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Billet de blog 24 février 2025

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Ukraine martyrisée

Trois ans de bombardements russes incessants, de maternités, écoles et hôpitaux visés, massacres de Butcha et d’Izioum, enfants kidnappés. Aujourd'hui, géopolitique tourneboulée par le délire trumpiste. Mobilisation en France, dans la rue, sur les places publiques, quasi inexistante.

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Dans sa tentative de conquête de l’Ukraine, entre février et mai 2022, Vladimir Poutine a littéralement rasé Marioupol faisant des milliers de morts et blessés parmi les civils et commettant des crimes de guerre à l’encontre de centaines de milliers autres (rapport 2024 de Human Rights Watch, Truth Hounds et SITU Researc). Comme ces massacres ne suffisaient pas pour le potentat du Kremlin, il organisa la déportation de milliers d’enfants ukrainien vers la Russie pour y être russifiés, crime contre l’humanité. Malgré le cynisme de Poutine prétendant avec sa commissaire aux droits de l’enfant Maria Lvova-Belova, qu’il les a sauvés des zones de guerre, tous deux ont fait l’objet de mandats d’arrêt lancés par la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye, qui devraient être appliqués par les 125 États membres (mais seulement 40 d'entre eux se sont alliés à l’Ukraine pour dénoncer ce crime). Les États-Unis n'ont jamais adhéré à cette Cour et Donald Trump a signé le 6 février un décret sanctionnant la CPI, invoquant ses condamnations contre des soldats américains et israéliens pour crimes de guerre en Afghanistan et à Gaza. Trump, Poutine, Netanyahou, la grande alliance des mafieux.

Illustration 1

France 5 a diffusé le 16 février Ukraine : l’enfance volée, un documentaire de Tetiana Pryimachuk et Philippe Lagnier sur les souffrances des enfants ukrainiens. Le film montre tout le malheur qui s’est abattu sur la population ukrainienne depuis que le potentat de Moscou a décidé de semer chez ses « frères » slaves la désolation comme il avait laminé Grozny. On sait qu’il a une propension à faire bombarder les maternités (comme ce fut précisément le cas à Marioupol), les écoles, les hôpitaux (comme celui pour enfants à Kiev à l’été 2024).

Dans le documentaire, une adolescente dit avoir espéré, alors que sa rue était sous les coups de mortiers, qu’un tir la tue sur place pour ne plus avoir à souffrir. Un autre ado, dont le père est mort au combat, n’espère qu’une chose : pouvoir un jour tuer tous les Russes. Yana, 13 ans, a eu les deux jambes sectionnées : appareillée (soignée aux USA, à San Diego), pétillante de vie, elle marche presque normalement (elle va participer prochainement à une course de 5 km au Japon). Krusha, 16 ans, ne parvient plus à pleurer : ses parents, assistant aux funérailles d’un soldat, ont été tués, touchés par un missile qui a fait 59 morts. Des psychologues aident tous ces enfants meurtris (un enfant sur 5 présente des signes de stress post-traumatique).

Les enfants déportés se sont retrouvés dans des colonies de vacances, des centres de rééducation, des familles d’accueil. Maria Lvova-Belova se pavane dans les médias avec les cinq enfants ukrainiens qu’elle a adoptés. Une ONG, Save Ukraine, agit pour organiser des rapatriements (523, soit 3 % des près de 20 000 déportés). Ces enfants ont subi des lavages de cerveau, certains ont été incorporés dans des camps militaires. Ilona, 17 ans, enlevée à Marioupol, emmenée en Crimée, puis en Russie, témoigne qu'on lui a fourni un document d’identité où elle avait un autre nom et une autre date de naissance. Quand elle a dit qu’elle avait une mère, on lui a dit : « oublie ça ». Un gamin se plaint car ses copains de Kiev ne le croient pas quand il raconte ce qu’il a vécu.

En ce 24 février, troisième anniversaire du début de cette agression barbare, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur la façon dont on a réagi : quelques mots lors de manifs sur d’autres sujets, mais si peu d’actions spécifiques. La mobilisation est restée au niveau de quelques collectifs pro-Ukraine. La façon dont le pouvoir a facilité l’accueil des réfugiés ukrainiens alors qu’il complique tant la vie des autres n’a pas facilité la solidarité de la part d’humanitaires choqués par ce deux poids deux mesures. Il est fort possible aussi qu’un certain antiaméricanisme primaire ait incité un temps à considérer que Poutine n’avait pas tout à fait tort de tenir tête à l’oncle Sam. D'où attitude plus ou moins conciliante au début avec cette guerre injuste et injustifiée, puis tout de même malaise quand l’armée russe provoqua des Oradour comme Butcha et Izioum. On en est là avec un Trump prêt à trahir l’Ukraine, à insulter ses dirigeants, pour s’attirer les bonnes grâces de Poutine (à la tête d’un pays sous-développé mais fortement nucléarisé), peut-être parce que seul compte pour lui son bras de fer avec la Chine dont le développement économique est phénoménal et menaçant pour l’oligarchie qui appuie envers et contre tout le monarque de Mar-a-Lago.

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. Ukraine : enfance volée (disponible jusqu’au 22 août 2025).

. voir Kidnappés, La Chronique d’Amnesty international (juin 2023), sur les enfants ukrainiens déportés.

Billet n° 846

Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Parcours et démarche : ici et "Chroniqueur militant". Et bilan au n° 700 et au  n° 600Le plaisir d'écrire et de faire lien (n° 800).

Contact : yves.faucoup.mediapart@free.fr ; Lien avec ma page Facebook 

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