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Billet de blog 14 août 2025

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Théorie de pseudo-Michel

Michel Onfray n’est pas un philosophe, et c’est tant mieux. Philosophe, c’est louche. Mais il loupe bel et bien sa négation de Jésus. Et c’est tant mieux. Il est loin d’être parfait, le Michel. Et c’est tant mieux.

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Illustration 1

Michel Onfray,  je lui dois beaucoup. Peut-être pas d’avoir fini par perdre la foi en la gauche, en tout cas d’avoir fini beaucoup plus tôt. Il est un pamphlétaire inspiré et exact. Je lui dois aussi mes études de philo, pépère chez moi dans mon reelax, avec sa contre-histoire, son anti-manuel, son Albert Camus, son Nietzsche, son Freud. Il est un grand professeur.
Alors je considère que ses erreurs et ses péchés en philosophie, qu’ils soient sincères ou mal intentionnés, sont tout aussi respectables que ceux de Jésus lui-même ! Ce que j’aime dans l’imperfection, c’est sa réalité, son humanité. Et à l’inverse, j’abhorre toute forme de « pureté », ethnique ou morale. Et bien sûr, l’interdiction de contester.

Troisième billet consacré aux enfances Jésus.

https://blogs.mediapart.fr/jean-max-sabatier/blog/060825/les-vies-de-jesus-enfances-1

https://blogs.mediapart.fr/jean-max-sabatier/blog/090825/paque-jerusalem

Promesses

Le haut potentiel intellectuel d’un enfant-roi.

C’est le titre d’un chapitre de la Théorie de Jésus, biographie d’une idée.

Onfray note qu’à part Luc qui raconte le Jésus de douze ans étonnant les rabbins dans le Temple, l’enfance de Jésus est zappée par les évangélistes canoniques, Matthieu, Luc, Marc et Jean. Il prend ensuite la liberté de parler des « apocryphes », les textes venus après, plus poétiques et spéculatifs, et qui en fait brodent et inventent à partir des premiers, ce que chacun sait, Onfray le premier. Qui s’étend particulièrement sur l’Évangile du pseudo-Thomas, antérieur à l’an 400, très postérieur à Jésus, Pierre, Paul et Jacques.
Il cite de larges extraits. Comme ce texte est court, le voici en entier :
_____________

Par Thomas, philosophe israélite, récit de l'enfance du Seigneur 

Moi, Thomas l'Israélite, je crois très utile de faire connaître à tous nos frères d'origine païenne, les actions enfantines de notre Seigneur Jésus-Christ et les merveilles qu'il accomplit après qu'il fut né en notre pays. 
Ce petit enfant Jésus, âgé de cinq ans, jouait, après un orage, au bord d'une rivière. Il dirigeait des ruisselets dans des fossés et cette eau redevenait aussitôt limpide, obéissant à sa moindre parole. 
Ensuite, ayant pris de la terre glaise, il pétrit douze petits moineaux. C'était un jour de sabbat ; une volée de gamins jouaient avec lui. 
Un Juif, voyant à quoi s'occupait Jésus ce jour-là, s'empressa de tout rapporter à Joseph son père. « Dis, ton fils est près de la rivière ; il a pris de l'argile et il a façonné douze moineaux. Il se moque du sabbat ! » 
Joseph se rendit sur les lieux. Dès qu'il aperçut son fils, il le gronda : « Pourquoi te livres-tu à des activités interdites le jour du sabbat ? » Mais Jésus frappa dans ses mains et cria aux moineaux : « Partez ! » Les oisillons déployèrent leurs ailes et s'envolèrent en pépiant. 
Sidérés, les Juifs s'en allèrent conter à leurs chefs ce que Jésus avait accompli sous leurs yeux. 
Cependant, le fils d'Anne le scribe, qui se trouvait là, avec Jésus, saisit une branche de saule et dispersa les eaux drainées par Jésus. Ce que voyant, Jésus se fâcha, et lui dit : «Méchant ! Impie ! Insensé ! Quel mal te faisaient mes canaux et cette eau ? Eh bien, maintenant, deviens comme un arbre sec, et ne porte plus ni feuille, ni racine, ni fruit. » Aussitôt l'enfant se dessécha, des pieds à la tête. Et Jésus s'en retourna chez Joseph. 
Les parents de l'enfant desséché vinrent ramasser leur fils, pleurant sur sa jeunesse. Ils l'apportèrent à Joseph et ils le blâmaient d'avoir un fils capable de ces miracles-là. 
 Une autre fois, Jésus se promenait dans le village, quand un enfant, en courant, le heurta à l'épaule. Irrité, Jésus lui dit : «Tu ne poursuivras pas ta route. » A l'instant, l'enfant s'écroula, mort. A cette vue, certains s’exclamèrent : « D'où sort cet enfant, dont chaque parole devient immédiatement réalité ? » Les parents du jeune mort allèrent se plaindre à Joseph : « Avec un fils comme le tien, tu ne dois plus rester avec nous, dans le village, ou alors apprends-lui à bénir, au lieu de maudire. Car il fait mourir nos enfants. » 
Joseph prit son fils à part et le tança : « Qu'est-ce qui t'a pris ? Ces gens souffrent, ils nous détestent et veulent nous chasser ! » Jésus répondit : « Je sais que les paroles que tu dis ne viennent pas de toi ; aussi, par égard pour ta personne, me tairai-je. Mais eux recevront leur châtiment. » Aussitôt, les plaignants furent frappés de cécité. 
Les assistants étaient dans la crainte et le désarroi. « Toute parole issue de sa bouche, bonne ou mauvaise, disaient-ils, s'accomplit et produit un miracle. » Et quand ils eurent vu les prouesses de Jésus, Joseph se leva, prit son fils par l'oreille et la lui tira vigoureusement. L'enfant s'emporta et lui dit : « Ne te suffit-il pas de chercher et de ne pas trouver ? Voilà que tu te mets à agir sans réfléchir. Ignores-tu que je [ne] suis [pas] à toi ? Laisse-moi donc tranquille ! » 
Un maître d'école, du nom de Zachée, qui se trouvait dans le quartier, entendit ce que Jésus disait à son père. Il était sidéré qu'un enfant s'exprimât de la sorte. Peu de jours après, il aborda Joseph et lui dit : « Tu as un fils plein d'astuce et d'intelligence. Confie-le moi. Je lui enseignerai ses lettres, et quand il les saura, je l'instruirai de toutes les sciences. Je lui apprendrai à saluer ses aînés, à les honorer comme des aïeux et des pères et à aimer les enfants de son âge. » 
Il énuméra donc à l'enfant toutes les lettres depuis alpha jusqu'à oméga, avec beaucoup de soin et de clarté. Mais Jésus, levant ses yeux sur son maître Zachée, lui dit : « Toi, qui ne connais pas les significations de l'alpha, comment veux-tu apprendre aux autres le bêta ? Hypocrite, enseigne d'abord l'alpha, si tu le connais, et alors nous te croirons quand tu nous parleras du bêta. » Et il se mit à interroger son maître sur la première lettre, et l'autre ne savait que répondre. Et devant un grand auditoire, l'enfant dit à Zachée : « Apprends, maître, la disposition de la première lettre et remarque ses lignes droites et ce trait transversal qui les rapproche et les unit, tandis qu'elles se joignent en leur sommet. Le caractère de la lettre A se compose de trois signes, de même importance, de même qualité et d'égale mesure. » 
Lorsqu'il eut entendu l'enfant expliquer les significations si nombreuses et si profondes de la première lettre, le maître Zachée resta bouche bée. Après une telle réponse et un tel enseignement, il se tourna vers l’assistance : « Quel malheur et quelle pitié ! Je me suis couvert de ridicule en attirant cet enfant chez moi. Reprends-le donc, je t'en prie, Joseph, mon frère. Je ne supporte pas la sévérité de son regard ; je ne veux plus lui entendre dire un mot. Cet enfant n'est pas de ce monde. Il commanderait jusqu'au feu ! Sans doute a-t-il été créé avant la fondation de l'univers. Quel ventre l'a porté ? Quel sein l'a nourri ? Je l'ignore. Mais moi, mon cher ami, il m'étourdit, je ne peux suivre ses raisonnements. Je me suis trompé, oh, quelle misère ! Je cherchais un élève, j'ai trouvé un maître ! 
« Oui, mes amis, j'avoue mon humiliation. Moi, un vieillard, me laisser battre par un gamin ! Il m'a ôté tout courage et je n'ai plus qu'une envie, mourir. Je ne peux plus le regarder en face. Quand tous diront que j'ai été dépassé par un bambin, qu'aurai-je à répondre ? Et que raconterai-je, sur les éléments du premier caractère, après ce qu'il en a dit ? Je ne sais, mes amis. Car de lui je ne connais ni le commencement ni la fin. Aussi, je t'en prie, Joseph, mon frère, ramène-le dans ta maison. Cet enfant-là est extraordinaire, c'est un Dieu, un ange, ou je ne sais quoi encore. » 
Tandis que les Juifs essayaient de réconforter Zachée, l'enfant partit d'un grand éclat de rire et dit : « Eh bien, pour que ta mésaventure ne soit pas inutile, que les aveugles de cœur retrouvent la vue ! Moi, je suis venu du ciel pour les maudire, mais aussi les appeler en haut, comme me l'a ordonné celui qui m'a envoyé à cause de vous. » 
Dès que l'enfant eut cessé de parler, tous ceux qui étaient tombés sous l'effet de sa malédiction se relevèrent, sains et saufs. Et personne dès lors n'osait l'irriter, de peur d'être maudit et estropié. 
Quelques jours après, Jésus jouait sur la terrasse d'une maison, quand l'un de ses petits camarades dégringola du haut du toit et se tua. L'accident mit tous les enfants en fuite. Jésus resta seul. Les parents de la victime arrivèrent et l'accusèrent d'avoir provoqué sa chute. Et Jésus avait beau se défendre, ils continuaient à le rudoyer. Alors, d'un saut, Jésus fut au bas de la terrasse. S'arrêtant devant le cadavre de l'enfant, il cria d'une voix forte : « Zénon (ainsi s'appelait-il), debout ! Et dis-le, est-ce moi qui t'ai fait tomber ? » Aussitôt l'enfant se releva et dit : « Non, Seigneur, tu ne m'as pas fait tomber mais tu m'as ressuscité ! » Les assistants étaient stupéfaits. Quant aux parents de l'enfant, ils glorifièrent Dieu à cause de ce miracle et ils adorèrent Jésus. 
Un peu plus tard, un jeune homme qui coupait du bois dans le voisinage, laissa échapper sa hache qui lui entailla la plante du pied. Perdant tout son sang, il se mourait. Ce fut l'affolement. Les gens accoururent. Jésus lui aussi, arriva en hâte. Fendant la foule, il vint toucher le pied blessé et le jeune homme sur-le-champ fut guéri. Il lui dit : « Debout maintenant ! Coupe tes bûches et souviens-toi de moi ! » Et la foule qui avait été témoin de la scène l'adora, disant : « L'esprit de Dieu habite véritablement ce petit ! » 
Quand il eut six ans, sa mère lui donna une cruche et lui demanda d'aller puiser de l'eau et de la rapporter à la maison. Mais dans la cohue, il heurta la cruche et elle se brisa. Alors Jésus étendit le manteau dont il était couvert, recueillit l'eau dedans et l'apporta à sa mère. À la vue de ce miracle, elle l'embrassa et elle conservait en son cœur les mystères qu'elle lui voyait accomplir. 
Une autre fois, à la saison des semailles, l'enfant sortit avec son père pour semer du blé dans leur champ. Et tandis que son père semait, l'enfant Jésus jeta un seul grain en terre. Et quand vint la moisson et qu'il battit sa récolte, il en tira cent mesures. Appelant tous les pauvres du village sur l'aire, il leur distribua son blé et l'excédent revint à Joseph. Jésus avait huit ans quand il fit ce miracle. 
Son père était charpentier et il fabriquait en ce temps-là des charrues et des jougs. Un riche le chargea de lui faire un lit. Il se trouva que l'une des pièces était plus courte que l'autre, et Joseph était bien contrarié. Mais Jésus dit à son père : « Pose les planches à terre, et reste à ta place si tu veux les rendre égales. » Joseph fit comme l'enfant avait dit. Et Jésus se mit à l'autre bout, saisit l'élément le plus court et en l'étirant, lui donna la même longueur que l'autre, sous les yeux admiratifs de Joseph ! Celui-ci prit son fils dans ses bras, le couvrit de baisers et dit : « Je suis heureux que Dieu m'ait donné cet enfant ! » 
Joseph, voyant que l'intelligence de l'enfant croissait avec son âge, et répugnant toujours à ce qu'il restât illettré, le prit et le mena chez un autre maître. Celui-ci dit à Joseph : «Je lui apprendrai d'abord les lettres grecques puis les lettres hébraïques. » Ce maître connaissait les prédispositions de Jésus et il était inquiet. Cependant, ayant écrit l'alphabet, il se dépensa en de longues explications auxquelles l'enfant ne répondait mot. Enfin, Jésus lui dit : « Si tu es véritablement un maître, et si tu connais bien tes lettres, dis-moi la signification de l'alpha, et moi je te dirai celle du bêta. Vexé, le maître lui envoya une gifle. L'enfant, sous le coup de la douleur, le maudit : aussitôt le maître perdit connaissance et tomba face contre terre. 
L'enfant revint dans la maison paternelle. Et Joseph, navré, commanda à sa mère : « Ne le laisse plus passer la porte, puisque les gens qui le mettent en colère meurent. » 
Peu de temps après, un nouveau maître, ami intime de Joseph, lui dit : « Amène-moi l'enfant à l'école. Peut-être réussirai-je par la douceur à lui apprendre ses lettres. » Joseph lui dit : «Si tu as le courage, frère, prends-le avec toi. » Il le prit donc avec lui, rempli de crainte et de préventions, et l'enfant trottait gaiement. Sans émoi, il entra dans l'école, avisa un livre posé sur un pupitre, le saisit, et au lieu de lire les lettres contenues dedans, ouvrant la bouche, il parla selon l'Esprit saint et il enseignait la Loi aux gens qui se trouvaient là, à l'écouter. Sa parole attira une foule attentive, et l'on admirait la maturité de son jugement, la vivacité de ses raisonnements et l'éloquence de ce bambin. 
Apprenant cela, Joseph, inquiet, courut à l'école. Il craignait une catastrophe pour le maître. Or celui-ci dit à Joseph : «Mon frère, sache-le, j'avais pris cet enfant pour un élève. Mais il déborde de grâce et de sagesse. Alors, je t'en prie, mon frère, ramène-le chez toi ! » À ces mots, l'enfant lui sourit et dit : « Tu as bien parlé et tu m'as rendu un juste témoignage. Eh bien, grâce à toi, celui-là aussi que j'avais frappé sera guéri. » Et instantanément l'autre recouvra la vie. Joseph prit l'enfant et rentra chez lui. 
Joseph envoya son fils Jacques lier des fagots et les apporter à la maison. L'enfant Jésus le suivit. Tandis que Jacques ramassait ses branches, une vipère le piqua à la main. Déjà il agonisait, tout raidi, quand Jésus s'approcha et souffla sur la morsure. Les douleurs se calmèrent sur-le-champ et c'est l'animal qui mourut. Jacques, lui, était déjà sur pied. 
Plus tard, chez un voisin de Joseph, un petit enfant malade expira. Sa mère pleurait amèrement. Entendant ce deuil et ces cris affreux, Jésus se précipita. Il vit l'enfant mort, lui toucha la poitrine et dit : « Mon tout petit, je te défends d'être mort ! Vis, et reste avec ta mère ! » Aussitôt, le marmot ouvrit ses yeux et sourit. Jésus dit à la femme : « Prends-le, donne-lui son lait et souviens-toi de moi. » 
La foule qui assistait à la scène était dans l'admiration et disait : « En vérité, cet enfant est un Dieu ou un ange de Dieu ! Toutes ses paroles deviennent réalité ! » Et Jésus s'en alla jouer avec d'autres enfants. 
À quelque temps de là, il se produisit un grand vacarme, près d'une maison en construction. Jésus se leva et alla voir. Un homme gisait, sans vie. Il lui prit la main et dit : «Je te le dis, homme, lève-toi, et remets-toi l'ouvrage. » Aussitôt il se leva et l'adora. 
Alors la foule, émerveillée, s’écria : « Cet enfant vient du ciel ! Il a déjà sauvé beaucoup de gens et il en sauvera tout au long de sa vie ! » 
Quand il eut douze ans, ses parents, selon la coutume, se rendirent à Jérusalem pour la fête de Pâques, avec la caravane des pèlerins. La Pâque terminée, ils s'en retournèrent chez eux. Tandis qu'ils cheminaient, l'enfant Jésus remonta à Jérusalem. Ses parents le croyaient toujours dans la caravane. 
Après une journée de route, ils le cherchèrent parmi leur famille et ne le trouvant pas, pleins d'angoisse, ils retournèrent le chercher à la ville. Au troisième jour, ils le découvrirent assis dans le Temple, au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant. Et tous étaient attentifs et s'étonnaient qu'un enfant pût fermer la bouche aux Anciens et aux docteurs du peuple, et qu'il sût éclairer les principaux points de la Loi et les paraboles des prophètes. 
Marie, sa mère, s'approcha et dit : « Pourquoi nous as-tu fait cela, mon enfant ? Nous étions bien inquiets et nous te cherchions. » Mais Jésus leur dit: « Pourquoi me cherchez-vous ? Ne savez-vous pas que je me dois aux affaires de mon Père ? » 
Scribes et pharisiens dirent : « Est-ce toi, la mère de cet enfant ? Elle répondit : « Oui, c'est moi. » Et ils lui dirent : « Tu es heureuse parmi les femmes, car Dieu a béni le fruit de ton sein ! De gloire, de vertu et de sagesse comme la sienne, non, nous n'avons jamais vu ni entendu ! » 
Alors, Jésus se leva et suivit sa mère, et il était soumis à ses parents. Sa mère conservait toutes ces choses dans son cœur. Et Jésus grandissait en sagesse, en âge et en grâce. À lui la gloire aux siècles des siècles. Amen ! 
___________________
On aura reconnu, à la fin, l’épisode du Temple, celui raconté par Luc seul, et aussi par Anthony Burgess !
Mais avant d’en arriver là, bonjour le petit ! Les enfances Voldemort, plutôt que les enfances Jésus. 
Quand Harry racontera ce qu’il a appris sur l’enfant Jedusor à Ron et Hermione, Ron soufflera : 
« Wouao, il fait peur, le petit Tu-sais-Qui ! »
Onfray, lui, s’est contenté, avant de déballer le pseudo-Thomas, de noter :
« … dans des évangiles dits apocryphes, on peut lire un certain nombre d’informations concernant l’enfant Jésus, mais elles ne donnent pas une image que je dirai très catholique. »

Ici, on commence à avoir le sentiment que le penseur, prisonnier de sa théorie, perd toute objectivité. Parler « d’informations » ! Cela se confirme après les passages du pseudo-Thomas : (notez qu'il commence par un mensonge. L'épisode lucanien est bel et bien citation extraite du pseudo-Thomas, puisqu'il la reprend.)
« Sauf que, cette fois-ci, ça n'est pas une citation extraite de l'évangile de Thomas, un texte apocryphe que ne reconnaît pas l'Église catholique comme faisant partie du canon officiel, mais le texte de l'évangile selon saint Luc II, 40-52), autrement dit : l'un des quatre Évangiles. 
Pourquoi l'histoire des oiseaux modelés à la boue, les enfants envoyés à la mort parce qu'ils ont eu le malheur de déplaire à Jésus soit en crevant son petit barrage dans un ruisseau, soit en le bousculant malencontreusement en courant dans la rue, pourquoi le maladroit avec sa hache, ou qui tombe du toit, pourquoi les instituteurs qui veulent enseigner à l'enfant Jésus et subissent sa colère, son courroux, sa vengeance, sa punition, et autres passions tristes, pourquoi ces morts ressuscités ne sont-ils pas pris au sérieux par l'Église catholique, apostolique et romaine qui renvoie l'évangile de Thomas du côté des farces alors que la leçon donnée au Temple par un Jésus de douze ans, qui fait partie de l'enseignement de Thomas mais également des dits de saint Luc reconnus, ceux-là sont pris au sérieux par la même Église catholique, apostolique et romaine ? Faux les miracles des petits oiseaux, ou les résurrections réalisées dans son enfance, mais vraies les résurrections à Naïn (Lc VII, 11-17), celle de la fille de Jaïrus (Mt IX, 18-26 ; Mc v, 21-43 ; Lc VIII, 41-56), celle de Lazare (Jn XI, 1-44) ? Fausse la leçon donnée par Jésus aux rabbins dans la synagogue si c'est Thomas l'apocryphe qui la raconte mais vraie si c'est saint Luc le synoptique ? »

Ça c’est pas du pseudo-sophisme ! C’est du sophisme authentique. De première bourre. À force de lire Freud, Sartre, Foucault, Mélenchon dans le texte, il a chopé la mauvaise foi, le Michel. 

De quoi s’agit-il ? Aux premiers siècles, la progression du christianisme donne lieu à toute une création littéraire. Je dis bien, « littéraire ». France Quéré, catholique il est vrai, dans son édition des évangiles apocryphes, au Seuil, préface ainsi l’évangile du pseudo-Thomas :

Qu'y a-t-il d'exact dans les nom et titres de ce personnage, à part le terme de « pseudo »? Ce « Thomas, philosophe israélite », n'a rien à voir avec le disciple de Jésus ni avec l'évangile de Thomas présenté plus loin. Israélite ? Ses ignorances font plutôt songer à un chrétien d'origine païenne. Philosophe ? Le récit révèle plus d'imagination que de sagesse ; de naïveté que de mystique. 
Le texte dont les recensions sont nombreuses en grec, latin, géorgien, slavon, arménien, remonterait à une source syriaque antérieure à l'an 400. Amalgamé avec le Protévangile, il a inspiré des romans de l'enfance, encore plus prodigues en merveilleux, dont le Livre arménien de l'enfance et l'Evangile arabe de l'enfance
Il énumère apparemment de simples anecdotes. Une intention plus subtile commande cependant la série. On y voit grandir l'enfant Jésus et ses miracles, d'abord inconsidérés, se diriger vers la forme parfaite que leur donnera la maturité d'un Jésus de douze ans.

Bien sûr, comme tous les auteurs d’évangiles apocryphes, le pseudo-Thomas a lu les canoniques. L’épisode du temple lui donne l’idée d’autres épisodes enfantins. Et comme il y a un certain côté bad boy dans l’épisode relaté par Luc, et aussi, malgré tout, un amendement de Jésus après les remontrances de ses parents, il imagine une petite enfance encore plus « humaine », je suis tenté de dire ! Colette, seize siècles plus tard, proposera dans L’enfant et les sortilèges un gosse tout aussi impossible, c’est à dire parfaitement possible ! Et Johanne, encore un siècle après, proposera un enfant-démon, non pas divin, mais sorcier. Et je suis à peu près certain que cet Évangile arabe de l’enfance arrivera jusqu’à l’oralité sénégalaise. (Rappelons que Jésus est Yoshua en hébreu, et Issa en arabe.)

Répondons maintenant aux questions du pseudo-philosophe :

1 : Pourquoi l'histoire des oiseaux modelés à la boue, les enfants envoyés à la mort parce qu'ils ont eu le malheur de déplaire à Jésus soit en crevant son petit barrage dans un ruisseau, soit en le bousculant malencontreusement en courant dans la rue, pourquoi le maladroit avec sa hache, ou qui tombe du toit, pourquoi les instituteurs qui veulent enseigner à l'enfant Jésus et subissent sa colère, son courroux, sa vengeance, sa punition, et autres passions tristes, pourquoi ces morts ressuscités ne sont-ils pas pris au sérieux par l'Église catholique, apostolique et romaine qui renvoie l'évangile de Thomas du côté des farces alors que la leçon donnée au Temple par un Jésus de douze ans, qui fait partie de l'enseignement de Thomas mais également des dits de saint Luc reconnus, ceux-là sont pris au sérieux par la même Église catholique, apostolique et romaine ?

Mais, mon bon, parce qu’ils ne sont pas sérieux ! Par leur auteur et par ses dates, déjà. Par le raisonnement très simple qui explique que l’épisode du temple a eu des témoins et du retentissement, logique et naturel, rationnel. Alors que la geste du pseudo-Thomas n’a tout simplement pas eu lieu, parce que les miracles n’existent pas. C’est tout le problème d’historicité qui règne autour de Jésus. 

2 : Faux les miracles des petits oiseaux, ou les résurrections réalisées dans son enfance, mais vraies les résurrections à Naïn (Lc VII, 11-17), celle de la fille de Jaïrus (Mt IX, 18-26 ; Mc v, 21-43 ; Lc VIII, 41-56), celle de Lazare (Jn XI, 1-44) ?

L’attitude qui consiste à parler avec la voix du charbonnier alors que l’athée Onfray sait très bien que les miracles, aussi bien canoniques qu’apocryphes, sont des billevesées, relève du sophisme le plus pur.

3 : Fausse la leçon donnée par Jésus aux rabbins dans la synagogue si c'est Thomas l'apocryphe qui la raconte mais vraie si c'est saint Luc le synoptique ? 

Là, j’y crois à peine. Il a pas pris un nègre, Onfray ? L’équipe du site en ligne de Front Populaire regorge d’ahuris. Il a pas dû avoir de mal à en recruter un. Syllogisme éminemment foireux, faux.  Le pseudo-Thomas invente et mêle ses âneries à un passage de Luc qui l’a inspiré. L’Église l’a rejeté pour tout un tas de bonnes raisons, et cela ne signifie pas que tout y est faux. 


Son prof Lucien Jerphagnon, qui lui suggéra d’ailleurs d’écrire un Jésus, le réprimandait au sujet de son anti-cléricalisme. Il est probable que ses quatre ans dans un internat salésien en est en partie responsable. Ainsi que d’un certain anti-christianisme. 

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