Tentative pour vaincre l'inertie des chroniqueurs tardigrades et les ricanements de leur public misonéiste (adapté de PM)
L'enjeu intéressant de la campagne électorale présidentielle - qui a déjà commencé et qui ne peut pas être réduite aux quelques jours qui précèdent les scrutins - n'est pas de savoir qui sera le prochain président, mais comment s'en débarrasser, ne plus en avoir.
Les dernières années montrent que la fonction présidentielle est un potentat autoritaire associé à un phénomène de cour. La fonction de président de la République est nocive pour l'Etat et la collectivité.Il y a un détournement de la légitimité politique qui repose sur le respect du Droit par l'invocation abusive de résultats électoraux, qui ne sont que le mode de désignation du mandataire temporaire à qui l'électorat confie la direction de la gestion des affaires publiques.
Force est de constater que le président de la République ne sert plus l'intérêt général.
L'électorat a le pouvoir de changer cela si tant est que cela lui soit proposé.
Après nuit debout, les gilets jaunes, le grand débat, la convention citoyenne sur le climat, mais aussi la régression des libertés publiques et des droits sociaux, la répression policière et judiciaire des manifestants ou de la solidarité aux migrants, la violence institutionnelle, le constat de la misère et de l'impréparation économique et industrielle du pays face à une épidémie ; tout cela montre que l'enjeu des présidentielles ne réside pas dans le choix d'une personne mais dans l'opportunité à changer de régime (cf. par ex. Mathilde Goanec " Comment rompre avec le jeu «pervers» de la présidentielle " ou François Boulo " Reprendre le pouvoir ").
C'est l'occasion de s'interroger si l'électorat préfère vraiment continuer dans l'autoritarisme bonapartiste actuel, qui caractérise l'exercice de l'action publique en France, ou, au contraire, adopter enfin une constitution digne d'une société démocratique moderne. Ce que les institutions actuelles ne garantissent pas. Il suffit de lire Médiapart.
Au-delà de la brutalité, les quinquennats qui se sont succédés ont fait la démonstration de leur impéritie politique, sociale et économique. Le pays s'est appauvri, il s'est désindustrialisé, il s'est privé de services publics, ... Tout ce qui fait défaut à ce quinquennat inutile et d'années mortes.
Le constat s'impose qu'Emmanuel Macron est pire que François Hollande, qui fut pire que Nicolas Sarkozy, qui fut pire que Jacques Chirac, qui fut pire que ... Cela ne présage rien de bon pour le suivant. Il n'y a pas de fatalité à la médiocrité. Il n'y a que de l'abdication ou de la complaisance.
Les sondages qui prêtent 13% d'intentions de vote à Eric Zemmour démontrent que la dimension politique est déjà totalement absente d'un évènement qui est dès à présent réduit à un pari sur une personne, comme on joue au tiercé.
C'est que confirment Emmanuel Macron, qui n'avait pas de programme, et sa concurrente, qui en avait un très mauvais. Il est incroyable qu'un tel duo soit parvenu au second tour des élections précédentes. Et il se trouve des chroniqueurs pour en proposer à nouveau l'éventualité.
Une solution serait de faire la grève du vote pour les présidentielles, comme y invite depuis plus d'un siècle Octave Mirbeau. Le risque est cependant très grand de voir n'importe qui d'élu, ce qu'affirme la tendance lourde des médias, d'élection en élection (cf. aussi toutologue, ultracrépidarianisme, l'ère du clash, tonitruantisme, marketing politique, ...)
Une autre solution est que se présente un candidat avec l'engagement de soumettre à référendum la convocation d'une nouvelle constituante pour réformer les institutions et faire disparaître, notamment, la fonction présidentielle (art. 89 de la Constitution).
Elu, il nomme un premier ministre et s'entoure de ministres favorables à un tel projet.
Il invite le corps électoral à voter aux législatives pour des députés défendant l'idée d'adopter une nouvelle constitution. Le succès d'En Marche permet d'envisager une même dynamique.
Le nouveau président veille au déroulement des travaux de la constituante s'appliquant à équilibrer l'action des fonctions exécutives, législatives et judiciaires. Chacune de ces fonctions dispose d'une assemblée qui vote son budget de fonctionnement et désigne pour la première le premier ministre et son gouvernement, la seconde son président d'assemblée, la troisième le garde des Sceaux et compose le CSM. C'est ainsi que fonctionnait la démocratie grecque dans l'Antiquité.
Il s'attache à ce que le projet d'écriture du projet se réalise rapidement afin de le soumettre à référendum avant la fin de son mandat.
En plus de la suppression de la fonction présidentielle, le projet garantirait une séparation équilibrée des trois fonctions de l'action publique limitant l'exécutif à un impératif de gestion du bien public dans l'intérêt général conformément à la légalité (et non théoriquement comme aujourd'hui), le législatif à proposer et adopter les lois (ce qui n'est pas le cas aujourd'hui), le judiciaire à sanctionner toutes les violations des lois. La conformité de l'action démocratique de ce dernier serait garantie par un contrôle d'un ordre juridique par un autre : l'ordre judiciaire recevrait et instruirait les plaintes contre l'ordre administratif, lequel agirait de même à propos des juridictions financières qui elles-mêmes s'occuperait des plaintes contre l'ordre judiciaire.
L'organisation des pouvoirs locaux seraient simplifiée et décentralisée telle qu'elle l'était de 1790 à 1792. Les représentants de l'Etat - comme les préfets, les recteurs, ... - seraient élus localement.
Une fois cela fait, et par précaution pour l'avenir (la France a une tradition du coup d'Etat), il démissionne après les législatives, pour inverser le calendrier de la réforme Jospin-Chirac :
- " En cas de vacance de la présidence de la République ou lorsque le Conseil constitutionnel a déclaré définitif, en application du cinquième alinéa du même article 7, l'empêchement du Président, les électeurs sont convoqués sans délai par décret. " (Al.2 Art. 1 bis de la loi du 6 novembre 1962)
- " Pour l'application du deuxième alinéa du II de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 susvisée, le mois de l'élection est réputé être celui du trente-cinquième jour qui précède le terme du mandat mentionné au premier alinéa de l'article 6 de la Constitution. " (Art. 12 Décret n°2001-213 du 8 mars 2001)
Pourquoi ne pas envisager la candidature d'un(e) simple cityoen(ne) plutôt que celle d'un(e) politique ?
Parce que ceux qui portaient un volonté de réformer la constitution, n'en parlent plus et briguent eux-mêmes le poste le plus nocif à la démocratie.
La chronique politique dans la perspective des prochaines élections ne traduit aucune exigence de programme mais se limite aux commentaires de postures personnelles.
Les médias s'inscrivent plus dans la tradition du plébiscite que dans celle de la démocratie.
La presse française demeure dans la théorie de l'être providentiel. Les récentes mobilisations sociales ont fait la démonstration d'une presse incapable ou trop paresseuse à promouvoir un choix de société.
Les disputes d'ego occupent les médias plutôt qu'une synthèse quotidienne sur l'état du pays pour permettre l'identification et la pertinence des mesures à prendre et garantir le bien-être général (La presse propose ces synthèses pour les spéculateurs, mais pas pour les électeurs).
Alors que l'achat d'un fonds de commerce exige la communication des trois derniers exercices, les politiques demandent à des dizaines de millions d'électeurs de se prononcer sans jamais connaître la situation exacte de leur pays. N'est-ce pas de l'escroquerie intellectuelle ? Il est où le droit à l'information ?
Les médias ont encore un an pour satisfaire efficacement l'exigence de démocratie de l'opinion. Il n'est peut-être pas fortuite que la perte de lecteurs des journaux accompagne la hausse de l'abstention.