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Billet de blog 7 mai 2018

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Nous sommes tous « dans le même bateau ».

Ce n’est pas « la misère du monde » qui a banalisé le meurtre de l’innocence dans nos rues, ce sont les graines de la discorde semées, depuis 1979, par nos faux amis agissant en toute impunité. Les Français - de toutes obédiences religieuses et philosophiques- ont le droit de savoir pourquoi leurs enfants – les victimes comme les assassins - sont morts.

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Nous sommes tous « dans le même bateau ».

« Mal nommer un objet c’est ajouter au malheur de ce monde. Et justement la grande misère humaine […] c’est le mensonge […] la grande tâche de l'homme est de ne pas servir le mensonge." Albert Camus, en résumé de pensées de Brice Parain, extrait de « poésie 44 », 1944.

Le sordide meurtre de Mireille Knoll nous a tous émus ; l’intervention, digne, de son fils, refusant l’amalgame, aussi. Cet assassinat fut l’œuvre (comme l’a révélé le journal Le Monde)  d’un psychopathe qui, très probablement, ne sera pas jugé, car irresponsable.

On se rappelle le pataquès médiatique orchestré par M. Khalifat, (ancien « barbouze » du Betar : c’est vous dire à quel point l’homme est sioniste !) actuel président du CRIF, à propos de cet assassinat. Personne n’a entendu M. Khalifat faire amende honorable depuis. Pourtant, rendre loyalement compte de ce genre de fait, après 30 ans de manipulation éhontée de l’opinion, c’est immanquablement fermer la porte à ceux qui distillent la haine de l’autre.

M. Val écrit dans son manifeste des 300[3] :« Dans notre histoire récente, onze Juifs viennent d’être assassinés - et certains torturés - parce que Juifs, par des islamistes radicaux. »

Toutes les innocences se valent au regard des lois de la République. Pourquoi cette restriction aux seuls juifs ? Il y a dans cette tirade comme une insulte à la mémoire des autres victimes et au chagrin des leurs. Que je sache, les massacres du Bataclan, de Charlie Hebdo, de Nice, aveugles, n’ont trié ni les sexes, ni les religions, ni les âges.

Cette restriction confine à l’obscénité par son ethnocentrisme positivement exhibitionniste. Cela est d’autant plus révoltant que, comparativement aux autres composantes de la société française, la communauté juive déplore le moins grand nombre de victimes du terrorisme. Le citoyen en quête de vérité, focalisant sur chacun des groupes de la mosaïque sociale, s’apercevrait du premier coup d’œil qu’il y a eu dans cette dérive meurtrière plus de victimes musulmanes, plus de chrétiennes, plus de femmes, plus d’homosexuels.

Si M. Philippe  Val tient à sa comptabilité macabre, qu’il écarte ses œillères un instant : ce sont les musulmans qui, dans le monde, payent le plus lourd tribut à « l’islamisme radical ». En réalité, la quasi-totalité des victimes sont musulmanes ; mais avouer cela, c’est priver les lobbies particularistes SHAF [1] d’une partie de leur fonds de commerce - qui consiste à essentialiser et amalgamer.

Nous sommes tous « dans le même bateau ». Nul besoin de le transformer en « radeau de la méduse ».

Claude Askolovitch, dans les colonnes du site Slate [2] , se dit «glacé par la tribune des 300» [3] . Il trouve que le texte est «horrible pour ce qu’il nourrit» : «Une mise en accusation des musulmans de ce pays, réputés étrangers à une véritable identité française, sauf à renoncer à leur dignité».

Comme de nombreux Français, Claude Askolovitch conteste - qui plus est, en tant que juif et cela a son importance à mes yeux - l’amalgame de la tribune des 300[3] : «Elle fait de la lutte pour les juifs une composante du combat identitaire français, et cette identité exclut.» Ce texte – qui, par ailleurs ,est anticonstitutionnel et contrevient à la loi du 09 décembre 1905- est condamnable, il induit un postulat insoutenable contre lequel le journaliste s’insurge et qu’il résume ainsi : «la défense du juif implique le refus de l’islam». Que l’on sache, la République qui proclame l’égalité en droit et en devoir de ses citoyens, s’interdit de s’immiscer dans leurs croyances.

Par ailleurs, Claude Askolovitch s'y montre aussi circonspect vis-à-vis des motivations soi-disant antisémites des crimes récents dont ont été victimes des membres de la communauté juive : «Les assassins de Ilan Halimi étaient "simplement" des barbares pétris de lucre et de haine, et rien n’atteste définitivement des motivations religieuses des tueurs de mesdames Knoll et Halimi.»

Certains, récitant les mots d’ordre du CRIF, viennent nous dire que le grief premier du « nouvel antisémitisme français » naît d’un fantasme : « les juifs ont de l’argent ».

Remarque 1 : « les juifs ont de l’argent » est un moyen d’empéguer l’adversaire dans l’infamant antisémitisme qui puise sa haine jusque dans « les sages de Sion »[4]- bréviaire de l’extrême droite européenne du début du 20ième siècle. On se souvient que « Les juifs ont de l’argent » fut l’élément clé du piège dans lequel on enferma Siné afin de le marquer au front de l’infamant stigmate « antisémite » [5]  (le Tribunal de Grande Instance lui a rendu justice).

Ont-ils vraiment écouté les griefs des uns et des autres ?

L’argent vient bon dernier. Ces gens-là savent que les juifs, qu’ils côtoient, ne sont ni Rothschild ni Rockefeller ;ils savent que les Cohen de Sarcelles tirent le « diable par la queue » et jouent les équilibristes de fin de mois, tout comme eux .Non, le grief premier est le pouvoir apparent - et voulu comme tel par les institutions juives de France, CRIF en tête - qui se manifeste par une emprise sur les médias , sur nos hommes politiques ,et une interpellation insolente de la République et ce , jusque dans les travées de son parlement [6] et [7] par des élus français qui travaillent à plein temps pour Israël.

Si « nouvel antisémitisme » il y a, la responsabilité revient à l’importation maladroite du conflit israélo-palestinien, et la non moins maladroite gestion de cette importation par nos hommes politiques qui – par clientélisme, bien souvent -ont laissé dégénérer la concurrence mémorielle jusqu’à la suppuration des cœurs. Chaque soubresaut de l’agenda de l’occupation de la Palestine – nous l’avons encore observé, ces dernier jours- se traduit par une onde « tellurique » qui secoue violemment la France – et pas seulement les musulmans contrairement à ce que les Val, Valls, Finkielkraut et tutti quanti laissent entendre. 

Par sa morgue, son hubris et son indécente injustice, cette occupation de la Palestine interpelle tous les descendants des DOM, des TOM et de nos ex-colonies. On peut voir dans le CRAN, les Indigènes de la République et les autres, toutes les velléités, tous les opportunismes que l’on veut. Il demeure, dans leurs cris, un fond de vérité : il y a en France, en contravention flagrante de l’égalité citoyenne, un « deux poids et deux mesures » lancinant. Ces inégalités sont du reste illustrées admirablement par le récent rapport Borloo [8] .

Les uns et les autres viennent nous dire, sur les ondes de France-Culture comme dans les colonnes de Marianne, que ce « deux poids et deux mesures est dans leurs têtes ».

Qu’à cela ne tienne ; ce sentiment de « deux poids et deux mesures » n’a d’égal que le sentiment « de nouvel antisémitisme » ressenti par certains juifs de France.

Ces sentiments sont entretenus – à dessein- par ces lobbies d’intérêts particularistes qui viennent régulièrement souffler sur les foyers de la haine de l’autre, de peur qu’ils ne s’éteignent. Ces lobbies sont : les SHAF [1]  – parmi lesquels le CRIF, la LICRA et les autres- bien sûr, mais aussi le wahhabisme [9] , maquillé en « salafisme », distillé par nos amis saoudiens.

Remarque 2 : le salafisme est mort au 11ième siècle ; il sert aujourd’hui de masque à une secte (bida’a), le wahhabisme [9] .Sauf à prendre le risque de se faire encanuler, chercher la vérité en cette matière passe obligatoirement par la consultation de bibliographies antérieures à 1979. 1979 est la date du lancement de l’expansionnisme symbiotique du wahhabisme -agissant à son service propre et à celui de son protecteur US- dans le cadre de la doctrine Carter. [10].

Bref, ce n’est pas « la misère du monde » qui a banalisé le meurtre de l’innocence dans nos rues, ce sont les graines de la discorde semées, depuis 1979, par nos faux amis agissant en toute impunité. Les Français - de toutes obédiences religieuses et philosophiques- ont le droit de savoir pourquoi leurs enfants – les victimes comme les assassins - sont morts.

Quoi qu’il en soit, la République ne peut décemment pas demeurer otage de ces deux autismes que sont le « deux poids et deux mesures »des uns et le « nouvel antisémitisme » des autres. L’équité prônée par sa loi et sa Constitution doit être imposée ; nos gouvernants doivent s’en montrer dignes en cessant (et en ne permettant plus aux apprentis sorciers bricoleurs d’opinions) d’agiter les Français les uns contre les autres.

Nous avons tous observé (avec consternation, pour ma part) Benyamin Netanyahou s’évertuer de rallier le juif de la diaspora à son panache écarlate en stigmatisant le gouvernement polonais coupable d’avoir osé se défaire du fardeau de la Shoa.

Pourquoi les générations présentes et à venir devraient-elles aller à Canossa à chaque fois que le chéri Bibi Netanyahou le jugerait utile ? Pire, en quoi la Pologne, qui fut le premier pays à tomber sous la botte nazie - donc à être privé de son libre arbitre - serait–elle complice de la Shoa ?
M. Netanyahou sait que même l’Allemagne, avant-hier nazie, n’entend pas laisser le poids de son passé criminel peser sur les épaules des jeunes générations. De quel droit en effet : il y a une différence, et de taille, entre commémoration et culpabilisation ad vitam aeternam.

Au cours de la dite « Querelle des historiens » [11]  l’Allemagne a rejeté la charge infamante du nazisme comme nous avons rejeté celle de Vichy et amnistié celle d’Algérie : afin de ne pas hypothéquer l’avenir de tous nos enfants.

Il y a quelque chose de malsain, une espèce de nécrophagie, dans cet entêtement à vouloir « nourrir » le présent des cadavres du passé. Les « deux mamelles » qui abreuvent « Le nouvel antisémitisme » sont : l’exploitation de la Shoa, jusqu’à la nausée, et l’occupation de la Palestine dont l’horreur perdure.

Dans cette affaire, Il demeure une chose irréfutable : les Palestiniens ne sont en rien responsables de la Shoa, l’injustice qui les accable est abyssale.

Sources :
[1] https://blogs.mediapart.fr/edition/lescarbille/article/170917/la-coalition-des-interets-particularistes-shaf-ou-l-aristocratie-du-moment
[2] Claude Askolovitch — 23 avril 2018, lien : http://www.slate.fr/story/160777/manifeste-contre-nouvel-antisemitisme-logie-devastatrice
[3]  le 22/04/2018 http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2018/04/22/01016-20180422ARTFIG00027-contre-le-nouvel-antisemitisme-des-centaines-de-personnalites-signent-une-tribune.php
[4] Protocole des sages de Sion https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Protocoles_des_Sages_de_Sion
[5] https://blogs.mediapart.fr/edition/lescarbille/article/021017/comment-val-et-malka-ont-amene-au-casse-pipe-l-equipe-de-charlie-hebdo-episode-iii
[6] https://www.youtube.com/watch?v=dSAuyodyzYo 
[7] https://www.youtube.com/watch?v=NEGVJu71Cr4
[8] Rapport Borloo, téléchargeable à partir de http://www.resovilles.com/decouvrez-rapport-borloo-quartiers/
[9] https://blogs.mediapart.fr/edition/lescarbille/article/130617/b-4-le-salafisme-wahhabite
[10] https://blogs.mediapart.fr/edition/lescarbille/article/281216/moyen-orient-genese-du-chaos-et-si-y-regardait-de-plus-pres
[11] https://blogs.mediapart.fr/edition/lescarbille/article/121117/finkielkraut-une-boucle-de-logique-episode-6

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