YVES FAUCOUP (avatar)

YVES FAUCOUP

Chroniqueur social

Abonné·e de Mediapart

880 Billets

2 Éditions

Billet de blog 26 juillet 2023

YVES FAUCOUP (avatar)

YVES FAUCOUP

Chroniqueur social

Abonné·e de Mediapart

Macron, les émeutiers et les mineurs de l’ASE

Le Président Macron, lors de son interview à TF1 et France 2 en direct de Nouméa, a désigné les principaux auteurs des émeutes suite à la mort du jeune Nahel : des mineurs vivant dans un contexte familial dégradé « soit familles monoparentales soit parce qu’ils sont à l’aide sociale à l’enfance ». Accusation gratuite à l’encontre des jeunes relevant de l’ASE.

YVES FAUCOUP (avatar)

YVES FAUCOUP

Chroniqueur social

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dès le prononcé de ces mots présidentiels, j’ai publié ce post sur Facebook :

ÉMEUTIERS DE L’ASE ?

Illustration 1
[capture d'écran]

Lors de son interview en direct de Nouvelle-Calédonie, le Président Macron a déclaré que les émeutiers [révoltés contre la mort du jeune Nahel tué par un policier lors d’un contrôle routier] étaient très jeunes : parmi 600 déférés, a-t-il dit, l’âge moyen est de 16 ans [officiellement, il y a eu 990 déférés et la moyenne d’âge était 17 ans], pour une très grande majorité « pas connus », et pour une « écrasante majorité » vivant dans un contexte familial dégradé « soit familles monoparentales soit parce qu’ils sont à l’aide sociale à l’enfance ».

J’ai consulté de très nombreux médias, aucun ne rapporte cette phrase (sur l’ASE), alors j’ai réécouté en replay l’interview. Il dit effectivement ce que je rapporte plus haut. Alors j’ai cherché des articles qui auraient évoqué l’implication dans les émeutes de jeunes relevant de l’ASE. Pas trouvé, nulle part je n’ai vu cette info.

Soit j’ai raté cette actualité (qui n’aurait concerné que deux ou trois individus ou qui n’existe pas), soit le Président s’est trompé, mélangeant avec une autre info (situation explosive au sein de l’ASE selon des articles de fin juin). Je suis preneur d’infos sur le sujet (en commentaire ou en MP). Il va de soi que s’il s’est trompé c’est gravissime, en espérant qu’il ne s’agisse pas d’une info approximative de la police ou carrément d’une instrumentalisation pour désigner ainsi des coupables commodes (dans ce cas, il n’y aurait plus de mot pour qualifier un tel propos).

Il restera à se demander pourquoi les médias n’ont pas repris ses mots : trop énormes, ont-ils craint de n’avoir pas compris ?

Le lendemain, le 25 juillet, j’apportais l’additif suivant :

Un site spécialisé Enfance Jeunesse Info a cité le 24/07 la réaction sur Twitter de Lyes Louffok ([ancien enfant placé très prisé des médias mais] qui a décidé de ne plus s’exprimer sur les réseaux sociaux depuis plusieurs mois) : « Si la majorité des enfants déférés sont issus de l'aide sociale à l'enfance, c'est peut-être que notre pays échoue à protéger les plus faibles, est incapable d'accorder à tous les mêmes chances de s’inclure dans la société, de vivre décemment, dans la dignité ? ». Il fallait s’attendre à ce qu’il se saisisse de l’accusation du Président pour alimenter sa critique générale de l’ASE, sans même interroger la véracité du propos présidentiel. Il n’empêche que le dispositif ASE est en crise et mériterait que l’État s’en soucie plutôt que de désigner à la vindicte publique les mineurs qui en relèvent.

Aujourd’hui, 26 juillet :

Excepté le site Enfance Jeunesse Info évoqué ci-dessus, aucun autre média n’a cité le Président sur ce point. Non seulement, je considère que l’exploitation du thème de la famille monoparentale mériterait approfondissement, celui du mineur relevant de l’ASE me parait un calcul tentant à minimiser les événements : les coupables seraient des enfants (son insistance sur "16 ans", sur les mères seules, et sur les enfants de l’ASE). Il n’est certes pas exclu que la police ait relevé la présence de mineurs non accompagnés (MNA, ou mineurs étrangers isolés, relevant juridiquement de l’ASE et donc des Départements) mais cela aurait été très localisé et en nombre infime, sur l’ensemble des 6 à 8000 émeutiers recensés. Les citer relèverait d’une tactique pour renvoyer la balle sur les collectivités territoriales et clore le débat sur la suppression des prestations familiales à l’encontre des parents de mineurs violents dans les rues. Cette hypothèse, Emmanuel Macron ne l’avait pas retenue, parlant cependant d’un projet de sanctionner les parents défaillants (ce qui a provoqué un tollé, une mesure consistant à punir une autre personne que celle ayant commis un délit étant juridiquement difficile à mettre en œuvre).

On attend par contre, désormais, un tollé à l'encontre de cette mise en accusation tactique et indigne des enfants pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance.

Billet n° 745

Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Parcours et démarche : ici et "Chroniqueur militant". Et bilan au n° 700 et au  n° 600.

Contact : yves.faucoup.mediapart@sfr.fr ; Lien avec ma page Facebook ; Tweeter : @YvesFaucoup

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.