Olivier Hammam (avatar)

Olivier Hammam

Humain patenté mais non breveté.

Abonné·e de Mediapart

1163 Billets

5 Éditions

Billet de blog 1 janvier 2021

Olivier Hammam (avatar)

Olivier Hammam

Humain patenté mais non breveté.

Abonné·e de Mediapart

Entropie systémique, partie III.

Je blaguais à la fin de la partie II en proposant que «dans ma réalité j'ai des choses nettement plus importantes à faire que poursuivre cette discussion», dans ma réalité tout importe et je puis à la fois poursuivre cette discussion et faire d'autres choses.

Olivier Hammam (avatar)

Olivier Hammam

Humain patenté mais non breveté.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Vers la deuxième partie

Pédagogie du réchauffement climatique, II.

Il me semble désormais inutile de développer la partie conceptuelle de ce billet en trois parties, pour aborder de front cette question, le “réchauffement climatique” en tant que “pédagogie”. On (en ce cas Ma Pomme) supposera que ce qui précède suffit pour l'aspect conceptuel, la suite relevant de l'aspect propagandiste de cette discussion.

Je ne suis pas dans la tête de mes gouvernants mais constate leur pratique. Laquelle ressort de cette proposition: «Il faut que tout change pour que rien ne change». Je ne sais pas si leur projet correspond à cette assertion, je sais en revanche que ce qui apparaît à la fois de leur discours et de leur pratique y correspond. Il y a une opposition dans leur discours même et une contradiction entre ce discours et leur pratique. D'où, il semble que la proposition «Il faut que tout change pour que rien ne change» corresponde à... Hum! Disons, à leur projet.

Bon, “leur projet”. Ouais mais il y a ce problème, leur projet est «et en même temps»™ «et de gauche et de droite»©. D'accord. Vous avez deux mains? C'est le cas général pour les humains. Quand j'agis avec ma main gauche je n'agis pas “et en même temps”™ de ma main gauche; parfois conjointement et parfois non mais dans tous les cas mon action à gauche n'est pas “et en même temps”™, chacune de mes mains à sa propre temporalité qui parfois est convergente avec celle de l'autre main, parfois non, et quand elles sont convergentes, parfois c'est prémédité, parfois non. Considérons que mon actuel gouvernement, le gouvernement français de ce début de janvier 2021, est «et en même temps»™ «et de gauche et de droite»©. Son opposition n'est pas dans cette circonstance, elle est soit de gauche, soit de droite, soit “ni de gauche ni de droite”, soit “et de gauche et de droite” mais autrement que ce gouvernement donc sans marque déposée. Du fait mon actuel gouvernement, acceptant cette opposition “gauche” contre “droite”, puisqu'il ne se répute pas “ni de gauche ni de droite” et ne rejette pas cette dichotomie, comme le font par exemple les libertaires et les libertariens, reste dans le cadre actuel qui divise les projets politiques en “de gauche” et “de droite”. Son hypothèse est donc de ne plus les opposer, ce que contredit son slogan: si on est «et de gauche et de droite»©, on ne réunit pas les deux oppositions mais on divise sa propre action, pour partie “et de gauche”, pour partie “et de droite”. D'un point de vue objectif ça ne change rien à la situation antérieure, qu'ils se réputent “de gauche” ou “de droite”, tous les gouvernement qui se succèdent entre 1986 et 2017 sont «et en même temps»™ «et de gauche et de droite»©. Sans dépôt de marque ni de copyright mais ils le sont. Jusqu'en 2002 il y a tout de même une différence mais marginale, à partir de 2002 même cette différence s'estompe, les gouvernements “de droite” sont toujours moins “de droite” que ne le propose leur programme électoral, ceux “de gauche” toujours moins “de gauche” que ne l'est leur programme, et celui «et en même temps»™ «et de gauche et de droite»©. est autant ou aussi peu “et de gauche et de droite” que ses prédécesseurs.

Une société est nécessairement “et en même temps” tout et son contraire. En même temps mais non conjointement. Pour reprendre ma proposition, une société est en même temps mais non conjointement statique et dynamique, donc se dire «et en même temps»™ tout et son contraire est un truisme, une “vérité d'évidence”, car dans une société tout et le contraire de tout peut émerger et en général émerge. Sans pour autant que tout se réalise. On peut dire que pendant un certain temps se réalisa en France une opposition fonctionnelle étiquetée “de gauche” et “de droite” mais que depuis un certain temps, au jugé depuis le milieu de la décennie 1960, elle n'est plus aussi fonctionnelle, et depuis le milieu de la décennie 1990, plus du tout fonctionnelle. Non que l'opposition fondamentale, qu'on dira des “anciens” et des “modernes”, n'ait plus de pertinence, elle transcende les circonstances, mais cette opposition “droite” contre “gauche” n'est plus fonctionnelle parce que ce qui fondait “la droite” au début de cette opposition n'agit plus dans la société française de ce début de XXI° siècle: même les plus réactionnaires des idéologies actives en France en cette année 2020 tout juste achevée ne remettent plus en cause sa superstructure, toutes se disent “républicaines”, presque toutes se disent “démocrates”. Qu'elles le soient ou non importe peu, il importe seulement qu'elles se disent l'être. Or, l'opposition “gauche” contre “droite” ne fonctionne pleinement que dans un contexte où “la droite” s'oppose à ce qui fonde la société, à ce qui fonde sa superstructure. Quoi que je pense de sa Constitution, qui n'est pas trop positif, reste ceci: la V° République a entraîné l'adhésion de tout ce qui était “la droite” et “ni la droite ni la gauche” à une forme d'organisation “républicaine” et “démocratique”. De mon point de vue, la Constitution de la IV° République fut nettement plus démocratique mais de fait la France de la décennie 1950 n'était pas encore prête à une telle évolution, pour cette raison simple qu'une large majorité des Français et de leurs représentants – environ les deux-tiers – adhéraient à des idéologies pas très favorables à dette forme d'organisation de la société, dont une part non négligeable pas trop favorable simplement à un gouvernement de type républicain.

Le gouvernement français actuel, se disant «et en même temps»™ «et de gauche et de droite»©, ne fait rien d'autre qu'énoncer une évidence. Comme dit dans l'excursus sur les truismes il n'y a pas de vérité d'évidence, donc énoncer une évidence c'est énoncer une non-évidence. Il est une évidence, qui n'est pas une vérité mais un simple constat sur la réalité observable, on peut être conjointement mais non en même temps “de gauche et de droite”. Plus que de pouvoir l'être on l'est quand on est un individu latéralisé: que j'aie conjointement un côté gauche et un côté droit n'a pas nécessité d'être dit, j'ai un côté gauche et un côté droit, que je le veuille ou non. Mais mon côté gauche n'est pas “et en même temps”™ mon côté droit, nom côté droit “et en même temps”™ mon côté gauche, ce que je fais avec l'un je ne peux le faire “et en même temps”™ avec l'autre. Conjointement oui, en même temps non. Car le temps est une dimension, donc ce qui se produit à un endroit de l'univers peut se produire au même instant en un autre mais pas “en même temps” puisque ça se produit ailleurs. Considérant cela, j'ai une clé de compréhension pour interpréter ce discours de mon gouvernement: il me dit que dans le contexte de 2021, 2020 ou 2017 l'opposition gauche-droite dans une acception politique, idéologique, n'a plus de pertinence. Qu'on soit “de gauche” ou “de droite” on adhère au dogme fondamental “la France est une République et une démocratie” et si on n'y adhère pas on ne participe plus de cette société. Ce qui ne signifie pas que des groupes marginaux n'y adhèrent pas, le 21 janvier prochain je suis assuré que des rassemblements, «dans le respect des consignes de distanciation sociale» bien sûr, c'est-à-dire dans le respect de la démocratie et de la République, se feront pour commémorer comme chaque année depuis 1794 la mort de Louis XVI – et que le même jour des rassemblements commémorant, «dans le respect [etc.]», la mort de Vladimir Ilitch Oulianov, dit Lénine, auront lieu comme chaque année depuis 1925. Mais ça n'aura rien à voir avec les rassemblements d'avant 1945 pour le premier, d'avant 1980 pour le second: même les “orléanistes” de 2020 n'aspirent pas à un rétablissement de l'Ancien Régime, même les “communistes” de 2020 n'aspirent plus à l'établissement d'un régime soviétique. Ils sont républicains et démocrates, ou ils ne sont rien.

Le gouvernement actuel me dit que dans le contexte présent l'opposition gauche-droite dans une acception idéologique n'a plus de pertinence, pourtant il se prétend “et de gauche et de droite”. Qu'est-ce qu'il me dit proprement? Qu'il est partisan de la préservation de l'état des choses dans la superstructure. Il me dit “et en même temps”™ que l'opposition gauche-droite est obsolète et qu'il veut la préserver. Il me dit simplement ceci: dans le contexte actuel, de 2021 tout juste commençant, il souhaite que rien ne change. Donc il prétend que tout change et que pour assurer le changement il faut que rien ne change. Se disant «et de gauche et de droite»©, il exprime le fait qu'il veut préserver la superstructure dans laquelle l'opposition gauche-droite était valide.

Le réchauffement climatique comme outil de propagande.

Le réchauffement climatique est un fait. Certes un fait difficilement démontrable mais un fait vérifiable, mesurable, pour le contester il faudrait démontrer de manière vérifiable que les données objectives à l'appui de cette thèse sont inexactes. L'usage politique de ce fait n'est pas un fait. Enfin si, c'est un fait, mais d'autre nature: un fait de propagande. Il y a peu encore, quand d'autres éléments de propagande susceptibles de préserver l'état des choses fonctionnaient pleinement, la notion de réchauffement climatique pouvait être objet de polémique, d'un côté les “climato-sceptiques“, de l'autre les “climato-convaincus”, entre eux une majorité de “sans opinion”, donc tendanciellement “climato-non-convaincus” sans être pour cela sceptiques. En 2021, les “sans opinion” ont basculé dans le camp des tendanciellement “climato-non-sceptiques”, non parce qu'ils on changé de “non opinion” mais parce qu'entretemps l'hypothèse du réchauffement climatique à cause anthropique est devenue vers le milieu de la décennie 2010 celle la mieux reçue. Ça n'a pas fait disparaître d'un coup d'un seul le “climato-scepticisme” mais dans le débat public c'est devenu l'apanage des “anciens” contre les “modernes”: l'opinion des “sans opinion” est toujours réputée celle des “avec opinion” majoritaires, selon le vieil adage «Qui ne dit mot consent».

La question n'est pas, pour les responsables politiques, de savoir si une opinion est vraie ou fausse mais si elle peut faire consensus: en 2010 il n'y avait pas de consensus possible sur cette question de réchauffement climatique, indépendamment de sa validité ou de son invalidité, en 2020 un consensus s'est établi en France sur cette question parmi les personnes qui “font l'opinion”, et plus largement parmi celles qui la font un peu partout. Ça n'induit pas qu'un consensus universel eut lieu, d'évidence des entités politiques aussi importantes que les États-Unis, le Brésil et l'Inde sont “hors consensus” donc on y reste dans la situation antérieure, des “sans opinion” tendanciellement “climato-non-convaincus” – ce qui n'empêche, bien sûr, ces nations étant confédérées ou fédérées, que certains de leurs États soient tendanciellement “climato-non-sceptiques”. Le but d'un gouvernement n'est pas de discerner le vrai du faux mais d'obtenir le soutien actif ou passif, l'approbation ou la non-désapprobation, d'une majorité relative suffisante, et que son pouvoir ne réunisse pas une frange significative d'opposition concertée. Comme précisé, dans le contexte français de cette troisième décennie du millénaire commençant aucun groupe idéologique souhaitant accéder au pouvoir ne peut se dire anti-républicain ni anti-démocrate; la question n'étant pas de savoir s'il est vraiment républicain ou/et démocrate mais s'il peut, souhaitant avoir la possibilité de gouverner, affirmer ne pas l'être. Dans l'entre-deux-guerres, en France on pouvait l'affirmer et y avoir – ô paradoxe! – un poids électoral non négligeable, ça restait de l'ordre des opinions admises; dans les décennies 1950 à 1970 ça restait encore admissible mais ça interdisait déjà l'accès au pouvoir, et dès le milieu de la décennie 1960 l'anti-républicanisme était déjà peu admissible; à partir de la décennie 1980 et plus encore à partir de la suivante être anti-démocrate ne faisait plus partie des opinions recevables pour un groupe politique aspirant à gouverner légalement. Peu importe donc que ces groupes soient sincèrement démocrates et républicains, importe qu'ils doivent se dire tels en 2021 s'ils envisagent d'accéder au gouvernement par la voie électorale.

En 2010, le président de la République en exercice pouvait, sans se décrédibiliser, déclarer le 6 mars 2006, lors d'une «table ronde sur la situation de l'agriculture française à l'occasion du Salon international de l'agriculture», «Je voudrais d'ailleurs, au point où j'en suis, dire un mot de toutes ces questions d'environnement. Parce que là aussi, cela commence à bien faire», ou lors même de ce Salon faire, le 23 mars suivant, un autre discours qui semblait de prime abord contradictoire au premier puisqu'il commence par y défendre le “Grenelle de l'environnement”, mais la suite du discours est plus dans la tonalité du précédent, plus cauteleux certes mais bien moins favorable à “l"environnement” quand mis en balance avec “l'enjeu économique”. Deux discours inenvisageables sous cette forme en 2021 de la part d'un chef de l'exécutif français. L'évolution de cette question est récente, postérieure à 2010, on peut la dater de l'année 2012, moment où “le réchauffement climatique” passe du statut d'objet de débat à celui de fait incontournable. Mais il fallut plus de temps pour que ça devienne un discours unanime, le même Sarkozy déclare en mars 2016, toujours au Salon de l'agriculture:

«Est-ce que j'ai bien fait de signer [le pacte de Nicolas Hulot pour l'écologie]? Je me suis posé la question... C'était une façon de céder à la pensée unique, à des gens qui au fond ne représentent que très peu, que les médias adorent mais qui ne représentent pas grand-chose».

On ne peut dire que les choses ont beaucoup changé dans la pratique de nos gouvernants depuis 2010 jusqu'en 2020, en revanche si Nicolas Sarkozy a l'intention de jouer de nouveau un rôle de premier plan dans la superstructure, il a intérêt à reprendre ses propos de 2008 sur l'écologie:

«Ce n'est pas une idéologie, ce n'est pas une lubie, ce n'est pas un truc, ce n'est pas une tactique, ce n'est pas un positionnement. C'est une conviction».

Que pour lui ce soit une idéologie et une lubie, que dans son projet ce soit un truc, une tactique, un positionnement, et non une conviction, importe peu, il importe simplement qu'en 2021 et en France, toute personne qui prétend que “le réchauffement climatique à cause anthropique” est une lubie idéologique ou/et que son adhésion à “l'écologie” est un truc, une tactique, se décrédibilise et compromet fortement ses chances de de gouverner. Tiens, je vais faire une recherche de sondages sur “le réchauffement climatique”. Recherche faite, même les plus pessimistes avec les questions les plus susceptibles de faire baisser le nombre de réponses positives sur à la fois le fait du réchauffement et la nécessité d'agir contre recensent une majorité d'opinions favorables, et presque tous atteignent ou dépassent une adhésion des trois-quarts des sondés à ces propositions – je précise: les sondages parus de 2018 à 2020, ceux antérieurs ne seraient pas significatifs. Bien sûr ceux qui atteignent des résultats “soviétiques” – une adhésion supérieure à 90% – ne sont pas significatifs non plus, disons que les sondages relativement neutres produisent des résultats avec une adhésion supérieure à 53% et selon les moments et le but de ces “enquêtes d'opinion”, en général de l'ordre de 60% à 75%. Bref, en ce début de décennie 2020 un “responsable politique” de toute opinion qui nierait ce réchauffement et sa cause anthropique, ou prétendrait que l'écologie est une lubie et une idéologie, ne parviendra pas à rassembler suffisamment de soutien pour être en position d'être au pouvoir. Il peut certes débiner les groupes politiques étiquetés “écologistes” mais non l'écologie comme instrument politique. Contrairement à une situation pas si ancienne, le tout début de ce XXI° siècle, une opposition frontale aux “questions d'environnement” est devenue impossible, et contrairement à une situation encore moins ancienne, celle de 2016-2017, postuler qu'adhérer à ces questions est «une façon de céder à la pensée unique» serait rédhibitoire. Précisément parce que c'est devenu une “pensée unique”.

La notion de “réchauffement climatique” est doublement un instrument de propagande: d'une part toute propagande de 2021 qui n'inclut pas cette notion dans son discours sera inefficace, de l'autre la fonction de cette notion n'a le plus souvent qu'un lien faible à ce réchauffement comme réalité observable. La propagande s'intéresse très peu à la réalité observable, elle ne s'intéresse, quand elle produit des discours destinés au “grand public”, qu'aux arguments “carottes” et aux arguments “bâtons”. De mon expérience, le concept «changement climatique» est éternel, quelle que soit la cause supposée de quelque chose présentée comme indésirable un des signes indiquant que cette chose a lieu est “le climat”, ou plutôt son absence: à tout moment depuis le temps où j'en entends parler, soit en gros le milieu de la décennie 1960, j'eus droit à ce slogan, «Il n'y a plus de saisons!». Je me suis tâté, vais-je acheter ce numéro de L'Histoire pour accéder à tout l'article? Pour l'instant je suspends ma réponse car ce qui nous en est donné me suffit ici:

«Il n'y a plus de saisons!
Il y a la réalité abordée à Copenhague. Et le sentiment populaire, de tout temps, que le climat se dérègle.
“L'année 2009 est incroyable pour le changement climatique!” déclare Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la Convention de l'ONU sur les changements climatiques à propos de la 15e conférence de l'ONU sur le climat. Baptisée COP 15, cette grand-messe du climat s'est tenue à Copenhague du 7 au 18 décembre et a tenté d'obtenir une communion politique en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Autour de cet événement majeur gravite cependant une forme de psychose largement entretenue par les médias et certaines associations, tous invoquant le caractère inédit et surtout “anormal” du climat des dernières années. Même si le réchauffement de nature anthropique, observé scientifiquement ces dernières années, n'est pas en cause, l'historien du climat se retrouve en terrain familier» (par Emmanuel Garnier, dans L'Histoire n° 349, janvier 2010).

C'est ainsi, il y a «le sentiment populaire, de tout temps, que le climat se dérègle». Cela indépendamment d'un dérèglement effectif et observable. Il se peut, il est assez vraisemblable, qu'on observe au cours des deux derniers siècles un réchauffement climatique à cause anthropique. Il est tout aussi certain que les variations météorologiques observables dans la durée d'une vie ne sont pas indicatives d'une variation climatique. Tout au plus d'une variation du climat qui n'est qu'en partie une conséquence du changement de climat induit par le réchauffement global sur cette période. Ce “sentiment climatique” a fondamentalement peu de liens avec le climat, beaucoup de liens avec les changements sociaux. En 1965 un Français de 25 ans et plus est né dans une autre société que celle de 1965, c'est vrai aussi pour ceux de 5 à 25 ans mais leur “sentiment social” n'est pas encore formé où se forma après 1946, et si entretemps il y eut pas mal de changements sociaux il sont, du moins à ce moment, au milieu de la décennie 1960, moins significatifs que ne le furent ceux qui se produisirent entre 1905 et 1945, période où se forma ce “sentiment social” pour presque tous les contemporains de 25 ans et plus – soit dit en passant, en 2020 on peut étendre  cette période de formation du “sentiment social” de trois lustres, rapport au fait que les humains de 2020 vivent en moyenne trois lustres de plus que ceux de 1965. Dire en 1965 «Il n'y a plus de saisons!» réfère non à un changement climatique mais à un changement de la société; le dire en 2020 réfère aussi à un changement social. La différence entre 2020 et 1965 est circonstancielle, des données d'observation rendent compte du fait qu'il y a effectivement un “changement climatique” et qu'il a une explication, la modification à cause anthropique de l'atmosphère avec un apport important de “gaz à effet de serre”, en tout premier de dioxyde de carbone, mais en 2020 comme en 1965 les variations météorologiques ne sont pas pertinentes pour “lire le changement”, le changement  climatique. En revanche, le sentiment du dérèglement des saisons est explicatif du dérèglement de la société, ou l'inverse: il n'y a plus de saisons parce que la société se dérègle, ou la société se dérègle parce qu'il n'y a plus de saisons.

Ce sentiment, «Il n'y a plus de saisons!», relève de la pensée magique,. cette «forme de pensée qui s'attribue ou attribue à autrui le pouvoir de provoquer l'accomplissement de désirs, l'empêchement d'événements ou la résolution de problèmes sans intervention matérielle». Ne pas trop tenir compte de l'alinéa qui suit:

«Ce type de pensée se manifeste principalement au cours de l'enfance et est, à l'âge adulte, appréhendé par la médecine comme un symptôme d'immaturité ou de déséquilibre psychologique».

Wikipédia est fortement orientée rationalisme et positivisme, donc privilégie les explications et considérations positives et rationnelles. Une proposition plus loin dans l'article me semble plus pertinente:

«La psychologie suggère que la pensée magique constitue une tentative d'échapper à l'angoisse de l'inconnu (“mieux vaut être dans l'erreur que dans l'incertitude”) et au conflit intérieur».

C'est ainsi, même si on ne fait pas preuve d'immaturité ni de déséquilibre psychologique l'inconnu angoisse, l'incertitude déstabilise, et on a donc besoin de se rassurer. En un apparent paradoxe, le sentiment qu'il n'y a plus de saisons parce que la société se dérègle rassure – l'autre proposition, le sentiment que la société se dérègle parce qu'il n'y a plus de saisons, rassure aussi mais d'autre manière qu'avec la pensée magique.

Quand un problème apparaît complexe les humains ont tendance à supposer la cause de ce problème complexe ou pour le dire mieux, inatteignable, ce qu'exprime cet autre lieu commun, «On ne peut rien y faire...». On ne peut rien faire envers la cause. Une cause transcendante. Le climat ou Dieu, même combat: une cause sans cause. Or les seules causes correctibles sont des causes avec cause. D'où, “la solution” est d'agir sur des causes secondes et non des causes premières. Ce qui est vrai. Je veux dire, on ne peut agir que sur des causes avec causes, sur des “effets”, des causes immanentes.

Le problème “changement climatique” n'a pas de solution si “le climat” est une cause sans cause, un objet global “avant toute chose”, avant toute cause.


Excursus: “Anthrop” ou “entrop”?

J'entendais à l'instant (dimanche 3 janvier 2020 entre 4h20 et 5h20) la rediffusion de La Conversation scientifique du 25 juin 2016, où Étienne Klein conversait avec Bernard Stiegler. À un moment, vers la fin de l'émission, interviennent les questions de l'entropie et de la néguentropie. Klein demande alors à Stiegler, «Avec un a ou avec un e?». Suit un échange très intéressant (je vous conseille l'écoute de cette émission) mais j'en parle pour autre chose: j'avais bien pensé à mettre en rapport “anthropie” et “entropie” (mon correcteur d'orthographe n'apprécie pas la forme “anthropie”) mais Stiegler m'a fait apparaître une autre possibilité de mise en rapport, “néguentropie” et “néguanthropie” (là je ne m'étonne pas de voir mon correcteur d'orthographe râler contre “néguanthropie”, Google trouve 100 résultats, tous en lien avec Bernard Stiegler, pour ce mot, et près de 35.000 pour “anthropie”...). Or il est évident qu'existe une “néguantrophie”, un “humanisme négatif” qui à son aboutissement serait un anti-humanisme, bien représenté, comme le mentionne Stiegler dans cette émission, par le “post-humanisme” et par le “transhumanisme”.

Je profite de cet excursus pour discuter un peu de ces deux notions, “post-humanisme” et “transhumanisme”: ces gens-là ont raison dans leurs prémisses, l'humanité, celle d'ici et maintenant, va disparaître, et on passera à autre chose, on ira au-delà. Il en va toujours ainsi, l'humanité telle qu'elle se pensait il y a seulement cinq ou six décennies n'existe plus, on est passé à autre chose, à une autre humanité. Où ils se trompent, mais ce ne sont pas les premiers, c'est dans les conséquences: l'humanité ne se pensent plus comme elle se pensait il y a deux ou trois générations mais les humains se pensent à peu de choses près comme ils se pensaient il y a trois ou trente générations. Bref, considérant ce qui est certain, l'avenir ne sera pas le passé, les “post-humanistes” et “transhumanistes” supposent que l'avenir sera autre que le passé, ce qui ne peut être le cas, il lui ressemblera beaucoup. La fin d'un monde n'est jamais la Fin du Monde, juste une autre manière de voir le monde, donc sa finalité. J'en discute abondamment ailleurs et vais en discuter un peu ici, juste après cet excursus: la réalité de 2020 a peu de rapports avec celle de 1990, encore moins avec celle de 1960, et presque rien de commun avec celle de 1930, mais la réalité ordinaire de ses habitants diffère assez peu avec celles antérieures, un “assez peu” de grande signification mais de peu d'effet...

Fin de l'excursus.


Le réchauffement climatique comme outil de propagande.

(suite)

Donc, le problème “changement climatique” n'a pas de solution si “le climat” est une cause sans cause, un une cause avant toute cause, un objet global. Ce n'est pas le cas bien sûr, le climat n'est pas une réalité mais un concept. Certes un concept qui se relie à une réalité, mais elle n'est pas un objet déterminé, global, et elle n'est pas une cause sans cause. Cela dit, une action volontaire correctrice du climat est inenvisageable, précisément parce que ce n'est pas un objet déterminé mais la résultante d'infinités de causes. Est envisageable une action correctrice envers nous-mêmes comme individus, comme groupes, comme sociétés et finalement comme humanité, non pour corriger le climat mais pour corriger notre rapport au monde. La situation de 2020 a démontré à grande échelle que nos sociétés peuvent aisément réduire leur niveau d'activité sans que ça change grand chose à la réalité ordinaire de la grande majorité des humains, beaucoup vivent “un peu” moins mal ou “un peu” plus mal, quelques-uns vivent beaucoup mieux ou plus mal, les sociétés ne se sont pas écroulées et le monde continue à tourner. La réalité est bien plus ordinaire que sa représentation. Il m'arrive pour illustrer la chose de prendre le moment de l'exode de 1940 en France: les estimations du nombre de morts va de 10.000 à 100.000, les sources les plus fiables donnant une estimation basse – il semble que les estimations hautes additionnent les morts civiles, donc proprement de l'exode, et les morts militaires –, ce qui relativement au nombre de personnes déplacées, entre huit et dix millions, dans un pays en guerre et soumis aux bombardements aériens et à l'avancée rapide des armées de terre, est un très faible nombre. Et comme le mentionne l'article de Wikipédia, six mois plus tard 75% à 80% de ces déplacés sont retournés chez eux et neuf mois plus tard, en février 1941, plus de 90% d'entre eux l'ont fait. La réalité est bien plus ordinaire que sa représentation: l'exode de 1940 fut à coup sûr une situation désastreuse mais nettement moins catastrophique que ne le représente toute anticipation ou tout récit a posteriori d'un tel événement. Et les sociétés ont de grandes capacités de résilience, elles “reviennent à la normale” assez aisément, y compris dans des contextes “anormaux”. En 2020, avec certes une situation nettement moins désastreuse on s'est cependant retrouvé dans un contexte comparable, et comme en 1940 la désorganisation de la superstructure eut peu de conséquences notables sur l'infrastructure. Est-ce que je mentionne dans ce billet que les changements dans la superstructure ont des conséquences effectives somme toute faibles mais des conséquences symboliques importantes alors que c'est l'inverse pour l'infrastructure? Il me semble que oui, je vérifie ça vite fait. C'est le cas. En fait c'est une citation d'un autre billet, «Changer la société», qui développe plus ces question de superstructure et d'infrastructure. Bon ben ce coup-là je vais radoter en le citant de nouveau:

«Les membres d'une société se confrontent à un paradoxe: le changement de l'infrastructure est perceptible mais non significatif, celui de la superstructure imperceptible mais significatif [...]. C'est que, quand la superstructure connaît une changement radical les positions de ses membres sont fort peu modifiées, le processus est différent mais ceux qui y agissent sont les mêmes et pour réaliser le plus souvent les mêmes fonctions qu'auparavant. Alors que le changement de l'infrastructure modifie visiblement la structure et la manière dont le processus se réalise, donc les positions des acteurs».

Tant qu'à faire de me citer, j'ajoutais dans ce billet-ci, partie II, sous-section «Des complots, des comploteurs et des complotistes», que les changements dans l'infrastructure “changent le paysage”, dans la superstructure “changent les mentalités”, les uns sont visibles, les autres non. Les changements dans les comportements sont visibles mais nettement moins sensibles, du moins au moment où ils ont lieu, ce n'est qu'avec un certain décalage qu'on les constate.

Ce qui relie les membres d'une société est avant tout la réalité symbolique: vous et moi ne sommes pas effectivement reliés en tant que membres de la société alors que nous le sommes en tant que participants d'un écosystème, c'est notre croyance en la société qui nous relie dans ce cadre symbolique. Raison pourquoi, bien que peu perceptibles les changements dans la superstructure sont plus significatifs: c'est par elle que la société en tant que réalité symbolique se relie, donc tout changement de la superstructure modifie les relations entre ses membres. Le Spectacle n'est pas une manière délibérée de changer les relations entre membres de la société mais résulte de l'altération de la superstructure, en revanche la Société du Spectacle est délibérée, elle résulte de la volonté délibérée de ses agents de faire que “rien ne change”, donc de remplacer la réalité par son apparence.

Le Spectacle résulte de l'inadéquation entre infrastructure et superstructure, c'est donc l'état habituel d'une société puisque l'une et l'autre sont en perpétuel changement et sauf en de rares occasions, en déphasage. Ça ne devient un problème critique que lorsqu'elles sont en discordance. Comme déjà expliqué, peu importe que cette discordance soit due à un emballement ou un ralentissement, dans les deux cas il y a discordance donc “trop de mouvement” en tels secteurs de la société, “trop d'immobilité” en d'autres. Pourquoi «le sentiment populaire, de tout temps, [est] que le climat se dérègle»? Parce que le sentiment de la régularité des choses, du temps cyclique, repose sur le sentiment de la régularité des événements cosmiques, des “météores” (cf. partie II, sous-section «Des complots, des comploteurs et des complotistes», et «Addendum III à “Quand les choses doivent changer...”»). Depuis au moins aussi longtemps que les humains produisent des discours dont on a la trace, ils pratiquent la “météorologie”, la “μετεωρολογία”, (meteôrologia), le “discours sur les météores”, ils “cherchent des signes” dans le ciel. Tiens ben, vous savez comment on saura que la Fin du Monde est proche? Ainsi:

«Comme quelques-uns parlaient des belles pierres et des offrandes qui faisaient l’ornement du temple, Jésus dit: Les jours viendront où, de ce que vous voyez, il ne restera pas pierre sur pierre qui ne soit renversée.
Ils lui demandèrent: Maître, quand donc cela arrivera-t-il, et à quel signe connaîtra-t-on que ces choses vont arriver? Jésus répondit: Prenez garde que vous ne soyez séduits. Car plusieurs viendront en mon nom, disant: C’est moi, et le temps approche. Ne les suivez pas. Quand vous entendrez parler de guerres et de soulèvements, ne soyez pas effrayés, car il faut que ces choses arrivent premièrement. Mais ce ne sera pas encore la fin.
Alors il leur dit: Une nation s’élèvera contre une nation, et un royaume contre un royaume; il y aura de grands tremblements de terre, et, en divers lieux, des pestes et des famines; il y aura des phénomènes terribles, et de grands signes dans le ciel»
.

Pour moi tout ce qui constitue les deux parties de la Bible est premièrement tropologique, secondairement allégorique, tertiairement littéral, et toujours anagogique mais cet aspect n'a guère d'importance: tout discours devant faire l'objet d'une interprétation est toujours susceptible d'une lecture “mystique” ou “secrète“, donc fausse. Si vous ne connaissez pas ces quatre catégories, en voici une explication:

«Dans un texte il y a toujours quatre niveaux de lecture, le niveau littéral (pshat dans la tradition hébraïque, littéral ou historique dans celle chrétienne), allusif (remez, allégorique dans la tradition chrétienne), allégorique (drash, tropologique dans la tradition chrétienne) et mystique ou secret (sod:, anagogique dans la tradition chrétienne). Les noms importent peu, importe le concept. On dira qu'il y a une lecture immédiate ou exotérique, référentielle, “ce qui est dit est vrai et univoque”, une lecture médiate ou ésotérique, indirectement référentielle, “ce qui est dit est faux et équivoque mais cache un sens vrai et univoque”, une lecture interprétative, on “cherche le sens”, et comme quand on cherche on trouve, nécessairement on en trouvera un mais on le trouvera en soi, non dans le texte, enfin une lecture exégétique, on cherche aussi un sens mais en dehors du texte. Cette notion dépasse largement le seul cadre des textes sacrés et de la tradition “judéo” (hébraïque puis juive, chrétienne, musulmane), de longue date les humains ont constaté cette particularité de leur mode de communication et certains ont su en tirer parti en bien comme en mal, pour unir ou pour diviser, un usage “divin” et un usage “diabolique” (en grec, le “diábolos”, “διάβολος”, est le “diviseur”, le “perturbateur”, le “corrupteur”, celui qui dénonce, qui calomnie, qui sème la discorde)».

Repris du billet «339: Une brève histoire du temps». J'ai utilisé les dénominations “chrétiennes” parce que la Bible en deux parties, Ancien Testament et Nouveau Testament, est l'ouvrage fondamental de ces courants “judéos” – enfin, de la majorité d'entre eux, certains courants actuellement admis en tant que sectes chrétiennes n'admettent qu'une part restreinte de cet ouvrage, voire un tout autre texte fondamental – mais les autres dénominations valent car cette conception des “quatre niveaux de lecture” est très commune, on la trouve donc chez les Hébreux antiques mais aussi chez les philosophes grecs – les discours “exotériques” et “ésotériques” et pour chacun ceux destinés aux “initiés” et aux “non initiés” –, etc.

Donc, pour moi la Bible est d'abord drash, mais ce passage cité peut être lu comme pshat, “historique”, et aussi comme remez et comme sod que ça ne change rien à sa fonction: informer que “le moment viendra quand il y aura des signes”, et spécialement «de grands signes dans le ciel». Dans mon jeune temps (décennies 1960 et 1970) la Grande Menace n'était pas “le Réchauffement” mais “la Bombe”, ce qui ne change rien au fait que “les Signes” se trouvent dans le Ciel, les météores: à l'époque le Signe des Signes était le même, «Il n'y a plus de saisons!», mais la Cause Magique autre.

Le réchauffement climatique comme propagande du non-agir et de l'agir.

Comme mentionné dans la partie II, excursus «Nul ne détient la vérité»:

«Aucune idéologie n'est plus vraie ou plus fausse qu'une autre [et si] la voie démocratique est beaucoup plus adaptative puisqu'elle n'a ni fins ni moyens [...] ça n'a rien de particulièrement valide, si on préfère une fin “dans l'agir” plutôt que “dans le non-agir” ça se défend, je préfère les achèvements par transition progressive que par rupture, c'est moins violent, mais ça ne change rien au fait de l'achèvement».

Dans toute société les deux courants coexistent, ils sont toujours en déphasage et parfois en discordance. Quand une “Approche Fraîche” émerge elle vient presque toujours de courants orientés “non-agir”, mais quand elle commence à se diffuser, à devenir une “Vérité d'évidence”, immanquablement elle sera recyclée par des courants orientés “agir”. De l'autre bord, les courants du “non-agir” ont aussi l'art de recycler les “Approches Flétries” des courants de “l'agir”. Vous avez entendu parler de la «querelle des Anciens et des Modernes» je suppose – en tout cas je l'espère. Lisant l'article de Wikipédia vous constaterez deux choses:

  • Elle n'est pas limitée à un pays et à un moment mais apparaît régulièrement, avec ceci de curieux que les Anciens d'hier sont très souvent les Modernes d'aujourd'hui et les Anciens de demain, et réciproquement;
  • les Anciens et les Modernes de toute époque puisent au même stock de notions et de concepts pour en tirer des leçons opposées.

C'est toujours le même phénomène: quand une notion, un concept, deviennent des lieux communs, des vérités d'évidence, si on souhaite faire partie d'un groupe idéologique susceptible d'occuper des positions de pouvoir on ne peut faire l'impasse sur eux, et quand ils sont supposés consensuels, on se doit d'affirmer être en accord avec eux. Peu importe, pour reprendre un de mes exemples, qu'un groupe politique soit républicain et démocrate, importe qu'en 2021 et en France un groupe politique voulant acquérir des positions de pouvoir se dise républicain et démocrate, quitte à proposer “l'aristocratie c'est la démocratie” et “la dictature c'est la république” – vous savez, genre orwellien, genre «la guerre c'est la paix, la liberté c'est l'esclavage, l'ignorance c'est la force». Peu importe qu'on adhère à la notion de “réchauffement climatique à cause anthropique”, importe qu'on dise y adhérer. Quitte à proposer une “solution” contradictoire à toute solution vraisemblable pour résoudre cette question.

J'en parlais dans la partie II, section «La clochette “réchauffement climatique”», la question du réchauffement climatique est dans le débat public depuis longtemps, si on remonte aux premières réflexions de type scientifique depuis le XVIII° siècle, où on réfléchit plus globalement au changement climatique – réchauffement, refroidissement ou autre – dans cette orientation, mais pour se limiter à une approche proprement scientifique ça remonte à la fin du XIX° siècle, avec une communication  très précise sur le sujet dès 1938. Pour cite l'article de Wikipédia:

«La question du dérèglement du climat provoqué par les rejets d'oxyde de carbone dans l’atmosphère est soulevée dès 1896 par Svante August Arrhenius, qui évoque la responsabilité de la combustion de la houille. Arrhenius a démontré que l’augmentation de la concentration de CO2 dans l’atmosphère risquait d’accroître très significativement la température de la planète. Il a calculé qu’un doublement de la teneur en CO2 pourrait provoquer un réchauffement de 4 à 6 °C, des valeurs en cohérence avec les modélisations du XXIe siècle [...].
Les universitaires François Jarrige et Thomas Le Roux indiquent que « les circulations scientifiques internationales des années 1900 expliquent sans doute que l'idée d'un réchauffement climatique produit par les rejets de l'industrie soit discutée avant la Grande Guerre. Ainsi, le Français Louis de Launay, ingénieur des Mines et membres de l'Académie des sciences (France), conclut un article sur les réserves charbonnières dans le monde par une mise en garde:
“Pour produire quelque 8.000 milliards de combustibles minéraux, combien n'a-t-il pas fallu de végétaux accumulés et très accidentellement préservés de la combustion dans la durée des temps géologiques ; le jour où cet acide carbonique aura été restitué aux couches inférieures de l'air par nos cheminées d'usines, quels changements (dont nous avons déjà les prodromes sur les grandes villes industrielles) ne manqueront pas d'être réalisés peu à peu dans nos climats?”
En 1938, l’ingénieur britannique Guy Callendar, puis en 1956 le physicien canado-américain Gilbert Plass ont établi, puis théorisé, la relation entre l’accroissement des rejets industriels de CO2 et les premières observations de réchauffement climatique planétaire».

La question a donc plus d'un siècle mais jusqu'à la fin de la décennie 1970 ça reste pour l'essentiel une question académique. Depuis, c'est devenu un des éléments des discours d'ordre propagandiste – je renvoie à la même section pour des éléments factuels. J'en cite cependant ce passage:

«La validité scientifique du concept de réchauffement climatique à cause anthropique n'a aucune importance dans le cadre du débat public, ce qui la fait émerger et instaure, selon les moments, un consensus ou un dissensus médiatiques, ou ce qui la fait sortir du débat public, répond à une autre logique».

Vous l'aurez remarqué comme moi, ou peut-être ne l'aurez-vous pas remarqué ce qui signifie que la moulinette à propagande a son efficacité, ce qui faisait il y a peu le cœur du discours sur la Grande Menace, “le terrorisme”, est désormais un sujet marginal, presque inexistant. Désormais trois autres sujets, d'ailleurs en convergence, ont remplacé ceux de 2019 (“terrorisme”, “vague Me Too”, “Gilets Jaunes”, “Black lives matter”...), “le réchauffement climatique”, “la biodiversité” et “la Pandémie”. Il est à comprendre que ce changement a sa logique: la propagande de type “carotte”-“bâton” n'a qu'une efficacité limitée dans le temps. En fait, toute propagande a une efficacité à temps compté, car toute propagande ne fonctionne que par la répétition mais la répétition finit par perdre de sa pertinence, par devenir insignifiante, “ne plus faire sens”, ne plus signifier. Le conditionnement nécessite la répétition mais la répétition qui porte sur un contexte indéterminé finit par ne plus fonctionner. La propagande s'adresse sur un mode de conditionnement classique à des personne capables de conditionnement opérant, ou de conditionnement opérant à celles capables de conditionnement opératif; tant que le discours porté correspond aux représentations elle peut fonctionner, dès qu'il n'y correspond plus les personnes activeront leurs propres conditionnements, ce qui opèrera comme un déconditionnement, ils n'adhèreront plus à la propagande non parce qu'ils n'y croient pas mais parce qu'il y a discordante, que ça n'est pas, ou n'est plus, le “bon son de cloche”. La moindre présence de la propagande articulée sur “le terrorisme” ne vient pas de ce que les personnes ont cessé d'y croire mais qu'elles ont cessé de “percevoir le son de cloche”. C'est comme dans ce conte sur le berger qui crie «Au loup!», à force d'agiter la clochette “au loup!” il “désensibilise”, déconditionne ses auditeurs, qui à la fin ne réagissent plus à cette clochette, même en présence du loup...

L'apparition ou la disparition de, pour dire largement, “l'écologie” en tant qu'instrument de propagande important ou prédominant n'a qu'un lien faible à la prépondérance sociale de cette question, à l'importance des questions “écologiques”, d'un point de vue objectif et empirique le réchauffement climatique comme fait a autant ou aussi peu d'importance en 1965, en 1975, en 1980, en 1990, en 2005, en 2020, d'un point de vue subjectif et symbolique il eut de l'importance entre 1975 et 1990, puis de nouveau à partir de 2001 ou 2002 jusqu'en 2019; à partir de février-mars 2020, sans disparaître il a glissé au second rang, non plus comme dominante mais comme harmonique, comme “bruit de fond”.

Il y a une grande différence entre “le Réchauffement” en tant qu'outil de propagande du non-agir et de l'agir: les philosophies ou idéologies du non-agir ont un projet concernant le collectif qui se réalise dans chaque individu, celles de l'agir un projet concernant l'individu qui se réalise dans le collectif, le non-agir vise à l'accomplissement personnel par le moyen principal du conditionnement opératif, secondaire du conditionnement opérant, l'agir à l'accomplissement personnel par le moyen des conditionnements classique et opérant. Pour un partisan du non-agir la notion de réchauffement climatique n'a pas de valeur en soi, c'est un des aspects d'un ensemble plus large, de ce fait une propagande du non-agir ne peut s'articuler sur ce seul concept, en ce sens qu'il n'existe pas de projet circonstanciel conséquent qui se fixerait comme but «agir contre le réchauffement climatique». Comme expliqué dans le billet «444: L'ataraxie plutôt que le catastrophisme»:

«Le non-agir, le wuwei, l'ataraxie, le ou la naishkarmya, n'est pas l'inaction mais la non-intentionnalité. La signification du mot sanskrit qu'on trouve aussi est “libération de l'obligation à tous rites et travaux religieux”, non-agir au sens donc de non agir par obligation, “agir pour agir” et non pas “agir pour réaliser”; “agir sans intention d'agir” plutôt que “agir sans agir”, ce qu'explicite la partie «Éthique de l'agir»:
“Au niveau éthique, le wuwei se manifeste chez celui ou celle qui a cessé les actions égoïstes et passionnelles et les a remplacées par l'humilité, l'altruisme, la tolérance, la douceur, et ceci sans aucune prétention à la sagesse”».

Souligné ici et non dans le billet dont provient la citation. Agir n'est pas une question de volonté, ne pas agir c'est mourir donc vivre c'est agir. Il y a cette volonté fondamentale, vivre, mais sa réalisation n'a pas de forme déterminée. En revanche il est des formes d'agir qui vont contre l'agir fondamental, donc ne pas agir ou agir aussi peu que possible dans ces formes contribue à préserver l'agir fondamental. Le réchauffement climatique à cause anthropique est de l'ordre du fait observable, il s'insère dans un ensemble de faits qui ont une cause unique: le comportement des individus, des groupes, des sociétés, qui induisent un certain processus qu'on peut décrire globalement comme “dégradation des conditions de vie”. Ce réchauffement étant un effet, et en outre un effet non désiré, un “effet secondaire”, outre qu'être inatteignable agir contre “le Réchauffement” n'a aucun intérêt, on ne guérit pas une maladie en luttant contre ses effets mais contre sa cause. Ça n'induit pas qu'on ne fasse rien contre les effets mais secondairement et pour autant que le remède ne soit pas pire que le mal. Prenez cette année 2020 tout juste achevée ce mardi 5 janvier 2021: elle s'est articulée sur un projet imbécile «la Guerre contre le Virus».

On peut lutter contre une épidémie (et non une pandémie) mais non lui faire une guerre car la guerre implique une possible équivalence des adversaires. Ce qui en passant implique l'impossibilité d'une «guerre contre le terrorisme»: pour faire une guerre les deux parties doivent non nécessairement s'équivaloir mais pouvoir s'équivaloir. Une “guerre asymétrique” n'est pas, ne peut pas être une guerre au sens strict: dans une guerre les deux parties usent de mêmes procédés en s'appuyant sur des structures similaires, dans une “guerre asymétrique” ce n'est pas le cas, et au moins l'une des parties considère quand ça a lieu, que “ce n'est pas une guerre” – l'exemple princeps donné dans l'article de Wikipédia est la guerre d'Indochine, or comme pour toute guerre coloniale une au moins des parties concernées ne considère pas que c'est une guerre, la partie colonialiste, elle fait “de la pacification” ou “de l'ordre”, cette guerre d'Indochine l'est du point de vue du faible, du Viêt Minh, c'est une guerre, une guerre d'indépendance, du point de vue français c'est une “reprise en main”, une opération de police avec les moyens de l'armée. Du fait, le discours de l'exécutif français, et de bien d'autres exécutifs, de “guerre contre le virus”, n'a pas de sens, une seule des parties, celle humaine, peut considérer cela comme une guerre, pour le virus “SARS-COV-2” c'est certes une lutte mais une lutte ordinaire, la “lutte pour la vie”, avec ce problème qu'il vise une cible “antibiotique” – les virus SARS-COV-2 ne sont pas très adaptés aux humains et tendent à une inefficacité ou une efficacité excessives, sont rapidement éliminés ou éliminent la cible, dans les deux cas ils contreviennent à leur persistance, à leur “lutte pour la vie”. Il y a bien une lutte du point de vue humain mais non une guerre car les moyens des “adversaires” sont trop asymétriques.


Fatigué de ce billet. Selon moi vous disposez des éléments nécessaires pour réfléchir à la question de l'entropie systémique dont “la Pandémie” est un signe parmi d'autres, donc des éléments pour aller vers la dysentropie. Et si ce n'est pas le cas, tant pis – pour vous.


Enfin, pour vous ou moi. Je suis partisan du non-agir mais le changement advient aussi bien par le moyen de l'agir que du non-agir. J'ai une préférence pour les solutions pas trop violentes, j'espère voir une majorité aller vers ce type de résolution, voila tout. Ça ne change rien au fait que quand les choses doivent changer elles changent, ça change seulement la manière de faire advenir le changement...

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.