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Sabrina Kassa

Journaliste à Mediapart

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L'Hebdo du Club

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Billet de blog 6 octobre 2016

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Sabrina Kassa

Journaliste, éditrice et responsable éditoriale aux questions raciales

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L’Hebdo du Club: en colère!

Cette semaine, de grandes colères ont traversé le Club. Les raisons ? La stratégie de Jean-Luc Mélenchon, une chronique de Catherine Nay et (bien sûr !) la révélation de l’identité d’Elena Ferrante, sans oublier, les propos du pape François. Alors la colère, mauvaise conseillère ? Pas toujours…

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Les billets les plus lus et les plus commentés cette semaine ont un point commun : ils ont été suscités par la colère ou en ont provoqué. Revue des sujets qui nous ont énervés.

Coups et contrecoups à la gauche de la gauche 

Tout a commencé par la proposition, formulée dans les colonnes du Figaro, par Jean-Luc Mélenchon d’un « débat solide » avec Sarkozy « sur l'identité nationale ». Aussi sec, Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF, s’est fendu d’un billet dans le Club, titré « Faut-il débattre avec Sarkozy sur l'identité nationale ? » pour expliquer pourquoi il considérait cette décision comme une erreur.

Et qu’il serait bien plus judicieux « pour 2017, [d’ouvrir] le seul grand débat qui compte, "quelle société voulons-nous ?", ou "quelle Nation voulons-nous être ?", quand les interrogations de type "Quelles origines avons-nous" ne peuvent qu'alimenter les peurs, les stigmatisations, les divisions, et, au final, faire le jeu d'une droite extrémisée et d'un FN dangereusement banalisé ».

Ce billet, motivé par une certaine colère, en a entraîné une bien plus grande (327 commentaires) allant de la critique de la posture de Dartigolles, et du PCF en général, face à Jean-Luc Mélenchon...

Illustration 1


À des réflexions sur le sens de la prise de judo tentée par JLM pour débattre du récit national autrement.

Illustration 2

Le lendemain, Alexis Corbière, porte-parole de Jean-Luc Mélenchon, a répondu au billet d'Olivier Dartigolles sur un ton cinglant, avec cette conclusion :

« Il est donc temps que cessent ces attaques répétées contre Jean-Luc Mélenchon. Je les considère à présent comme suspectes et semblant poursuivre un but bien sombre. D’où vient cette obstination à chercher à salir notre progression ? Qui applaudit à ses attaques si ce n’est nos adversaires ? A qui cela peut-il profiter si ce n’est à ceux qui sont les premiers responsables des maux dans lesquels est plongé notre pays et qui sont finalement plutôt épargnés dans les tribunes répétitives du porte-parole du PCF ? »

Ambiance… Le fil de commentaires (327) a ensuite gardé ce ton féroce de guerre… fratricide !

Catherine Nay, aaaarghhh !

Illustration 3

Le même jour, Fabrice Arfi laissait lui aussi s’exprimer sa colère, dans un billet, contre Catherine Nay : « La célèbre éditorialiste d’Europe 1 [ayant] réalisé, mercredi 28 septembre, un triple boucle piqué journalistique sur le plateau de C’est dans l’air (France 5) pour s’essuyer les pieds sur Mediapart. L’émission, dont Mme Nay est une chroniqueuse régulière, était consacrée aux embarras de Nicolas Sarkozy, qui a connu, il faut bien le dire, une semaine toute pourrie entre nos révélations sur l’affaire libyenne, la sortie du livre de Patrick Buisson, les mises en cause judiciaires de ses deux “grands flics” préférés et la diffusion, ce soir, d’un Envoyé spécial sur le scandale Bygmalion. »

Ce billet a été intensément lu, commenté (261) et recommandé (130). Les réactions allant encore plus loin dans l’indignation. 

Illustration 4

Pape François : grosse fatigue...

Quelques jours plus tard, ce fut au tour de la réalisatrice Ana Dumitrescu (notamment de Même pas peur) de publier un coup de gueule furieux mais plein d’humour, contre les propos du pape François sur la supposée théorie du genre propagée dans les manuels scolaires français. Et bien d'autres sujets liés à cet « obscurantisme [qui] gagne du terrain un peu partout dans le monde à coup de surenchère ».

Illustration 5

« Trop c'est trop. J'observe, je regarde la société, j'essaie de rester pondérée et puis il y a des moments où le vase débordes'exclame-t-elle dans La Goutte d'eau bénite de trop. Les mots du Pape sont la goutte d'eau d'une nausée qui m'envahit chaque jour un peu plus. Cela serait bien que cette nausée ne soit que le signe d'une gastro-entérite saisonnière. Malheureusement ce n'est pas le cas. »

Elena Ferrante, la polémique sans fin 

Last but not least, la colère sur la révélation de l’identité d’Elena Ferrante a joué au ping-pong entre le Journal et le Club. Tout a commencé le jour de la publication de l’enquête du journaliste italien Claudio Gatti, publiée rappelons-le dans plusieurs journaux européens (Il Sole 24 ore, où travaille Claudio Gatti, Frankfurter Allgemeine Zeitung) et américain (The New York Review of Books), le 2 octobre. 

L’article a provoqué un déluge de commentaires (417) sur le choix éditorial de Mediapart, allant jusqu'à considérer cette publication comme « une faute », car rien ne justifiait de « violer » la vie privée de la romancière.

Deux jours plus tard, dans les colonnes du Club, François Bonnet, le directeur éditorial de Mediapart, publiait dans un billet, la réponse de Claudio Gatti aux critiques (mondiales !) qui lui étaient adressées. Où le journaliste explique, d’une part, que les succès mondiaux d’Elena Ferrante ont fait d’elle un personnage public, justifiant par là-même que l’on enquête sur sa véritable identité (la transparence étant le prix à payer de la gloire) : « Elle est à l’heure actuelle l’Italienne la plus lue dans le monde (comme le démontrent les réactions des médias et des réseaux sociaux). Des millions de lecteurs avaient donc un désir légitime de découvrir la personne derrière l’œuvre. » Et d’autre part, que son enquête visait à rectifier sa fausse autobiographie, La Frantumaglia, publiée en 2003.

Les 167 commentaires qui ont suivi ces explications n’ont pas permis de calmer le jeu du côté des abonnés. Ni l’article de Joseph Confavreux, journaliste à Mediapart, publié le même jour, rendant compte de façon factuelle de la dimension mondiale de cette polémique.

Le commentaire de Philippe Marlière sous le billet de François Bonnet donne le ton.

Illustration 6

Plusieurs abonnés, très fâchés contre Mediapart, se sont étonnés de l’absence de réaction de la rédaction. Ce débat, vous vous en doutez, nous a évidemment traversés. Un journal est un organisme vivant, pas une secte. Et les points de vue opposés, nourris notamment par ce que nos lecteurs nous disent, servent à nous faire réfléchir sur la direction, toujours en mouvement, que nous voulons donner à notre journal.

Pour conclure, je vous signale cette très belle chronique littéraire de Marielle Billy sur L'Amour harcelant, le premier roman publié par Elena Ferrante (1992), qui devrait donner envie à ceux qui ne connaissent pas son œuvre, de la découvrir.

Cette polémique aura eu alors cette grande vertu ! Preuve que la colère est parfois fort utile…

Illustration 7