I - Au 15 décembre 2016, 37 personnes étaient assignées à résidence depuis plus d’un an au titre de l’article 6 de la loi du 3 avril 1955, alors que 10 autres l’étaient depuis 6 à 12 mois. Dans le rapport n° 4281 du 6 décembre 2016 sur le contrôle parlementaire de l’état d’urgence, les députés se sont émus du sort quotidiennement fait à des personnes à l’encontre desquelles aucune illégalité n’a été reprochée pendant les 365 jours de l’année 2016, la commission des Lois considérant à cet égard qu’il n’était « guère concevable que des personnes puissent être maintenues durablement dans un dispositif d’assignation à résidence sans élément de nature à constituer une infraction pénale, sauf à méconnaître les principes fondateurs de l’Etat de droit » (p. 125).
La conséquence logique de ce constat aurait été de considérer qu’au-delà d’une certaine durée, une assignation à résidence ne pouvait plus être renouvelée, à moins d’une part que des éléments de « dangerosité » nouveaux puissent être relevés à l’encontre de la personne assignée et d’autre part que ce renouvellement, constitutif d’une privation de liberté au sens de l’article 66 de la Constitution, soit préalablement autorisé par le juge judiciaire.
Le problème, du point de vue de l’administration, est qu’il est pratiquement impossible de dénicher un élément de dangerosité nouveau à l’encontre d’une personne qui a scrupuleusement respecté les lourdes prescriptions de son assignation à résidence pendant 365 jours au moins… C’est ce qu’a souligné le sénateur Michel Mercier en séance publique le 15 décembre 2016 : « Il n’y aura pas d’« éléments nouveaux » pour en décider. La personne est surveillée du matin au soir ; elle doit pointer trois fois par jour auprès de la gendarmerie ou de la police. S’il y avait des éléments nouveaux la concernant, c’est que les services du ministère de l’intérieur n’auraient pas fait leur travail ».
II - C’est ainsi que, comme il a été indiqué dans ce billet, l’article 2 de la loi n° 2016-1767 du 19 décembre 2016 prorogeant l’état d’urgence pour la 5ème fois ne subordonne pas le renouvellement d’une assignation à résidence à l’existence d’un élément nouveau de dangerosité, alors que l’avis du Conseil d’Etat du 8 décembre 2016 comme le projet de loi présenté le surlendemain aux députés par le Gouvernement avaient retenu cet élément comme critère central de la prorogation des assignations au long cours. Ainsi que l’énonçait explicitement l’exposé des motifs du projet de loi : « en cas de faits nouveaux ou d’informations nouvelles, la mesure d’assignation à résidence d’une personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre public pourra être reprise ».
En ne reprenant pas cette importante limite au renouvellement des assignations à résidence, le législateur a consciemment choisi la voie de la fragilité constitutionnelle. Le rapport parlementaire précité du 6 décembre 2016 indiquait en effet de la manière la plus claire possible (p. 126) que : « il est nécessaire de limiter la durée des assignations à résidence dont une personne peut faire l’objet, avec un juste équilibre entre une mesure potentiellement à durée indéterminée – ce qui soulèverait des difficultés au regard de la jurisprudence constitutionnelle – et un encadrement trop restreint qui ferait perdre tout son intérêt à ce dispositif d’exception ». Dans le schéma retenu par la loi du 19 décembre 2016, l’assignation à résidence est potentiellement à durée indéterminée.
La loi du 19 décembre 2016 distingue deux régimes pour le renouvellement des assignations à résidence d'une durée cumulée supérieure à 12 mois.
L’un est permanent, et figure au I de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016, mais son application est différée : modifiant l’article 6 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, il prévoit l’autorisation préalable du Conseil d’Etat pour renouveler l’assignation à résidence des personnes qui ont été assignées à résidence depuis plus de 12 mois à partir du 21 mars 2017 (90 jours après la promulgation de la loi du 19 décembre 2016). Concrètement donc, l’article 6 de la loi du 3 avril 1955 modifiée par le I de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016 ne devient applicable qu’à partir du 21 mars 2017. Mais quid alors de la situation des personnes assignées à résidence depuis plus de 12 mois et dont l’assignation est renouvelée dès le début de la 5ème prorogation de l’état d’urgence, soit le 22 décembre 2016 ?
C’est ici qu’intervient l’autre régime, transitoire et applicable tant que le I ne l’est pas, qui figure au II de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016, selon lequel : « Par dérogation aux quatre derniers alinéas de l'article 6 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, toute personne qui, dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, a été assignée à résidence plus de douze mois sur le fondement de l'état d'urgence déclaré par le décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 portant application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 et le décret n° 2015-1493 du 18 novembre 2015 portant application outre-mer de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 peut faire l'objet d'une nouvelle mesure d'assignation s'il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics. Cette nouvelle assignation ne peut excéder une durée de quatre-vingt-dix jours. (…) ».
Autrement dit, pour les personnes assignées pendant plus d’un an avant le 19 décembre 2016, le renouvellement de l’assignation pendant la 5ème prorogation de l’état d’urgence est possible pour une durée de 90 jours, sans l’autorisation préalable du juge des référés du Conseil d’Etat désormais prévue à l’article 6 de la loi du 3 avril 1955 – à l’issue de ce renouvellement pour 90 jours, une nouvelle assignation pour trois mois est subordonnée à l’autorisation préalable du juge des référés du Conseil d’Etat. La dissociation entre ces deux régimes a été clairement faite dans le rapport n° 220 du 14 décembre 2016 de la commission des Lois du Sénat relatif à la 5ème prorogation de l'état d'urgence : le régime transitoire « permet à la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur de renouveler, avant l'entrée en vigueur du présent projet de loi, les arrêtés d'assignation à résidence qu'elle jugerait pertinents dans les conditions actuelles et lui laisse un délai de trois mois pour se préparer à la nouvelle procédure devant le juge des référés du Conseil d'État ».
Le 22 décembre 2016, date de l’entrée en vigueur de la cinquième prorogation de l’état d’urgence, le ministre de l’Intérieur a notifié 52 arrêtés d’assignations à résidence (il y a désormais, au 12 janvier 2017, 63 personnes assignées à résidence) signés deux jours auparavant. Un certain nombre d’entre eux devaient concerner des personnes assignées depuis novembre 2015, et ont donc été pris pour une durée maximale de 90 jours.
III - L’une de ces personnes assignées pour 90 jours – M. Sofiyan I. est assigné depuis le 15 novembre 2015, d’abord à l’Haÿ-les-Roses puis depuis le 10 juin 2016 à Toulouse – a contesté cet arrêté, comme Le Monde daté du 13 janvier 2017 (p. 14 de la version papier) s’en est fait l’écho. Cet arrêté est assorti des obligations suivantes, susceptibles de lourdes sanctions pénales en cas de manquement à l’une d’elles : « obligation de se présenter trois fois par jour, à 9 heures, 14 heures 30 et 20 heures, au commissariat de police tous les jours de la semaine, y compris les jours fériés ou chômés, de demeurer, tous les jours, de 21 heures 30 à 7 heures 30, à son domicile avec interdiction de se déplacer de son lieu d’assignation à résidence sans avoir obtenu préalablement l’autorisation écrite du préfet de la Haute-Garonne ».
Concrètement, en conséquence de ces obligations, M. Sofiyan I. avait effectué au 3 janvier 2017 la bagatelle de :
- 416 jours d’assignation à résidence ;
- 4 160 heures durant lesquelles il a été interdit de sortir de son appartement ;
- 1 278 pointages au commissariat de police (à une seule occasion au cours de ces 14 derniers mois, le requérant a été en retard lors d’un de ses pointages : du fait d’une circulation exceptionnellement dense, en novembre 2016, M. Sofiyan I. est arrivé au commissariat de police 15 minutes après l’heure imposée de pointage, et a été immédiatement placé en garde à vue pendant 24 heures, à la demande du procureur de la République, puis jugé en comparution immédiate et condamné à une amende) ;
- 1 838 heures, au moins, de transport pour se rendre au commissariat (90 minutes pour chacun des trois pointages).
Par l’intermédiaire de son avocat, Me Bruno Vinay que l’on peut voir ici à côté de l’un de ses clients ex-assigné à résidence, cette personne a formé un référé-liberté contre l’arrêté d’assignation, d’abord devant le tribunal administratif de Toulouse, puis après rejet de sa requête en appel devant le Conseil d’Etat ; le juge des référés du Conseil d’Etat, saisi le 5 janvier 2017, s’est comme d’habitude prononcé bien au-delà du délai de 48 heures énoncé par la loi, par une ordonnance n° 406614 du 16 janvier 2017 accompagnée d’un communiqué de presse.
A l’occasion de sa demande de suspension de l’arrêté d’assignation, le requérant a mis en cause la constitutionnalité de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016, selon la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC). L’auteur de ce blog ne peut que se réjouir de constater que la QPC s’est approprié les deux moyens d’inconstitutionnalité – atteinte à la liberté d’aller et de venir, violation de l’article 66 de la Constitution – évoqués dans ce billet.
Le Conseil d’Etat a décidé de renvoyer au Conseil constitutionnel une QPC portant sur l’ensemble de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016, c’est-à-dire sur le I comme sur le II de l’article 2.
Or, l’arrêté litigieux a, comme cela vient d’être indiqué, été pris sur la base du seul II de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016. A l’exception de ses premiers mots (« Par dérogation aux quatre derniers alinéas de l'article 6 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence »), le régime d’autorisation préalable du juge des référés du Conseil d’Etat institué par le I de cette loi est totalement inapplicable au litige formé par M. Sofiyan I. Par application du 1° de l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 aux termes duquel un renvoi au Conseil constitutionnel n’est possible que si « la disposition contestée est applicable au litige », le Conseil d’Etat n’aurait vraisemblablement pas dû renvoyer une QPC portant sur les dispositions du I de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016, divisibles de celles du II. Le Conseil constitutionnel pourrait donc ne statuer que sur la constitutionnalité du II de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016.
IV – Tenons-nous en à la mise en cause de la constitutionnalité de la disposition législative seule applicable au litige, à savoir le II de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016.
Sans surprise eu égard au sens de l’avis du 8 décembre 2016 qu’avait rendu son Assemblée générale, le Conseil d’Etat, par une décision du 16 janvier 2017, a décidé de renvoyer cette QPC au Conseil constitutionnel, lequel a trois mois à compter de la réception de cette décision pour se prononcer – jusqu’au 17 avril 2017. Eu égard là encore à cet avis de l’Assemblée générale du Conseil d’Etat, il est probable que le Conseil constitutionnel juge que la disposition législative attaquée est contraire à la Constitution - on voit mal au surplus comment le gouvernement pourrait défendre devant le Conseil constitutionnel une disposition législative si différente du projet de loi qu'il avait présenté aux députés le 10 décembre 2016.
Toutefois, sachant que l’arrêté en cause – et ceux qui lui sont comparables – a une durée de vie de 90 jours (il expire de plein droit le 21 mars 2017), l’intervention du Conseil constitutionnel pourrait n’avoir que des effets purement platoniques – ici encore comme d’habitude dans le cadre de l’état d’urgence. A moins qu’il ne décide d’accélérer le calendrier normal de l’instruction, comme il l’avait fait pour sa décision n° 2015-527 QPC du 22 décembre 2015 rendue sur renvoi du Conseil d’Etat effectué 11 jours auparavant, le Conseil constitutionnel pourrait se prononcer soit après le 21 mars 2017 (auquel cas le juge des référés du Conseil d’Etat constatera qu’il n’y a plus lieu de se prononcer sur la demande en référé de M. Sofiyan I. !), soit neutraliser comme il l’a déjà fait à trois reprises dans le cadre de l’état d’urgence l’inconstitutionnalité du II de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016 selon l’une de ces deux techniques : le Conseil constitutionnel peut décider que l’inconstitutionnalité entrera en vigueur à une date fantaisiste dont le seul objet est de permettre à l’assignation de produire tous ses effets (v. par analogie la décision du Conseil constitutionnel décision n° 2016-600 QPC du 2 décembre 2016 évoquée dans ce billet) ; le Conseil constitutionnel peut décider que l’atteinte à la liberté d’aller et de venir doit s’incliner devant les conséquences « manifestement excessives » d’une méconnaissance de l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public (v. par analogie n° 2016-567/568 QPC la décision n° 2016-567/568 QPC du 23 septembre 2016 évoquée dans ce billet).
V – Il est temps d’en venir à la situation de M. Sofiyan I.
1 - En renvoyant la QPC au Conseil constitutionnel, le juge des référés du Conseil d’Etat a fait état d’un doute sérieux quant à la constitutionnalité de la disposition législative qui a permis le 5ème renouvellement de l’assignation à résidence dont M. Sofiyan I. fait l’objet depuis le 15 novembre 2015. La logique aurait voulu que, pour cette seule raison de pur droit, l’arrêté d’assignation pour 90 jours du 20 décembre 2016 soit suspendu jusqu’à ce que le Conseil constitutionnel se prononce.
Mais, comme il l’avait déjà fait pour les assignés à résidence de la COP 21 (v. ce billet), le Conseil d’Etat a considéré qu’un renvoi au Conseil constitutionnel ne suffisait pas à caractériser une atteinte manifestement illégale à la liberté d’aller et de venir de l’intéressé - on voit ici que le référé-liberté n'est pas un substitut au recours pour excès de pouvoir. A sa manière, le Conseil d’Etat aura été, avec le gouvernement et le Parlement, le fossoyeur des libertés individuelles des personnes visées par les mesures d’application de la loi sur l’état d’urgence. Dire, comme le fait le communiqué de presse précité, que lorsque le Conseil constitutionnel aura statué dans le délai de trois mois qui lui est imparti, « le juge des référés du Conseil d’État se prononcera ensuite sur la demande du requérant tendant à la suspension de son assignation à résidence » est d’une fausse candeur scandaleuse lorsque l’on a à l’esprit que l’arrêté litigieux a une durée de vie de 90 jours, de sorte qu’il y avait une urgence extrême à ce que le Conseil d’Etat tire, sur l’exécution de l’arrêté, la conséquence normale et attendue du renvoi qu’il venait de décider, en suspendant l’exécution de cet arrêté.
2 –M. Sofiyan I. avait été condamné le 12 décembre 2014 par le tribunal correctionnel de Paris à une peine de cinq ans d’emprisonnement dont deux ans avec sursis assorti d’une mise à l’épreuve de trois ans pour avoir, « courant 2012 et au plus tard jusqu'au 5 février 2013 », constitué en France un groupement composé de six personnes, dédié au soutien d’un groupe présent à cette époque au nord du Mali (placé sous mandat de dépôt le 9 février 2013, il a été libéré et placé sous contrôle judiciaire le 22 janvier 2014 sur décision du juge d’instruction Marc Trévidic et avait donc comparu libre à son procès pénal). Il a depuis exprimé des regrets qui avaient justifié son placement sous bracelet électronique pour un an et 10 mois par décision du 21 septembre 2015 prise par le juge de l’application des peines pour ce motif : « M. I. (…) a exprimé des regrets en indiquant qu’il n’aurait pas dû faire confiance à certaines personnes mais a tenu à préciser qu’il n’avait jamais été dans ses intentions de faire le djihad ou de se livrer à des activités terroristes. Il explique aujourd’hui être un musulman pratiquant, respectueux des règles de la République » (la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 16 février 2016, a suspendu la mesure de placement sous surveillance électronique « jusqu’à la main levée de toute assignation à résidence à l’encontre du condamné », le bracelet électronique ayant été effectivement retiré 6 jours plus tard ; mais le comble est que l'intéressé avait été assigné à résidence le 15 novembre 2015 alors qu'il était déjà sous bracelet électronique et soumis à des restrictions de libertés au moins aussi contraignantes que celles de l'assignation !).
Pour autant, M. Sofiyan I. n’avait aucune chance de voir aboutir sa demande de suspension de l’arrêté ministériel du 20 décembre 2016. En effet, le requérant avait précédemment contesté le 4ème arrêté ministériel l’assignant à résidence à compter du 22 juillet 2016, et le Conseil d’Etat avait rejeté sa demande de suspension par une ordonnance n° 404916 du 23 novembre 2016 (rendue 16 jours après la saisine du juge des référés, qui doit normalement se prononcer en 48 heures). Or, comme il a été indiqué dans ce billet, la validation par le juge des référés d’une assignation à résidence entraîne automatiquement la validation du renouvellement de cette assignation à résidence, dès lors que ni la loi du 3 avril 1955, ni le II de l’article 2 de la loi du 19 décembre 2016 (une personne « peut faire l'objet d'une nouvelle mesure d'assignation s'il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics ») ne subordonne ce renouvellement à l’existence d’un élément nouveau ! Assigné un jour, assigné toujours.
Ainsi, alors que dans l’ordonnance du 23 novembre 2016, on peut lire (considérant 6) que : « Pour renouveler l'assignation à résidence litigieuse, le ministre de l'intérieur s'est fondé sur la gravité de la menace terroriste sur le territoire national, qui a justifié la prolongation de l'état d'urgence, et sur le comportement de M.A..., qu'il a caractérisé par quatre éléments : (…) », l’ordonnance du 16 janvier 2017 fait écho par ce copié/collé (considérant 16), seul le numéro du considérant étant modifié : « Considérant que, pour renouveler l’assignation à résidence de M. A..., le ministre de l’intérieur s’est fondé sur la gravité de la menace terroriste sur le territoire national, qui a justifié la prolongation de l’état d’urgence, et sur le comportement de M.A..., qu’il a caractérisé par quatre éléments : (…) ». On relèvera à cet égard que le ministre de l’Intérieur n’a pas hésité, dans son assignation du 20 décembre 2016, à reprendre les deux motifs de l’assignation de juillet 2016 pourtant neutralisés par l’ordonnance du 23 novembre 2016 (la participation supposée à l’association Sanâbil et la participation supposée à la création d’un site internet) ; aux explications demandées à l’audience par le juge des référés du Conseil d’Etat, la représentante du ministre de l'Intérieur a répondu en ces termes : « il n’y a pas vraiment de violation de l’autorité de la chose jugée, simplement, nous ne sommes pas d’accord avec l’analyse du Conseil »…
Tout le reste est à l’avenant, l’ordonnance du 16 janvier 2017 constituant pour l'essentiel un calque de celle rendue par le juge des référés du Conseil d’Etat le 23 novembre 2016, à l’exception de son considérant n° 20 par lequel le juge des référés invite M. Sofiyan I. à le ressaisir dans l’hypothèse où le juge d’application des peines ordonnerait de nouveau son placement sous bracelet électronique – hypothèse improbable car désormais, précisément en conséquence de l'assignation à résidence dont il fait l'objet, l’intéressé a perdu l'emploi qui avait pour partie justifié son placement sous surveillance électronique et ne remplit donc plus les conditions pour faire l'objet d'un tel placement.
PS du 20 janvier : le Conseil constitutionnel a enregistré la QPC sous le n° 2017-624 QPC. Il semble vouloir traiter cette affaire "à l'ordinaire" et non au regard d'une urgence spécifique attachée à la durée de vie provisoire de l'assignation à résidence pour 90 jours : les intervenants éventuels ont jusqu'au 9 février pour se faire connaître auprès du Conseil constitutionnel, et ni la date de l'audience publique ni celle à laquelle la décision sera rendue n'ont été fixées.