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Billet de blog 29 juin 2019

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Le discours écologiste, faux nez de la macronie

Le discours écologique, d'abord esquissé dans la déclaration de politique générale du Gouvernement, a fait l'objet d'une véritable profession de foi de la part du Président. Mais non seulement les prises de position ne sont pas en adéquation avec les actes, mais le pouvoir s'acharne à empêcher toute remise en question par les citoyens des politiques environnementales nuisibles.

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C'est une véritable guerre entre "l'économiquement correct" - c'est à dire la croissance à tout prix - et les impératifs liés à la sécurité et au bien-être  des citoyens -  qui se déroule sous nos yeux. Les exemples démonstratifs ne manquent pas :
- L'augmentation du trafic aérien lié à la construction du terminal T4 de Roissy pose un véritable problème de santé public, dénoncé par l'ADVOCNAR, dont les agents économiques ne font aucun cas :
- L'épisode de canicule actuel - exceptionnel dans sa durée et son intensité - vient nous rappeler que les habitants des zones bétonnées sont les plus exposées aux grandes chaleurs, mais le pouvoir s'obstine, contre vents et marées, à soutenir EuropaCity et les bétonneurs du plateau de Saclay.
- Après les scandales liés au Chlorpyrifos  et au Glycophysate , dont il est à présent démontré que les études de toxicité ont été outrageusement truquées par Dow et Monsanto, ces produits ne sont toujours pas interdits par l'Union Européenne et par la France. L'arrêté pesticides pris par le Gouvernement est retoqué par le Conseil d'Etat  qui le juge insuffisant en termes de protection des populations. Les scientifiques qui réclament le retrait d'une autre famille de pesticides jugée dangereuse se heurtent à une fin de non-recevoir de l'agence sanitaire française sous le prétexte que les preuves sont insuffisantes. Que le principe de précaution ait été oublié, c'est le résultat du travail des lobbyistes, dont on retrouve la trace jusque dans les agences gouvernementales, comme le montre récemment la nomination de l'une d'entre elle comme directrice de la communication de l'ANSES.
- Toujours dans le domaine des pesticides, une préfète se permet d'enjoindre à un maire de revenir sur une interdiction dans sa commune, sous le prétexte que « l’utilisation des produits phytopharmaceutiques relève d’un pouvoir de police spéciale confiée au ministre chargé de l’agriculture ». Quand un maire veut s'opposer à la carence évidente des autorités gouvernementales, il est "retoqué" par le représentant de l’État, au nom d'une orthodoxie qui devrait prendre le pas sur la sécurité sanitaire ! Il est tout à l'honneur de ce maire de ne pas vouloir se coucher, soutenu par deux pétitions qui ont obtenu un succès qui dépasse sa commune (60000 signatures !). Mais si l'affaire arrive devant le tribunal administratif, il a malheureusement la jurisprudence contre lui.
- Un collectif de juristes dénonce une "régression généralisée" du droit de l'environnement en France : ils font état de la "disparition programmée de la Commission Nationale du Débat Public" et de la fin des enquêtes publiques. A une époque où l'extinction de la biodiversité connait un emballement sans précédent, un article de Médiapart fait état de la mise à l'écart du conseil national de protection de la nature au profit d'instances nommées par les préfets et les collectivités locales, au nom de la sacro-sainte croissance. Si l'on prend l'exemple d'EuropaCity, on peut constater que les nouvelles règles qui sont en train de se mettre en place sont létales pour la liberté d'informer et la sensibilisation de l'opinion : le débat public n'aurait jamais eu lien, la suppression programmée des enquêtes publiques aurait réduit à néant toute possibilité d'échange avec un commissaire enquêteur, la réduction à la portion congrue des études d'impact aurait interdit d'en invoquer l'insuffisance comme moyen de droit contre la ZAC du préfet et la modification du PLU. L'autorité environnementale, dont les avis indépendants ne sont pas du goût du pouvoir, ne pourra être saisie que sur décision du préfet. La volonté de supprimer dans les documents d'urbanisme les considérations d'environnement complète le tout. Ainsi, La mise au pas des corps intermédiaires indépendants réduit la démocratie à un vote tous les cinq ans avec, dans l'intervalle, un pouvoir qui fait ce qu'il veut sans aucune possibilité d'opposition.
C'est "une communication d'une perversité extrême" que celle de Macron,  qui proclame sa "foi (électoraliste !) de converti récent" à l'écologie. Il est seulement dommage que ce genre se limite à des discours de façade de faux converti à l'écologie. Le ministre de l'écologie n'est pas en reste, attribuant sans vergogne à l'action gouvernementale la baisse de 4% des émissions françaises de gaz à effet de serre en 2018. Le discours général est loin d'être à la hauteur des enjeux, car un éditorial du journal Le Monde se charge de rappeler que cette baisse, essentiellement due aux conditions climatiques moins rigoureuses qu'en 2017, est purement conjoncturelle. Le même article énumère une succession de carences politiques qui donne la mesure de l'inertie du pouvoir : la rénovation du logement -le secteur le plus émetteur dit l'article - est insuffisante ; A côté de l'absence de politique des transports privilégiant les solutions "propres" et des subventions aux énergies fossiles qui ont plus que doublé en 10 ans, des schizophrènes prétendent taxer les carburants au nom de l'écologie et cette démarche "punitive" est précisément à l'origine de la révolte des Gilets Jaunes. Tout cela montre que "la prise de conscience du dérèglement climatique dans l'opinion publique a considérablement augmenté, mais elle ne s'est pas traduite par l'action politique correspondante". Cela s'est traduit par une recrudescence du vote écologique aux élections européennes, mais il est permis de penser que si, par malheur, ce n'était qu'un feu de paille, les belles déclarations d'intention seraient très vite oubliées.

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