Geoffroy Roux de Bezieux, philosophe
- 11 févr. 2021
- Par YVES FAUCOUP
- Blog : Social en question

Interrogé ce matin sur un RSA-jeunes ponctuel compte tenu de la crise actuelle, Geoffroy Roux de Bezieux, patron du Medef, a déclaré sur France Inter qu'il n'y était pas favorable : « sur le revenu universel et le RSA, nous on préfère toujours un revenu d'activité, du travail plutôt qu'un revenu d'assistance, c'est plus philosophique » !
Il défend l'expérience TZCLD, sans rien dire de ce que le Medef pourrait faire pour qu'elle ne reste pas concentrée sur quelques territoires comme c'est le cas pour le moment. Il concède que l'on pourrait donner « une prime spécifique pour les jeunes, pourquoi pas, une prime de compensation de la perte de revenu » mais pas un RSA. Et d'ajouter de sa voix doucereuse : « instaurer le fait qu'être pauvre c'est un métier à plein temps, moi je ne suis pas favorable ».
Voilà comment ce "philosophe", également "philanthrope" [reconnu par la Fédération de France car Monsieur soutient financièrement et généreusement des associations... cathos intégristes], fait mine de ne pas comprendre la phrase de Louis Gallois. Très franchement, cette mauvaise foi confine au cynisme.
Dans son extrait écrit, France Inter ne rapporte pas que le patron du Medef a dit : « c'est plus philosophique ».
Quelques rappels à propos du « philanthrope » Roux de Bezieux
Entreprise libérée ?

L’ancêtre du Medef finançait le parti nazi
Jennifer Richard, écrivaine, vient de publier Le diable parle toutes les langues (Albin Michel) : c’est le roman d’un marchand d’armes bien réel, Basil Zaharoff (1849-1936), banquier, magnat de la presse et du pétrole, philanthrope, comme il se doit quand on truste de telles fonctions. Dans une recension du Monde des livres (8/01), il est qualifié par Gladys Marivat de « vautour responsable de millions de morts » pour son commerce des armes. Par ailleurs, Jennifer Richard a découvert dans les archives nationales allemandes à Berlin une note du secrétaire du parti nazi, datée de 1932, dans laquelle il est indiqué que Zaharoff finance le parti d’Hitler (tous les ouvrages sur cet homme le niaient jusqu’alors). La note précise aussi que, parmi les contributeurs, il y a le Comité des forges français (c’est-à-dire le Medef de l’époque). En ce temps-là, le patron des patrons se nomme François de Wendel.

Rappelons que François de Wendel, celui qui finançait Hitler, avait fait fortune en pressurant pendant des décennies les ouvriers y compris leurs enfants dès le plus jeune âge. Il est le grand-oncle d’Ernest-Antoine Sellières de Laborde, ancien patron du Medef, un des héritiers de la fortune de Wendel : il n’a jamais envisagé d’indemniser les descendants de ces prolétaires. Il est toujours à la tête d’une société financière de Wendel. Accusé de fraude fiscale, il devait s’acquitter il y a deux ans d’un redressement de 29,4 millions d’euros, mais cette mesure a été invalidée, comme de juste, pour un vice de forme par une cour administrative. Seulement le Conseil d’État ayant annulé la décision de cette cour, le baron pourrait bien être finalement condamné à payer. Et si les héritiers des ouvriers des forges réclamaient leur dû ?
Darmanin chez les Fachos

Pourtant, non seulement le ministre traîne déjà quelques casseroles (vie privée et déclarations racistes), mais on en voit poindre d’autres : en 2008, il a publié quelques articles pour le mensuel de la Restauration nationale, Politique Magazine, courant royaliste, ce que vient d’indiquer le canard de Marion Maréchal-LePen, L’Incorrect. Et l’Action Française rappelle que Darmanin fut un temps dans ses rangs. À deux jours du triste anniversaire de la tentative de coup d’État des fascistes à Paris, le 6 février 1934. Remember ! [4 février]
Le Plan de Bayrou
François Bayrou cause régulièrement dans le poste pour parler de la proportionnelle ou de sa bonne ville de Pau, dont il est maire. Il avait été durant un mois et quatre jours Garde des Sceaux mais écarté car pèse sur lui, en tant que patron du MoDem, l’affaire judiciaire des emplois fictifs des assistants parlementaires des députés européens, encore pas jugée.

Et voilà qu’il proclame ces jours-ci qu’à 4000 euros par mois on fait partie de la classe moyenne (alors que le revenu médian est exactement de 1789 euros… ce qui n’est pas révolutionnaire). On voit comment la notion fumeuse de « classe moyenne » est passablement instrumentalisée par la classe dominante.
Non au RSA !

L’assistanat des profiteurs
« La leçon sur l’assistanat donnée par des catégories qui profitent, bien plus que les autres, des largesses de l’État-providence et de l’entreprise, et qui sont tout autant présentes parmi les fraudeurs, est à la fois moralement inacceptable et politiquement risquée. Tout en croyant rassurer la France populaire, elle engendre un décalage dévastateur entre les discours et les actes, attisant un populisme dont profite largement l’extrême droite, qui l’utilise au mieux. » Sur le site de l'Observatoire des inégalités Les assistés de la France d’en-haut.
. Certaines de ces petites chroniques sont parues sur mon compte Facebook.
Billet n° 601
Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Parcours et démarche : ici et là. "Chroniqueur militant". Et bilan au n° 600.
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