Nous avons décidé d'organiser le Live du 22 février « Le participatif sur Internet : pour quel débat public ? » suite à une série d'alertes inquiétantes.
Le 10 janvier, tout d'abord, la décision des sites francophones belges du groupe Roularta (dont Le Vif/L’Express) de fermer la possibilité de commenter les articles sur leurs sites, à cause « du caractère souvent trop virulent et irrespectueux qui rend impossible tout dialogue constructif » nous a interrogée. D'autant plus que depuis cinq ans, plusieurs sites d'information ont fait ce choix radical, notamment en Amérique du Nord (CNN, Reuters, Toronto Sun, etc.) en supprimant les espaces de commentaires et parfois même les forums de débats. L'explication avancée tournant toujours autour du même constat : le débat public numérique deviendrait ingérable, d'une qualité de plus en plus dégradée, confisqué par quelques armées de trolls et des commandos de propagandistes.
D’autre part, plusieurs contributeurs du Club Mediapart, très investis dans l’espace participatif, ont sonné l’alarme en début d'année pour nous dire que chez nous aussi, ça n’allait plus ! Un constat largement partagé dans le Club que vous pouvez retrouver ici : Le participatif dans Mediapart : Synthèse des propositions.
Nous avons ainsi organisé ce Live dans l’optique de mieux comprendre ce qui se joue aujourd'hui sur ce terrain-là (les relations entre les journalistes et les commentateurs/contributeurs sont-elles condamnées à être stériles ) et de faire participer le plus grand nombre aux chantiers que nous comptons mettre en route sur la modération et le participatif.
La première partie propose ainsi une réflexion sur la crise de la démocratie Internet : est-ce que la promesse démocratique de la révolution numérique a échoué ? Est-ce que les forums de discussion sur les sites d’information sont tous voués à disparaître à cause de la virulence qui s’y déploie ? Faut-il alourdir les sanctions à l’égard de ceux qui ne jouent pas le jeu ? Remettre en question le pseudonymat ? Ou faut-il avant tout mettre plus de moyens humains pour gérer ces espaces de discussion ?
Une intervention de Dominique Cardon, sociologue, professeur à Sciences-Po/Medialab, nous a particulièrement éclairé sur la nécessité de prendre le temps de "cultiver son jardin" :
« Il y a des conditions dans lesquelles le participatif marche mieux que d'autres. (...) La meilleure métaphore c'est celle du potager : il faut cultiver son espace. Il faut l'organiser, y revenir. Il faut de l'interraction, il faut aussi encourager le fait que les participants se surveillent et se contrôlent mutuellement et se reprochent un certain nombre d'expressions pour créer un peu d'auto-régulation, même si certains ne sont pas auto-régulables. Et que du coup, il y a quelque chose dans l'installation d'un dispositif qui instaure un contrat de lecture et de participation avec le public dans lesquel on a l'impression qu'il y a des règles. Car si on a l'impression qu'il n'y a pas de règles, et qu'au contraire ces espaces servent de panneaux d'affichage des opinions extrêmes, et si en plus il n'y plus de dialogue avec la rédaction, il est probable en effet que l'on vienne à fermer ces espaces ».
Dans la deuxième partie de la soirée, nous avons cherché à faire parler ceux qui ont fui les espaces de discussion avec ceux qui en revanche sont très présents, voire trop ! L'idée qui nous motivait était de mieux comprendre certaines attitudes et comment dépasser la « crise » actuelle.
Outre la rencontre avec les abonnés, toujours riche et surprenante dans sa diversité, ce moment nous a permis de cerner une question prioritaire (par souci d’efficacité, nous ne pouvons pas ouvrir tous les chantiers en même temps !)
Pour remettre de la sérénité dans les fils de discussion, faut-il donner la possibilité aux bloggeurs de disposer sous chacun de leur billet un bouton « tous sauf » qui leur permettrait de bloquer des commentateurs ?
Cette proposition, qui consisterait à laisser à chacun la liberté de modérer son billet comme il le souhaite soulève plusieurs questions (déjà évoquées lors du live et de la discussion qui s’en est suivi dans le fil de discussions, mais aussi dans le billet de synthèse de Camedia déjà cité, mais aussi de Pascal Eychart, Egalidad…):
1 - Ce blocage doit-il être un filtre : les commentateurs bloqués pourraient quand même intervenir sur le fil mais ils ne seraient plus visibles par l’auteur. (à lire dans la synthèse de Camedia : « Il lui permettrait d'agir individuellement pour s'épargner le harcèlement des trolls, des militants ou des ennemis personnels. Il ne s'agit pas de censurer les commentaires fâcheux - ils sont publiés, libre aux autres de les lire - mais de s'en protéger personnellement. ») ou une interdiction de participer pur et simple à la discussion initiée par l’auteur du billet ?
2 – Ce nouveau pouvoir donné aux blogueurs de "cultiver son jardin" comme il l’entend comporte-t-il le risque de renforcer les replis sur soi (ou sur sa bande) ? Ne vaut-il pas mieux une application plus sévère de la charte ?
Si cette nouvelle fonctionnalité devait voir le jour, il faudra comme vous pouvez l’imaginer de longs développements de la part de notre équipe technique, aussi nous souhaitons entendre le plus d’avis possibles avant de prendre une décision. N’hésitez pas à réagir en écrivant, ou en recommandant certains commentaires, certains d’entre vous l’ont déjà fait, voilà quelques extraits :

Agrandissement : Illustration 1


Agrandissement : Illustration 2


Agrandissement : Illustration 3


Agrandissement : Illustration 4

Merci pour votre participation !