Franz-Olivier Giesbert, 74 ans, est toujours éditorialiste au Point, l’hebdomadaire de la famille Pinault, qu’il a dirigé de 2000 à 2014. Il a été le rédacteur en chef du Nouvel Observateur (1985-1988) et du Figaro (1988-2000), ainsi que le directeur éditorial de La Provence (2017-2021). Toujours membre du jury Renaudot, « FOG » est aussi « conseiller de la présidence » à La Revue des Deux Mondes. La revue, propriété du milliardaire Marc Ladreit de Lacharrière, a été dirigée de 2014 à 2022 par Valérie Toranian (ex-Elle), qui est depuis l’automne dernier à la tête de la rédaction du Point.

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En 1989 : « Tout propriétaire a des droits sur son journal. D’une certaine manière, il a les pouvoirs. Vous me parlez de mon pouvoir, c’est une vaste rigolade. Il y a des vrais pouvoirs. Le vrai pouvoir stable, c’est celui du capital. Il est tout à fait normal que le pouvoir s’exerce. Ça se passe dans tous les journaux. Il n’y a pas un journal où cela ne se passe pas. » Source : FOG, dans l'émission « Radioscopie » animée par Jacques Chancel sur France Inter (passage cité en 2011 par Gilles Balbastre et Yannick Kergoat dans le documentaire Les Nouveaux chiens de garde)
4 décembre 1995 : « Les cheminots et les agents de la RATP rançonnent la France pour la pressurer davantage. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : de corporatisme, c’est-à-dire de racket social. » Source : FOG, dans Le Figaro (cité par Serge Halimi dans Les Nouveaux chiens de garde, éd. Raisons d'agir, 1997)
Juin 1998 : M. Giesbert fait son entrée au jury du prix Renaudot, en remplacement de Roger Vrigny, à qui Christian Giudicelli, le « fidèle complice » de Gabriel Matzneff, servit longtemps de « sparring-partner » sur France Culture. MM. Giesbert et Giudicelli (qui fut aussi longtemps un pilier du jury Larbaud, à Vichy) se sont côtoyés au sein du jury Renaudot pendant près de vingt-cinq ans (entre 1998 et 2022).

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Octobre 2006 : « Première “question qui fâche” : Nicolas Sarkozy, on a le sentiment que vous avez le don d’ubiquité. Vous êtes toujours partout : est-ce que c’est bien raisonnable, avant une campagne présidentielle, d’être toujours au front, sur le devant de la scène ? » Source : FOG, dans l’émission « Chez FOG », sur France 5 (dans les années 2000 et 2010, le journaliste a animé plusieurs émissions sur les chaînes du service public)
« Le 18 octobre 2012, Franz-Olivier Giesbert décrète dans un roboratif éditorial [du Point] que "tout est fait, chez nous, pour empêcher les entreprises de marger ou d'embaucher : notre pays taxe aveuglément les sociétés et le travail pour remplir la panse d'un Etat-Gargantua qui n'est jamais rassasié". [...] Ces considérations sont caractéristiques de la production journalistique de FOG, qui se résume, pour une importante part, à la répétition de slogans, toujours les mêmes, dont le trait principal est qu'ils ne risquent guère de trop le fâcher avec les oligarchies régnantes. Plus précisément : l'éditocrate, qui par ailleurs se targue de carburer à l'"anticonformisme", psalmodie, toutes les semaines ou presque, qu'il faut que la France réduise drastiquement sa dépense publique et se libère des corporatismes où se vautrent des privilégiés – souvent des fonctionnaires. » Source : Sébastien Fontenelle, in Editocrates sous perfusion. Les aides publiques à la presse, trente ans de gabegie, éd. Libertalia, p. 23-24
Le 24 octobre 2013, FOG titre à la Une du Point : « Les assistés. Comment la France les fabrique. » Cinq semaines plus tôt, la Cour des comptes avait révélé qu’entre 2009 et 2011, l’hebdomadaire avait reçu 13,5 millions d’euros d’aides publiques (« hors aides indirectes », était-il précisé). Source : « Les aides de l'Etat à la presse écrite », p. 40
4 novembre 2013 : FOG, comme Christian Giudicelli, Georges-Olivier Châteaureynaud, Frédéric Beigbeder, Louis Gardel et deux autres jurés, vote pour Séraphin, c’est la fin !, de Gabriel Matzneff, à qui est attribué (par 7 voix contre 3) le prix Renaudot de l’essai. « Le PDG du Point, Franz-Olivier Giesbert, assume cette année-là la présidence du jury. » Source : Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin, dans Le Monde (6.01.2020)
9 juillet 2015 : « Franz-Olivier Giesbert a fait irruption en mars [2015] au comité de rédaction [de La Revue des Deux Mondes] de façon spectaculaire puisque, aux dires de témoins effarés, ce fut pour FOG l’occasion d’une grande bouffée d’anti‑intellectualisme ponctuée par ce mot d’ordre : "Il faut arrêter d’enculer les mouches." Lancée dans l’un des lieux les plus policés du débat intellectuel français, la phrase a fait sensation. [...] Depuis lors, la revue sert à ses lecteurs des plats particulièrement relevés avec des interventions ou interviews d’Eric Zemmour, Michel Onfray, Michel Houellebecq, Régis Debray : c’est un festin du pessimisme prophétique et réactionnaire. » Source : Edouard Launet, dans Le Monde

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2 juin 2016 : « La France est soumise aujourd’hui à deux menaces qui, pour être différentes, n’en mettent pas moins en péril son intégrité : Daech et la CGT. » Source : FOG, dans Le Point
24 septembre 2017 : « Bernard Tapie, ce grand sentimental d’une sensibilité à fleur de peau, est fait de ce béton armé qui résiste à tout, y compris aux plus intenses pilonnages. Rien ne lui aura été épargné, mais si l’on observe l’épopée de sa vie, c’est un guerrier, un survivant dans l’âme, un ballon increvable qui rebondit à l’infini, une pierre qui remonte sans cesse les pentes qu’elle a descendues, un homme qui ne cède jamais et que requinquent les obstacles les plus difficiles. » Source : FOG, dans La Provence (cité en mars 2018 par Le Ravi) ; à l'homme d'affaires, qui l’a nommé directeur éditorial du quotidien régional en mai 2017, FOG a notamment consacré un fameux éditorial en février 2015 et un livre en juin 2021
Février 2018 : « Je suis très en colère. Parce que je trouve qu’on rentre dans un monde de dingues, d’ordre moral, d’ordre politiquement correct. Quand on compare aux Etats-Unis, avec le premier amendement, où on a beaucoup de liberté… Ici, brusquement, tout le monde se lève. Par exemple, Céline : la folie totale ! Brusquement, il ne faut pas publier ses œuvres antisémites… » Source : FOG, dans l'émission « Les terriens du dimanche » animée par Thierry Ardisson sur Canal + (cité par Samuel Gontier sur le site de Télérama)
Avril 2018 : « Parmi les collaborateurs réguliers ou exceptionnels [de La Revue des Deux Mondes], on relève les noms de Robert Redeker, Pierre‑André Taguieff, Caroline Fourest, Natacha Polony, Brice Couturier, Philippe Val, ou encore les très droitiers Philippe de Villiers (février‑mars 2016) et Alexandre Del Valle (décembre 2015). Partagée par toutes ces signatures, l’obsession du péril islamique suinte de chaque numéro. » Source : Mona Chollet, « Valérie Toranian, des nouveautés cosmétiques au péril islamique », in Les éditocrates 2. Le cauchemar continue, éd. La Découverte
21 novembre 2019 : « Le quotidien La Provence a perçu plus d’un million d’euros en 2018 du conseil départemental des Bouches-du-Rhône, dont la présidente, Martine Vassal (LR), brigue la mairie de Marseille. Les dirigeants du journal, dont Franz-Olivier Giesbert, font désormais ouvertement campagne pour elle. » Source : Laurent Mauduit, dans Mediapart (FOG et La Provence ont perdu le procès qu'ils avaient intenté au site d'information indépendant suite à la parution de cette enquête)
Le 2 janvier 2020 paraît Le Consentement, de Vanessa Springora. Jérôme Garcin sera le seul membre du jury Renaudot à démissionner.
Septembre 2021 : « Ce livre [Vanessavirus, paru quelques mois plus tôt en Italie] est l’occasion [pour Gabriel Matzneff] de rendre un vibrant hommage à cinq amis qui lui paraissent mériter une reconnaissance particulière : "Parmi mes pairs, les écrivains jouissant d’une grande notoriété, il n’y en aura que cinq qui m’auront défendu bec et ongles [après la parution du Consentement]. Oui, cinq, pas un de plus, je peux les compter sur les doigts d’une main : Catherine Millet, Dominique Fernandez, Bernard-Henri Lévy, Franz-Olivier Giesbert et, last but not least, un inattendu, car ces quatre-là sont des copains, voire des amis, au lieu que l’intempestif cinquième, je ne l’avais jamais rencontré […] : Alain Finkielkraut." Ces défenseurs ont des propriétés sociales homogènes, qu’il s’agisse du genre (masculin, Millet mise à part), de l’âge (génération née dans les années 1940), de la classe sociale (CSP ++) et du groupe ethnique (européen) : ce sont, sous tous les rapports, des dominants. » Source : Pierre Verdrager, L’enfant interdit. De la défense de la pédophilie à la lutte contre la pédocriminalité, éd. Armand Colin, p. 270
Novembre 2021 : « Après avoir passé trois jours et trois nuits à Notre-Dame de Lagrasse où j’ai vécu, prié, mangé ou lavé la vaisselle avec les chanoines, je ne pouvais m’empêcher, au moment de partir, de faire le parallèle, aussi scabreux fût-il, entre eux et leur saint dont les écrits sont d’actualité comme jamais. Depuis son évêché d’Hippone, actuelle Annaba, au nord-est de l’Algérie, Augustin a vécu avec sérénité la chute de l’Empire romain en proie aux invasions barbares, symbolisée par le premier sac de Rome, œuvre des Wisigoths en 410, avant ceux des Ostrogoths et des Vandales. » Source : Trois jours et trois nuits, éditions Fayard (« ce livre [est] un pur projet de reconquête politique déguisé en livre de prière », selon l'historien Patrick Boucheron)
Février 2023 : « Richard Millet [auteur de La Gloire des Pythre... et d'un Eloge littéraire [à] Anders Breivik] n'a pas signé en 1977 dans Le Monde, à l'invitation de Gabriel Matzneff auquel celui-ci collabore alors, des pétitions en faveur de la pédophilie, comme le même Aragon, Jean-Paul Sartre encore, Simone de Beauvoir, Roland Barthes, Gilles Deleuze, Philippe Sollers, Bernard Kouchner et tutti quanti. Ces gens-là n'ont jamais eu de comptes à rendre pour toutes les insanités qu'ils ont signées ou proférées. Il est vrai qu'ils fricotaient souvent avec l'extrême gauche, ce qui reste le meilleur des parapluies pour tous ceux qui déparlent, aujourd'hui encore. Quand on se penche sur le cas de Richard Millet, somptueux romancier, on ne peut trouver que disproportionné sinon absurde l'opprobre dont il est accablé. » Source : FOG, dans La Revue des Deux Mondes

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2 mars 2023 : « A lire Le Point du 23 février, "le parti de l’étranger" serait de retour sous la forme du "mélencho-lepénisme". Franz-Olivier Giesbert range scandaleusement le RN et LFI dans un même sac "poutinolâtre". Une diffamation poussée très loin, puisque, selon lui, les mélenchonistes auraient hérité cela de "leurs ancêtres 'collabos' qui applaudissaient aux conquêtes du Führer" et seraient "les enfants de Jacques Doriot". Suivent seize pages de dénonciation des "bourgeois mélenchonistes" qui "se renient socialement" en trahissant leur classe (Annie Ernaux et Pierre Lemaître, notamment). Cette "enquête" prêterait à rire si sa rhétorique n’empruntait pas autant au Gringoire des années 1930. » Source : Politis, brève de la rubrique « Nuisances et indécences »
9 mars 2023 : dans son dernier édito du Point, FOG parle « culture woke » et « travers wokistes de l’époque », « repentance » et « professionnels de la gréviculture », « avantages de la fonction publique d’Etat ou des cheminots de la SNCF », et Gaspard Proust devient sous sa plume le « fils spirituel de Pierre Desproges ». Une double page de pub plus loin, son successeur à la tête du journal, Etienne Gernelle, pour qui Michaël Zemmour est un « économiste d’extrême gauche », dit tout le bien qu’il pense de la gauche de droite, et spécialement des gouvernements Socrates, Zapatero et Tsipras et de leurs réformes néolibérales passées (pour un aperçu de l’œuvre du directeur de la publication de l'hebdomadaire, lire notamment ici et là). Arrivent ensuite la chronique de Patrick Besson, un (autre) juré Renaudot qui « [voulait] que [sa] femme ait le prix », et quatre nouveaux éditoriaux, signés semaine après semaine par trois hommes (dont le fidèle Nicolas Baverez) et une femme, Peggy Sastre, autrice de La domination masculine n’existe pas et Ex utéro, pour en finir avec le féminisme – le tout illustré par Xavier Gorce. Une centaine de pages plus loin, un énième « bloc-notes » de Bernard-Henri Lévy, dont « l’imposture » est depuis longtemps documentée (lire aussi ici), permet au lecteur de prendre une dernière fois de la hauteur.
11 mars 2023 : FOG ouvre les Grandes Rencontres de Vichy, proposées depuis 2010 par la mairie et Philippe Lapousterle. « L'ami intime de François Bayrou » présente l'éditocrate, qu'il connaît « depuis trente ans », à la fois comme « un éminent journaliste, l’un des mieux informés de France » et « un grand écrivain ». Aussi comme un « personnage » dont « l’impertinence » va jusqu’à la « provocation ». Sources : site de la Ville de Vichy et La Montagne (édition du 27.02.2023)

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On peut également lire le chapitre « Les obsessions de Franz-Olivier Giesbert » écrit par Sébastien Fontenelle dans l’ouvrage collectif Les Editocrates 2 et les articles relatifs à l’éditorialiste sur le site d’Acrimed. L’édition DVD du film documentaire Les Nouveaux chiens de garde (2011), produit par Jacques Kirsner, est disponible chez Epicentre.