La gouvernance et les parties prenantes
La problématique engagée sur l’éthique des affaires pose les questions de corruption, d’entreprise citoyenne et de gouvernance d’entreprise. Elle interroge sur les problèmes d’organisation du travail, d’accords d’entreprise et de comportements. Sa formalisation vise à bâtir une identité sociale en abordant les problèmes d’organisation avec les salariés.
La conception française du « gouvernement des entreprises » (rapport Viénot 1995) se différencie de la conception anglo-saxone. Celle-ci consacre la primauté des actionnaires sur l’ensemble des différents acteurs. Celle-là considère que la mission du Conseil d’administration consiste à défendre en toutes circonstances l’intérêt de la société, qui ne peut se confondre avec celui des seuls actionnaires. Les recommandations de l’OCDE en ce domaine sont les suivantes : Assurer le respect des droits des actionnaires ; Améliorer la transparence de l’information fournie par les entreprises ; Séparer les fonctions de président du Conseil d’administration et de directeur général ; Nommer au Conseil des administrateurs indépendants en nombre suffisant ; Créer des comités spécialisés.
La notion de gouvernement d’entreprise appelle à une limitation des pouvoirs des dirigeants par la prise en compte d’un ensemble organisationnel. En faisant intervenir l’ensemble des « parties prenantes », cette notion fait clairement connaître la responsabilité morale des dirigeants. De fait, le gouvernement d’entreprise permet de contrôler que les objectifs poursuivis sont légitimes et que les moyens mis en œuvre pour les atteindre sont adéquats. La question de la légitimité du pouvoir d’entreprise est posée.
L’éthique des affaires semble conduire l’entreprise vers un nouveau conformisme, puisqu’il s’agit pour elle de se conformer à des normes. La politique de responsabilité sociale et environnementale se situe tant au plan opérationnel qu’au plan stratégique. Elle recoupe les différentes disciplines de gestion.
Les pratiques d’évaluation des politiques de responsabilité sociale de l’entreprise interfèrent avec les logiques de normes et de certifications : qualité (ISO 9000), environnement (ISO 14000), sécurité (ISO 18000), codes d’éthique et labels éthiques (SA 8000). L’Institute of Social and Ethical Accountability propose une norme globale (AA 1000). Une entreprise qui s’en tiendrait à un strict alignement sur les éléments normatifs courrait effectivement le risque du conformisme. Or, la question de l’éthique dépasse cet ordre.
L’on attend de l’entreprise qu’elle développe une politique de responsabilité dynamique, en quête d’efficacité sociale et environnementale. L’éthique constitue toujours le cadre grâce auquel s’affirme la personnalité et l’originalité. Il appartient à chaque entreprise d’être inventive pour construire une stratégie non-conformiste, dans le but de répondre à la problématique de sa responsabilité sociale. La prise en compte du « développement durable » doit se manifester, tant par des actions extérieures à son activité économique (mécénat de solidarité, partenariat avec les associations, missions d’entreprise), qu’à travers cette activité même (ressources humaines, développement local). L’enjeu stratégique consiste à concevoir l’adéquation des capacités de l’entreprise avec son environnement. Il montre que l’Etat ne dispose plus des moyens pour répondre à l’intérêt général et que les « parties prenantes » se tournent vers les entreprises créatrices de richesses, en quête d’une légitime participation à l’intérêt commun.
Développements précédents :
L’éthique a un sens que les affaires ne peuvent corrompre
La problématique de la mondialisation
La quête de sens pour l’aventure humaine
Développements suivants :
Le management éthique redécouvre l’homme comme la véritable valeur
L’éthique est un questionnement permanent de la conscience
Yves Maris