Covid-19 : Eugénisme social en marche
- 21 mars 2020
- Par Patrick Cahez
- Blog : L'Europe sociale des droits de l'Homme
Emmanuel Macron affirme que c'est la "guerre".
Effectivement, les guerres ne détruisent que les peuples, jamais - ou très rarement - ceux qui les conduisent à la guerre.
C'est identique pour la pandémie.
Elle s'abat avec une même disproportion sur les populations pendant que ceux qui les gouvernent se montrent en pleine forme et sont suivis par une escorte médicale qui suffirait à garnir un hôpital dans un des nombreux déserts médicaux ; que leur politique d'austérité budgétaire a provoqué, sans que cela ne soit sanctionné par les urnes.
Le ministre du budget chargé de cette austérité - conservateur, voir réactionnaire - a été réélu au premier tour des élections municipales.
L'épidémie signale le degré dramatique de son incompétence.
Gouverner c'est prévoir, et la crise sanitaire était prévisible.
La planification comptable qu'a substituée à la politique et au droit la majorité LREM-Modem-UDI est seule responsable de cette situation qui n'est pas fortuite.
Ce n'est pas la première fois dans l'histoire qu'il y a une épidémie et le progrès technique actuel multiplié la vitesse de contamination des populations.
Le constat est sans appel.
Emmanuel Macron et sa majorité ont réduit les ressources publiques, favorisé les profits privés et détruit les services publics, dont l'hôpital ; comme ils ont raboté les cotisations sociales, qui garantissent un accès aux soins de qualité, réduit les allocations sociales, qui garantissent une prévention et une qualité de vie favorables à la santé, comme ils projettent de réduire les retraites.
Ils ont précarisé et fragilisé ce qui fait société, ce qui la rend forte.
Leurs nombreuses déclarations publiques de mépris sont également significatives de ce qui se passe.
Les expressions de dédain pour la population, son niveau d'éducation, son refus de la régression sociale, voire l'absence de considération pour les personnes mutilées par la répression disproportionnée qu'ils ont ordonnée ont révélé leur conception de la direction de l'Etat et des affaires publiques.
L'épidémie, dans ce contexte, pose la question si cela n'est pas pour la majorité une opportunité comptable à purger la misère ; puisque le pouvoir admet cette fatalité plutôt que d'adopter immédiatement un budget pour réparer et équiper les hôpitaux, embaucher et motiver les personnels soignants, leur garantir la sécurité au travail.
Le pouvoir ne parle que d'héroïsme, de sacrifice, d'obéissance, d'ordre, ... 14-18 est-il vraiment une référence pertinente pour une société du 21° siècle ?
L'abstention du pouvoir à adopter le budget à la hauteur du défi qu'il demande de relever aux acteurs de la santé, qu'il a négligés et méprisés, révèle plus une logique d'eugénisme social dont le discours gouverne depuis des années ; selon laquelle les jeunes, les vieux, les malades, les chômeurs, les travailleurs, les étudiants, les parents, les enfants, ... coûtent trop chers aux "investisseurs". Se rappeler d'Alain Minc parlant de son père. Son père avait été résistant dans la FTP-MOI.
Ces politiques - mais en sont-ils réellement ? la politique se préoccupe du bien-être général pas du profit des "investisseurs" - sont médiocres et indécents. Ils ne sont pas du tout en phase avec les idées politiques et le droit fondamental de notre temps.
De nombreux intellectuels s'accordent à dire que ce sont des brutes diplômées, des pauvres types. Le degré zéro de l'action publique s'affirme dans la contradiction à détruire la santé publique et demander ensuite aux populations d'accepter dans l'angoisse et la solitude d'attendre la maladie pour être finalement sacrifiés sur l'autel de la rentabilité économique ; puisqu'il est déjà annoncé que ne serons sauvés que quelques-uns. Ceux qui peuvent servir à la croissance ?
Le débat public n'aborde pas ces questions de fond sur la piètre qualité du personnel politique.
Au contraire, la mise en abyme des médias - sans soulever la contradiction du discours et des actes - favorise le détournement de la démocratie. Entretenir les citoyens dans l'angoisse désarme la réflexion, l'analyse, la critique d'un scandale politique majeur démontrant que la population n'est qu'une variable d'ajustement des intérêts d'un petit groupe de privilégiés du système.
La gestion politique que fait la majorité de l'épidémie paraît malheureusement confirmer que l'humain, en effet, n'est qu'une "ressource" - du consommable, du jetable - dans un plan comptable. C'est conforme à toutes les réformes qu'elle a menées.
Mise à jour :
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Personnes âgées : voilà la circulaire de la honte
28 avr. 2020 Par dominique vidal
À force de la chercher en vain, j'aurais fini par douter de l’existence de cette circulaire du 19 mars qu’évoquait « Le Canard enchaîné » la semaine dernière et qui inciterait les médecins à limiter l’admission en réanimation des personnes « fragiles ». Et voilà que m’est parvenu ce message d’une personne active dans un hôpital.
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