tout bout de champs au lieu d’accompagner et à protéger les victimes de la culture patriarcale, devrait être intéressé par cette réalité… S'il faut faire des économies, que l’Etat lutte contre la pédocriminalité !
En conclusion
Ce billet est un rapide état des lieux de la pédocriminalité. Les prochains articles traiteront d’autres thèmes qui lui sont corolaires : les réseaux de pédocriminalité, le seuil de non-consentement à 15 ans, la psychotraumatologie et les propositions contre la pédocriminalité. Le prochain discutera de ce que j’appelle la « défense idéologique du système pédocriminel ». Entre les années 70 et 90, la pédosexualité est relativisée jusqu’à être valorisée par les médias, la télévision, le monde littéraire et certains artistes. Encore aujourd’hui, ce système idéologique perdure : en témoignent l'omniprésence de la culture du viol, ou encore les propos d'Alain Finkielkraut et d'autres sur l'affaire Polanski et Maztneff.
[1] Serge Garde, Homayra Sellier, Karl Zéro, 1 sur 5, Editions Télémaque, 2020, Paris, p4
[2] BECKER Judith V., HUNTER John A., « Understanding and treating child and adolescent sexual offenders » in Advances in Clinical Chiwld Psychology, 1997, Vol. 19, pp. 177-197.
[3] Dans ce chapitre, les statistiques recouvrent la violence sexuelle en général (adulte et mineur).
[4] Serge Garde, Homayra Sellier, Karl Zéro, 1 sur 5, Editions Télémaque, 2020, Paris, p33
[5] Serge Garde, Homayra Sellier, Karl Zéro, 1 sur 5, Editions Télémaque, 2020, Paris, p84