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Billet de blog 20 juin 2015

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La Grèce sous les coups de boutoir des négociateurs

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je n'ai rien contre les politiciens. Ils ne sont pas particuliers à la IVe République. Ils ont peu changé depuis la Grèce. En gros, ils forment, depuis des siècles, un club de négociateurs. Aux objectifs historiques - donc à long terme - ils substituent toujours l'objectif immédiat.  (André Malraux)

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Rien de bien neuf donc pour les Grecs, sauf la maturation de la situation mise en place par l'accord entre Syriza et la Troïka le 20 février 2015, qui a conduit à une situation catastrophique pour la Grèce, désormais en situation de cessation de paiement, sauf "héritage" de dernière minute.

Le gouvernement grec a proposé le 18 juin un vaste plan de libéralisation

Comme nous le verrons dans ce billet, la vigilance de la "Plateforme de gauche" est vitale pour la Grèce, d'autant que Yanis Varoufakis, Ministre des Finances, n'hésite plus à vanter les compromis du gouvernement. Le 18 juin, au soir de l'échec de nouvelles négociations avec l'Eurogroup, il a en effet publié sur son blog le plan de libéralisation proposé par le gouvernement grec à l'Eurogroup comme gage de sa "bonne foi" vis-à-vis du capitalisme financier : Greece’s Proposals to End the Crisis: My intervention at today’s Eurogroup.

Il s'agit en fait d'un train de réformes assez banal pour ceux qui sont habitués aux mécaniques du néolibéralisme. Aux côtés de dispositions autoritaires visant à lutter contre la fraude fiscale et contre la corruption, ce plan offre à la Troïka, avec l'appui logistique de l'OCDE, "un vaste programme de privatisations couvrant la période 2015-2025", la libéralisation de divers marchés de produits et services, la chasse aux "dépenses nuisibles", une réforme de l'administration publique avec l'introduction d'un système d'évaluation du personnel, la réduction des coûts non salariaux, la "modernisation et la rationalisation de la gestion de la masse salariale du secteur public". Il promet "la libéralisation du secteur de la construction, y compris le marché et les normes de matériaux de construction", la libéralisation du commerce de gros, "un centre d'affaires unique pour éradiquer les obstacles bureaucratiques pour faire des affaires en Grèce", enfin la "réforme" du système de retraites par l'élimination progressive des retraites anticipées, la réduction des coûts de fonctionnement du fonds de pension de retraites, propose enfin, comme mesure de gauche, la "consolidation" des fonds des pensions plutôt que de simples coupes dans les retraites.

Le 5 juin dernier, le Daily Telegraph publiait le point de vue de Panagiotis Lafazanis, chef de file de la tendance "Plateforme de gauche" à Syriza, hostile aux orientations du Parti de la gauche européenne et ministre de l'énergie au sein du gouvernement Tsipras. Selon Panagiotis Lafazanis, sa coalition au sein du Parlement serait en capacité de bloquer un éventuel accord entre le gouvernement et la Troïka dont nous venons d'exposer les bases.

Panagiotis Lafazanis

« Pas de convergence possible entre notre gouvernement et les Institutions »

"Les divisions au sein du gouvernement de la Grèce ont été mises à nu, vendredi 5 Juin 2015 : le ministre a exclu tout accord avec les créanciers du pays, les accusant d'exiger une « livraison de chair ». Panagiotis Lafazanis, le ministre de l'énergie et de l'environnement, a déclaré au Telegraph que la Russie pourrait être une source alternative d’avantages « financiers substantiels » pour la Grèce, soulignant qu'il n'y avait pas de « convergence possible entre notre gouvernement et les Institutions ».

Alexis Tsipras, le premier ministre, a gagné un sursis auprès des prêteurs, permettant à la Grèce de regrouper quatre remboursements distincts pour le Fonds Monétaire International (FMI) dans une somme d’un milliard cinq cent millions d'euros au 30 Juin 2015. Cela donne à Alexis Tsipras jusqu'à la fin du mois pour éviter un défaut et pour parvenir à un accord avec les créanciers.

La "Plateforme de gauche" serait en mesure de bloquer un accord éventuel

Mais un tel accord devrait être soumis au parlement et Panagiotis Lafazanis pourrait être un obstacle redoutable. Il dirige la Plateforme de gauche au sein du mouvement Syriza au pouvoir, représentant environ un tiers des cent quarante-neuf députés du parti. La coalition dispose d'une majorité parlementaire globale de douze députés, donc Panagiotis Lafazanis et ses alliés pourraient, en théorie, bloquer tout accord.

Promettant de s'opposer à un accord, Panagiotis Lafazanis « ne pense pas que Syriza acceptera que le pays et son peuple soient exterminés à l'intérieur de la zone euro. Un troisième programme consécutif d’austérité est l'option la plus destructrice possible pour la Grèce ».

Alexis Tsipras a pris le pouvoir en janvier 2015 avec l'engagement de renégocier les "plans de sauvetage". Mais aucun accord n'a été atteint, laissant le gouvernement grec chercher des moyens d’existence quotidiens, luttant jour après jour pour trouver assez d'argent pour payer les fonctionnaires et respecter ses obligations envers le FMI.

Panagiotis Lafazanis, un ancien communiste, estime que cela suffit. Tout accord, soutient-il, forcerait Syriza à briser sa promesse électorale de mettre fin à l'austérité. Il veut qu’Alexis Tsipras mette fin aux négociations et, si nécessaire, refuse de payer les dettes de la Grèce, ou même quitte l'euro.
« Les institutions ne veulent pas d’un accord, même au détriment de la Grèce, avec, disons, un compromis acceptable ». « il est évident que, compte tenu de leurs exigences, il ne peut y avoir de convergence entre notre gouvernement et les Institutions ».

La nécessité de la rupture

Les créanciers, constitués de la commission européenne, du FMI et de la Banque Centrale Européenne (BCE), veulent se procurer des recettes par la privatisation des biens publics grecs. Mais Panagiotis Lafazanis a dénoncé les privatisations au sein de son propre champ de responsabilité. « La privatisation des services publics d'énergie serait l'équivalent d’un crime odieux au détriment de notre nation, de notre peuple et de notre économie ». « Ce serait comme un coup de grâce, le coup final de la miséricorde, après cinq ans d’écrasement des programmes de prêts de renflouement. Je ne suis pas seulement contre, mais je me battrai vigoureusement contre de telles options ».

Selon Panagiotis Lafazanis, la Grèce devrait rompre avec le consensus de l'Union Européenne et construire de meilleures relations avec la Russie ; « La poursuite du développement des relations gréco-russes dans tous les domaines, ainsi que le transit d'un pipeline de gaz naturel russe à travers notre territoire, est absolument compatible avec notre présence dans l'Union Européenne », a-t-il dit.
Les divisions au sein de Syriza sont si grandes que même si Alexis Tsipras devait signer un accord avec les créanciers ce mois-ci, Panagiotis Lafazanis pourrait donc aider le Parlement à voter contre l’accord. S’il en était ainsi, une autre élection générale pourrait être la seule manière de sortir de l'impasse."

Alexis Tsipras et Jean-Claude Juncker

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La Grèce sur ce blog :

- La règle du jeu (3/03/2015)

- Traduction de l'entretien en cinq parties avec Costas Lapavitsas, député du groupe SYRIZA au Parlement grec, publié dans la revue américaine "Jacobin" (mars 2015). 

Grèce : comment la gauche radicale allemande a capitulé (8/03/2015)

Alexis Tsipras : "I am not dangerous" ! (17/05/2014)

La crise sanitaire en Grèce (24/02/2014)

Explosion de la mortalité infantile en Grèce (24/02/2014)

La fermeture des centres de consultation de la Sécurité Sociale (21/02/2014)

 - Grèce : la honte de la France (19/12/2013)

Edition "Que vive la Grèce" :

La Grèce face à l'échec de la stratégie du "bon euro" (17/03/2015)

Les Grecs et l'Union européenne : sortir de l'euro, mais pas de l'UE (sondage) (4/01/2015)

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