Du "quoi qu'il en coûte" du covid aux "boucliers" anti inflation, l'argent public coule à flots depuis plus de deux ans. Macron nous a sauvés avec ses petits bras musclés. Avec ses petits bras certes mais surtout avec notre argent. Argent magique dépensé avec démesure, sans discernement ni contrôle. Dans un contexte où d'évidence l'Etat devait intervenir, ce dernier en a profité pour gaspiller sans risquer d'en être blâmé. Pour aujourd'hui s'alarmer avec cynisme de l'explosion des dettes publiques, ie nous présenter la note et poursuivre sa guerre sociale.
Guerre sociale contre les plus démunis, retraités, chômeurs, travailleurs qu'il ne faut surtout pas augmenter. Contre les services publics qu'il faut faire dysfonctionner à tout prix en asséchant leurs ressources via une baisse continue des cotisations sociales. Bref l'agenda classique des néolibéraux, c'est-à-dire comme le dit l'économiste Gaël Giraud ni plus ni moins la privatisation du monde, de la santé à l'éducation nationale jusqu'aux routes nationales. Avec toujours la même antienne : le public est inefficace et trop cher.

Le 26 octobre dernier, sur France 2, Supermenteur a ainsi enfilé les perles du catéchisme néolibéral. Tout y est passé, jusqu'à la tarte à la crème du gâteau PIB sur lequel on prélèverait indûment 56% pour les dépenses publiques. Lire à ce sujet Jean Gadrey (ici) pour un torpillage définitif de cette fake-news. Ajoutons que les aides aux entreprises, qui ne font qu'enfler (150 milliards en 2021) sont aussi des dépenses publiques (voir "un pognon de dingue, mais pour qui?" de Combes et Petitjean). Supermenteur est également revenu sur la dernière innovation du gouvernement en communication : le graal du plein emploi.
Voici la triste blague : nous serions grâce au travail formidable du gouvernement pratiquement au plein emploi, il suffirait d'un dernier effort collectif pour l'atteindre (sous-entendu pour toujours?). Pour cela, il faut d'urgence mettre au pas les chômeurs fainéants, continuer les baisses d'impôts pour les entreprises qui ont évidemment porté leurs fruits, et pour finir reculer l'âge de départ à la retraite.
Sur l'âge de la retraite, on ne voit pas bien le rapport avec le chômage à part peut-être une possible augmentation de ce dernier. Mais passons. Sur les aides en entreprises, comme sur la baisse d'imposition des plus aisés, des rapports produits par le gouvernement lui-même ont démontré que cela ne fonctionnait pas. Quant au procès sur les chômeurs, il relève du mythe odieux.
Mais regardons la lune plutôt que le doigt.
Car la réalité toute crue est que nous sommes très très loin du plein emploi, contrairement au tableau flatteur que dresse le gouvernement et ses passe-plats médiatiques. Tout est donc faux dans cette affaire, la prémisse, les conclusions, tout.
Le taux de chômage n'est pas de 7,5% mais de 20%; dans le privé c'est même 30%. Et ceci sans compter ceux, toujours plus nombreux, qui sortent des radars, ou encore la précarisation rampante. Un article brillant d'Olivier Berruyer sur son site Elucid (ici) lève la supercherie, en s'appuyant sur les chiffres du gouvernement. Au passage, il tord également le cou au faux procès fait aux chômeurs (6,6 millions de chômeurs pour 200 000 emplois non pourvus!).
Cette fiction du plein emploi poursuit donc plusieurs objectifs : claironner que tout va très bien et que tout va aller encore mieux, s'auto-congratuler du travail accompli, donner un cap positif au pays mais surtout justifier un nouveau tour de vis social. Ceux qui ont bien travaillé dans cette affaire, ce sont bien les cabinets de conseil. Et ils vont avoir du pain sur la planche, car cette fiction va se briser bientôt sur la réalité, à savoir une récession sévère qui se profile déjà. Il en faudra des trésors d'imagination pour tordre à nouveau les chiffres et les idées...
Pour compléter, voici quelques billets anciens mais toujours d'actualité :
1) sur le bidouillage des chiffres : L'excellent bilan économique de Macron
2) sur le vieux logiciel économique de Macron : Macron, ce disruptif d'arrière garde
1) sur la dette publique : Idées reçues sur la dette publique