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La Cour de cassation se fourvoie à faire de la politique plutôt que du droit ?

Le communiqué de la Cour de cassation fait référence à la coutume internationale mais ignore les traités de droit international ratifiés par la France qui excluent l’immunité des chefs d’Etat et posent l’imprescriptibilité des crimes. Etonnant raisonnement de la Cour qui procède par inversion normative et fait obstacle à son obligation positive à garantir l’efficacité des droits humains.

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La Cour de cassation consacre le principe de la hiérarchie des normes (cf.  Guide de légistique - Légifrance p.39 et s. ) lequel impose que les principes du droit interne se soumettent et doivent être conformes aux dispositions des traités internationaux ratifiés par la France. Or, bizarement, elle semble oublier que la France a ratifié des traités internationaux protecteurs des droits humains qui posent aux institutions du pays, donc aux magistrats, notamment et pas seulement, une obligation posisitive de garantir l’efficacité de ces droits humains. Il est assez paradoxal que la décision relative à Bachar El Assad lui fasse obstacle et qu’elle établisse même ainsi une inexécution de l’obligation positive à garantir leur efficacité. C’est d’autant plus surprenant que la Cour de cassation reconnaît une valeur normative et une force contraignante aux résolutions de l’Assemblée génerale des Nations-Unies puisqu’elle en invoque une (Résolution 2625 (XXV) de l'assemblée générale des Nations unies du 24 octobre 1970 - n° 14) mais qu’elle en ignore de nombreuses autres, notamment la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité adoptée le 26 novembre 1968 par l'Assemblée générale dans sa résolution 2391 (XXIII) qui exclut l’immunité des chefs d’Etat...

D’autre part, la France a ratifié des traités de droit pénal international qui excluent l’immunité des chefs d’Etat, notamment et particulièrement, et rendent imprescriptibles les crimes attentatoires à la vie et à la dignité humaine. Ce qui semble le cas dans les affaires jugées. Il est surprenant que le ministère public se soit pourvu, alors qu’il agit censément dans l’intérêt de la loi, pour y faire échec et permettre l’impunité d’un chef d’Etat notoirement connu comme étant un criminel. Les gilets jaunes n’ont pas bénéficié d’autant de souci à dire le droit.

Enfin, l’inconventionnalité du droit interne fait qu’il est immédiatement écarté comme l’a jugé l’Assemblée plénière de la Cour de cassation en rendant un arrêt de principe selon lequel le juge français n’attend pas que le droit interne français soit modifié conformément au droit international protecteur des droits humains pour faire prévaloir et appliquer ce dernier : " Attendu que les Etats adhérents à cette Convention sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, sans attendre d'être attaqués devant elle ni d'avoir modifié leur législation " (par ex. Solution identique a/s du droit de l’UE). La Cour oublie sa propre jurisprudence, pourtant bien établie, à propos de Bachar El Assad et de faits qui sont nettement plus graves et attentatoires aux droits humains qu’une mesure de garde-à-vue .

Ces décisions sont donc en même temps très étonnantes.

Elles ne s’appliqueront pas aux mandats d’arrêts contre Benjamin Netanyahou et ses complices ; car ces mandats, à la différence des cas de l’espèce, ne sont pas émis par l’autorité judiciaire française mais par la Cour pénale internationale (CPI) qui n’est pas placée sous le contrôle de la Cour de cassation. Bien au contraire, le Statut de Rome impose à la Cour de cassation, en tant qu’institution d’un Etat partie, d’aider efficacement la CPI dans la sanction des auteurs et des complices des crimes que la CPI poursuit.

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Lire les décisions

Décision relative aux agents des états étrangers

25 juillet 2025 Cour de cassation Pourvoi n° 24-84.071 Assemblée plénière Publié au Bulletin - Publié au Rapport

Décision relative aux chefs d'états étrangers

25 juillet 2025 Cour de cassation Pourvoi n° 24-84.393 Assemblée plénière Publié au Bulletin - Publié au Rapport

Contact presse

Guillaume Fradin, directeur de la communication

06.61.62.51.11

scom.courdecassation@justice.fr

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