Que l'Union Européenne considère officiellement le Hezbollah comme une organisation terroriste est la chose la plus maladroite et illogique qu'elle puisse faire maintenant. Tout d'abord parce que c'est d'un mépris sans nom pour la population libanaise chiite qui, mène si elle n'adhère pas dans son intégralité au « Parti de Dieu » a tout de même une forte sympathie pour lui depuis l'évacuation du Liban Sud, occupé par les troupes israéliennes. De surcroit, le Hezbollah est politiquement reconnu au Liban, il a sa place démocratique dans la vie électorale libanaise et le déni de cet état de fait, ne fera qu'enfermer un peu plus l'Union Européenne dans sa réputation de donneur de leçon « has been » aux yeux du proche Orient tout entier.
Il y a dans ce choix de l'UE à la fois toute l'hypocrisie sans limite dont nous sommes capables, nous, vieille Europe aux problèmes internes non solutionnés et toute l'arrogance de politiciens dépassés , frustrés d'être trop hors jeu pour savoir apparaître par touche subtile et un rien pragmatique.
Voilà que subitement l'Europe semble découvrir que le Hezbollah ne lâchera pas!
Mais il me semble, grosse maligne, qu'il était possible s'en rendre compte avant, avec un rien de tête et une bonne carte sous les yeux.
Il est regrettable que les « experts orientaux » (!) payés si cher par l'Union Européenne ne se soient pas livrés à une réflexion un peu professionnelle sur ce sujet depuis....oh depuis que la carte parle d'elle-même (ce qui, pour aider, est son lot quotidien: il ne se passe pas une nuit sans la création d'une nouvelle colonie en Israël).
Doit-on donc en déduire que l'ire subite de nos dirigeants vient de ce que le Hezbollah ose, oui, ose, porté secours à son voisin syrien qui l'appelle à grands cris, en lui rappelant n'en doutons pas, que c'est tout de même en partie grâce à lui que les moyens d'une résistance s'acheminent vers ce pays si convoité qu'est le Liban. Le Hezbollah a fait le choix de la fidélité à ses alliés et je pense que cette valeur n'est pas totalement ridicule, même si elle est désormais complètement caduque en Europe.
Qu'est ce qui peut nous agacer si subitement chez le Hezbollah? La question reste en l'air...
Ce qui est bien ancré au sol par contre, c'est le prix du pain.
Le prix du pain à Alep par exemple qui, depuis qu'elle subit par vagues dévastatrices, un blocus de la population civile par Jahbet Al Nosra (voir mon papier précédent) à vu le coût de sa vie quotidienne multiplié par 100. Ne serait-il pas plus urgent d'aider les mamans d'Alep a se procurer du lait maternisé que de s'épuiser dans des déclarations politiques? La encore, le Hezbollah a fait son choix et là encore, je trouve que ce positionnement humain et social (qui fait d'ailleurs la grande force de ce parti sur le terrain alors que cela devrait être la nôtre) se justifie totalement.
Ce qui est douloureusement pragmatique, c'est la dangereuse illusion de nous dire que UE a aussi décidé d'envoyer des armes dans un pays où se batte donc en face à face deux organismes que l'Occident déclare terroristes (le Hezbollah et Jahbet Al Nosra) en voulant nous convaincre que ces armes serons donc « utilisées à bon escient contre les bonnes personnes ». Le pathétique frise l'hallucinatoire. S'il y a tant de dangereux terroristes sur le terrain (puisque s'y ajoute l'épouvantable Bachar selon l'étrange logique des donneurs d'armes), est-il bien nécessaire d'en fournir encore? Est-ce vraiment le choix le plus rationnel pour protéger la population contre...elle-même?
Que l'on ne se méprenne pas: je n'entends pas, ici « défendre » le Hezbollah qui n'a d'ailleurs nullement besoin de moi (!) pour convaincre de sa popularité, mais j'essaye d'expliquer en quoi l'illogisme de cette prise de position européenne face à d'obscures urgences du moment, ne saurait être accepté, ni même comprise par le monde arabe.
Tout le monde sait par exemple que malgré leurs distorsions, Israël et le Hezbollah communiquent régulièrement, comme le rappelle d'ailleurs R. Fisk, dans son dernier papier. Pourquoi devrions-nous, nous, nous priver de canaux de discussion?
Par ailleurs, l'opinion occidentale commence à réaliser que la situation syrienne est loin d'être aussi limpide qu'on ne lui a présenté dans la presse et à travers les voix horrifiées de ses politiciens. Il y a quelque chose qui cloche dans le dossier et ce « climat d'horreur » dont a prétendu que les syriens demandaient de sortir toute affaire cessante, est suspecté d'être , aux vues des actuelles ruines fumantes du pays, comme moins épouvantable que ce qui se prépare maintenant pour lui. Dans ce contexte s'ébauche donc le début d'une écoute, voire du respect , d'une « voix arabe ». On commence, pour le dire court, à admettre que « ces gens là ne voient pas forcément les choses comme nous », qu'on n'est donc pas sûr de les comprendre à 100%, en particulier dans leur vision de la construction d'un bonheur et même.....aïe aïe aïe......(car ça, pour nous européens, c'est historiquement TRES pénible à admettre) « qu'après tout , ils sont chez eux » et ont donc, finalement... le droit de décider de ce qui se passe dans leurs pays respectifs. Or, c'est précisément dans l'un des courants de cette voix arabe que le Hezbollah s'inscrit. La position des libanais est a ce sujet sans ambiguïté: Dois-je rappeler que bon nombre de chrétiens libanais sont de farouches militants du Hezbollah? Que beaucoup d'autres n'ont rien contre lui et par cette attitude, montre la sagesse de ceux qui aiment vivre dans leur pays, c'est à dire dans « ce pays là » où les voisins sont « pour le moins compliqués », quelque soit le côté où l'on regarde ?
Le plus parlant sera sans doute de finir en citant le Che, dont les Tee-shirts fleurissent sur les poitrines de tous les bobos de la planète: « La révolution n'est pas exportable ». Chaque pays a bien sa problématique propre, que de grands gaillards américains ont souvent du mal à saisir, positionnés qu'ils sont dans leur milieu d'océans, et que d'ethnocentrés esprits européens ont toujours du mal à respecter, comme cette ridicule décision au sujet du Hezbollah s'impose en parfaite illustration.
Voici donc par étape, ma reflexion commencée 2011.
Avancons prudement, au rythme des moments où il me semble pertinent d'apporter un regard sur les évènements.
Précédents billets sur le même thème:
Là où j'en suis de ma reflexion...(1)
Là ou j'en suis de ma reflexion...(2)
Là où j'en suis de ma reflexion...(3)
Là où j'en suis de ma reflexion...(4)
Là où j'en suis de ma reflexion...(5)
Là où j'en suis de ma reflexion...(6)
Là où j'en suis de ma reflexion...(7)
Là où j'en suis de ma reflexion...(8)
Là où j'en suis de ma reflexion...(9)
Là où j'en suis de ma reflexion...(10)
Là où j'en suis de ma réflexion (11)
Là où j'en suis de ma reflexion (12)
Là où j'en suis de ma reflexion (13)
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Là où j'en suis de ma reflexion (22)
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Là où j'en suis de ma reflexion (24)
Là où j'en suis de ma reflexion (26)
+ ma lette ouverte à Laurent Fabius
+ mes papiers sur la Syrie:
Le dernier billet de la série "Ma Syrie"
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La première partie de mes écrits sur la Syrie, se trouve dans l'édition sur les révolutions dans le monde arabe sous les liens suivants:
(cliquez ici pour avoir accès au huitième article de cette série sur le monde bédouin du centre de la Syrie) C'est dans cet article que j'explique mon désaccord avec l'édition spéciale de Médiapart et à la suite duquel, je suis revenue sur mon blog....
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