Le 27 novembre 2022, le président de la République a annoncé une dizaine de lignes de train de nuit pour 2030. Et cet automne 2023 l’État lance une mission pour construire des trains de nuit neufs. Seule ombre au tableau : en dernière minute, cette commande de matériel neuf risque d’être réduite a minima pour être limitée aux 4 lignes déjà existantes : elle permettrait donc de créer zéro nouvelles lignes d’ici 2028 et elle laisserait l’extension du réseau dans l’inconnu pour la suite.
Le budget de l’État sera débattu au Parlement à l’automne. Les sénatrices et sénateurs fraîchement élus le 24 septembre auront donc la possibilité de plaider pour augmenter l’ambition. Le collectif « Oui au train de nuit » a appelé les candidat-e-s à se prononcer sur le sujet, en répondant à un questionnaire. Voici un bilan des réponses et, plus largement, de l’action du Sénat pour les trains de nuit.
Il est encore temps pour les candidat-e-s de répondre au questionnaire disponible sur : http://www.ouiautraindenuit.wordpress.com/senateurs

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Carte des actions des sénatrices et sénateurs pour les trains de nuit. Voir aussi le tableau des engagements des candidats par département.
Le retour des trains de nuit, on le doit notamment au Sénat
Comme expliqué dans un précédent billet de blog (publié à l’occasion des précédentes élections sénatoriales), le Sénat a déjà eu l'occasion de jouer un rôle clé pour la relance des trains de nuit.
Une étude réclamée par le Parlement
En 2019, les sénateurs Guillaume Gontard (Isère, EELV) et Éliane Assassi (Seine-Saint-Denis, PCF) ont fait voter un amendement à la Loi d’Orientation des Mobilités demandant à l’État de lancer une étude pour « développer l’offre des trains de nuit » [voir la vidéo]. Cela a abouti, deux ans plus tard, à la publication par le gouvernement du « rapport TET » (pour Trains d’Équilibre du Territoire). Cette étude propose d’investir 1,5 Milliard d’euros pour construire 600 nouvelles voitures-couchette et voitures-lits, pour relancer un réseau de 25 lignes, dont des liaisons directes région-région (sans passer par Paris), comme Bordeaux-Nice, Metz-Barcelone, Quimper-Lyon-Genève, ainsi que des lignes internationales reliant 9 pays différents !
Les annonces du gouvernement
Suite à la publication du rapport TET, le ministre des Transports a annoncé en décembre 2021 un investissement de 800 millions d’euros pour construire 300 voitures-couchette (réduisant l’ambition de moitié). Emmanuel Macron a confimé le 27 novembre 2022 que « en 2030 notre pays comptera une dizaine de lignes de trains de nuit ».
Pour que ces annonces deviennent réalité, l'action des sénatrices et sénateurs est nécessaire. En février 2021, le sénateur Jean-François Longeot (Doubs, Union Centriste) a interrogé le gouvernement sur son ambition pour les trains de nuit. En mars 2022, les sénateurs Hervé Maurey (Eure, Union Centriste) et Stéphane Sautarel (Cantal, LR) ont publié un rapport d'information parlementaire qui tire la sonnette d'alarme : sur « le financement des trains d’équilibre du territoire de jour et de nuit, il est urgent que l'État passe des paroles aux actes ».
Le sénateur communiste des Côtes d’Armor, Gérard Lahellec, réclame « une grande ambition publique pour les trains de nuit ». Jean-Claude Anglars (Aveyron, LR) a dénoncé en décembre 2022 le retard de la commande de nouveaux trains de nuit. En septembre 2023, cette commande n’est toujours pas validée, et le gouvernement n’a pas pris la peine de répondre à la question du sénateur.

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Mobilisation pour la « Palombe Bleue »
En décembre 2021, les Hautes-Pyrénées fêtaient le retour d’une liaison Paris-Tarbes-Lourdes. Depuis lors, aux côtés des usagers, des cheminots et des autres élus locaux, les sénateurs ont agi pour que ce nouveau train de nuit desserve aussi le Béarn et le Pays Basque. Quelques jours après l’inauguration du Paris-Lourdes, les sénateurs ont auditionné le PDG de la SNCF en lui demandant d’aller plus loin. Éric Kerrouche (Landes, PS) a interpellé le gouvernement en août 2022 pour demander le rétablissement de ce train de nuit surnommé la « Palombe Bleue ».
Quelques mois plus tard, c’est devant le Sénat, en réponse à une demande de Max Brisson, sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques, que le gouvernement a finalement annoncé le retour d’une desserte quotidienne toute l’année vers Dax, Orthez et Pau, effective à partir de décembre 2023... avec toutefois des horaires insuffisamment optimisés pour cause de travaux.
Un rôle d’aiguillon pour alerter sur les dysfonctionnements
L’intervention des parlementaires permet aussi de faire remonter des problèmes sur les lignes existantes. Ainsi, en 2021, les sénateurs centristes Philippe Bonnecarrère (Tarn) et Jean-Michel Arnaud (Hautes-Alpes) ont sonné l’alarme concernant les dysfonctionnements des lignes Paris-Rodez-Albi et Paris-Briançon.
Du côté des Pyrénées-Orientales, le sénateur LR Jean Sol a alerté le gouvernement sur la problématique du train de nuit Paris-Portbou, qui depuis juillet 2022 est limité à Cerbère et ne peut plus franchir la frontière pour atteindre sont terminus en Espagne à Portbou. En cause : une nouvelle réglementation imposée par les autorités ferroviaires française (EPSF) et espagnole (EASF), qui oblige les conducteurs à maitriser un double niveau de langue B1 sur la portion de voie ferrée d’à peine un kilomètre entre Cerbère et Portbou. Le Sénateur LR Max Brisson a alerté aussi sur la double homologation qui empêche les trains de circuler entre Hendaye et Irun. Ces obligations absurdes, sur fond de guerre entre le ferroviaire français et espagnol, entrent en contradiction avec les accords de l'Union Internationaux des Cheminots de fer (UIC), en vigueurs depuis... 1922 !
Concernant la relance du Paris-Aurillac qui est prévue en décembre 2023, les sénateurs cantaliens Bernard Delcros (Union Centriste) et Stéphane Sautarel (LR) ont interpellé le gouvernement pour appuyer la nécessité de ce train.
Un sujet transpartisan et qui mobilise dans toutes les régions
Fait notable, la relance des trains de nuit est un sujet qui rassemble des parlementaires de tous bords politiques et des quatre coins de l’Hexagone. Parmi les sénateurs et sénatrices qui se sont mobilisés pour les trains de nuit depuis 2020, on peut citer aussi : Olivier Jacquin (Meurthe et Moselle, PS), Jean-Claude Anglars (Aveyron, LR), Viviane Artigalas (Hautes-Pyrénées, PS), Daniel Chasseing (Corrèze, Les Indépendants), Jean-Pierre Corbisez (Pas-de-Calais, divers gauche), Martine Filleul (Nord, PS), Marc Laménie (Ardennes, LR), Jean-Louis Masson (Moselle, non-inscrit), Jacques Fernique (Bas-Rhin, EELV), Jean-Jacques Michau (Ariège, PS), Pierre Ouzoulias (Hauts-de-Seine, PCF), Denise Saint-Pé (Pyrénées-Atlantiques, Union Centriste), Guylène Pantel (Lozère, PS), Angèle Préville (Lot, PS), Daniel Salmon (Ille-et-Vilaine, EELV). Pour une liste plus complète, voir la carte des sénatrices et sénateurs qui se mobilisent.
2023, une année clé pour lancer la construction de la prochaine génération de trains couchette
Suite à la publication de l’étude qui propose d’investir 1,5 Milliard d’euros pour construire 600 voitures-couchette, les parlementaires de tous bords se sont mobilisés pour inscrire ce financement dans le budget de l’État. En ce sens, de nombreux amendements aux Projets de Loi de Finances (PLF) ont été défendus en 2021 et 2022. Lors des débats, le ministre des Transports a annoncé la commande de trains de nuit neufs « sans doute dans le PLF 2024 », qui sera débattu cet automne.
Le 15 juillet 2023 l’État a finalement lancé une mission pour construire des trains de nuit neufs, mais il ne prévoit que de renouveler le matériel pour les lignes existantes, soit probablement autour de 150 voitures couchette. C’est une victoire, mais il est nécessaire d’aller plus loin au moins au niveau des orientations posées par le président de la République, ce qui nécessite 300 voitures. Construire du matériel neuf prend 5 à 8 ans. L’investissement est donc à réaliser sans attendre.
Il est aussi pertinent d’aller plus loin : le rapport TET a montré la pertinence de construire un parc de 600 voitures de trains de nuit pour relancer 25 lignes.
La mobilisation des sénatrices et sénateurs lors des débats sur le Projet de Loi de Finances (PLF 2024) sera donc nécessaire pour appuyer l’effort d’investissement et augmenter l’ambition. Alors, les futurs sénatrices et sénateurs défendront-ils les trains de nuit ?
Les engagements des candidat-e-s
En amont des élections sénatoriales du 24 septembre 2023, le collectif « Oui au train de nuit » a appelé les candidat-e-s à se prononcer via un questionnaire en ligne. Plusieurs candidat-e-s s’engagent à agir dans différentes régions, et en premier lieu dans les Pyrénées.
Dans les Hautes-Pyrénées, Viviane Artigalas (PS), Maryse Carrère (PRG), Charles Rocheteau (LFI), Clément Artigue (EELV), Hervé Charles (PCF) et Annie Baylac (PCF) s’engagent à demander une commande de 600 voitures pour relancer 20 lignes. Jean-Marc Delcasso (Renaissance) limite l’ambition à 300 voitures-couchette pour 10 lignes. Jacques Behague (LR) vise "le maintien des trains de nuit".
Dans les Pyrénées-Atlantiques, Max Brisson (LR) s’engage : « Je ferai tout mon possible pour que les trains de nuit retrouvent la place qui était la leur parmi les offres de mobilité les plus vertueuses », de même que Julien Brunel (EELV), qui veut promouvoir « une nouvelle manière de voyager et de parcourir nos territoires ». Frédérique Espagnac (PS) soutient également la demande de construire 600 nouvelles voitures.
Marc Panis, candidat EELV dans les Pyrénées-Orientales, s’engage à défendre une ligne reliant Perpignan à Lille.
Le sénateur écologiste de l’Isère Guillaume Gontard s’engage également à soutenir le retour des trains de nuit et il souligne l’importance « que les départs ne soient pas tous depuis Paris ».
Mathilde Ollivier, candidate écologiste pour les français de l’étranger, souhaite « le développement des trains de nuit, et la mise en place d’une tarification plus compétitive que le secteur aérien ».
Autres candidats ayant répondu : Nicolas Orgelet (EELV 41), Maxime Viancin (LFI 44), Raphaël Daubet (Radical 46), Maryse Combres (47, EELV), Xavier CZAPLA et Monique Vadrot (LFI 47), Simon Uzenat (56, union de la gauche), Marie-Madeline DORE-LUCAS (LFI 56), Guillaume HÉDOUIN (EELV 50), Céline Scavennec (EELV 59), Eric Bocquet (PCF 59), Pierre Ristic (61 Orne, EELV), et en Ile-de-France : Géraldine Dauvergne (GE 93), Marion Beauvalet (LFI 75) , Delphine Fenasse (LFI 94). Voir le tableau des engagements des candidats par département et la carte des actions des Sénateurs et des engagements des candidats. Sénateurs : si vous n'apparaissez pas, merci de nous envoyer les hyperliens à propos de vos actions pour nous aider à compléter.

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