En résumé : ‘‘Richard Ferrand a signé fin 2010, au nom de sa compagne, un compromis pour acheter un immeuble, au moment même où les Mutuelles de Bretagne étaient à la recherche de nouveaux locaux. Ce compromis avait été assorti d'une clause conditionnant l'achat du bien à la promesse de sa location par l'organisme où Richard Ferrand était directeur-général. Ce n'est qu'une fois cette location approuvée que sa compagne, Sandrine Doucen avait monté une SCI – domiciliée à l'adresse commune du couple – pour finaliser la transaction. Elle avait pu emprunter la totalité des 375 000 euros nécessaires, le loyer annuel de 42 000 euros sur neuf ans permettant d'auto-financer l'opération. Les lieux avaient ensuite été rénovés par les Mutuelles de Bretagne, organisme bénéficiant de subventions publiques, pour environ 250 000 euros.’’
Mais le Canard révèle l’affaire en mai 2017 et, depuis plusieurs séquences judiciaires, dont un classement sans suite à Brest et une action de l'Association Anticor, la Cour de cassation conclue le 5 oct 2022 à la ‘‘prescription des faits’’ sans pour autant blanchir l’ami du président...
L’ avocat de l’association anticorruption Anticor, à l’origine de la plainte, Jérôme Karsenti, a rappelé que «la Cour de cassation a fait une interprétation très stricte du droit, faisant échapper Richard Ferrand à sa responsabilité pénale. Il n’en reste pas moins que les faits sont constitués et qu’il n’échappe au procès que par un moyen procédural.» C’est comme si la date de ‘‘consommation’’ était périmée... mais le produit est toujours là, même quand il est pourri !
Et déjà en juin 2017, il m'avait inspiré... En effet, Monsieur le ministre Ferrand, ex-député PS, soutien de la première heure du nouveau Président, secrétaire-général du mouvement En Marche, élu sous l’étiquette PS depuis 1998, jonglait avec brio de promesse de vente en création de société, de mutuelle conciliante prenant en charge les travaux en étant locataire et juteuse plus-value pour sa compagne officielle et mère de la fille du ministre. ... à voir Un Ferrand dans la chaussure...
La proposition du Président est cohérente avec sa façon de se passer de l’équité en politique dont ses déclarations à l’époque exprimaient bien sa suffisance... «les choses ne vont pas forcément bien quand la presse devient juge». Or, quand la presse investigue et informe, ce n'est pas un jugement, mais le devoir d'informer et pour les citoyens le droit de savoir! La question c'est l'intégrité d'un élu, voir la cohérence d'un projet de gouvernement qui au premier "couac" fait l'autruche!
Les nominations chères à M Ferrand...
Et concernant M Ferrand on pourrait s’amuser, si on peut dire, à souligner ses nominations. Il a proposé pour le Conseil Constitutionnel M Juppé, condamné pour «prise illégale d’intérêt» dans l’affaire des emplois fictifs du RPR en 2014, à quatre mois de prison avec sursis.
Comme le rappelle le journal Le Monde, Richard Ferrand ‘‘pourrait retrouver l’ex-magistrate Véronique Malbec, qu’il avait lui-même nommée quand elle était directrice de cabinet du garde des sceaux de l’époque...’’ Déjà à ce moment-là cette ‘‘nomination avait soulevé des interrogations, puisqu’elle avait été procureure générale près la cour d’appel de Rennes en 2017, et donc responsable hiérarchique du magistrat du tribunal de Brest qui, à ce moment-là, avait classé sans suite l’enquête préliminaire sur les Mutuelles de Bretagne.’’
Il avait aussi pour le Conseil Supérieur de la Magistrature, suivant la procédure des nominations, voulu nommer Mme Faugère, ex-directrice générale de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Mais, encore une fois, l'hebdo du mercredi (16 janvier 2019) a lancé un “Canard dans la mare”, rappelant que Mireille Faugère, avait perçu trop d’argent lorsqu’elle dirigeait l’AP-HP. En juillet 2018, un jugement du Tribunal administratif de Paris l'avait condamné à rembourser la somme de 148 934€... voir: Ferrand et la juge des juges trop “gourmande”!
Un Conseil Constitutionnel ‘‘vierge de toute condamnation’’...
Oui, on pourrait penser et, exiger que le Conseil constitutionnel soit ‘‘vierge de toute condamnation’’... Mais non, la Macronie (et bien d’autres avant) considèrent que l’éthique en politique n'est qu'une formule dans l'intitulé de l'Association Anticor et que les intérêts et les combines politiques en haut niveau s’imposent pour le bien des affaires de la (leur) République.
Nous sommes loin de l’exigence du casier judiciaire vierge pour les candidats à une élection ou les ministres et sous-ministres !
Et la proposition de Macron arrive le jour de la parution d’un rapport où ‘‘La France perd cinq places dans le classement mondial de l’indice de perception de la corruption établi chaque année par Transparency International. Pour la première fois, le pays est classé parmi ceux « risquant de perdre le contrôle de la corruption».’’ Lire l’article de Michel Deléan /la-france-degringole-dans-le-classement-de-la-lutte-anticorruption
Deux autres billets sur l’affaire Ferrand : * oct 2017 /ferrand-tout-est-bien-qui-finit-bien * * avril 2021 /ferrand-et-sa-belle-affaire-en-famille