Francis Poézévara (avatar)

Francis Poézévara

Écosocialiste - Conseiller municipal - Le Printemps Putéolien - Génération·s

Abonné·e de Mediapart

15 Billets

0 Édition

Billet de blog 30 mai 2024

Francis Poézévara (avatar)

Francis Poézévara

Écosocialiste - Conseiller municipal - Le Printemps Putéolien - Génération·s

Abonné·e de Mediapart

SLG#11 - Un leadership de gauche ?

Le leadership est-il un concept de droite ? Faut-il que la gauche coupe toutes les têtes qui dépassent ? Mais surtout : où est Jean Jaurès ?

Francis Poézévara (avatar)

Francis Poézévara

Écosocialiste - Conseiller municipal - Le Printemps Putéolien - Génération·s

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Note : cet article s'inscrit dans le cadre d'une série intitulée (sobrement !) Sauver la gauche pour sauver le monde. Voir la table des matières de la série en fin d'article.


Horizontalisme vs. verticalisme : ces modalités d’organisation font l’impasse sur une problématique que rencontre la gauche depuis plusieurs décennies, le rapport au leadership. Notre camp politique s’est toujours écharpé sur cette question, et c’est logique : nous nous retrouvons tiraillés par une tradition française bonapartiste de “l’homme fort”, que nous associons à tort ou à raison à une image d’efficacité, et une tradition de gauche démocratique. D’où les incompréhensions entre une organisation horizontale comme EELV et une organisation verticale comme LFI par exemple. 

Sur la question du leadership, la gauche doit assumer le fait d’être dans une tension entre son idéal et la société du XXIème siècle. Le premier est rappelé par l’Internationale : il n’est pas de sauveur suprême. La gauche ne peut pas se placer entre les mains d’une unique personne, mais doit faire vivre un leadership collectif. Cela ne signifie pas que nous devons éviter à tout prix d’avoir un·e leader·euse ; cela signifie que celle-ci ou celui-ci ne peut pas être un despote aux pouvoirs étendus. Personne ne doit remplacer la réflexion et la délibération collective. La société actuelle, quant à elle, fait la part belle au culte des personnalités. Nous devons certes mener la bataille culturelle pour sortir de ce réflexe, mais nous devons également en prendre conscience et accepter que nos idées ont besoin de porte-paroles bien identifiés pour les diffuser. 

Notons que cette tension n’est pas récente, et que la personnification n’est pas du seul fait de la droite conservatrice. C’est ainsi que Jean Jaurès a ainsi représenté lui-même l’idéal socialiste au début du XXème siècle, qu’il est toujours une référence révérée bien au-delà de son camp politique, et qu’il a eu une influence bien plus importante que celle que lui conféraient ses mandats. D’ailleurs, ne souffrirait-on pas d’un “syndrôme Jaurès” ? L’attente d’une personnalité hors du commun pour porter notre camp et remporter la bataille culturelle ? Attente démesurée qui implique bien entendu régulièrement la déception de voir nos héros (presque au sens mythologique) n’être que des humains, faillibles et imparfaits ? 

Comme souvent, la solution pour concilier ces deux impératifs antagonistes (besoin de démocratie, besoin de leadership) réside sans doute dans une forme de mesure, de compromis entre les deux. Oui, certaines personnes portent des compétences hors normes, que ce soit dans le domaine oratoire, ou de la pensée politique, ou de la vision et stratégie politiques. Nous avons tout intérêt, collectivement, à utiliser ces compétences pour le bien commun. Il faut donc cesser (pour un certain nombre d’entre nous) cette habitude de vouloir couper les têtes qui dépassent en opposant au collectif les individualités. Nous avons besoin de leaders et leadeuses. Mais nous devons également les apprécier à leur juste valeur. Personne n’a et ne doit avoir de magistère politique absolu. Le pouvoir, dans nos organisations, doit s’exercer collectivement. Nos leaders et leadeuses présent·es et à venir ont pour mission de mener le collectif et non d’exercer le pouvoir sur lui. A l’inverse, le collectif a pour mission d’identifier et de permettre à ces individualités (quelles qu’elles soient) d’exprimer leur talent, en tenant compte également de la juste reconnaissance à laquelle aspire chacun·e. 

Concrètement, les recettes existent. La plupart des statuts des organisations actuelles prévoient des systèmes permettant aux individualités de s’exprimer et de mettre leurs talents au service du collectif, du local au national. Mais tout comme l’esprit de la Vème République n’est pas respecté lorsque le Président gouverne et l’Assemblée le suit docilement, l’esprit des statuts de nos partis est bien souvent passé par pertes et profits. Il est ainsi fréquent que les postes des organisations soient distribués à des ami·es que tel ou telle jugera à même de le·la soutenir le temps venu. En somme, il s’agirait tout simplement de reproduire dans nos organisations ce que nous appelons de nos vœux dans la société : la fin du copinage, la primauté du bien commun sur les manœuvres individuelles.

Article suivant : Décentralisons l'action politique (aussi) !


Introduction : Sauver la gauche pour sauver le monde

Partie I - Des remises en cause existentielles

     A - La gauche face à la société

  1. La montée de l'anxiété : une menace pour la société et un défi pour la gauche
  2. Histoire d'un désamour politique : quand défiance et lassitude s'installent
  3. L'engagement citoyen à l'ère de l'atomisation sociale

     B - La gauche face à elle-même

  1. L’impossible convergence des luttes
  2. A gauche, passion fragmentation
  3. Entre fin et moyens, l'éternel dilemme de la gauche

Partie II - Stratégie, organisation : inventer une nouvelle voie pour la gauche

     A - Construire la gauche du XXIème siècle

  1. Diversité de l'engagement et rôle des partis
  2. Défragmenter enfin la gauche

     B - Leadership, engagement, mobilisation

  1. Verticalité ou horizontalité ?
  2. Un leadership de gauche ?
  3. Décentralisons l'action politique
  4. Retrouver la joie militante

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.